Intervention de Jean Boyer

Réunion du 24 mai 2011 à 18h30
Débat sur la politique forestière et le développement de la filière bois

Photo de Jean BoyerJean Boyer :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat qui nous est proposé aujourd’hui est d’une importance capitale en termes de développement, d’énergie, de diversification et d’innovation.

D’abord, la filière bois concerne l’aménagement du territoire, dans les zones urbaines comme dans les zones rurales, grâce aux possibilités qu’elle recèle en termes d’activité économique et énergétique.

Ensuite, les richesses forestières constituent un atout important pour le développement de nos territoires. Sénateur de la Haute-Loire, donc d’un département forestier, je connais la diversité des richesses que crée cette production, particulièrement appréciée en zone de montagne.

Oui, dans certains de nos départements, la forêt est une source incontournable de richesses naturelles et d’activités de production diverses.

Le débat organisé aujourd’hui au Sénat sur la politique forestière et le développement de la filière bois est l’occasion de nous sensibiliser sur la nécessité de soutenir une filière dont l’avenir est à prendre en compte sur tous nos territoires. La forêt est présente partout en France à des niveaux différents. Si elle montre des couleurs et des visages multiples selon les régions, partout, elle constitue un atout.

En effet, la surface boisée de la France métropolitaine progresse depuis 1820 pour atteindre aujourd’hui 17 millions d’hectares, représentant 27 % de la surface du territoire. L’essentiel – 91 % – est constitué de forêts, de résineux ou de feuillus, le reste étant souvent des îlots de peupliers ou des arbres isolés.

Au côté de l’agriculture, la forêt occupe une place économique non négligeable et concourt à l’avènement de nombreuses filières organisées entre la production, la transformation, la consommation, l’entretien ou tout simplement la valorisation et la promotion. Après la filière verte, il y a la filière bois, l’énergie bois, la construction bois, la promotion et la valorisation de tout un secteur économique.

Comme l’a souligné un précédent intervenant, la forêt, richesse économique, richesse naturelle, est appréciée des chasseurs, mais aussi de ceux qui souhaitent se ressourcer, trouver la tranquillité.

La forêt, c’est aussi un enjeu en termes d’occupation foncière, d’attractivité économique. Comme on parle de surface agricole utile, pourquoi pas ne pas parler de surface forestière utile, pour laquelle un vrai projet de territoire doit exister au service de nos économies locales. C’est un enjeu pour demain, pour les générations futures.

L’homme ne doit pas l’ignorer. Il doit l’organiser dès l’instant de la plantation en adaptant les espèces au sol, au climat, à l’orientation. Il doit aussi organiser son développement, puis sa destination.

La forêt est une réalité, une force, une chance. Nous sommes face à une activité diversifiée. En effet, la filière bois emploie actuellement 231 000 salariés et réalise 40 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Elle regroupe des activités relevant de l’agriculture – la sylviculture – et de l’industrie – travail du bois, meubles, papeterie. Ces activités sont implantées sur l’ensemble du territoire. Les exploitations forestières et les scieries de petites dimensions côtoient les entreprises de menuiserie ou les grandes entreprises de charpentes, traverses, poteaux... La forêt doit être soutenue par une politique ambitieuse, y compris sur le plan du transport. Ainsi, le fret ferroviaire ne doit pas être oublié ; il doit au contraire être revu, sachant que des gares aujourd’hui désaffectées arrivent au cœur des entreprises concernées. Dans mon département, des voies ferrées s’arrêtent au milieu de zones forestières.

La forêt française présente une grande biodiversité, avec cent vingt-huit essences de bois. Or la biodiversité n’est-elle pas au cœur des préoccupations actuelles ? La forêt française, qui est la première en Europe pour les feuillus et la troisième pour les résineux, s’étend chaque année. Elle couvrait 11 millions d’hectares en 1950 et 16 millions d’hectares en 2006, mais elle est très morcelée.

La loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, promulguée le 27 juillet 2010, visait à améliorer cette situation. Mais parallèlement, elle a suscité des inquiétudes, notamment chez les petits propriétaires qui redoutaient l’impossibilité d’acquérir les parcelles limitrophes. Les esprits se sont calmés, mais les inquiétudes furent réelles.

Chaque année, contrairement à ce que l’on pourrait croire, le stock de bois sur pied s’accroît en raison de l’augmentation des surfaces, des progrès des pratiques sylvicoles, mais aussi d’une plus forte concentration en C02 dans l’atmosphère, qui agit comme un « dopant » pour la forêt. Le volume annuel de production, qui était de 81, 3 millions de mètres cubes en 1996, atteignait 103, 1 millions de mètres cubes en 2006. Dans le même temps, la récolte commercialisée est passée de 33, 3 millions à 36, 5 millions de mètres cubes.

Si l’on ajoute 22 millions de mètres cubes autoconsommés par les propriétaires et environ 8 millions de mètres cubes de bois mort, on ne récolte en fait que 60 % de l’accroissement naturel annuel, ce qui est pour le moins surprenant. On estime que 36 millions de mètres cubes n’ont pas été prélevés et viendront accroître le stock de bois sur pied. Notre forêt, sous-exploitée, nécessite des initiatives nouvelles. Les pôles d’excellence rurale, institués en 2006, ont démontré que la filière bois exigeait des initiatives valorisantes. Plus de 100 projets sur 300 en témoignent, et il s’agit non pas de projets de guichet, mais bien de projets d’initiatives.

Soucieux de ne pas dépasser le temps de parole qui m’a été imparti, je conclurai en rappelant que la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche a surtout exprimé la volonté de l’État d’avoir une véritable politique forestière dynamique. Elle prend en compte non seulement les principes de développement et de gestion durable, mais également la protection et la mise en valeur du patrimoine forestier naturel remarquable, sans oublier les hommes qui y travaillent quotidiennement, puisqu’elle comporte un important volet social, y compris en matière d’insertion.

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