Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux vous parler de la forêt à mon tour, brièvement mais, je l’espère, en maintenant un équilibre entre le pessimisme et l’optimisme.
Il nous faut bien constater, monsieur le ministre, que, en dépit de votre talent bien connu, les ambitions des Assises de la forêt appelaient une autre réponse budgétaire que celle qui ressort, par exemple, de la loi de programmation triennale.
Selon ce texte, les crédits du programme 149 « Forêt », qui s’élevaient à 305 millions d’euros en 2008, passent à 292 millions d’euros dans le budget pour 2009 et devraient chuter à 248 millions d’euros si l’on en croit les prévisions pour 2011. Ce n’est pas un progrès !
, mais c’était peut-être beaucoup demander, il eût été souhaitable, pour tous les amoureux de la forêt, de confirmer l’orientation retenue auparavant et, conformément à cette dernière, de maintenir le montant du programme et renouveler les crédits consacrés à la reconstitution des forêts détruites par la tempête de 1999 – à mesure que cette reconstitution, heureusement, s’achève – en faveur des investissements forestiers, de protection et d’amélioration, qu’il s’agisse de la forêt publique ou de la forêt privée.
J’évoquerai d’abord la question de la forêt publique. Sa partie communale, représentée par la Fédération nationale des communes forestières de France, la FNCOFOR, dont j’étais naguère le responsable, s’est abstenue de voter le budget de l’ONF lors du conseil d’administration du 17 novembre, fait très rare.
En effet, si la FNCOFOR s’est réjouie du maintien du versement compensateur à 144 millions d’euros, comme le prévoit le contrat État-ONF – ce qui est pour nous une grande satisfaction et nous vous en remercions de grand cœur –, elle s’est inquiétée des charges qui pèseront désormais sur l’ONF, son partenaire, et non plus son tuteur. Il s’agit de l’augmentation de sa part patronale de dépenses sociales, soit 25 millions d’euros en 2009 et 60 millions d’euros en 2011, ainsi que de l’exigence par l’État d’un loyer pour l’usage, gracieux jusque-là, des maisons forestières. Là, nous confinons pour ne pas dire au folklore, à tout le moins à la dérision.
C’est que la révision générale des politiques publiques, la RGPP, mécanisme que la commission des finances approuve, est passée par là !
La réduction des effectifs, autre chapitre essentiel de la RGPP, se limitera-t-elle à la non-compensation d’un départ à la retraite sur deux déjà observée dans l’établissement ? Faudra-t-il aller plus loin dans le cadre de la norme de 1, 5 % par an prévue par le contrat entre l’État et l’ONF ?
Les communes forestières, monsieur le ministre, vous demandent avec insistance de veiller à ce que les charges de l’ONF qui découleront de la RGPP soient ajustées à la situation du marché du bois, dont dépendent les ressources de l’établissement. Or ce marché, comme vous le savez, se dégrade sensiblement avec la crise de la construction.
Les communes, comme l’a dit mon successeur à la présidence de la COFOR, mon ami Jean-Claude Monin, ont été choquées de voir l’État ou l’ONF refuser désormais de s’acquitter de la taxe foncière sur les propriétés non bâties des forêts domaniales : cela représente 14 millions d’euros de recettes en moins pour les communes et l’abolition d’un usage traditionnel. Certes, ce n’est pas l’épisode le plus dramatique de l’histoire des forêts, mais cette situation est quelque peu regrettable.
La forêt privée, pour sa part, s’inquiète de la baisse des aides à la voirie forestière, pourtant reconnues nécessaires à l’accroissement de la récolte de bois.
Cette nécessité a été affirmée aux assises de la forêt et du bois. Le budget ne la reconnaît plus, ou il ne la reconnaîtra peut-être que plus tard. Quid du fonds de mobilisation, dont il a été question lors du Grenelle de l’environnement ? Comme l’ont observé la plupart des orateurs qui m’ont précédé, il existe un écart entre les espoirs suscités par le Grenelle de l’environnement en matière forestière et la réalité budgétaire.
Le dispositif d’encouragement fiscal à l’investissement, le DEFI, a été amélioré pour ce qui concerne le DEFI Travaux, mais non pour l’investissement foncier, c'est-à-dire le DEFI Forêt. Il serait pourtant souhaitable que l’application du seuil de cinq hectares soit étendue des forêts de montagne à l’ensemble du territoire forestier national.
Y aura-t-il bien un dispositif d’appui à la récolte du bois dans les forêts difficiles d’accès pour effectivement valoriser ce qui constitue, au-delà du solaire et de l’éolien, notre tout premier gisement national d’énergie renouvelable ?
M. Henri Plauche-Gillon, président de la Fédération nationale des syndicats de propriétaires forestiers et sylviculteurs, relevant que l’examen du projet de budget pour 2009, en première lecture à l’Assemblée nationale, avait débouché sur la suppression de 2 millions d’euros de crédits, destinés à être redéployés pour financer le plan de relance pour l’emploi, certes indispensable, vous a fait part, monsieur le ministre, de son amertume en ces termes : « La forêt – et c’est une observation que je me fais moi aussi depuis quelques années – sert régulièrement de variable d’ajustement au ministère de l’agriculture. »
C’est ainsi que, depuis quelques budgets, la forêt a dû, au dernier moment et pour satisfaire à des amendements parlementaires, sans doute justifiés, payer pour les bâtiments d’élevage, l’installation des jeunes agriculteurs, voire la lutte contre la fièvre catarrhale, que sais-je encore !
Faudra-t-il, dès lors, nous consoler en nous raccrochant à l’idée de créer un fonds « chaleur renouvelable », qui figure dans le document intitulé « 50 mesures pour un développement des énergies renouvelables à haute qualité environnementale » ? Ce fonds, d’après ce document officiel du ministère de l’environnement, est sous-tendu par une haute ambition puisqu’« il s’interfacera naturellement avec les outils mis en place pour faciliter la mobilisation de la ressource forestière ».
C’est un peu obscur, c’est sans doute un peu idéal, mais nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour faire pénétrer dans cette obscurité un peu de lumière, et dans cet idéal un peu de réalité !