Intervention de Muguette Dini

Réunion du 21 décembre 2009 à 14h30
Représentation devant les cours d'appel — Discussion d'un projet de loi

Photo de Muguette DiniMuguette Dini :

Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, aux termes de l’article L. 1231-1 du code du travail, le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu sur l’initiative de l’employeur ou du salarié.

Schématiquement, lorsque la rupture du contrat résulte de la volonté du salarié, il s’agit d’une démission. En revanche, celle qui résulte de l’initiative de l’employeur constitue un licenciement.

Le code du travail prévoit deux cas de licenciement : le licenciement pour motif personnel et le licenciement pour motif économique. Dans le premier cas, c’est le manquement du salarié qui est sanctionné. Dans le second, le licenciement est dicté par des difficultés économiques, la suppression ou la transformation d’emplois.

Vous l’avez compris, madame le garde des sceaux, je concentrerai mon propos sur le sort du personnel des études d’avoués. Ces salariés seront licenciés alors qu’ils n’ont pas commis de faute, alors qu’aucune raison économique ne l’impose. Les représentants des avoués emploient l’expression de « licenciement politique ».

M. le rapporteur parle, quant à lui, de « licenciement du fait de la loi », de « licenciement pour motif économique survenant en conséquence directe de la loi », ou encore de « licenciement venant en conséquence de la réforme ».

Au-delà de ces considérations sémantiques, ce sont, vous le savez, 1 650 salariés d’une moyenne d’âge de quarante-trois ans, dont 90 % de femmes – elles cumulent tous les handicaps ! –, qui se retrouveront en recherche d’emploi, dans un contexte économique plus que défavorable, contraints d’accepter une mobilité géographique et, surtout, une baisse de revenus.

Nous savons tous que les avocats, ployant déjà sous les charges patronales, se montrent peu enclins à embaucher du personnel supplémentaire, dont la qualification et la spécificité ne correspondent pas forcément à leur attente.

Le décompte établi par M. le rapporteur montre bien que la situation s’annonce critique pour une grande moitié de ces salariés, qui n’auront, au moment de leur licenciement, aucune perspective immédiate d’emploi.

Pour l’autre moitié, l’avenir se conjugue au conditionnel : 170 collaborateurs juristes bénéficieraient de passerelles vers d’autres professions, 350 salariés pourraient accompagner leur ancien employeur devenu avocat, 380 salariés seraient recrutés par le ministère de la justice et affectés aux greffes des juridictions, mais essentiellement dans le cadre d’emplois de catégorie B et C.

La présidente de la commission des affaires sociales que je suis s’est montrée attentive aux mesures de licenciement et d’accompagnement prévues pour ces 800 salariés assurément licenciés. Quelles sont-elles ? Des indemnités de licenciement plus élevées que celles qui sont prévues dans le cadre du régime légal de licenciement économique, fondées sur un mois de salaire par année d’ancienneté et directement versées par le fonds d’indemnisation créé à cet effet ; une convention de reclassement et d’accompagnement personnalisée ; une indemnité exceptionnelle de reconversion pour ceux des salariés qui trouveraient un nouvel emploi avant d’être licenciés.

Il se murmure ça et là que ces mesures sont plus que satisfaisantes. Je ne suis pas d’accord !

Avec plusieurs de mes collègues de l’Union centriste, j’ai déposé un amendement instaurant une indemnité exceptionnelle de reconversion d’un montant égal à l’indemnité majorée de licenciement. Ces salariés ne sont-ils pas tous contraints de renoncer à leur emploi ? Tous doivent donc bénéficier d’une indemnisation équivalente. Je regrette alors que nous nous soyons vu opposer l’irrecevabilité au titre de l’article 40 de la Constitution. Le législateur que nous sommes se doit de prévoir une juste indemnisation des salariés qui seront licenciés du fait de cette réforme.

Je terminerai mon développement par un point qui me semble fondamental : la période transitoire préalable à l’entrée en vigueur de cette nouvelle organisation.

Je ne partage pas l’analyse selon laquelle la réduction de cette période de transition permettrait d’humaniser la réforme en ne laissant personne dans l’incertitude. Une fois la loi votée, il n’y aura plus d’incertitude. Les avoués devront se reconvertir et les salariés se reclasser. Mais pour cela, il leur faut du temps. Et ce temps, le groupe de l’Union centriste est convaincu qu’il doit être au minimum d’une durée de deux ans.

Une nouvelle vie professionnelle, à marche forcée, ne se prépare pas en à peine huit mois.

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