Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 22 mars 2006 à 15h00
Conseil européen des 23 et 24 mars 2006 — Débat sur une déclaration du gouvernement

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Les États-Unis l'ont d'ailleurs bien compris. Le nouveau grand jeu qu'ils mènent face à l'Union européenne pour le contrôle des ressources énergétiques alimente leur politique internationale.

Au Moyen-Orient, leur hégémonie est une évidence. La guerre d'Irak a fait des Anglo-Saxons les maîtres du pétrole de ce pays, où la France n'a pas su, ou pu, garder l'exploration et l'exploitation des champs géants de Majnoun ou de Nahr bin Umar. L'Arabie saoudite et les Émirats privilégient aussi majoritairement les compagnies anglo-saxonnes. L'alignement de la politique étrangère de l'Union européenne sur celle des États-Unis vis-à-vis de l'Iran laisse augurer une prédominance américaine lorsque les relations avec ce pays se seront apaisées.

Certes, la France est fortement implantée dans le Golfe de Guinée et en Angola, mais, là aussi, les Américains progressent et la Chine développe ses positions africaines.

Les liens étroits entre les sociétés pétrolières américaines et le gouvernement des États-Unis génèrent une politique de l'énergie dynamique et même agressive, face à laquelle l'Union européenne n'offre pas une ligne de défense cohérente. Devant cette situation, elle doit agir d'urgence.

Le conseil « Énergie » du 14 mars semble montrer qu'il existe un consensus sur la nécessité d'élaborer une stratégie commune ; je m'en réjouis.

Le Livre vert identifie six domaines clés dans lesquels des actions sont nécessaires pour atteindre les objectifs de durabilité, de compétitivité et de sécurité de l'approvisionnement.

Trois points me semblent essentiels.

En premier lieu, l'Union européenne doit parler d'une seule voix, diversifier les sources et les voies d'approvisionnement extérieures et conclure de nouveaux partenariats avec ses voisins et avec d'autres grands pays producteurs dans le monde.

Le premier partenariat à conclure, c'est évidemment avec la Russie, géant énergétique, voisin direct et premier fournisseur de l'Union européenne. Il y a urgence, car des ventes d'hydrocarbures importantes se développent avec la Chine et le Japon. Et le potentiel de la Russie n'est pas infini.

Si le dialogue sur l'énergie entre l'Union européenne et la Russie est établi, les accords de partenariat et de coopération de 1997 et les conclusions du sommet Union européenne-Russie de 2001 ne sont pas encore entrés véritablement dans les faits.

Notre dépendance par le volume et la valeur vis-à-vis de ce pays crée mécaniquement une dépendance de celui-ci vis-à-vis de nous. L'Union européenne représente en effet 30 % en volume et 70 % en valeur des recettes de Gazprom.

Par ailleurs, les investissements nécessaires pour garantir l'approvisionnement et améliorer des installations vieillissantes et polluantes ont été évalués récemment par la Commission européenne à 715 milliards de dollars. Sans ces investissements, la capacité exportatrice de la Russie risque de très fortement diminuer. Si la Russie n'améliore pas son efficacité énergétique, d'ici à 2010, elle sera à 83 millions de tonnes équivalent pétrole exportables contre dix fois plus si elle le portait au niveau français.

L'Union a donc un intérêt vital à renforcer la Russie en tant que fournisseur sûr et fiable par des transferts technologiques et des investissements. La maîtrise de l'itinéraire et la cogestion, aujourd'hui inexistante, des oléoducs et gazoducs conditionnent également la sécurité de l'approvisionnement. Je citerai en exemple les gazoducs du Nord russo-allemand, qui sont totalement bilatéraux, et les deux projets Yamal.

En deuxième lieu, il est essentiel de diversifier le bouquet énergétique par le développement de sources d'énergies propres et renouvelables compétitives.

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