Intervention de Philippe Dallier

Réunion du 30 mars 2006 à 15h00
Engagement national pour le logement — Suite de la discussion d'un projet de loi en deuxième lecture

Photo de Philippe DallierPhilippe Dallier :

Le rôle du législateur est pourtant bien d'essayer, autant que faire se peut, de prendre en compte la diversité des situations.

En première lecture, certains ont opposé à cette demande, qui me semblait pourtant tout à fait légitime, le fait que la loi doit être la même pour tous et que l'on ne peut pas légiférer commune par commune. Mes chers collègues, est-il besoin de rappeler que tout notre droit est rempli de catégories, de tranches, de critères divers et variés permettant justement de faire preuve de discernement, le plus souvent, d'ailleurs, au bénéfice de celles et ceux qui sont le plus en difficulté ? L'impôt sur les sociétés, l'impôt sur le revenu ou la DSU en sont les plus beaux exemples.

Ces catégories, ces tranches, ces critères ont bien pour objet de prendre en compte la diversité des situations des entreprises, des particuliers ou des collectivités. Alors pourquoi, sur un sujet comme le logement social, faudrait-il que toutes les communes soient traitées à la même enseigne, petites ou grandes, pauvres ou riches ?

Que l'abbé Pierre, pour lequel nous avons tous le plus grand respect, rappelle les principes pour lesquels il s'est toujours battu, je le comprends parfaitement et je l'approuve. Qu'il soit utilisé pour tenter d'empêcher toute modification de la loi, alors qu'elle est injuste, sans même qu'il soit possible de débattre des problèmes qu'elle pose, est plus que regrettable.

Monsieur le ministre, au cours de ce débat, il faut que nous puissions trouver un accord sur trois points essentiels, afin de rendre plus équitables et plus efficaces les dispositions de l'article 55.

Le premier, et le plus important à mes yeux, est la prise en compte de la situation réelle des communes en termes de disponibilité foncière, car le fond du problème est bien là : comment distinguer, parmi les communes qui ne réalisent pas les objectifs que la loi leur fixe en matière de construction de logements sociaux, celles qui ne peuvent pas le faire et celles qui ne veulent pas le faire ? Seule une appréciation de la situation, réalisée de manière contradictoire, sur des critères précis, peut permettre d'y parvenir.

Comme il s'y était engagé en première lecture, ce dont je le remercie sincèrement, M. le rapporteur fera des propositions en ce sens, propositions auxquelles je souscris pleinement.

Il ne s'agit nullement de permettre à certains de « se défiler ». Mais il importe de distinguer entre ceux qui ne veulent pas faire et ceux qui ne peuvent pas faire. §Une fois cette possibilité acquise, il sera alors d'autant plus justifié et incontestable d'accroître les pénalités pour ceux qui refusent le minimum de solidarité.

Le deuxième point sur lequel nous devons trouver un accord, monsieur le ministre, c'est la prise en compte de la capacité contributive des communes soumises au prélèvement. Pour ce faire, il suffit simplement d'utiliser le potentiel financier de la commune et non plus le potentiel fiscal moyen de toutes les communes pour le calcul de ce prélèvement. Cela me semble la moindre des choses en matière d'équité.

Il faut également que nous puissions élargir la liste des dépenses déductibles engagées par les communes pour la réalisation des logements sociaux, de même que nous devons pouvoir étendre la déductibilité dans le temps, au-delà des deux années prévues aujourd'hui, ce qui est trop peu compte tenu du renchérissement du coût du foncier.

Enfin, monsieur le ministre, le dernier point sur lequel je souhaite insister concerne les moyens financiers supplémentaires dont les villes ont besoin lorsqu'elles accueillent des populations nouvelles du fait de la construction de logements.

Si, à la suite de la première lecture au Sénat, ce dont je me réjouis, le texte prévoit maintenant la compensation aux communes, dès la première année, de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour ce qui est des logements sociaux, sauf les PLS, il faut aussi que le calcul de la DGF intègre le plus vite possible cette population nouvelle.

Je sais que des modifications par décret sont en préparation sur la règle actuelle des 15 % minimum pour valider un recensement complémentaire ; il faudrait également qu'à l'occasion du nouveau recensement mis en place par l'INSEE les règles du jeu soient précisées.

Mes chers collègues, je suis certain que le débat qui s'ouvre sera aussi passionné qu'en première lecture, parce que le sujet le mérite. Je forme cependant le voeu qu'il soit serein - mais après avoir entendu certains de mes collègues au cours de la séance des questions d'actualité au Gouvernement, je crains que tel ne soit pas tout à fait le cas - et que nous puissions, comme aimait à le dire le général de Gaulle, faire de la politique en tenant compte des réalités.

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