Monsieur le président, madame la ministre d’État, mes chers collègues, cette réforme de la représentation devant les cours d’appel nous est présentée comme une question technique concernant un cas bien particulier et appelant des réponses pratiques et circonstanciées.
Or les lacunes et les incohérences qui ont été pointées du doigt lors des débats à l’Assemblée nationale et au sein de la commission des lois du Sénat, comme l’a rappelé notre rapporteur, montrent qu’en réalité le projet de loi que nous examinons n’a rien d’objectif. Il est avant tout guidé par des intérêts politiques qui n’ont rien à voir avec ceux des avoués, de leurs salariés et du justiciable.
En effet, si l’on juge ce texte du simple point de vue de la méthode, nous sommes obligés de constater l’absence de rationalité et de pragmatisme. Différents éléments laissent assurément penser qu’il a été rédigé en urgence et dans la plus parfaite méconnaissance de la profession visée.
Le courrier envoyé par le cabinet du garde des sceaux est, à ce titre, tout à fait éloquent. Dès la première ligne, il y est écrit que cette réforme a pour objet de rendre plus simple et moins chère notre justice devant les cours d’appel. Or cette affirmation est fausse et totalement récusable.
Si, dorénavant, le justiciable ne devra pas avoir recours à deux professionnels, en revanche, il devra payer une taxe d’environ 300 euros à laquelle s’ajoutera une somme forfaitaire exigée au titre de la simple postulation devant les cours et estimée par le Conseil national des barreaux à environ 800 euros, avec, en plus, une majoration de 20 % pour chaque événement de la procédure nécessitant des diligences supplémentaires.
En somme, faire appel ne sera ni plus simple, ni moins coûteux. Pis, le tarif des avoués, qui autrefois était fixé par le gouvernement, se retrouvera totalement dérégulé. Ce seront donc les justiciables les plus fragiles économiquement qui en pâtiront le plus.
Plus choquant encore, le même courrier affirme avec une certaine fierté que « Madame la garde des sceaux a obtenu dans le budget 380 postes dans les services judicaires auxquels pourront postuler les salariés d’avoués ».
Madame le ministre d’État, 380 postes, dont 19 postes de catégorie A recrutés par voie contractuelle, 139 de catégorie B et 222 de catégorie C, soit plus des deux tiers des postes d’emplois sous-qualifiés et faiblement rémunérés ; 380 postes pour 1 852 salariés, soit un poste pour sept personnes. Cela se passe de commentaires...