Intervention de Robert Bret

Réunion du 22 mars 2006 à 15h00
Conseil européen des 23 et 24 mars 2006 — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Robert BretRobert Bret :

Par ailleurs, nous regrettons que la majorité des « programmes nationaux de réforme » se concentrent sur le nombre d'emplois, c'est-à-dire sur le quantitatif, omettant d'en considérer la qualité.

En effet, l'élévation du taux d'emploi est considérée comme positive, quelles que soient les conditions de travail - bas salaires, durée du travail, pénibilité importante - et quels que soient les éléments de précarité associés aux emplois concernés - temps partiel contraint, intérim, etc. Les États membres se sont révélés incapables de comprendre que le développement de politiques communes solidaires à l'échelon européen pouvait apporter une valeur ajoutée qui profiterait à tous. Au contraire, ils ont opté pour la mise en concurrence des salariés et des peuples.

À présent, des mesures concrètes devraient être prises au plus vite en matière sociale afin de favoriser le développement d'une société axée sur la cohésion, ce qui suppose des mesures en faveur de la stabilité de l'emploi et du respect des droits des travailleurs.

Concernant la recherche et l'innovation, le constat est aussi alarmant. En 2004, l'Union européenne a consacré 1, 9 % de son PIB à la recherche-développement.

L'investissement dans ce domaine est pourtant indispensable à la réussite de la politique de développement durable dans son ensemble et permettrait la création de richesses et d'emplois. Les investissements dans la recherche et le développement doivent être axés sur l'accroissement de la qualité de la vie et la promotion du développement durable.

Concernant la politique énergétique européenne, l'Union européenne prend place dans un monde où la demande énergétique s'accroît considérablement.

On estime que la consommation mondiale d'énergie devrait croître de près de 52 % à l'horizon de 2030 par rapport au niveau de 2003. Selon les prévisions de l'Agence internationale de l'énergie, l'Europe devra importer près de 70 % de ses besoins en énergie en 2030, contre 50 % actuellement.

Comme dans d'autres domaines, la Commission européenne a donné la priorité à la libéralisation du marché intérieur du gaz et de l'électricité. Cette libéralisation s'est faite par étapes depuis les directives de 1996 et 1998 et sera achevée au 1er juillet 2007.

Jusqu'à présent, la libéralisation du gaz et de l'électricité a surtout accéléré la concentration du secteur aux mains de quelques grands groupes et a favorisé le remplacement des monopoles publics par des monopoles privés.

Cette libéralisation se traduit également par des augmentations de prix et remet en cause le droit à l'énergie pour tous.

Dans ce sens, l'année 2006 débute en France par la fusion, annoncée le 7 février, de Gaz de France et de Suez, ainsi que par l'augmentation des tarifs de GDF, afin de satisfaire un retour sur investissement confortable pour les futurs actionnaires.

Le Parlement français vient également d'adopter un projet de loi dédouanant l'État de sa responsabilité en matière de sécurité nucléaire et ouvrant la porte à la privatisation du nucléaire civil. Pourtant, le nucléaire, dans l'état actuel des connaissances, est une réponse efficace au double défi de l'augmentation des besoins et du respect de l'environnement.

Le protocole de Kyoto, récemment entré en vigueur, impose de prendre des mesures pour la réduction de l'émission de gaz à effet de serre.

Cependant, il nous faut continuer à promouvoir la diversité énergétique et le développement des énergies renouvelables.

Le développement des énergies renouvelables impose des investissements importants en faveur de la recherche.

Ces questions doivent se situer au coeur de la stratégie de Lisbonne, et devraient figurer au premier rang des priorités du septième programme-cadre de recherche de la Communauté.

J'espère que les discussions du Conseil européen sur les questions énergétiques se traduiront par des mesures concrètes permettant de répondre aux besoins énergétiques croissants tout en assurant le respect de l'environnement.

Il convient en effet de tirer toutes les conséquences de la libéralisation : la sécurité énergétique est impossible sans la maîtrise publique de la production énergétique.

Celle-ci nécessite en effet d'avoir une vision à long terme, qui seule permet d'intégrer la charge des coûts externes majeurs que sont le traitement et la gestion des déchets - nous en parlerons dans quelques mois -, le démantèlement des installations et la prise en compte des risques, notamment nucléaires.

De plus, car il s'agit de biens publics, il est nécessaire d'instaurer une réelle transparence, une circulation effective des informations ainsi qu'un exercice concret de la citoyenneté.

Pour conclure, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, je constate qu'en dépit du contexte actuel, exceptionnel à bien des égards, aucune volonté de mettre en oeuvre une vraie politique de relance, qui irait dans le sens des aspirations des peuples européens, n'est perceptible.

Une fois encore, la question fondamentale d'une augmentation du budget européen est éludée. Pourtant, seul un budget digne de ce nom permettrait à l'Union de financer des politiques communes ambitieuses et solidaires, et de répondre aux attentes des peuples.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion