… et constitueraient donc des réservoirs de virus.
Par ailleurs, la complexité épidémiologique ne permet pas aujourd’hui d’envisager la disparition de la maladie : vingt-quatre sérotypes du virus de la fièvre catarrhale ovine sont connus, et à chacun d’eux correspond un vaccin.
Aujourd’hui, en France, sont apparus les sérotypes 1 et 8. Il est raisonnable de penser que d’autres se manifesteront, comme c’est d'ailleurs le cas en ce moment du sérotype 6. Or dès qu’un sérotype nouveau apparaît, le vaccin qui lui correspond doit être fabriqué et administré aux sujets susceptibles d’être infectés.
Si l’on considère que, sur les vingt-quatre sérotypes, deux pourraient apparaître tous les ans, il nous faudra douze années pour faire disparaître définitivement la maladie, et c’est là l’une des grandes difficultés auxquelles nous sommes confrontés. La vaccination, en quelque sorte, court derrière les nouveaux sérotypes, lesquels ne manqueront pas de se manifester.
De surcroît, en ce qui concerne la dissémination de la maladie, on imaginait qu’il n’existait qu’un seul vecteur, un moucheron, le culicoïde. Désormais, on estime que de très nombreux insectes ou acariens seraient vecteurs de cette maladie, dont ils assurent la propagation.
Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, la vaccination pourrait montrer ses limites, même si je n’ignore pas que, pour le moment, nous ne disposons guère d’autres solutions.
Comme vous vous en doutez, mes chers collègues, il ne s’agit pas là de considérations personnelles : j’ai recueilli les avis d’éminents spécialistes. En particulier, le professeur François Schelcher, spécialiste de pathologie bovine à l’école vétérinaire de Toulouse, qui fut mon camarade d’études, a confirmé la justesse de mes observations. Il m’a cité l’exemple de l’Espagne, qui a tenté d’éradiquer la maladie par la vaccination et qui constate aujourd'hui les limites de cette politique.
D’autres logiques pourraient donc être suivies, surtout pour les élevages de bovins allaitants.
Tout d'abord, une autre logique médicale : en cas d’épidémie incontrôlable par la vaccination, il faut envisager la quarantaine.
Ensuite, une autre logique économique, complémentaire et conforme aux nécessités de la précédente : elle consiste à maintenir les animaux sur place.
Or, aujourd’hui, les éleveurs des zones défavorisées produisent des broutards maigres, qu’ils déplacent ensuite pour les faire engraisser hors des territoires où ils sont nés.
Cette pratique, outre qu’elle cantonne ces éleveurs dans un système de production d’une matière première – les broutards – qu’ils ne valorisent pas jusqu’au bout, favorise la circulation des bovins et certainement celle du virus, donc la propagation de celui-ci.
De plus, pour parer aux conséquences de cette circulation, particulièrement en cas de crise sanitaire, toute une réglementation et le contrôle qui en relève se mettent en place. La contrainte qui s’y attache nuit gravement à l’activité économique et à la rentabilité des élevages.
Cette circulation est-elle inévitable ? C’est certainement l’une des questions que l’on doit se poser.
Aussi, ne serait-il pas plus efficace, en complément de la vaccination, de favoriser une politique volontariste d’engraissement des animaux sur le lieu même de leur naissance, grâce à des aides ciblées et adaptées ?
Dans le même temps, cela supprimerait un facteur de propagation de toutes ces épidémies à répétition.
Médicalement, cette politique satisferait au principe de la quarantaine, qui, bien que très ancien, reste pertinent. Économiquement, elle permettrait aux éleveurs d’accomplir la totalité du cycle de production en « finissant » leurs animaux sur place. Elle stimulerait le développement de filières locales, abattoirs et entreprises de transformation.
Ne s’agirait-il pas d’une réponse médicale et économique plus appropriée ? Je vous pose la question, monsieur le ministre. Nous nous soucions tous de préparer l’avenir, cet avenir auquel je m’intéresse beaucoup, car c’est là que je compte passer les prochaines années !