Madame la présidente, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de vous présenter aujourd’hui le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 et de prendre part à ce débat, voulu par le Sénat, sur les prélèvements obligatoires et l’endettement.
Lors des présentations, devant la commission des finances du Sénat, de ce projet de loi de programmation et du projet de loi de finances pour 2011, qui ont été l’occasion d’échanges particulièrement fructueux et de grande qualité, j’ai évoqué la stratégie du Gouvernement en matière de finances publiques pour les années à venir.
Si nous avons qualifié de « responsable » le projet de budget pour 2011, c’est parce que l’inflexion vertueuse, profonde et déterminée qu’il enclenche sera maintenue les années suivantes. Il est en effet important de mettre en perspective l’action du Gouvernement pour une nouvelle trajectoire en matière de finances publiques, l’objectif à terme étant intangible : réduire le déficit public pour le ramener à son niveau d’avant la crise en 2013 et à 2 % du PIB en 2014, avant de tendre, à l’instar de l’Allemagne, vers l’équilibre budgétaire.
La finalité de l’ensemble des politiques publiques doit être d’écarter l’épée de Damoclès qui menace nos têtes et celles de nos enfants. Nous devons donc faire preuve d’esprit de responsabilité devant cette cruelle question des déficits publics, qui met incontestablement en jeu la souveraineté nationale, en faisant évoluer, pour le préserver, le modèle social français, selon des priorités réalistes, en adéquation avec nos moyens.
Seul un effort de sérieux budgétaire à moyen terme, nécessaire à l’assainissement de nos finances publiques, nous permettra de respecter l’engagement que nous avons pris devant nos partenaires européens : c’est aussi de la parole de la France dans le concert européen qu’il s’agit.
Par la trajectoire des finances publiques que nous programmons pour les années à venir, nous souhaitons en effet exprimer clairement à nos concitoyens et à nos partenaires européens notre détermination à maîtriser le déficit public. Notre objectif, ambitieux et vertueux, est de ramener celui-ci à 6 % en 2011, à 4, 6 % en 2012, à 3 % en 2013 et à 2 % en 2014. Cela suppose un effort soutenu, durable et équitablement réparti entre les acteurs de la dépense publique : État, administrations de sécurité sociale, collectivités territoriales.
Dès 2011, la norme « zéro valeur » hors charges de la dette et de pensions s’appliquera à la dépense de l’État. Nous assumons le passé, mais nous décidons, pour la première fois dans l’histoire de nos finances publiques, marquée par un accroissement systématique des dépenses chaque année, le gel des dépenses de l’État, qui seront donc fixées au même niveau que l’an dernier et ne suivront pas l’inflation. On peut comparer notre plan en la matière aux plans britannique, espagnol ou portugais, à cette différence de taille près que nous créons une dynamique historique de maîtrise de l’évolution de la dépense publique.
Dans cette perspective, des efforts importants en termes de rationalisation, de politique d’achats, de politique immobilière, de mutualisation des budgets de communication, devront être consentis, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, dont les vertus commencent à produire leurs effets. Le niveau d’intervention ou de subventionnement de l’État sera réduit de 10 % – 5 % dès l’année prochaine –, tandis que 100 000 fonctionnaires partant à la retraite ne seront pas remplacés, la suppression de 97 000 autres postes étant proposée pour les trois années à venir. Tous ces efforts s’inscrivent dans la durée, l’État se devant d’être vertueux et de donner l’exemple.
Dans le même esprit, nous proposons le gel des dotations de l’État aux collectivités territoriales.
Enfin, l’objectif national de dépenses d'assurance maladie, l’ONDAM, qui avait été fixé à 3 % pour cette année par la représentation nationale, sera respecté pour la première fois depuis sa création en 1997. Ce résultat inédit donne quelque crédit à notre objectif de limiter à 2, 9 % pour 2011 et à 2, 8 % pour les années suivantes la progression des dépenses d’assurance maladie.
Nous attendons aussi un dynamisme retrouvé des recettes fiscales, grâce notamment au retour de la croissance sur la période de programmation et aux efforts que nous poursuivrons sur les niches fiscales et sociales.
Cette trajectoire assignée au déficit public est un engagement politique fort du Gouvernement : nous le tiendrons en 2011 comme les années suivantes, car il y va de notre indépendance sur les marchés financiers. Il est loin le temps où les banques centrales finançaient pour l’essentiel les politiques publiques ! Au début des années quatre-vingt, leur part dans ce financement atteignait 80 % ; aujourd’hui, la situation s’est inversée, puisque ce sont les marchés financiers qui fournissent 80 % du financement de nos politiques publiques.
Les répercussions de la crise mondiale de 2008-2009 ont conduit les Européens à mettre en place un plan d’accompagnement des pays en difficulté d’un montant potentiel de 750 milliards d'euros. N’oublions pas trop vite que l’euro était encore menacé voilà six mois à peine. Je suis assez frappé de constater à quel point la mémoire peut être fragile : certains font comme si rien ne s’était passé au cours de cette période de crise ! L’oubli a déjà fait son œuvre et les mauvaises habitudes peuvent reprendre leur cours. Cela doit nous inciter à ne pas perdre de vue la réalité : la question des déficits publics, qui constitue pour les Français une source d’inquiétude et d’interrogations, doit être au cœur de toute politique publique. Réduire les déficits est un moyen de restaurer la confiance, de retrouver le chemin de la croissance, de rétablir une souveraineté pleine et entière. Le Premier ministre l’a rappelé à de nombreuses reprises et je le réaffirme ici : nous tenons à protéger notre pays d’un endettement excessif, qui pourrait porter atteinte à notre capacité d’action. Il est donc du devoir et de la responsabilité tant du pouvoir exécutif que de la représentation nationale de rappeler en tout temps, en tous lieux et en toutes circonstances – la répétition ayant des vertus pédagogiques – qu’il est nécessaire de réduire les déficits, de corriger les effets de la crise et de retrouver un chemin vertueux, les temps actuels nous imposant de ne plus nous endetter comme nous avons pu le faire dans le passé. Même le président Obama a mis l’accent, voilà quelques semaines, sur la menace que le poids du déficit représentait pour la souveraineté des États-Unis, adressant ainsi un message politique fort au regard de l’histoire américaine.
Nous ferons tout pour que notre pays reste maître de son destin. C’est d’ailleurs le sens politique de l’amendement que le Gouvernement présentera au cours de la discussion de ce projet de loi de programmation des finances publiques, à la suite, monsieur le rapporteur général, du débat fructueux que nous avons eu en commission des finances. Le Gouvernement s’engage devant le Parlement à prendre des mesures d’économies supplémentaires concernant les dépenses et les niches fiscales ou sociales pour respecter les objectifs pluriannuels de finances publiques du présent projet de loi de programmation, si les circonstances macroéconomiques s’avéraient moins favorables que prévu.