Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous le savez la poursuite de l'exportation du minimum vieillesse à l'étranger n'est pas cohérente vis-à-vis des principes fondamentaux de notre protection sociale. Elle n'est pas non plus à la portée de nos finances sociales, à l'heure où nous demandons à tous les assurés sociaux de ce pays de faire des efforts importants.
Aujourd'hui, cette solidarité est financée par l'endettement croissant du fonds de solidarité vieillesse, et donc, par voie de conséquence, par la mise à contribution des générations futures, celles de nos enfants et petits-enfants.
La Cour des comptes a déjà attiré l'attention des pouvoirs publics sur ce problème, notamment à la page 99 de son rapport de septembre dernier sur la sécurité sociale.
Voici les termes employés par les magistrats financiers : la Cour « considère aussi que l'exportation des compléments de retraite qui a été instituée [...] pour les non-résidents en France (et qui est à l'origine d'effets d'aubaine importants) n'est ni justifiée par la nature de la prestation ni requise par les règlements communautaires. Au minimum, le calcul de cette prestation devrait être modulé en fonction de la durée de travail effectuée ».
Eh bien, mes chers collègues, voilà précisément ce que je vous propose de faire !
J'observe en outre, que, dans sa lettre du 5 octobre 2005, le président du FSV a lui aussi a évoqué « le caractère laxiste des conditions d'exportation à l'étranger de l'élément de base du minimum vieillesse au bénéfice des étrangers non résidents ».
C'est donc fort justement que le Gouvernement a décidé de mettre un terme à cette situation qui choquerait nos concitoyens s'ils en avaient davantage connaissance.
Il y a un effet d'aubaine incontestable lorsqu'un seul trimestre de travail en France permet de bénéficier à vie, à partir de soixante-cinq ans, d'une pension de 2 900 euros par an à titre propre et de l'ouverture de droits non contributifs pour le conjoint.
Il y a abus manifeste lorsque, pour près de la moitié des bénéficiaires actuels, la présence dans notre pays est incertaine, voire douteuse, notamment pour les personnes à charge.
Je souhaite donc que l'on se rapproche du droit commun de la sécurité sociale - je dirai même du sens des réalités -, qui repose sur le principe que les minima sociaux sont versés sous condition de résidence sur le territoire. Ils profitent aux Français ou aux étrangers en situation régulière, mais à condition de vivre en France. Ni plus, ni moins !
Mon amendement vise donc à compléter le dispositif gouvernemental, qui, lui, ne vise que les nouveaux bénéficiaires potentiels.
Je crois qu'il faut aussi mettre un terme aux situations les plus contestables que l'on constate aujourd'hui, en supprimant le service du premier étage du minimum vieillesse à l'étranger pour les personnes ayant travaillé moins de cinq ans en France. Pour les autres personnes, c'est-à-dire celles qui ont vécu en France relativement longtemps, et non pas de façon transitoire ou épisodique, le service de l'allocation serait maintenu sans changement.
Mes chers collègues, l'enjeu est fondamental : en l'état actuel de la situation, si nous ne faisons rien, nous risquons de devoir exporter plusieurs milliards d'euros à l'étranger au cours des années qui viennent, dans des conditions impossibles à contrôler. Certains experts pensent même que le coût du statu quo en la matière serait de 7 milliards d'euros ! Où pourrions-nous donc trouver pareille somme alors que nous cherchons précisément à lutter contre les dérives qui menacent notre système de protection sociale ?