Le 8 juillet dernier, depuis l'hôpital de Montpellier, nous est parvenue la triste nouvelle de la disparition de Marcel Vidal, à l'âge de 66 ans. Selon la métaphore en usage, notre collègue a succombé à « une longue maladie ».
Son dernier combat, Marcel Vidal l'a mené comme il a conduit sa vie, avec lucidité, courage et dignité. Le mal qui le frappait a eu raison des forces d'un homme qui, malgré la souffrance, fréquentait encore notre palais quelques semaines avant sa disparition.
Le décès de Marcel Vidal a profondément ému ceux qui l'ont connu et apprécié, comme moi-même, comme ceux qui ont partagé ses ambitions, ses engagements et ses combats.
Marcel Vidal appartenait à cette catégorie d'hommes pour qui la vie publique fut en quelque sorte une vocation, un sacerdoce Elle fut, pour ce qui le concerne, une vocation précoce.
Né le 7 mars 1940 à Montpellier, il devait embrasser une carrière de cadre au Crédit agricole. Cette orientation initiale ne répondait cependant pas totalement à son ambition de servir ses concitoyens dans tous les domaines de la vie publique.
Très tôt, il obtient son premier mandat, à Nébian, où il avait ses attaches familiales, et dont il devient maire à peine âgé de 25 ans.
En 1967, c'est au conseil général que Marcel Vidal est élu, dans le canton de Clermont-l'Hérault.
En 1971, il devient, à la faveur des municipales, maire du chef-lieu de canton. Ce mandat municipal, auquel il attachait un prix tout particulier, Marcel Vidal allait l'exercer trente ans durant.
Il allait, à force d'imagination, de créativité, de détermination, conférer à sa ville un développement exceptionnel qui lui valut des hommages reconnaissants en provenance des horizons les plus divers. Après quinze ans de vie locale, l'élu confirmé et expérimenté qu'il était fait son entrée au Sénat. Marcel Vidal est alors âgé d'à peine 40 ans.
Aussitôt, notre collègue s'inscrit à la commission des affaires culturelles. Il devait rester fidèle à cette commission durant les vingt-six années où il siégea dans ce palais. En faisant ce choix, Marcel Vidal mettait en accord sa sensibilité aux questions culturelles, au sens le plus large, avec son engagement parlementaire.
Viticulteur de tradition, Marcel Vidal était un homme de culture.
Pianiste accompli, connaisseur du monde artistique, à l'éveil de la création contemporaine, mais soucieux de la protection et de la promotion du patrimoine, Marcel Vidal a marqué durablement la vie culturelle de sa région en y apportant le souffle d'un homme authentiquement attaché au développement culturel en milieu rural.
Très tôt, il représente notre Assemblée au conseil d'orientation du Centre Pompidou, qu'il présida entre 1998 et 2002, avant d'en devenir, après sa réforme, vice-président du conseil d'administration. À la commission des affaires culturelles, Marcel Vidal se distinguera par ses interventions en faveur de la promotion du théâtre, de la musique vivante et du cinéma, dont il était le rapporteur autorisé, écouté et visionnaire.
Mais Marcel Vidal n'était pas l'homme d'un seul tropisme. Élu issu du terroir, l'agriculture, l'aménagement du territoire, le développement et la protection de l'environnement, la forêt étaient aussi régulièrement au coeur de ses préoccupations et de son action.
En 1983, notre collègue M. Pierre Mauroy, alors chef du Gouvernement, le charge d'une mission auprès de Gaston Deferre, à l'époque ministre de l'intérieur, sur la lutte contre l'incendie et la protection des forêts méditerranéennes. Les propositions qu'il fera constitueront la base de nos actuels services départementaux d'incendie et de secours, les SDIS.
De même, Marcel Vidal mettra beaucoup de temps et d'énergie à promouvoir l'huile d'olive de qualité. D'aucuns disent qu'il la fit entrer au restaurant du Sénat. Marcel Vidal présidait avec compétence et dynamisme la section d'oléiculture du groupe sénatorial d'études sur l'économie agricole alimentaire.
Mais son champ d'action ne se limitait pas à ses interventions nombreuses sur cet aspect de la vie de sa région.
Fondateur du syndicat intercommunal d'aménagement touristique du Salagou, il allait le présider durant un quart de siècle, de 1976 à 2001. C'est ainsi qu'il avait obtenu, après de patientes démarches et une politique active de mise en valeur du lac, son classement au titre des sites naturels. C'est ce qui lui avait valu, entre autres responsabilités extraparlementaires, d'être désigné par le Sénat pour siéger à la commission supérieure des sites, perspectives et paysages.
Toujours guidé par l'action et la promotion de sa chère région, Marcel Vidal avait aussi oeuvré pour la sauvegarde du cinéma de sa ville, la réouverture du théâtre municipal, la création d'une école de musique, le maintien du lycée un temps menacé, ou le développement du stade municipal. Tous ces équipements sont ceux qui scandent la vie d'une cité, qui impulsent une dynamique culturelle et citoyenne, une humanité quotidienne. Marcel Vidal a su les mettre en place, les porter, les développer, avec la courtoise efficacité que nous lui connaissions.
Dans ce qui devait être sa dernière intervention au Sénat, le 12 avril dernier, Marcel Vidal prit part au débat suscité par la question orale posée par notre collègue M. Gérard César sur l'avenir de la viticulture. Il aimait à souligner combien le vin participait de la culture occidentale et à marquer que les enjeux autour de sa production et de sa consommation n'avaient jamais été aussi déterminants. C'est sur ce thème, - comme par un retour symbolique et prémonitoire à ses origines -, que Marcel Vidal avait pris congé de nous. Le vin, qui est symbole de vie dans certains rituels religieux de notre continent, fut en quelque sorte, pour nous tous, son ultime message.
Cet homme aux racines locales profondes restera dans nos mémoires pour sa droiture, son humilité, son ambition pour sa ville, son territoire et son pays.
Il fera référence pour les élus de la Nation par la force de ses engagements, la qualité de ses interventions et son attention aux autres.
À son épouse et à ses filles, à toute sa famille et à ses proches, j'exprime la sympathie émue de notre Assemblée et les assure de la part personnelle que nous prenons à leur chagrin.
Aux membres du groupe socialiste et à ses collègues de la commission des affaires culturelles, j'exprime notre compassion et nos sincères condoléances.
Merci, Marcel Vidal, pour ce que vous avez été. Le Sénat restera fidèle, j'en suis sûr, à votre souvenir.