Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il était temps de poser les prémisses d'une nouvelle gouvernance en matière de finances. Le présent projet de loi de finances pour 2008 marque une étape décisive puisque les propositions formulées au cours de ces derniers mois, qui visent à introduire de nouvelles règles dans les relations financières entre l'État et les collectivités, y trouvent un début de traduction.
Je pense bien évidemment à la conclusion d'un nouveau pacte entre l'État et les collectivités territoriales. Ainsi, dorénavant, le contrat de stabilité, qui remplace le contrat de croissance et de solidarité en vigueur depuis 1999, va modifier le calcul des dotations en l'indexant uniquement sur l'inflation, norme de progression fixée pour l'ensemble des dépenses de l'État. Ai-je besoin de rappeler qu'en vingt-cinq ans la dette financière de l'État a triplé, passant du cinquième aux deux tiers de notre production nationale ? Ce fait que, de budget en budget, on a voulu ignorer nous contraint aujourd'hui à réduire énergiquement nos dépenses.
Les collectivités, comme tout un chacun, en sont conscientes et se préparent à participer à l'effort global de maîtrise des dépenses publiques.
Je m'interroge tout de même sur le dispositif qu'il faut mettre en oeuvre pour instaurer cette stabilité alors même que les dépenses des collectivités augmentent plus vite que l'inflation. Pour ne prendre que le seul exemple des communes, l'accroissement de leurs dépenses est en moyenne supérieur de deux points à l'inflation.
Je tenais, à cet égard, à donner acte au Gouvernement d'avoir su préserver pour l'année 2008 l'évolution de la dotation globale de fonctionnement. Elle sera, comme les années précédentes, indexée sur l'inflation majorée de 50 % de la croissance du PIB.
Il a été institué de fait une sorte de période transitoire qui va « donner du temps au temps » et permettre aux collectivités de s'adapter. Il est en effet très difficile pour les élus locaux de passer brusquement d'un taux de progression à un autre et d'ajuster, en moins de trois mois, les dépenses prévues pour l'année suivante.
Lors du débat d'orientation budgétaire en juillet dernier - vous étiez présent, monsieur le ministre -, j'avais souligné, comme nombre de mes collègues, l'inquiétude des élus à ce sujet. Je suis satisfait, ce soir, de voir que vous en avez tenu compte.
Ces nouvelles donnes de croissance de l'enveloppe normée, plus contraignantes pour les collectivités, doivent aller de pair avec une prise en compte plus systématique et plus approfondie des besoins des élus locaux. Ainsi, en contrepartie du contrat de stabilité, le Gouvernement affiche la volonté d'établir un véritable partenariat de confiance entre l'État et les collectivités afin de les associer aux décisions qui les concernent. Cela me semble être le coeur de « la nouvelle gouvernance » recherchée.
J'espère donc, monsieur le ministre, que la Conférence nationale des exécutifs, qui a été mise en place le 4 octobre dernier à cet effet, sera une véritable instance de discussion et de concertation, et non une simple structure d'enregistrement.
Je voudrais d'ores et déjà saluer la décision prise de créer, au sein du Comité des finances locales, une commission consultative sur l'évolution des normes, laquelle serait chargée de rendre un avis sur les projets de textes réglementaires et de faire une étude d'impact sur les compétences ou les finances des collectivités. C'est, à mon sens, une bonne chose, car il n'est pas de bonne pratique de placer les élus locaux devant le fait accompli, comme cela est le cas depuis de nombreuses années. Cela pose une véritable question de démocratie locale, notamment en ce qui concerne le droit des collectivités de lever l'impôt.
Nous le savons tous, l'une des sources des dépenses supplémentaires, le plus souvent méconnue d'ailleurs, naît de la surabondance de réglementations qui, sous des prétextes sécuritaires ou environnementaux, ont considérablement chargé la barque des collectivités.
À titre d'exemple, je citerai le coût pour les petites communes rurales de la mise en oeuvre des dispositions relatives au contrôle sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine, sans parler du coût prohibitif des investissements pour la lutte contre les incendies.
Avec ce nouveau pacte, semble donc bien s'amorcer une réforme plus globale de la fiscalité locale. Mais cela arrive à un moment, vous le savez bien, monsieur le ministre, où nos concitoyens sont coincés entre la baisse de leur pouvoir d'achat et leur désir légitime de faire profiter leur famille, leurs enfants, de l'accès à la consommation qui leur est proposé par les médias à longueur de journée.
C'est donc vers les collectivités que nos concitoyens se tournent pour trouver, bien sûr gratuitement, toujours plus de services, de distractions, de solidarité. Voilà la réalité que les maires côtoient tous les jours et à laquelle nous allons devoir faire face.
Le souci d'apporter à nos concitoyens les meilleures conditions d'existence afin qu'ils ne désertent pas nos communes fait que le système actuel est à bout de souffle. Dans l'urgence, on doit donc réformer les quatre vieilles, répartir autrement les dotations, introduire plus de péréquation. Tout le monde s'accorde sur ces orientations : améliorer l'autonomie financière des collectivités et satisfaire aux exigences de clarté et de lisibilité.
Monsieur le ministre, n'oublions pas que les collectivités sont les premiers investisseurs et qu'elles font vivre des milliers d'entreprises et des millions de travailleurs : 90 % des dépenses d'équipements sportifs sont financées par les collectivités. Il faut donc être attentif aux conséquences qu'auraient des mesures engagées sans préparation, sans concertation et surtout sans étude d'impact sur le développement économique de nos territoires. Veillons à ne pas casser le dynamisme des collectivités, car les effets qui en résulteraient seraient désastreux pour le pouvoir d'achat des Français.
Certes, la péréquation existe. Au travers de la DGF, elle est d'ailleurs le meilleur outil de réduction des inégalités de richesse entre les collectivités. Les masses financières consacrées à la péréquation ont connu une progression importante depuis 2002 et les différentes réformes menées entre 2004 et 2006, ainsi que le choix du Comité des finances locales, ont permis à la part de l'enveloppe consacrée à la péréquation de croître en volume de plus de 31 % de 2004 à 2007.
Pour autant, - et nous avons été nombreux à le dire ce soir - une politique volontariste ne suffit pas. Force est de constater que le système actuel de péréquation est trop timide. D'énormes disparités et inégalités entre les collectivités existent. L'écart de potentiel fiscal par habitant entre les communes va de un à l'infini, ce qui pose la question de l'égalité du citoyen devant le service public délégué aux collectivités.
Mes chers collègues, disons les choses : une péréquation juste doit être inégalitaire.