Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 26 juin 2008 à 21h30
Livre blanc sur la défense — Débat sur une déclaration du gouvernement

Michèle Alliot-Marie, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales :

Comme l’a souligné M. Dulait, les nombreuses menaces qui pèsent aujourd’hui sur notre pays – terrorisme, trafics ou même risques naturels – ne connaissent plus de frontières. Finalement, il y a une grande continuité de la menace et, par conséquent, un réel besoin de réaction.

À cet égard, madame Demessine, nos compatriotes se moquent bien de savoir où se situe l’origine de la menace. Ce qui leur importe, c’est que nous soyons tous capables d’y faire face et de les protéger.

Cela suppose, bien entendu, de mener notre action le plus loin possible de nos frontières, afin de contenir la menace autant que faire se peut et d’éviter qu’elle ne parvienne jusqu’à nous. C’est le rôle de nos forces armées que de se projeter ainsi à l’extérieur.

Pour autant, lorsque la menace est sur notre territoire, les forces de police et de gendarmerie, parfois soutenues, d’ailleurs, par des moyens militaires, doivent alors être en mesure de protéger nos concitoyens. Il est de notre responsabilité politique et collective de nous assurer de la présence effective de tous les moyens nécessaires pour y parvenir.

À cet égard, sur le territoire national, le ministère de l’intérieur est bien entendu en première ligne. Il doit donc être à même d’agir, afin de pouvoir détecter l’origine même des différentes menaces, y compris à l’international.

À cette fin, il utilise notamment le réseau des attachés de sécurité intérieure, mais participe également à certaines structures, à l’instar du Club de Berne, qui réunit de façon régulière les services de renseignement des pays européens. Il convient aussi de citer le rôle du service de coopération technique internationale de police, ainsi, bien sûr, que celui de la mission aux affaires internationales et européennes, que je renforce au sein du ministère.

Ces structures constituent en quelque sorte un ensemble de « capteurs » des menaces susceptibles de naître à l’extérieur de notre pays.

Bien entendu, le ministère de l’intérieur s’appuie également sur l’organisation territoriale de l’État, placée sous l’autorité des préfets, ce qui lui permet d’intervenir au moindre événement et d’assurer la coordination de l’ensemble des moyens. Sa vocation interministérielle est donc plus que jamais justifiée.

À cet égard, il faut rappeler le rattachement, depuis le mois de mai 2007, de l’outre-mer au ministère de l’intérieur, dont la responsabilité s’étend désormais à la totalité du territoire national. Le fait que les collectivités territoriales, également rattachées au ministère, s’investissent de plus en plus dans la gestion des crises majeures amplifie d’autant notre capacité de réaction.

Mesdames, messieurs les sénateurs, tels sont les moyens dont nous disposons. Il importe, bien sûr, de pouvoir réagir plus spécifiquement. De ce point de vue, l’action que je mène depuis un an à la tête du ministère de l’intérieur va tout à fait dans le sens des préconisations formulées dans le Livre blanc. En ce sens, le ministère de la défense et celui de l’intérieur doivent répondre à une double exigence.

La première, c’est d’être le plus opérationnel possible, par une meilleure utilisation et une plus grande coordination des moyens disponibles. Le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur s’inscrit tout à fait dans cette logique, puisqu’il favorise notamment la mutualisation des savoir-faire et des moyens techniques.

La deuxième exigence du Livre blanc, c’est de mieux assurer l’anticipation et la prévision.

Pour ce qui est, d’abord, de l’anticipation, venant moi-même du ministère de la défense, j’ai été surprise de constater que celui de l’intérieur, alors même que les menaces changent et que la délinquance évolue, ne disposait pas de structures lui permettant d’anticiper et, donc, de réagir par rapport au long terme. Il se retrouvait donc, en quelque sorte, « le nez sur le guidon ».

J’ai donc souhaité, dès mon arrivée, la création de la délégation à la prospective et la stratégie, que je vous avais d’ailleurs annoncée à l’automne dernier. Fonctionnant depuis le mois de janvier, elle va nous assurer une meilleure visibilité pour anticiper les besoins à venir, notamment en termes d’équipement.

Pour ce qui est, maintenant, de la prévention, il était tout aussi important de se doter de tous les moyens nécessaires. C’est le sens de la réorganisation des services de renseignement intérieur : le rapprochement de la DST et des RG au sein de la nouvelle DCRI, la direction centrale du renseignement intérieur, nous met aujourd’hui en capacité d’utiliser l’ensemble des savoir-faire et de bénéficier d’une réelle synergie.

De la même manière, dans le cadre de la future loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite LOPPSI 2, que je vous présenterai à l’automne prochain, il sera prévu un renforcement des moyens humains et techniques pour faire face à l’ensemble des besoins et, en particulier, aux risques NRBC, les risques nucléaires, radiologiques, bactériologiques et chimiques. En effet, comme je le souligne déjà depuis plusieurs années, je crains qu’à l’avenir nous n’ayons affaire à des terroristes qui, outre les explosifs classiques, n’hésiteront pas à recourir à des armes d’une autre nature. Il faut donc que nous soyons à même de réagir, sur le territoire national, à ce type de menace.

Bien entendu, mesdames, messieurs les sénateurs, agir et anticiper, cela suppose également de nouer suffisamment de contacts extérieurs. C’est la raison pour laquelle j’ai passé récemment un certain nombre d’accords de coopération avec l’Arabie saoudite et l’Algérie. C’est aussi pour cette raison que, au niveau européen, j’ai signé à Lisbonne un accord prévoyant, sur toute la façade atlantique, un dispositif de lutte contre les flux illicites. Nous avons d’ores et déjà obtenu des résultats remarquables, notamment contre le trafic de drogue. Au cours de la présidence française de l’Union européenne, je proposerai l’extension de ce système à la Méditerranée, pour disposer ainsi de moyens supplémentaires.

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