La norme de dépenses prévue par cet article pour l’ensemble des administrations publiques est pour le moins contrainte. Sa faible progression participe d’une démarche que nous avons déjà éprouvée et qui, dans tous les cas de figure, a conduit, malgré les discours initiaux, à constater une aggravation constante du déficit.
Si l’on s’interroge sur la dépense publique de l’État, par exemple, on constate que sa part dans le produit intérieur brut n’a pas vraiment varié. Ce qui a progressé, c’est le déficit comptable de l’État et ce déficit ne trouve sa source que dans la déperdition continue des recettes, que nous avons soulignée dans la discussion générale.
Voilà bien, mes chers collègues de la majorité, le sujet sur lequel vous faites le plus la sourde oreille, compte tenu de votre vision des prélèvements obligatoires. Vous oubliez que servir l’intérêt général et mettre à disposition des services publics font partie des choix que notre conception républicaine porte et que chacun doit participer, selon ses capacités, à ces objectifs.
La dépense publique a néanmoins évolué sur un point, depuis une vingtaine d’années, singulièrement depuis 1995 : les dépenses de sécurité sociale y ont pris une part prépondérante.
Dans le même temps, le niveau des dépenses des administrations publiques locales ne change pratiquement pas, et ce malgré une conception de la décentralisation pour le moins particulière, qui s’est traduite par un transfert de charges nouvelles aux collectivités territoriales, notamment dans le champ du développement des infrastructures, puis dans celui de l’action sociale.
Avec la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, dite loi Raffarin, nous avons même pu tester une nouvelle mouture de cette logique de transferts : celle qui consiste à se débarrasser auprès des collectivités de personnels – les personnels techniciens, ouvriers et de service, ou TOS – nombreux et, surtout, en fin de carrière. Non seulement ces agents sont à quelques années de l’exercice du droit à pension, mais ils représentent les charges les plus importantes en termes de masse salariale.
Nous sommes évidemment opposés à la norme de progression de la dépense inscrite dans le cadre de ce projet de loi de programmation, une norme qui ne tient aucun compte de ces transferts, notamment ceux qui ouvrent des droits à des bénéficiaires dont le nombre progresse, et de leur coût exceptionnel.
Cette norme imposerait que le texte soit mis en œuvre sans prendre en compte ces transferts, leur économie et leur évolution propre, alors même que ceux-ci pèsent dans les comptes des administrations locales.
C’est là une démarche d’autant plus regrettable que les collectivités territoriales jouent un rôle déterminant dans la poursuite des efforts d’équipement du pays. Cela n’est donc pas sans incidence sur l’activité économique de ce dernier et, comme je vous le disais ce matin, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, sur les recettes du budget général de l’État.
L’examen des lois de finances les plus récentes laisse en effet clairement apparaître l’effondrement continu de la part des budgets publics consacrée aux dépenses d’investissement. Nous sommes parvenus, si mes souvenirs sont exacts, à un niveau de dépenses d’équipement avoisinant 5 % de l’ensemble des crédits budgétaires.
Ces dépenses sont victimes, au premier chef, des coupes claires, qui rendent encore plus insupportables les progressions constantes du service de la dette et de l’émission de nouveaux titres de dette publique.
Cela fait belle lurette – depuis 2002 – que l’État ne s’endette plus pour doter le pays d’équipements nouveaux. Il le fait juste pour payer la facture, si élevée, des cadeaux fiscaux et sociaux.
Les collectivités territoriales soutiennent aujourd’hui, de manière fondamentale, l’effort d’équipement de la nation ; elles supportent 70 % à 80 % de la dépense publique réelle d’équipement. Sans leur intervention, pas de routes, pas d’équipements sportifs, pas de développement de nos infrastructures de formation et d’enseignement, pas d’équipements culturels !
Compresser leurs dépenses de fonctionnement, comme ce texte nous y invite, c’est les priver des moyens de prolonger cette politique d’équipement et c’est donc peser sur l’emploi d’aujourd’hui et sur la croissance de demain, faute d’infrastructures à la hauteur.
Vous le savez bien, selon le rapport de l’observatoire des finances locales, qui a notamment été réalisé par nos collègues qui siègent aussi au comité des finances locales, cette contribution des collectivités territoriales est actuellement en diminution puisque leurs capacités, elles aussi, sont en train de diminuer.
Telles sont les remarques que je voulais formuler à propos de cet article 4, contre lequel, bien sûr, nous voterons.