Intervention de Christian Poncelet

Réunion du 15 janvier 2008 à 16h15
Éloge funèbre de daniel bernardet sénateur de l'indre

Photo de Christian PonceletChristian Poncelet, président :

L'année 2007 a été pour notre assemblée une année éprouvante, qui a vu disparaître plusieurs des nôtres, parmi les plus éminents. J'ai tenu à saluer nos collèges disparus en me rendant à leurs obsèques, en votre nom et en mon nom personnel, pour leur témoigner l'hommage du Sénat de la République.

Au cours de ces cérémonies prenantes, j'ai constaté l'expression de la peine, de l'émotion et du chagrin de leurs concitoyens qui ont tenu à accompagner - nombreux - nos défunts collègues. J'ai mesuré avec force en ces occasions pénibles l'estime, la considération et l'affection dont nos collègues étaient l'objet.

Daniel Bernardet n'est pas parti seul.

Lui qui avait été porté, par deux fois, au Palais du Luxembourg avait souhaité que les élus de son département l'accompagnent dans un ultime cheminement de la mairie à l'église, puis au cimetière.

Son cercueil, porté par quatre maires, ceints de leur écharpe, entourés par une foule d'élus arborant leurs insignes, témoignait hautement et symboliquement des liens intimes qui les unissaient dans une même communion mémorielle.

Daniel Bernardet était aimé des siens, et les regrets qu'il a laissés ont été à la mesure de ce qu'il fut pour son département et la population.

Fils d'agriculteurs modestes, Daniel Bernardet naquit le 7 juin 1927 à Lourouer-Saint-Laurent dans le canton de La Châtre. Très tôt, il entra dans la vie active.

Il le fit dans tous les sens du terme.

Menuisier de formation, il « montera » - comme l'on disait alors - à Paris pour y suivre les cours du Centre technique du bois, puis ceux de l'école scientifique d'organisation du travail.

Artisan dynamique, il deviendra au fil des ans, à la force de son travail, mais aussi de son intuition et de son sens aiguisé de l'organisation - de son bon sens, dirais-je -, un chef d'entreprise estimé et prospère.

Cette énergie n'allait pas s'arrêter au seul champ de la vie professionnelle.

Sa personnalité allait très tôt être remarquée par les élus de l'Indre, et c'est presque naturellement qu'il fit, en mars 1959, à trente-deux ans, son entrée au conseil municipal de Châteauroux. Ce premier mandat, auquel il consacrera trente années de sa vie, sera, et de loin, celui auquel - il l'avouait - il fut le plus attaché.

Élu adjoint au maire en 1965, il deviendra le premier magistrat de la ville en 1971, jusqu'en mars 1989. Dix-huit années au cours desquelles il donnera toute la mesure d'un édile d'exception. Ses actions ont fortement marqué sa chère ville de Châteauroux. La coulée verte, les Cordeliers, la percée de la préfecture vers le quartier Saint-Jean, la modernisation de l'aéroport autour d'un syndicat mixte : tout cela est l'oeuvre de Daniel Bernardet.

Parallèlement, Daniel Bernardet assumera les mandats qui ponctuent le « cursus honorum » d'un élu local exemplaire : conseiller régional, conseiller général, député, sénateur. Il deviendra président de la région Centre de 1983 à 1985, puis prendra en main les destinées de l'assemblée départementale jusqu'en 1998.

C'est dire la place éminente qu'occupait notre collègue et combien l'Indre lui est redevable de la force de ses engagements : il ne ménagea jamais sa peine en faveur de l'aménagement de ce territoire rural et de son développement économique.

Élu député lors des élections législatives de 1986, il conservera de ce passage à l'Assemblée nationale la satisfaction d'avoir fait avancer certains dossiers locaux de première importance. Il décidera en 1988 de ne pas se représenter et de consacrer son ambition nationale à la conquête d'un siège sénatorial.

Élu au Sénat pour la première fois en 1989, il sera reconduit par ses pairs en 1998.

Membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, puis de la commission des affaires sociales, il y apportera les fruits de l'expérience et du vécu acquis dans son département, « sur le terrain » comme l'on dit communément, au plus proche de nos concitoyens, qu'il se plaisait à écouter, à conseiller et à soutenir.

Au Sénat, il prendra part à de nombreuses propositions concernant notamment la mondialisation, les organisations non gouvernementales et l'action internationale des collectivités locales.

Son réformisme pragmatique conduira le représentant du monde rural qu'il était à participer activement aux travaux préparatoires de la loi relative au pacte de relance pour la ville. Il défendra également, avec ferveur, la réforme sénatoriale de 2003, dont il estimait qu'elle contribuait efficacement à une modernisation indiscutable et nécessaire de notre institution.

Il s'investit aussi avec l'énergie qui était la sienne dans des domaines aussi divers que la lutte contre la toxicomanie, l'assurance dépendance et le développement du dialogue social dans l'entreprise.

Personnalité forte, attachante et conviviale, doté d'un grand sens de l'observation et de l'écoute, Daniel Bernardet avait bien sûr tissé des liens exceptionnels avec les habitants de sa commune de Châteauroux, mais au-delà avec ceux de son département, de son canton et de sa région. Il avait mis son dynamisme, son efficacité et, je dirais, son esprit entrepreneurial au service de ses concitoyens et de l'intérêt général.

Homme du contact direct, il pouvait saluer par leur nom et par leur prénom un grand nombre des habitants de sa ville et de son département. Sa convivialité naturelle l'avait amené à créer une institution originale et sans équivalent : la « Fête de l'amitié », qui réunissait chaque année autour de lui, et jusqu'à l'an dernier, plusieurs centaines de personnes qui manifestaient ainsi leur attachement à sa personne et à l'amitié.

Ce sont les mêmes qui, au lendemain de son décès, défilaient attristés, sincèrement et profondément affectés, devant son cercueil, comme on le fait lorsqu'un être cher et familier vous quitte pour l'éternité.

L'un de ses compagnons de route a résumé l'opinion générale : Daniel Bernardet fut « un grand homme, tout simplement ».

Il restera pour chacun d'entre nous un exemple de tolérance, de générosité et de courage. Il est demeuré fidèle à lui-même jusqu'à l'extrémité de ses forces, jusqu'à ses derniers jours.

Aux membres de la commission des affaires sociales, affectés par la disparition de l'un de ses membres éminents, j'exprime notre sympathie attristée.

À ses collègues du groupe UMP, une fois encore cruellement éprouvé par la disparition de l'un des siens, j'adresse les condoléances les plus émues du Sénat tout entier.

À sa famille, à son épouse Christiane, à ses enfants Jean-Luc et Frédérique, à tous ses proches, je veux dire la part personnelle que chacun des membres du Sénat de la République prend à leur peine et je les assure que notre assemblée gardera longtemps et fidèlement la mémoire de leur cher disparu.

Daniel Bernardet, reposez en paix.

Je vous invite maintenant, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, à observer une minute de silence en mémoire de notre collègue.

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