Intervention de Jean-Paul Emorine

Réunion du 22 mars 2006 à 15h00
Conseil européen des 23 et 24 mars 2006 — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Jean-Paul EmorineJean-Paul Emorine :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, ce rendez-vous avec la représentation nationale, à la veille du Conseil européen traditionnellement consacré à la croissance et à l'emploi, retient toute notre attention.

Tout doit en effet être mis en oeuvre pour relancer la croissance et améliorer la compétitivité de l'Europe face aux défis de la mondialisation. Cela suppose que des efforts et des réformes courageuses soient réalisés au sein de chacun des États membres, d'où l'intérêt d'une vaste réflexion préalable.

Il est donc très souhaitable que, au cours de cette séance, soient débattues et enrichies les positions que défendra le Gouvernement français lors du Conseil européen des 23 et 24 mars.

Pour ma part, en tant qu'élu du groupe de l'UMP, mais aussi et surtout comme président de la commission des affaires économiques, j'insisterai sur trois points qui intéressent tout particulièrement mes collègues : la directive sur les services, la stratégie de Lisbonne et la politique énergétique de l'Union européenne.

S'agissant de la directive sur les services, la commission des affaires économiques a adopté à l'unanimité les conclusions de la communication de notre collègue Jean Bizet sur la position prise par le Parlement européen le 16 février dernier. Elle a ainsi réaffirmé sa volonté de voir se poursuivre le processus législatif communautaire sur la libre circulation des services en soutenant les amendements du Parlement européen, qui constituent un compromis qu'elle estime désormais acceptable.

Quatre points essentiels devraient, selon la commission des affaires économiques, être ainsi intégrés dans la nouvelle proposition de la Commission soumise au Conseil : l'exclusion de certains secteurs spécifiques du champ d'application de la directive tels que les services sociaux, les agences de travail intérimaire ou, de façon plus générale, les secteurs déjà couverts par des législations spécifiques ; la primauté des régimes et des directives sectoriels ; la réaffirmation de la règle de la libre circulation des services, en poursuivant le processus d'harmonisation ; l'exclusion du droit du travail, qui doit rester de la compétence du pays d'accueil, et le maintien de l'application effective de la directive sur le détachement des travailleurs.

Ce dernier point est particulièrement important, car nous sommes très attentifs à tout risque de dumping social qui pourrait naître des textes européens ou de leur mauvaise application sur le terrain.

Sur ce sujet, la commission des affaires économiques a d'ailleurs demandé à notre collègue Francis Grignon de préparer un rapport sur la concurrence résultant de l'élargissement dans les domaines du bâtiment et des travaux publics.

En ce qui concerne la mise en oeuvre de la stratégie de Lisbonne, sur des bases révisées par le Conseil européen des 22 et 23 mars 2005, la commission des affaires économiques soutient les objectifs économiques et sociaux que celle-ci définit à l'horizon 2010.

Au mois de novembre dernier, la commission des affaires économiques a adopté une proposition de résolution, devenue résolution européenne du Sénat, sur la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil établissant un programme-cadre pour l'innovation et la compétitivité.

Ce programme-cadre, d'un montant de 4, 2 milliards d'euros pour la période 2007-2013, est conçu pour permettre le redémarrage de la stratégie de Lisbonne. Il va indéniablement dans le bon sens : il encourage la création et le développement des entreprises innovantes, intervient dans le domaine des technologies de l'information et de la communication, mais tend aussi à favoriser le développement de l'énergie intelligente, c'est-à-dire à améliorer l'efficacité énergétique. En cela, l'Europe prend les moyens d'assurer sa compétitivité pour demain.

Il me paraît essentiel, pour assurer cette compétitivité, à la fois globalement et nationalement, de veiller à l'articulation effective de ce programme avec les politiques des États membres, qu'il s'agisse de la politique industrielle ou de la politique de recherche et d'innovation.

De ce point de vue, nous pouvons nous féliciter de la réforme de notre système de recherche et d'innovation menée depuis deux ans. Désormais, la mise en place de l'Agence nationale de la recherche et de l'Agence de l'innovation industrielle renforce les logiques de projets qui sous-tendent les programmes européens.

Je crois également intéressant de souligner que c'est dans ce cadre que doivent s'inscrire nos pôles de compétitivité, qui traduisent une véritable politique d'aménagement du territoire en impliquant les collectivités territoriales. Quel est votre sentiment sur ce point, monsieur le ministre, madame la ministre déléguée ?

Un autre volet de ce Conseil porte sur la définition d'une « stratégie européenne pour une énergie sûre, compétitive et durable ». Il s'agit, à l'évidence, d'un enjeu majeur pour la croissance économique de l'ensemble des États membres et pour l'indépendance de l'Europe sur la scène mondiale.

La parution du Livre vert de la Commission européenne et la contribution des ministres de l'énergie adoptée le 14 mars dernier constituent la base des discussions de ce volet « énergie ».

À cet égard, on peut se féliciter que le mémorandum français remis en janvier dernier ait pu contribuer à l'élaboration de ces documents.

Les éléments de contexte et les enjeux en matière de sécurité, d'approvisionnement, de demande énergétique et de changement climatique, obligent à mettre en place une stratégie commune. Il est aujourd'hui plus que temps !

Il faut en effet rappeler que la dépendance énergétique extérieure de l'Europe devrait augmenter et atteindre 70 % en 2030, contre 50 % aujourd'hui. À cet horizon, nous devrions encore dépendre principalement de trois sources fossiles : le pétrole, le gaz et le charbon. Or, ces ressources sont importées et leur épuisement est programmé à moyen terme. Cela pèsera inéluctablement sur les prix de l'énergie. Il convient, en outre, de prendre en compte les turbulences politiques qui peuvent affecter les fournitures de l'Europe, comme l'a récemment montré la crise entre la Russie et l'Ukraine.

L'Europe doit donc impérativement se prémunir contre ces aléas contraignants en faisant de la sécurité énergétique une priorité stratégique communautaire, déclinée à travers plusieurs axes d'intervention.

Il convient de rappeler que la France, à la suite du premier choc pétrolier, a fait le choix de cette priorité et que les options arrêtées et bâties autour du nucléaire ont largement fait leurs preuves. Il faut également redire que le nucléaire contribue de façon essentielle à la lutte contre le changement climatique.

À l'échelon communautaire, il est certes satisfaisant que le nucléaire soit mentionné dans la composition du bouquet énergétique européen plus durable, efficace et diversifié.

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