Nous recevons 2 370 euros d'aide par appartement, la région et le département confortant l'aide de l'État. Il reste donc à financer 27 270 euros par logement, soit sur fonds propres, soit par emprunt. C'est, par conséquent, à peu près 90 % de l'investissement que nous ne pouvons répercuter intégralement dans les loyers, en raison du niveau de ressources des locataires.
Et pourtant, ce patrimoine réhabilité est nécessaire, compte tenu du profil social et économique des demandeurs et des locataires. En effet, 80 % des demandeurs et 76 % des locataires de l'organisme que je préside ont des revenus inférieurs à 60 % des plafonds de ressources HLM.
Un renforcement significatif de la PALULOS, la prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, me paraît s'imposer, la plupart des offices ne disposant pas de fonds propres suffisants pour rendre ces opérations supportables pour les locataires. Cette réévaluation devrait prendre en compte l'évolution des coûts de construction constatés depuis dix ans.
À défaut, le patrimoine ancien continuera de se marginaliser, la vacance d'augmenter et les ressources des constructeurs sociaux de se tarir. Les moins fortunés de nos compatriotes ne pourront toujours pas se loger.
Dans le domaine de la construction neuve, les problèmes financiers se posent en termes différents, mais la problématique est la même. Pardonnez-moi d'évoquer encore une expérience locale, mais je pense qu'elle est semblable à celles des constructeurs sociaux sur l'ensemble du territoire, hors grandes agglomérations.
L'aide de l'État pour un logement financé en PLUS est de 2, 5 %. Les coûts de construction ont augmenté d'environ 20 % en trois ans. Nous ne pouvons plus construire de logements au-dessous de 95 000 à 100 000 euros l'unité, hors foncier. L'équilibre d'opération en zone 3 - c'est-à-dire dans l'ensemble du territoire départemental, à l'exception de l'agglomération centre - se situe à environ 80 000 euros. Le constructeur doit donc injecter 20 % de fonds propres par logement, soit 20 000 euros en moyenne, c'est-à-dire 2 millions d'euros pour 100 logements.
Sans l'aide du département, nous ne pouvons pas construire ! En effet, quel organisme peut aujourd'hui dégager autant de fonds propres ? La question contient la réponse ! Ceux qui se risqueraient à compléter le financement de la Caisse des dépôts et consignations par un emprunt complémentaire se trouveraient rapidement confrontés à un déséquilibre abyssal de leurs finances, qui les placerait inéluctablement dans une situation désagréable !
Construire ou réhabiliter devient donc de plus en plus difficile, en raison de l'augmentation du coût de la construction et du prix du foncier, de la nécessaire prise en compte des normes environnementales, ainsi que de l'absence de revalorisation du concours de l'État à l'unité logement.
C'est une situation paradoxale : la masse des crédits budgétaires en faveur du logement est en constante progression pour augmenter la production globale, mais les crédits à l'unité logement sont de plus en plus marginalisés, au point de rendre les équilibres d'opération impossibles. Pour certains offices, construire ou réhabiliter devient suicidaire. Vous ne devez pas, madame la ministre, sous-estimer cette situation, qui peut miner de l'intérieur l'ambitieux programme que vous défendez.
Quelles solutions reste-t-il ? On peut certainement vendre une partie du patrimoine ancien, mais à un rythme et suivant des modalités propres à chaque organisme, en fonction de sa politique patrimoniale et en considérant un ratio raisonnable de deux logements construits pour un logement vendu.
J'ajoute qu'il ne faut pas tirer de plans sur la comète, la demande d'achat devant être fortement sollicitée pour des résultats plutôt moyens.
Faut-il chercher à réaliser des gains de productivité ? Le maximum est fait en termes de limitation des coûts de construction. Sans doute la plupart des organismes peuvent-ils faire des économies au niveau des frais de gestion, le ratio nombre de locataires par gestionnaire pouvant vraisemblablement être amélioré.
Faut-il compter sur l'aide des collectivités locales ou de leurs groupements ? Elle est déjà fortement sollicitée et axée principalement sur l'allègement du coût du foncier et des viabilisations.
Reste une réévaluation des concours de l'État. Il me semble, madame la ministre, que nous y sommes contraints, sous peine de voir la construction et la rénovation sociales retomber à leur plus bas niveau, à un moment où les besoins exigent notre mobilisation commune.
Je pense que vous savez tout cela et que vous recherchez, de bonne foi, le croisement de toutes ces pistes pour maintenir le cap qui vous a été fixé.