Ce désaveu cinglant vous oblige à revoir votre copie, ou plutôt ce qui n’était sans doute qu’un brouillon !
Monsieur le ministre, votre prétendu réalisme budgétaire a une limite, la loi, comme vient de le rappeler le Conseil d’État.
La commission de la culture est convaincue que, même dans un contexte budgétaire difficile, des moyens peuvent être mobilisés pour mener une autre politique, avec des priorités éducatives affirmées plutôt que des priorités financières présentées comme incontournables.
Par ailleurs, sur l’ensemble des crédits d’heures supplémentaires, 320 millions d’euros sont consacrés aux seules exonérations de cotisations sociales résultant de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA ». En revanche, moins de 130 millions d’euros doivent financer environ 30 000 emplois vie scolaire, ou EVS. Or ces derniers s’adressent surtout à des personnes éloignées de l’emploi, dont ils visent à permettre la réinsertion. Par conséquent, restreindre le contingent d’EVS ne peut qu’alourdir le nombre de chômeurs. De plus, parmi les EVS, ceux qui servent d’assistants aux directeurs d’école afin de les décharger de tâches administratives sont les plus touchés par les non-renouvellements. Il apparaît donc que les choix financiers du Gouvernement s’opposent directement à la politique de l’emploi et à l’accompagnement des élèves, deux actions pourtant plus que prioritaires.
La construction du présent budget privilégie décidément l’optimisation de la gestion et confond performance financière et performance éducative. Si le projet de loi de finances pour 2012 est voté en l’état, en cinq ans, 68 000 postes d’enseignant auront été supprimés, dont 28 000 dans l’enseignement primaire public.
Le constat est très net : la préscolarisation des enfants âgés de moins de trois ans est en voie d’extinction ; elle concerne seulement 5 % des effectifs en Seine-Saint-Denis. Les effectifs des classes augmentent à chaque rentrée : demain, 32, 33 ou 35 enfants par classe sera peut-être la norme. Année après année, les postes dans les RASED disparaissent.
La commission de la culture s’interroge sur l’articulation entre les recteurs et l’administration centrale, qui paraît très imparfaite. De l’aveu même des services de l’éducation nationale, elle ne permet pas « une identification précise, pour chaque levier d’efficience et pour chaque académie », de l’incidence de telle ou telle mesure. Comment peut-on alors prétendre améliorer la gestion d’année en année ?
Nous sommes obligés de constater que les résultats des évaluations sont défavorables, que les inégalités sociales se traduisent en inégalités scolaires et que les inégalités territoriales portent atteinte à l’ambition d’équité de notre école publique. Le pilotage territorial de certaines mesures paraît nettement insuffisant.
Il faut noter que les élus locaux ne sont consultés à aucun moment lors de la construction de ce budget. Tous leurs représentants se sont plaints de ne pas être traités comme des partenaires à part entière par le ministère. Pourtant, leur implication en faveur de l’école est totale et leurs contributions ne cessent de s’accroître au fur et à mesure du désengagement de l’État.
Enfin, s’agissant de la médecine scolaire, la Cour des comptes a récemment évoqué l’existence de déserts médico-scolaires. Pourquoi un tel échec ? Nous le savons : il est dû à des rémunérations trop faibles, à un statut trop rigide et à l’absence de perspectives de carrière valorisantes.
Monsieur le ministre, il est urgent de réagir et, comme le préconise le Conseil d’État au travers de sa récente décision, de reprendre le dialogue avec l’ensemble des acteurs concernés.
En conclusion, en l’absence d’une réelle politique éducative ambitieuse pour tous, étant donné le manque de lisibilité de la gestion administrative et l’abandon de la formation initiale et continue des enseignants, la commission de la culture et de l’éducation émet un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».