Intervention de André Boyer

Réunion du 26 juin 2008 à 21h30
Livre blanc sur la défense — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de André BoyerAndré Boyer :

… ce qui nous a contraints à un mode de financement pour le moins singulier de ce programme décisif.

Enfin, la mise en place de réelles bases de défense suppose, pour être à la hauteur des enjeux, des dépenses d’infrastructures prévisibles et très importantes. Nous nous accommodions en effet, jusqu’ici, dans les emprises actuelles, de bâtiments certes souvent chargés d’histoire, mais de ce simple fait peu adaptés, très difficiles à maintenir en bon état et souvent, d’ailleurs, mal entretenus.

Ces quelques chapitres majeurs ne prétendent cependant pas à l’exhaustivité.

Face aux dépenses que je viens d’évoquer, quelles économies pouvons-nous déjà mettre en balance ?

Les réductions d’effectifs, pour être significatives, devront s’étaler sur six ans. Le Livre blanc précise que les restructurations ne devraient faire sentir leurs effets qu’au bout de trois ou quatre ans.

Quant aux programmes d’armements, une fois encore étalés ou reportés, ils souffraient déjà d’une insuffisance patente de financement et n’offrent que des perspectives d’économies limitées, tout entières affectées aux besoins nouveaux.

À cet égard, monsieur le ministre, que représente le différé de la décision sur le second porte-avions en termes financiers, alors que nous avons cofinancé des études de définition de ce programme avec les Britanniques et que nous avons procédé à la commande des catapultes aux États-Unis ?

Quelles sont les priorités d’équipement de notre pays, et à quoi devons-nous renoncer pour préserver l’essentiel ? Je ne suis pas certain que le Livre blanc réponde complètement à cette question.

S’agissant des besoins importants de la marine nationale, en particulier, dont les crédits font l’objet, depuis plusieurs années, de reports cruellement ressentis, permettez-moi de rappeler mon attachement – partagé, je n’en doute pas ! – à la préservation d’une marine océanique, instrument de souveraineté, mais aussi facteur majeur de sécurité près de nos côtes ou sur toutes les mers du globe. En clair, il s’agit de toutes les missions qui ressortissent de l’action de l’État en mer, comme le précise d’ailleurs le Livre blanc.

Ce dernier préconise également la réaffectation intégrale, au profit des équipements, des économies engendrées par les restructurations. Il est difficile cependant d’identifier la source des 3 milliards d’euros d’économies qui viendraient abonder le budget d’équipement de nos forces. Je ne demande bien sûr qu’à être rassuré par vos éclaircissements quant au volume et à l’affectation des économies dégagées sur les trois prochaines années.

Ma préoccupation est d’autant plus vive que notre horizon en matière de défense reste, j’en suis convaincu, étroitement lié au grand projet de faire de l’Europe de la défense un acteur majeur et autonome.

Force est de constater que, dans ce domaine, nous sommes encore bien seuls, et sans doute peu convaincants. Notre ambition et notre propre détermination sont un moteur indispensable. Seul un effort budgétaire national crédible peut nourrir notre capacité d’entraînement et faire progresser cette Europe de la défense, qui implique la relance du projet de 1999 en termes de capacités, de conduite des opérations et de planification à l’échelon européen.

En effet, ce qui intéresse nos rares partenaires éventuels ne se limite pas aux intentions affichées, aussi louables soient-elles, ou aux déclarations de principe. Notre pouvoir de conviction repose, n’en doutons pas, sur le contenu de nos propositions et leur cohérence avec notre propre politique.

Les annonces du Livre blanc concernant notre réintégration dans l’OTAN, laquelle, j’en conviens, changerait peu de choses à l’implication, déjà grande, de notre pays dans cette alliance, ne risquent-elles pas, de ce point de vue, d’être interprétées comme un renoncement ?

Certes, nous sommes confrontés à une réforme difficile, qui impose des choix douloureux. Ne pas les formuler clairement, à l’échelon tant national qu’européen, puisque nous appelons de nos vœux une Europe de la défense, mettrait en péril la réforme elle-même, et la sécurité qu’elle veut et qu’elle doit assurer à notre pays.

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