Madame la secrétaire d'État, avec la politique mise en œuvre par votre gouvernement depuis 2007, le reste à charge que les assurés ont à payer pour leurs soins est toujours plus important. C’est la conséquence d’une politique de déremboursement à tout crin et d’une prise en charge par la solidarité nationale des soins d’optique et dentaires qui n’a jamais été suffisante ; nous pouvons même dire qu’elle est inexistante.
Aussi, les complémentaires santé ont mis en place des réseaux de soins avec les professionnels concernés, ce qui bien souvent permet d’obtenir une qualité de prestations supérieure pour un coût moindre.
À la suite des critiques des professionnels de l’optique, le ministère de l'économie s’est inquiété des risques de distorsion de concurrence que pouvaient comporter ces réseaux. Sur sa demande, en vertu de l’article L. 462-1 du code de commerce, l’Autorité de la concurrence a rendu un avis le 28 septembre 2009 sur ce sujet précis.
Dans cet avis, l’Autorité de la concurrence ne s’oppose pas au principe de réseaux de conventionnement fermés tout en reconnaissant qu’ils « peuvent constituer le support de pratiques ayant pour effet d’exclure certains professionnels du marché ». Elle préconise ainsi la mise en œuvre de critères clairs, transparents et non discriminatoires de la part des complémentaires santé.
Pourtant, madame la secrétaire d'État, la situation concrète mérite que le Gouvernement apporte des solutions plus précises. En effet, certains professionnels d’optique, tout particulièrement dans les communes rurales, sont confrontés à un effet cumulatif de réseaux importants dont ils sont exclus.
Pour prendre le cas de ma commune, Lanmeur, l’opticien ne peut bénéficier d’un conventionnement ni avec Groupama ni avec la MGEN, ce qui réduit terriblement son chiffre d’affaires et met véritablement sa survie en question. Par ailleurs, du côté des assurés, cela signifie encore une fois un accès aux soins rendu plus difficile du fait de l’éloignement.
Mon propos n’est absolument pas de dénigrer le travail des mutuelles, qui ont un rôle aujourd’hui primordial à jouer pour la qualité des soins et une meilleure prise en charge des patients. Ce sont d’ailleurs les pouvoirs publics qui appellent eux-mêmes à « un engagement supplémentaire dans la gestion du risque et la prise en charge des soins », comme le rappelait récemment Étienne Caniard, président de la Mutualité Française.
En réalité, il s’agit de conserver un équilibre entre une offre de soins égale sur tout le territoire et l’équilibre du financement de la sécurité sociale.
Cette question est d’autant plus d’actualité que, lors de la première lecture à l’Assemblée nationale de la proposition de loi de M. Fourcade modifiant certaines dispositions de la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, les députés ont adopté un amendement visant à « légaliser » cette pratique des conventionnements.
En effet, un arrêt de la Cour de cassation du 18 mars 2010 remet en cause cette pratique en interdisant à une mutuelle de moduler le niveau de prestations suivant l’existence ou non d’un conventionnement.
Or, si je comprends le souhait des mutuelles de constituer un réseau de soins au bénéfice des patients et la nécessité de limiter les dépenses de santé, je sais aussi qu’il faut faire très attention à l’avenir de la liberté de choix. Ma crainte est que, en créant certaines obligations par la loi, on ne porte atteinte à la liberté de choix des patients comme des professionnels.
Ce n’est pas en voyant disparaître des professionnels, ces artisans indépendants que sont nos opticiens dans nos communes rurales, que nous améliorerons la prise en charge des patients.
Aussi, je voudrais savoir, madame la secrétaire d'État, quelles réponses vous pouvez apporter dès aujourd’hui pour que ces commerces de proximité ne mettent pas la clé sous la porte et pour que les habitants des communes rurales ne soient pas les victimes de politiques de conventionnement qui les dépassent.