Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits du programme « Vie politique, cultuelle et associative », que je suis chargé de vous présenter, sont en forte augmentation, de près de 230 %, en raison de la préparation des élections présidentielle et législatives de l’an prochain.
Sans entrer dans le détail des chiffres, compte tenu du peu de temps dont je dispose, j’aborderai deux questions.
En ce qui concerne tout d’abord la lutte contre les dérives sectaires, des moyens sont mobilisés au travers de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, la MIVILUDES, et d’une cellule d’assistance et d’intervention en matière de dérives sectaires, la CAIMADES. Les moyens de cette dernière baissent régulièrement, hélas ! depuis sa création en 2009. Alors qu’elle comptait à l’origine sept policiers et gendarmes, son personnel se réduit aujourd’hui à quatre policiers. La commission des lois dénonce unanimement cette évolution et souhaite voir rétablis les effectifs de la CAIMADES à leur niveau antérieur.
S’agissant ensuite du contrôle du financement des partis politiques, et plus précisément des campagnes électorales, les crédits mobilisés sont importants et la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques considère qu’elle a aujourd’hui les moyens d’assurer ses missions.
Néanmoins, sur le plan législatif, le fait que treize lois encadrant le financement de la vie politique aient été votées depuis 1988 montre que nous avons du mal à stabiliser la réglementation du financement des partis politiques et des campagnes électorales.
De nombreuses insuffisances sont toujours constatées. Je pense, par exemple, au fonctionnement des micro-partis ou au fait que les dons versés par une même personne à différents partis ne font pas l’objet d’un plafonnement global. De tels dons multiples ne sont pas choquants en eux-mêmes, mais est-il logique que le donateur puisse bénéficier à chaque fois d’une réduction d’impôt et que la collectivité nationale encourage ainsi cette pratique ? Cela me semble discutable.
Je souhaite insister plus spécifiquement sur le développement de pratiques dont la presse s’est fait l’écho et qui attestent que les règles s’appliquant au financement des campagnes électorales ne sont pas aussi bien respectées qu’on pourrait le souhaiter.
Très récemment encore, un ancien membre du Conseil constitutionnel a fait état de dépassements des plafonds prévus pour les dépenses de campagne électorale par différents candidats sans que le Conseil constitutionnel ait jugé opportun, à l’époque, de prononcer des sanctions. La justice, pour sa part, a considéré que ces faits étaient prescrits. Je pense que notre assemblée, en particulier sa commission des lois, devrait se pencher sur ces dérives et sur les infractions à la réglementation du financement des campagnes électorales, qui pour l’heure ne peuvent pas être sanctionnées de manière satisfaisante.
Je souhaiterais tout particulièrement mettre l’accent sur le cas où un Président de la République en exercice serait candidat à sa réélection… §Nous n’avons pas les moyens, à l’heure actuelle, de vérifier si certaines dépenses sont bien engagées au titre de l’action républicaine qu’il lui incombe de mener en tant que chef de l’État, et non en vue de l’élection présidentielle. Notre seul recours est de saisir la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques, ce qui a été fait récemment.
Cependant, la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques peut parfaitement rejeter cette demande ou y apporter une réponse contestable. Il ne resterait alors au citoyen simplement désireux de s’informer qu’à se tourner vers le Conseil d’État, qui se déclarerait incompétent, puisqu’il ne lui appartient pas de traiter les contentieux portant sur une future élection présidentielle.
Il faudrait donc attendre que le Conseil constitutionnel soit saisi d’éventuels abus manifestes, mais ce dernier doit proclamer les résultats d’une élection présidentielle dans les dix jours qui suivent celle-ci, tandis que la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques a un mois pour se prononcer sur la validité des comptes… Par conséquent, un éventuel abus manifeste dans l’utilisation des deniers publics ne pourrait être convenablement sanctionné. Cette situation n’est pas satisfaisante !
Monsieur le ministre, je souhaiterais donc que, dans l’esprit républicain que vous manifestez depuis tout à l’heure, vous nous aidiez à trouver une solution. L’actuel Président de la République ne pourrait-il par exemple s’engager à publier un état détaillé des dépenses liées à ses déplacements effectués entre le 1er juin dernier, date d’ouverture des comptes de campagnes, et l’élection présidentielle ? Cela permettrait de faire progresser la transparence. Je ne doute pas, monsieur le ministre, que vous serez attentif à cette proposition.
Pour les raisons que j’ai indiquées, et aussi parce que le Gouvernement a jugé utile de diminuer la part du financement public des dépenses de campagnes électorales sans modifier le plafond de celles-ci, ce qui revient à avantager les candidats disposant de ressources privées ou à encourager les dépassements, la commission des lois a émis un avis défavorable sur les crédits qui nous sont présentés.