Séance en hémicycle du 1er décembre 2011 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • enseignant
  • lycée
  • l’enseignement
  • l’école
  • l’éducation

La séance

Source

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen :

- du projet de loi autorisant l’approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Panama en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu, déposé ce jour sur le bureau de l’Assemblée nationale ;

- du projet de loi autorisant la ratification de l’accord de passation conjointe de marché en vue de la désignation par adjudication de plates-formes d’enchères communes et du projet de loi autorisant la ratification de l’accord de passation conjointe de marché en vue de la désignation par adjudication d’une instance de surveillance des enchères, déposés ce jour sur le bureau de notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010, relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, et en application de l’article R. 131-6 du code de l’environnement, M. le Premier ministre, par lettre en date du 30 novembre 2011, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l’avis de la commission du Sénat compétente en matière d’environnement sur le projet de nomination de M. François Loos à la présidence du conseil d’administration de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME).

Cette demande d’avis a été transmise à la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire » (et articles 51 septies et 51 octies).

La parole est à M. Claude Haut, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de rappeler l’importance de la mission « Enseignement scolaire » dans le budget de l’État : ses crédits s’élèvent à 62, 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, ce qui correspond à un plafond de 981 206 emplois rémunérés par le ministère de l’éducation nationale.

Notre ancien collègue Gérard Longuet était, l’année dernière, rapporteur spécial des crédits de cette mission. Il avait alors déjà souligné des déficiences dans la gestion du ministère de l’éducation nationale. Ses observations sont, hélas, toujours d’actualité.

Elles portaient notamment sur quatre points, que je vais rappeler.

En premier lieu, concernant l’enseignement technique agricole, M. Longuet avait relevé, le 17 novembre 2010, lors de l’examen en commission des finances des crédits de la mission inscrits dans le projet de loi de finances pour 2011, que la contraction des emplois, « eu égard à la taille des établissements comme à leur répartition sur l’ensemble du territoire, conduit à des fermetures de classes ou de sites scolaires. […] Nous avons donc un vrai sujet quant à l’application de la diminution des effectifs dans l’enseignement technique agricole. »

En deuxième lieu, s’agissant des corrections techniques du plafond d’emplois du ministère de l’éducation nationale, à hauteur – excusez du peu ! – de 20 359 équivalents temps plein travaillé, M. Longuet indiquait que « le ministère de l’éducation nationale […] semble manifestement fâché avec la comptabilité. […] Contrairement aux années précédentes, le schéma d’emplois n’est pas justifié au niveau national mais est renvoyé à la responsabilité des académies. » Or, aujourd’hui encore, plus d’un an après l’engagement de la réforme, nous ne savons toujours pas comment les suppressions d’emplois ont été réparties entre les académies ! Monsieur le ministre, peut-être pourrez-vous apporter des réponses aux inquiétudes à ce sujet des enseignants, des parents et, bien sûr, des élèves ?

En troisième lieu, en ce qui concerne les suppressions d’emplois, M. Longuet observait qu’il conviendrait « sans doute d’interroger le ministre sur la soutenabilité à moyen terme » d’une telle politique. La question peut être reposée cette année !

En quatrième lieu, M. Longuet relevait que les plafonds d’emplois en exécution ne correspondent toujours pas aux prévisions de la loi de finances, le Gouvernement ne sachant procéder à temps à la « régularisation du désajustement constaté entre recrutements et départs ». En d’autres termes, le ministère de l’éducation nationale ne parvient pas à anticiper correctement les décisions de ses agents en matière de départ à la retraite, ni à ajuster en conséquence le nombre de postes offerts aux différents concours.

Par ailleurs, dans son rapport d’information du 21 juin dernier fait au nom de la mission commune d’information sur l’organisation territoriale du système scolaire et sur l’évaluation des expérimentations locales en matière d’éducation, notre collègue Jean-Claude Carle remarquait que les suppressions de postes donnaient « une certaine prime à la facilité ».

En dépit de toutes ces observations, le présent projet loi de finances poursuit la politique de suppression de postes, à hauteur, en 2012 et à périmètre constant, de 15 640 ETPT, ce nombre traduisant l’effet en année pleine des suppressions de postes de la rentrée 2011 et 14 000 nouvelles suppressions d’emploi prévues à la rentrée 2012. L’économie correspondante s’élève à 467 millions d’euros, soit l’équivalent de la non-revalorisation de 1 % du point d’indice de la fonction publique pour les personnels de l’éducation nationale.

Entre la loi de finances initiale pour 2008 et le présent projet de loi de finances pour 2012, 70 600 postes ont été supprimés dans l’éducation nationale, dont 68 000 postes d’enseignant et 2 600 postes dans le secteur administratif.

Pour les rapporteurs spéciaux, le rétablissement d’un grand nombre des postes d’enseignant supprimés depuis 2007 doit constituer une priorité, si l’on veut redonner au service public de l’éducation les moyens de ses ambitions.

En outre, la répartition des suppressions de postes entre le public et le privé ne nous paraît pas équitable. En effet, l’enseignement privé subit moins de 10 % des suppressions de postes, alors qu’il est d’usage de respecter un prorata de 20 % entre les créations ou les suppressions de postes dans l’enseignement privé et celles qui concernent l’enseignement public.

S’agissant toujours des effectifs, le nombre de professeurs contractuels n’est toujours pas connu avec précision ; nous savons seulement que, entre le 31 décembre 2005 et le 31 décembre 2010, il a augmenté de 76 %. Ces informations doivent bien sûr être rendues publiques, c’est la raison pour laquelle la commission des finances présentera un amendement tendant à prévoir la remise d’un rapport sur cette question au Parlement.

Les dépenses relatives aux heures supplémentaires constituent une dernière variable d’ajustement des emplois de l’éducation nationale. Celles-ci s’élèvent à 1, 31 milliard d’euros pour l’année scolaire 2010-2011, soit une hausse de 3, 1 % par rapport à l’année scolaire précédente. Ces sommes équivalent à la rémunération de 40 000 ETPT, ce qui est beaucoup, même si, bien entendu, toutes ces heures supplémentaires ne correspondent pas des heures d’enseignement. En tout état de cause, il faut y regarder de plus près.

Nous sommes confrontés à une question majeure : quelle école voulons-nous pour nos enfants ? Quels sont les moyens à la hauteur des enjeux ? À cet égard, en dehors de la dépense d’éducation par élève ou par établissement, qui est légèrement supérieure à la moyenne dans notre pays, les comparaisons internationales fournies par l’OCDE ne sont pas toujours flatteuses pour nous : les classes françaises comptent un nombre d’élèves plus élevé que celles des autres pays industrialisés, et le taux d’encadrement est en France inférieur à la moyenne des autres États de l’OCDE.

Pour justifier la suppression de postes d’enseignant, le Gouvernement avance des arguments démographiques : à moyen terme, le nombre d’élèves diminuerait, tandis que le nombre d’enseignants augmenterait. Le Gouvernement retient pour son calcul une période de vingt ans, allant de la rentrée scolaire 1990-1991 à la rentrée scolaire 2010-2011.

Ces chiffres sont, pour le moins, extrêmement contestables, puisqu’ils dépendent largement de la période retenue. En effet, depuis le début des années 2000, le nombre d’élèves scolarisés dans l’enseignement public du premier degré a augmenté, ce que ne font pas apparaître les modalités de calcul retenues par le Gouvernement, qui tendent à masquer quelques évolutions observées depuis 2002.

Par ailleurs, les évolutions moyennes masquent des tendances disparates : il faudrait pouvoir défalquer la création de dispositifs spécifiques d’encadrement des élèves en difficulté et/ou handicapés, dispositifs qui n’existaient généralement pas il y a vingt ans, pour apprécier avec beaucoup plus de précision l’évolution dans les autres classes.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, nous ne sommes pas convaincus par l’argument du Gouvernement selon lequel il y aurait plus d’enseignants pour moins d’élèves.

En conclusion, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de la mission « Enseignement scolaire ». §

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai mon intervention en citant un extrait de l’article L. 111-1 du code de l’éducation : « Le droit à l’éducation est garanti à chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, d’élever son niveau de formation initiale et continue, de s’insérer dans la vie sociale et professionnelle, d’exercer sa citoyenneté. »

Aujourd'hui, ce droit à l’éducation ainsi défini est remis en cause, après cinq années de mise en œuvre d’une politique de restriction budgétaire et de déconstruction du service public de l’éducation. D'ailleurs, le projet de budget pour 2012 consacre un peu plus encore l’amoindrissement et la dénaturation de ce dernier.

À cet égard, je partage le constat formulé par notre collègue Claude Haut selon lequel les effectifs des personnels du ministère de l’éducation nationale rémunérés sur d’autres crédits que ceux du titre 2 sont également en baisse. Les contrats aidés des personnels d’assistance éducative correspondraient à 88 688 emplois dans le projet de loi de finances pour 2012, soit une diminution de 3 500 par rapport à 2011. Toutes les catégories d’emplois sont donc touchées, y compris les plus précaires.

Dans ce contexte, l’enseignement technique agricole connaît une évolution particulièrement inquiétante. En 2012, la suppression de 280 ETPT correspond à un taux de non-compensation des départs à la retraite de 68, 3 %. C’est l’un des plus élevés du budget de l’État.

Par ailleurs, aucune mesure catégorielle n’est prévue dans l’enseignement agricole à la prochaine rentrée. En son sein, l’enseignement public est particulièrement menacé. Dans la mesure où il concerne 37 % des effectifs scolarisés, l’application de la règle de la parité entre l’enseignement agricole public et l’enseignement agricole privé devrait donc conduire à ce que les suppressions de postes dans le premier représentent 37 % des suppressions de postes dans l’ensemble de l’enseignement agricole, et non 60 %, comme c’est le cas. Cette situation a justifié la création d’un comité permanent de défense et de développement de l’enseignement agricole public.

Notre collègue Claude Haut évoquait à l’instant de graves carences dans la gestion du ministère de l’éducation nationale, révélant un manque de pilotage au plus haut niveau.

Je ne prendrai qu’un seul exemple des erreurs dites « techniques » relatives au nombre d’emplois corrigées dans le présent projet de loi de finances : pour les emplois des opérateurs, ces erreurs portent sur 824 ETP, soit un sixième de l’emploi total en leur sein.

À défaut de revaloriser l’ensemble de ses fonctionnaires, le ministère de l’éducation nationale privilégie l’adoption de mesures nouvelles. Ainsi, 165, 4 millions d’euros sont inscrits dans le projet de loi de finances pour 2012 au titre de mesures de cet ordre, mais aucune précision n’est apportée quant à leur contenu, à leurs bénéficiaires ou aux politiques qu’elles sont censées contribuer à mettre en œuvre. On demande donc au Parlement d’accorder un blanc-seing au Gouvernement…

La politique sociale du ministère de l’éducation nationale n’est pas plus satisfaisante. Le montant alloué aux bourses, soit 570, 6 millions d’euros, est en diminution de 6, 8 %. La dotation des fonds sociaux, accordés par les chefs d’établissement aux familles les plus en difficulté, accuse un recul de 4, 4 %. En outre, aucun objectif ni indicateur de performance ne permet de mesurer l’efficacité de ces crédits d’action sociale.

L’allocation de rentrée scolaire, l’ARS, versée sous conditions de ressources, aurait profité à 4, 6 millions d’enfants à la rentrée 2011. Certes, les montants de cette allocation ont été revalorisés de 1, 5 % pour cette même rentrée, mais ils sont notoirement insuffisants pour les élèves des lycées professionnels et devraient être davantage modulés selon les niveaux de scolarisation. Par ailleurs, le versement de l’ARS à la fin du mois d’août paraît trop tardif. Surtout, cette augmentation ne compense pas l’explosion des frais de rentrée scolaire à laquelle sont exposées les familles, comme l’a montré l’association Familles de France.

Suppressions d’emplois, sacrifice de l’enseignement public agricole, opacité et erreurs sur le nombre de postes ou encore sur les mesures catégorielles envisagées en 2012, réduction drastique des crédits d’action sociale : le budget de l’éducation nationale proposé pour 2012 ne correspond nullement à l’effort que devrait conduire notre nation pour assurer l’égalité des chances à tous les enfants.

Les politiques menées dans le domaine de l’éducation ne sont pas davantage satisfaisantes. Que dire de la suppression de milliers de postes d’enseignant dans les réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté, les RASED ? La suspension des allocations familiales, quant à elle, s’inscrit dans une logique consistant à surveiller et punir. La réforme du lycée conduit à une désorganisation et à une remise en cause du statut.

Je veux également exprimer mes craintes quant à la scolarisation en maternelle non obligatoire et à celle des enfants âgés de deux à trois ans, si tant est qu’elle existe encore.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

En dix ans, le taux de scolarisation des enfants de moins de trois ans s’est écroulé, passant de 34, 6 % en 2000 à 13, 6 % en 2010, alors que de 700 000 à 750 000 enfants pourraient être accueillis, selon les estimations que vous avez vous-même fournies, monsieur le ministre, le jour de l’examen de la proposition de loi visant à instaurer la scolarité obligatoire à trois ans. Je rappelle que vous avez censuré cette discussion en invoquant de façon abusive l’article 40 de la Constitution.

Pourtant, vous le savez, il est reconnu que la scolarisation en maternelle joue un rôle fondamental et contribue à la réussite du parcours scolaire. Or vous la réduisez à une variable d’ajustement budgétaire.

Enfin, la commission des finances est extrêmement attachée à une revalorisation du métier d’enseignant, au-delà de la problématique financière. Je pourrais évoquer le développement de l’emploi précaire, la diminution du nombre de candidats aux concours de l’enseignement, soulignée lors de la table ronde que Claude Haut et moi-même avons organisée le 11 octobre dernier avec des syndicats d’enseignants et des associations de parents d’élèves, ou encore les déclarations, de plus en plus fréquentes, de jeunes enseignants affirmant envisager de changer de métier au cours de leur carrière, avant même d’avoir commencé à exercer…

Ce sont autant de signes d’une certaine désaffection pour le métier d’enseignant, qui appellent à une association plus étroite des personnels à la politique éducative autour d’objectifs partagés.

Nous pouvons, nous devons assurer aux enseignants des conditions de travail qui leur redonnent à tous l’envie d’exercer le plus beau métier du monde, porteur des espoirs de notre jeunesse et de l’avenir de notre nation.

Vous comprendrez, monsieur le ministre, mes chers collègues, que la commission des finances, confrontée à ce constat, mais aussi animée par l’espoir d’une autre politique qui mette l’humain au centre des préoccupations, propose au Sénat de rejeter les crédits de la mission « Enseignement scolaire », d’adopter, avec modification, l’article 51 septies, d’adopter, sans modification, l’article 51 octies et d’adopter un amendement portant article additionnel après l’article 51 octies.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste -EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Françoise Cartron, rapporteure pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’examen du projet de loi de finances pour 2012, il apparaît que l’éducation nationale est dotée d’un budget d’environ 62 milliards d’euros, en progression de 0, 86 % par rapport à l’an passé, ce qui porte à 6 % son augmentation sur l’ensemble de la législature.

Néanmoins, ne nous y trompons pas : il s’agit en fait d’une baisse de crédits, puisque, sur cette même période, l’inflation n’est même pas compensée.

En outre, cette prétendue augmentation de crédits est en trompe-l’œil, car elle résulte du glissement des dépenses de personnel. Ainsi, 550 millions d’euros supplémentaires par rapport au budget de 2011 sont consacrés aux pensions et non pas à de nouveaux moyens dont bénéficieraient les élèves.

À ce propos, je note que, par le biais du projet de collectif budgétaire pour 2011, le Gouvernement, arguant de disponibilités au titre des pensions, propose le transfert de 70 millions d’euros au profit de la masse salariale de l’éducation nationale et de la justice. Cela veut-il dire que des crédits de pensions peuvent être transformés en postes ?

Ainsi, après les réintroductions d’emplois et les défaillances du logiciel Chorus l’année dernière, une nouvelle opération de replâtrage est en marche…

Dans ces conditions, trois questions se posent : quelle est la valeur réelle du plafond d’emplois de la mission « Enseignement scolaire » ? Quel degré de sincérité peut-on accorder au budget de l’éducation nationale ? Les amendements votés par le Parlement sont-ils toujours pleinement pris en compte ?

Pour les années à venir, la commission de la culture souhaite beaucoup plus de transparence et de précision, en matière à la fois de justification et d’exécution des crédits.

Concernant la masse des crédits de personnel, je souhaite souligner le niveau particulièrement important des heures supplémentaires. En effet, plus de 1, 3 milliard d’euros y est consacré, soit 10 % de plus qu’en 2008-2009. Ces crédits auraient pu être employés à d’autres fins : remise en cause de suppressions de postes de titulaire sur zone de remplacement, ou TZR, renforcement du taux d’encadrement dans l’éducation prioritaire, consolidation de l’accueil à l’école maternelle ou encore offre d’une véritable formation aux enseignants, pour faire suite, monsieur le ministre, à votre réforme ratée de la mastérisation…

À ce propos, nous apprenons avec satisfaction que le Conseil d’État vient d’annuler en partie votre arrêté du 12 mai 2010 portant sur les nouvelles modalités de formation.

Marques de satisfaction sur les travées du groupe socialiste -EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Ce désaveu cinglant vous oblige à revoir votre copie, ou plutôt ce qui n’était sans doute qu’un brouillon !

Monsieur le ministre, votre prétendu réalisme budgétaire a une limite, la loi, comme vient de le rappeler le Conseil d’État.

La commission de la culture est convaincue que, même dans un contexte budgétaire difficile, des moyens peuvent être mobilisés pour mener une autre politique, avec des priorités éducatives affirmées plutôt que des priorités financières présentées comme incontournables.

Par ailleurs, sur l’ensemble des crédits d’heures supplémentaires, 320 millions d’euros sont consacrés aux seules exonérations de cotisations sociales résultant de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA ». En revanche, moins de 130 millions d’euros doivent financer environ 30 000 emplois vie scolaire, ou EVS. Or ces derniers s’adressent surtout à des personnes éloignées de l’emploi, dont ils visent à permettre la réinsertion. Par conséquent, restreindre le contingent d’EVS ne peut qu’alourdir le nombre de chômeurs. De plus, parmi les EVS, ceux qui servent d’assistants aux directeurs d’école afin de les décharger de tâches administratives sont les plus touchés par les non-renouvellements. Il apparaît donc que les choix financiers du Gouvernement s’opposent directement à la politique de l’emploi et à l’accompagnement des élèves, deux actions pourtant plus que prioritaires.

La construction du présent budget privilégie décidément l’optimisation de la gestion et confond performance financière et performance éducative. Si le projet de loi de finances pour 2012 est voté en l’état, en cinq ans, 68 000 postes d’enseignant auront été supprimés, dont 28 000 dans l’enseignement primaire public.

Le constat est très net : la préscolarisation des enfants âgés de moins de trois ans est en voie d’extinction ; elle concerne seulement 5 % des effectifs en Seine-Saint-Denis. Les effectifs des classes augmentent à chaque rentrée : demain, 32, 33 ou 35 enfants par classe sera peut-être la norme. Année après année, les postes dans les RASED disparaissent.

La commission de la culture s’interroge sur l’articulation entre les recteurs et l’administration centrale, qui paraît très imparfaite. De l’aveu même des services de l’éducation nationale, elle ne permet pas « une identification précise, pour chaque levier d’efficience et pour chaque académie », de l’incidence de telle ou telle mesure. Comment peut-on alors prétendre améliorer la gestion d’année en année ?

Nous sommes obligés de constater que les résultats des évaluations sont défavorables, que les inégalités sociales se traduisent en inégalités scolaires et que les inégalités territoriales portent atteinte à l’ambition d’équité de notre école publique. Le pilotage territorial de certaines mesures paraît nettement insuffisant.

Il faut noter que les élus locaux ne sont consultés à aucun moment lors de la construction de ce budget. Tous leurs représentants se sont plaints de ne pas être traités comme des partenaires à part entière par le ministère. Pourtant, leur implication en faveur de l’école est totale et leurs contributions ne cessent de s’accroître au fur et à mesure du désengagement de l’État.

Enfin, s’agissant de la médecine scolaire, la Cour des comptes a récemment évoqué l’existence de déserts médico-scolaires. Pourquoi un tel échec ? Nous le savons : il est dû à des rémunérations trop faibles, à un statut trop rigide et à l’absence de perspectives de carrière valorisantes.

Monsieur le ministre, il est urgent de réagir et, comme le préconise le Conseil d’État au travers de sa récente décision, de reprendre le dialogue avec l’ensemble des acteurs concernés.

En conclusion, en l’absence d’une réelle politique éducative ambitieuse pour tous, étant donné le manque de lisibilité de la gestion administrative et l’abandon de la formation initiale et continue des enseignants, la commission de la culture et de l’éducation émet un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste -EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je sais que le ministre de l’agriculture, retenu par d’autres obligations, ne pouvait assister à notre débat de ce soir, mais je ne peux m’empêcher de regretter son absence. Cela étant, je connais son attachement à l’enseignement agricole.

Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit de consacrer à l’enseignement agricole 1, 3 milliard d’euros, soit une hausse de 1, 2 % des crédits de paiement et de 1, 7 % des autorisations d’engagement. La levée de la réserve de précaution devrait, en outre, permettre d’éviter cette année les reports de charges. L’enseignement agricole est donc plutôt bien traité. Il paie toutefois son écot à la RGPP et prend pleinement sa part aux mesures de maîtrise de la dépense publique, notamment via l’optimisation de la gestion et la réduction de 10 % de ses crédits de fonctionnement à l’horizon 2013.

L’augmentation des crédits hors titre 2 résulte de l’évolution des subventions aux établissements de l’enseignement agricole privé. Ces dotations ont en effet été relevées, afin de prendre en compte les obligations juridiques découlant de l’application du code rural. Je me félicite de la volonté affichée par le ministre de l’agriculture de respecter les protocoles d’accord de 2009, signés pour régler des problèmes récurrents de reports de charges et de contentieux. La subvention pour 2012 aux établissements privés du temps plein risque toutefois d’être insuffisante pour assurer l’accueil de 1 300 élèves supplémentaires, que n’avait pas prévu le ministère. Il conviendrait que des marges de manœuvre puissent être dégagées pour remédier à la situation.

Mes chers collègues, j’aimerais rappeler mon attachement, en tant que rapporteur pour avis de la commission de la culture, au développement équilibré de toutes les composantes de l’enseignement agricole, qu’il s’agisse du public, du privé temps plein ou du privé rythme approprié. Elles ont chacune leurs spécificités et répondent de façon diversifiée et adaptée aux besoins des élèves, des familles et des territoires.

L’analyse des crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2012 me conduit à adopter une attitude d’optimisme prudent et vigilant pour ce qui concerne l’ouverture, en février prochain, de la négociation du prochain plan triennal. Je souhaite que tout soit fait d’ici là pour garantir la qualité du dialogue social au sein de l’enseignement agricole et éviter le blocage du Conseil national de l’enseignement agricole, qui, à deux reprises, n’a pu fonctionner cet automne.

En termes d’emplois, ce projet de budget prévoit la suppression de 280 postes, uniquement d’enseignant. Après ces nouvelles suppressions, l’enseignement agricole sera parvenu à un taux de non-compensation des départs à la retraite de 45, 5 % sur trois ans. C’est donc un peu moins que la norme du « un sur deux ».

À première vue, les suppressions de postes paraissent difficilement tenables, mais elles coïncident en fait avec la fin de la rénovation de la voie professionnelle. En particulier, il faut tenir compte de la résorption du double flux d’élèves né du maintien transitoire de voies parallèles, l’une directe, l’autre via le brevet d’études professionnelles agricoles, le BEPA. En outre, la rationalisation de la carte des formations menée en collaboration avec l’éducation nationale réduira l’incidence des suppressions, qui devrait au final être plus mesurée que ce que l’on pouvait craindre. Mais il ne sera pas possible, à l’avenir, d’aller plus loin sans entraver durablement le développement de l’enseignement agricole. Tous les jeunes qui s’y destinent doivent pouvoir y trouver leur place.

En revanche, il faut souligner le bilan positif des ouvertures et des fermetures de classes. Le bilan net correspond, à la rentrée 2011, à l’ouverture de plus de 135 « équivalents classe ». Je me félicite de ce déploiement de l’offre de formation, qui répond bien à la mission d’aménagement et de revitalisation du territoire assignée à l’enseignement agricole. Saluons tout particulièrement le dynamisme de l’outre-mer, qui voit globalement s’ouvrir neuf nouvelles classes, s’ajoutant aux sept de l’an passé.

Enfin, il semble que les synergies avec le ministère de l’éducation nationale soient désormais systématiquement recherchées. C’est vrai à l’échelon central pour la définition des politiques éducatives, la mise en œuvre des réformes, les référentiels des formations et la conception des épreuves. Mais l’échelon régional est également très actif, si j’en juge par la mise en commun de locaux et l’optimisation de la carte des formations. Les échanges de services d’enseignants entre établissements de l’éducation nationale et établissements de l’enseignement agricole se développent également. Cette consolidation des coopérations entre l’éducation nationale et l’enseignement agricole s’opère dans le respect des spécificités de chacun, mais dans un esprit nouveau de coresponsabilité. Le développement de ces collaborations permettra de desserrer l’étau budgétaire, par l’optimisation des fonctionnements et des coûts.

En conséquence, à titre personnel et contrairement à la commission de la culture, je suis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UCR et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteure pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la voie professionnelle a subi depuis 2008 une refonte extrêmement brutale et profonde, qui n’a quasiment rien épargné, ni la carte des formations, ni la construction des parcours, ni les modalités pédagogiques d’enseignement.

La voie du baccalauréat professionnel en trois ans pouvait être intéressante pour les meilleurs élèves. En revanche, afin de tenir compte des plus fragiles et des risques d’accroissement du nombre des sorties du système scolaire sans qualification, j’ai toujours plaidé, en tant que rapporteure pour avis de la commission de la culture, pour le maintien en parallèle de l’ancienne voie.

Nos craintes se sont malheureusement confirmées année après année. La réforme est d’autant plus difficile à mener que les moyens consacrés aux lycées professionnels diminuent. Il faut noter l’affaiblissement particulièrement inquiétant des ressources provenant de la taxe d’apprentissage. En outre, la répartition du produit de cette taxe est très surprenante, puisque, au sein du second degré, le public reçoit à peine plus que le privé, alors que ce dernier scolarise cinq fois moins d’élèves. Par ailleurs, au sein du second degré public, les lycées généraux et technologiques reçoivent environ 5 % de son produit, contre moins de 3 % pour les lycées professionnels.

La construction du barème de la taxe et l’affectation des fonds par les organismes collecteurs désavantagent donc très nettement les élèves de l’enseignement professionnel public. Que comptez-vous faire pour y remédier, monsieur le ministre ?

Pour dresser un premier bilan de la réforme, je me suis penchée sur le suivi des élèves de seconde professionnelle. Des taux de redoublement élevés, qui s’élèvent jusqu’à 6 % dans les académies de Lille et de Versailles, soit plus que dans les anciennes sections de BEP, ont été enregistrés. Plus gravement, le nombre des sorties du système scolaire a augmenté et atteint presque 15 % d’après le rapport des inspections générales. Si cette tendance se confirme, la réforme se soldera par un accroissement sérieux des inégalités sociales et scolaires.

La certification intermédiaire et le contrôle en cours de formation regroupent une grande partie des écueils de la réforme. La progression pédagogique est perturbée, la charge d’organisation démesurée, la fiabilité des évaluations très incertaine, l’articulation avec l’accompagnement personnalisé et les périodes de formation en entreprise déficiente.

Les formations de niveau V sont graduellement déprofessionnalisées, ce dont les organisations patronales s’inquiètent d’ailleurs.

Parallèlement, la possibilité de poursuite d’études en section de technicien supérieur a été beaucoup trop mise en avant, sans qu’aucun dispositif concret d’accompagnement des bacheliers professionnels ne soit mis en place. Du point de vue tant de la capacité d’insertion sur le marché du travail que de la poursuite d’études, la réforme risque de susciter beaucoup de frustration parmi les familles et les élèves.

Ce sont bien sûr les milieux populaires et les moins favorisés qui en paieront le prix. Je rappelle que la moitié des élèves en voie professionnelle sont enfants d’ouvriers, de chômeurs ou d’inactifs, alors que ces derniers ne représentent qu’un tiers de l’effectif global du second degré.

Enfin, la mastérisation a ouvert une crise majeure du recrutement des enseignants en lycée professionnel.

J’évoquerai brièvement cette réforme, le Conseil d’État venant d’annuler partiellement l’arrêté du 12 mai 2010, qui décline notamment les modifications statutaires relatives à l’année de stage, lesquelles avaient entraîné la suppression de 16 000 postes. Dans son arrêt du 28 novembre dernier, il considère que vous étiez « incompétent », monsieur le ministre, pour abroger seul les textes antérieurs. Ce que je dénonçais ici même en avril dernier, à l’occasion d’une question orale avec débat sur la réforme de la formation des enseignants, est aujourd’hui reconnu par la plus haute juridiction administrative ! Oui, c’est un camouflet : l’arrêté du 19 décembre 2006 fixant notamment le temps de service en responsabilité des stagiaires à huit heures par semaine et imposant une formation dans les IUFM, les instituts universitaires de formation des maîtres, s’applique donc de nouveau !

Cette précipitation, les professeurs de lycée professionnel l’ont éprouvée durement : les parcours appropriés de master dans les universités ont été construits à la hâte et restent invisibles, d’où un tarissement sans précédent du vivier de candidats. Se prépare ainsi l’affaiblissement des formations dispensées dans les lycées professionnels, à cause d’un manque de titulaires bien formés et du recours massif à l’emploi précaire. Les difficultés sont accrues par les obstacles mis à la reconversion de salariés. Le MEDEF et les branches professionnelles s’en alarment déjà.

Pour conclure, j’aimerais évoquer la question de la régionalisation de l’enseignement. En effet, un possible transfert aux conseils régionaux de la compétence pour les lycées professionnels, y compris pour la gestion du personnel enseignant, a été évoqué encore récemment. À titre personnel, j’y suis résolument hostile. Les ressources financières des régions sont trop minces et leur expertise pédagogique trop faible. En outre, tout ce qui est de nature à renforcer les inégalités sociales et territoriales entre les élèves doit être combattu.

La déstabilisation actuelle de l’enseignement professionnel, qui s’ajoute aux problèmes déjà évoqués par notre collègue Françoise Cartron, explique également l’avis défavorable de la commission de la culture sur les crédits de la mission. §

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.

Je vous rappelle également qu’en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.

Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de trente minutes pour intervenir.

Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Françoise Laborde.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Laborde

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au titre du dernier exercice budgétaire de la mandature nous est présenté un budget d’un montant de quelque 62 milliards d’euros pour les cinq programmes de la mission « Enseignement scolaire ».

Selon vous, monsieur le ministre, ce chiffre traduit la priorité accordée par le Gouvernement à la réussite de chaque élève et sa volonté de garantir la qualité du système éducatif. C’est le premier budget de l’État, en effet. D’ailleurs, le Président de la République ne nous épargne pas ses effets d’annonce. Dans son intervention télévisée du 27 octobre dernier, il traçait ainsi son orientation budgétaire : « Moins d’enseignants, mieux payés, mieux formés, mieux considérés, mieux respectés. C’est la seule politique possible. »

Les lignes budgétaires que vous tentez de rendre présentables comportent des crédits en trompe-l’œil, comme l’a souligné M. le rapporteur spécial, dont je tiens à saluer le travail de grande qualité.

Permettez-moi, monsieur le ministre, de vous livrer mon interprétation de ces chiffres ; elle diverge considérablement de la vôtre.

La progression affichée de 0, 86 % des crédits ne repose que sur l’augmentation des pensions ; autant dire qu’elle n’est aucunement le reflet d’une dynamique nouvelle.

Cette année encore, les annonces en resteront au stade de l’affichage, car elles ne trouvent pas de traduction chiffrée dans le projet de loi de finances pour 2012.

Les leviers d’action que vous privilégiez ne sont pas les bons. Ainsi, je ne peux cautionner une gestion des ressources humaines qui conduit à affaiblir encore davantage notre service public d’éducation à l’école, au collège ou au lycée, au lieu d’en assurer la pérennité et la qualité.

Malheureusement, monsieur le ministre, la recherche purement comptable d’économies à court terme amène à faire l’impasse sur la qualité de l’enseignement, l’avenir de notre jeunesse et l’égalité des chances.

Le constat d’échec est patent. Les organismes indépendants qui mesurent l’efficacité de notre système scolaire sont unanimes : celui-ci creuse les inégalités sociales plutôt que de les aplanir ; un comble ! L’enquête du programme international pour le suivi des acquis des élèves, le PISA, menée auprès des jeunes de quinze ans l’a montré en 2009. Les résultats de la session qui sera réalisée en février 2012 confirmeront-ils ces aggravations ? Déjà, lors du vote du projet de loi de finances pour 2011, le groupe du RDSE dénonçait cette situation.

Pourtant, vous continuez à appliquer la logique de la révision générale des politiques publiques, en supprimant encore davantage de postes : 14 000 le seront en 2012. L’effort demandé est énorme et, de surcroît, discriminatoire, puisque seulement 1 435 postes seront supprimés dans l’enseignement privé.

Ce qui est valable à vos yeux pour les enseignants titulaires l’est aussi, et je le déplore, pour les contrats aidés. Ce n’est pas en supprimant, cette année encore, près de 8 000 emplois de vie scolaire que vous pérenniserez le bon fonctionnement des établissements scolaires publics.

Si elle n’est bien sûr pas seule à l’origine du mal-être de notre école, la gestion des ressources humaines a des conséquences tangibles sur le terrain : non-remplacement des absences, classes surchargées peu propices aux apprentissages, charge de travail accrue pour les professeurs qui enseignent l’éducation civique, les langues vivantes ou assurent des cours de soutien, absence de moyens supplémentaires pour accueillir les enfants présentant un handicap.

Dans le sud de la Haute-Garonne, parents d’élèves et enseignants se mobilisent contre le non-remplacement systématique d’un enseignant partant à la retraite sur deux.

Purement comptable, ignorant les spécificités géographiques, cette politique contraint les conseils départementaux de l’éducation nationale à fermer des classes, le plus souvent dans les zones les moins peuplées : elle est désastreuse en matière d’aménagement du territoire, particulièrement dans un grand département comme le mien, où coexistent des zones urbaines en développement et de vastes zones rurales.

Ces coups de boutoir contribuent à fissurer l’édifice de l’école et à creuser les inégalités entre les régions et, surtout, entre les enfants : je déplore que l’ascenseur social n’ait toujours pas été remis en route.

Les heures supplémentaires constituent l’autre levier d’action privilégié par le Gouvernement dans la répartition des crédits que nous examinons ce soir. Elles permettent de répondre aux besoins en personnel compétent pour assurer les services de soutien en dehors des horaires réguliers, l’apprentissage des langues vivantes ou les remplacements de courte durée.

Mais, pas plus à l’école que dans l’entreprise, le recours aux heures supplémentaires n’est, en soi, une preuve de bonne gestion. La hausse des dépenses au titre des heures supplémentaires contribue à fragiliser le statut des enseignants : on sait bien, en effet, que la limite entre les heures supplémentaires choisies et les heures supplémentaires subies est toujours ténue…

De surcroît, cette politique coûte cher. Les crédits affectés au paiement des heures supplémentaires ne seraient-ils pas mieux utilisés autrement, par exemple pour favoriser l’embauche de titulaires sur zone de remplacement ?

Monsieur le ministre, je tiens à vous poser une question directe : et l’éducation, dans tout cela ?

Car enfin, comme l’a souligné Mme Cartron, les choix financiers du Gouvernement se retournent directement contre la politique de l’emploi et la qualité de l’accompagnement des élèves !

Comment, dans ces conditions, comptez-vous donner une impulsion pédagogique nouvelle au contenu des enseignements ? Comment comptez-vous recruter du personnel compétent en offrant les salaires de cadre les plus bas de la fonction publique ? Déjà, la pénurie se fait sentir, à tel point que les chefs d’établissement doivent recruter à Pôle emploi des personnes qui n’ont ni la compétence ni l’expérience requises.

Dans les collèges, par exemple, pourquoi ne pas utiliser les compétences des enseignants des départements voisins ayant demandé leur mutation sans l’obtenir ? Ils sont en disponibilité obligée et voient passer des annonces de Pôle emploi pour lesquelles ils ne sont pas prioritaires.

Aujourd’hui, un enseignant dont le conjoint est muté loin de son domicile a deux solutions : soit il accepte d’être séparé de lui, et il accumulera chaque année des points en vue d’obtenir une mutation ; soit il décide de le suivre en se plaçant en situation de disponibilité ou en congé parental, afin de ne pas mettre en danger sa vie familiale, mais il cessera alors d’engranger des points et un cercle vicieux s’enclenchera !

Les femmes sont les principales victimes de cette situation désastreuse, dont elles subissent à un double titre les conséquences : pour le déroulement de leur carrière et pour le calcul de leur future pension de retraite. Je vous demande donc d’engager une réforme de la procédure de changement d’affectation pour rapprochement de conjoints, afin de faire cesser des situations familiales particulièrement difficiles, en même temps qu’un gaspillage de compétences.

Un autre problème, que je me contenterai d’évoquer, est très préoccupant : celui des conséquences de la modification de la carte scolaire, qui aggrave, en milieu rural comme dans les quartiers sensibles, les disparités dans la qualité du service public de l’éducation. Bref, les inégalités territoriales et sociales se creusent : la mixité sociale disparaît et, avec elle, les beaux principes fondant notre modèle républicain.

C’est pourquoi, à la suite de notre rapporteure pour avis, je demande que le ministère de l’éducation nationale procède à une évaluation rigoureuse des conséquences pédagogiques de la désectorisation, c’est-à-dire de son incidence sur les apprentissages des élèves.

Avant de conclure, je souhaite attirer l’attention sur la pénurie des moyens alloués à la médecine scolaire. Dans un contexte de crise économique grave, ce service permettrait aux enfants des familles les plus défavorisées de bénéficier d’un « minimum médical ».

Mais, là encore, les moyens ne sont plus au rendez-vous, alors qu’il s’agit d’un enjeu majeur pour la santé publique. Quand la patientèle d’un médecin généraliste représente environ 1 000 personnes, un médecin scolaire suit quelque 10 000 élèves ! Ces chiffres se passent de commentaires… Nous nous privons d’un véritable outil d’alerte et de prévention. Combien d’enfants traîneront toute leur vie des difficultés qui auraient pu être identifiées et résolues très en amont ?

Je pourrais aussi vous parler des psychologues, des infirmiers ou des RASED… Mais j’ai déjà, l’an passé, fait longuement état de leur situation.

Monsieur le ministre, vos choix budgétaires pèsent, année après année, sur l’école de la République. Je dirai même que, pour la cinquième année consécutive, le leitmotiv de votre politique est : « RGPP » !

Le temps est venu de mener un vrai travail de fond, débouchant sur une réforme qui redonne au métier d’enseignant la place centrale au sein de la mission « Enseignement scolaire ». Comme vous l’aurez compris, les membres du groupe du RDSE, dans leur majorité, ne voteront pas les crédits de cette mission.

Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste -EELV et du groupe CRC. – M. Jacques Legendre applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le système éducatif d’une société est son socle, le reflet de sa vivacité et le vecteur de son avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Vous conviendrez donc que la mission « Enseignement scolaire » revêt une importance fondamentale.

Elle représente le premier poste budgétaire de l’État. Ses crédits pour 2012 s’élèvent à plus de 61 milliards d’euros, ce qui correspond à une progression de 0, 9 % par rapport à 2011 et de 6 % depuis 2007.

Permettez-moi, monsieur le ministre, de faire une remarque sur les conditions d’examen des crédits de cette mission. C’est en quelques heures, et de nuit, que nous allons débattre du premier budget de l’État… La politique d’éducation, par son importance, me paraît mériter davantage d’attention !

Aussi me semble-t-il utile d’envisager l’organisation d’un débat d’orientation budgétaire, qui permettrait à la représentation nationale d’aborder en profondeur cet enjeu fondamental pour l’avenir de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Depuis plusieurs décennies, l’instruction s’est transformée, les exigences du monde professionnel ont évolué, l’internationalisation des cursus a fait bouger les frontières de l’éducation.

L’enseignement doit s’adapter à ces mutations, qui mettent en jeu l’avenir de nos enfants. Les priorités de l’enseignement ne sont plus en 2011 celles d’il y a trente ans !

Après « l’école pour tous », il faut s’engager avec vigueur pour la réussite de chacun. Pour le faire efficacement, une évaluation de l’état de notre système éducatif est absolument nécessaire.

Adapter notre système éducatif au monde d’aujourd’hui est le défi majeur que nous avons à relever pour assurer un avenir pérenne et des perspectives professionnelles encourageantes à nos enfants.

De ce point de vue, monsieur le ministre, je tiens à saluer le travail que vous accomplissez, depuis quatre ans, pour soutenir et améliorer notre système d’éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Il a supprimé la formation professionnelle des enseignants !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Cette année encore, nous pouvons constater que vos réformes portent leurs fruits.

C’est pour adapter le système éducatif aux mutations en cours que vous avez lancé une politique de personnalisation.

La personnalisation des parcours doit ainsi prendre le relais de la politique de massification, qui est arrivée à son terme et a engendré de nouvelles contraintes pour notre système éducatif. La personnalisation doit permettre à chaque jeune de quitter l’école en disposant d’une qualification. Comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre, il faut désormais passer de l’école pour tous à la réussite de chacun.

La réussite des élèves doit être le fil conducteur de la politique de l’État en matière d’enseignement. Je le dis avec une profonde conviction, parce que je considère que la réussite collective de la France dépend de la réussite individuelle de chacun de ses enfants.

La rentrée prochaine verra également la poursuite d’expérimentations qui contribuent à l’amélioration des conditions d’apprentissage de beaucoup d’élèves.

Les internats d’excellence, en particulier, connaissent un développement rapide : vingt-trois établissements étaient ouverts à la rentrée 2011, proposant au total 10 000 places labellisées. En plus de constituer un levier pour la diffusion de nouvelles pratiques pédagogiques et éducatives répondant à la demande sociale de personnalisation des parcours et d’accompagnement renforcé, ils sont un outil particulièrement efficace pour renforcer l’égalité des chances en s’appuyant sur la valeur fondamentale au sein de l’école : le mérite.

Je tiens à réaffirmer que le succès de nos enfants n’est pas seulement une question de moyens. Il n’est pas inutile de rappeler que notre pays compte aujourd’hui 35 000 enseignants de plus qu’en 1990, et 540 000 élèves de moins ! C’est pourquoi nous ne considérons pas que la simple augmentation des budgets ou du nombre de personnels suffise à fonder un projet pour notre école. Nous pensons que nos enseignants, sur lesquels tout repose, ont besoin d’être mieux reconnus, formés et rémunérés.

Je tiens à saluer le travail qu’ils accomplissent et l’engagement dont ils font preuve pour accompagner les élèves. Je souhaite leur rendre hommage : ils sont, aux côtés des parents, les artisans de la réussite de nos jeunes.

En 2007, le Président de la République avait tenu les propos suivants : « Je souhaite faire de la revalorisation du métier d’enseignant l’une des priorités de mon quinquennat parce qu’elle est le corollaire de la rénovation de l’école et de la refondation de notre éducation. »

Nous pouvons être fiers des mesures prises par le Gouvernement, depuis 2007, pour revaloriser le métier d’enseignant.

En matière de formation, d’abord, le nouveau pacte de carrière qui a été mis en place permet d’améliorer la formation tant initiale que continue des enseignants.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

Il n’y a plus de formation des enseignants !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Carle

Cependant, s’ils sont bien formés à leur discipline, les enseignants ne le sont pas suffisamment à leur métier, même si l’instauration de stages d’accueil et la création de masters en alternance y contribuent.

En matière de rémunération, les efforts sont réels. Nous nous félicitons, monsieur le ministre, de l’augmentation, que vous avez annoncée le 24 novembre dernier, du salaire des jeunes enseignants, à hauteur de 2 000 euros pour un temps plein. Cet effort sans précédent, consenti de surcroît dans un contexte budgétaire très contraint, représente une augmentation de 5 % par rapport à la rentrée 2011 et de 18 % par rapport à 2007 !

J’ajoute que le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux a permis d’augmenter la rémunération des enseignants en début de carrière. La France est le seul pays à le faire, au moment même où ses voisins, par exemple l’Espagne, réduisent le salaire des enseignants tout en leur demandant de travailler quelques heures de plus par semaine…

Ainsi, beaucoup est fait pour soutenir et accompagner ceux qui se consacrent avec dévouement à ce beau métier.

Dans le même ordre d’idées, monsieur le ministre, il me paraît important de donner aux jeunes enseignants les moyens d’entrer dans la carrière le plus sereinement possible. Ils doivent pouvoir acquérir de l’expérience avant d’être nommés à des postes dans des établissements plus difficiles. Tout le monde y gagnera, à commencer par les élèves qui, parce qu’ils rencontrent des difficultés de nature à compromettre leur parcours scolaire, ont besoin d’un encadrement expérimenté propre à leur fournir tout le soutien nécessaire.

C’est donc dans l’intérêt de l’ensemble des acteurs du système éducatif que nous devons réformer la politique d’affectation actuelle : à mon sens, elle ne permet pas de tirer le meilleur profit des compétences de chacun.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les collectivités locales interviennent financièrement dans la politique de l’éducation. Or nous savons que ce qui est imposé est souvent mal compris et inefficace sur le terrain. La mission commune d’information sur l’organisation territoriale du système scolaire et sur l’évaluation des expérimentations locales en matière d’éducation, dont j’ai eu l’honneur d’être le rapporteur, a pu s’en rendre compte !

C’est pourquoi je suis attaché à l’idée de partenariat et convaincu que le recours aux contrats entre les élus locaux, les parents et le monde socioprofessionnel est un vecteur d’avancées essentielles. Je le dis au vu de la réussite d’initiatives locales qui illustrent les vertus de cette méthode. Selon moi, nous devrions les étudier avec intérêt : je pense, par exemple, aux expérimentations conduites par M. Dubois dans la Somme et par M. Jardel dans votre propre région, monsieur le ministre.

Je souhaite enfin attirer votre attention sur l’accompagnement scolaire des enfants âgés de trois à six ans. C’est au cours de cette période de la vie que l’enfant se construit et acquiert le socle de connaissances indispensable à son épanouissement.

Je tiens à rendre hommage au travail accompli par les enseignants des écoles maternelles ; la réussite de nos enfants dépend de leur engagement.

Cette tranche d’âge est particulièrement sensible, et nous devons la considérer à la hauteur de l’importance qu’elle représente dans la vie.

C’est pourquoi je suis favorable au travail qui est engagé vers un repérage précoce des difficultés scolaires, n’en déplaise aux bien-pensants qui y voient un nouveau sujet de polémique stérile en parlant d’évaluation, de test, alors qu’il n’est aucunement question de cela, comme vous l’avez souvent rappelé, monsieur le ministre.

Je suis favorable à cette démarche, car je suis convaincu que c’est en identifiant le plus tôt possible les difficultés d’un enfant que le système éducatif pourra lui apporter le soutien et l’accompagnement nécessaires lui permettant de dépasser ses faiblesses du moment et de préparer sa réussite de demain.

Monsieur le ministre, ce budget témoigne, dans un contexte de crise, de votre volonté de donner à nos enfants le meilleur investissement qui soit : celui du savoir. D’ailleurs, ce n’est pas moi qui le dis, mais Socrate, qui, voilà vingt-cinq siècles, déclarait : « Le savoir est la seule matière qui s’accroît quand on la partage. » Il est de notre devoir de réussir un meilleur partage de ce savoir.

Pour conclure, permettez-moi de suggérer trois pistes afin d’améliorer un système qui peine à réduire les inégalités scolaires, conséquences trop souvent d’inégalités sociales.

Tout d’abord, le politique doit prendre toute sa place. Le Parlement ne doit plus se satisfaire d’un rôle contemplatif sur un budget véritable « boîte noire » décryptable par les seuls initiés. Beaucoup de ceux que nous avons auditionnés nous l’ont dit.

Ensuite, les priorités actuelles ne sont plus celles des années cinquante. Les affectations et le statut des enseignants devront s’inscrire dans cette réalité.

Enfin, seule une politique intégrant et responsabilisant la famille, l’école et la ville permettra de réduire ces inégalités.

Quant à la méthode, monsieur le ministre, elle est évidente : le contrat vaut toujours mieux que la circulaire. Passons de compétences aujourd’hui encore trop séparées à des compétences véritablement partagées, parce que nos enfants le valent bien.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le cinquième budget de l’enseignement scolaire de ce gouvernement. Cinq années de RGPP qui se sont concrétisées par une saignée d’une ampleur inégalée dans les postes – près de 80 000 à l’éducation nationale –, orchestrant le démantèlement de notre service public d’éducation.

Sans surprise, donc, le projet de budget pour 2012 entérine 14 000 nouvelles suppressions d’emploi.

La majorité des interventions des rapporteurs budgétaires l’ont montré : les voyants sont au rouge !

Sur le terrain, se matérialise donc, année après année, la détérioration des conditions d’accueil des élèves et des conditions de travail des personnels.

Quel élu n’a pas été interpellé pour des classes fermées ou surchargées, sur la réduction de l’offre de formation, la suppression d’options au lycée, la fragilisation extrême des moyens de remplacement ou le manque de personnel de vie scolaire ? Pourtant, vous prétendez toujours, monsieur le ministre, « faire mieux avec moins ».

Pour le « moins » : les personnels – qu’ils soient enseignants, chefs d’établissement, inspecteurs, administratifs, personnels de vie scolaire –, les élèves, les parents, tous éprouvent cette gestion de la pénurie.

Pour le « mieux » : les « nouveaux services », annoncés à grand renfort de communication en 2007 – aide aux devoirs, stage de remise à niveau –, vous les avez en fait financés en réduisant le temps d’enseignement pour tous, en faisant progressivement disparaître les RASED et en recourant massivement aux heures supplémentaires.

Le solde est donc largement négatif !

Je veux m’arrêter un instant sur cette question des heures supplémentaires.

L’année dernière, plus de 1, 3 milliard d’euros – l’équivalent de 40 000 équivalents temps plein travaillé – ont été consacrés aux heures supplémentaires, soit une hausse de près de 10 % depuis 2008. Pour 2012, vous prévoyez de reconduire ce volume. Car il s’agit non plus seulement de répondre à un besoin ponctuel d’ajustement, mais bien de couvrir des besoins permanents à l’éducation nationale !

Cette généralisation des heures supplémentaires est donc mortifère pour l’emploi et pour la qualité de l’enseignement.

Ainsi, en 2012, le nombre de postes offerts aux concours externes restera historiquement bas et bien inférieur aux prévisions des départs en retraite d’enseignants, impactant la réforme de 2010 : dans le premier degré, 5 000 postes d’enseignants pour 9 000 départs à la retraite ; dans le second degré, 8 600 postes au concours pour 11 620 départs envisagés.

Au lieu d’ouvrir des postes au concours pour assurer les métiers et les missions du service public d’éducation, le Gouvernement use donc d’un mode de gestion qui compresse l’emploi et développe la précarité. J’en veux pour preuve l’augmentation constante, depuis 2007, du nombre d’enseignants non titulaires. Pour le seul programme du second degré public, c’est l’explosion : 44 % d’augmentation entre janvier 2007 et décembre 2011 !

Autre paradoxe, la dernière enquête réalisée par le SNPDEN, le syndicat national des personnels de direction de l’éducation nationale, montre que, pour gérer la pénurie, les établissements sont justement contraints de supprimer des moyens de remédiation – les dispositifs d’accompagnement tels que « l’accompagnement personnalisé » –, pourtant têtes de pont de vos réformes !

On comprend mieux pourquoi vous répétez que la vraie question aujourd’hui est celle du « sur mesure » et non de « la qualité ». Le sabordage de la formation initiale et continue des enseignants, littéralement atomisée, en témoigne !

Ce « sur mesure », terme séduisant, s’incarne dans votre politique « d’individualisation des parcours », qui va de pair avec l’autonomie accrue des établissements.

Cette autonomie, vous l’imposez avec le dispositif ECLAIR, Écoles, collèges et lycées pour l’ambition, l’innovation et la réussite. Face à l’hostilité des équipes dans les établissements, n’avez-vous pas tenté, dans le cadre de la politique de la ville et avec la signature de trente-trois avenants expérimentaux aux contrats urbains de cohésion sociale, de passer outre ?

Si cette politique aboutit, elle imposera définitivement le modèle d’une école du tri et de la sélection sociale, de plus en plus précoce.

Je ne reviens pas sur vos projets « d’étiquetage » dès la maternelle, mettant d’un côté les élèves pour lesquels le socle commun de connaissances et de compétences constituerait un horizon indépassable et, de l’autre, ceux qui seraient « destinés » à la poursuite d’études.

Tout au contraire, il faut mettre l’école au service de l’émancipation individuelle et collective, parce que tous les élèves sont capables de progresser et de réussir à condition que l’école, et donc l’État, leur en donne les moyens.

Ce n’est évidemment pas ce que vous avez engagé depuis 2007.

L’exemple combiné de la suppression de la carte scolaire et de la création des internats d’excellence illustre parfaitement votre logique.

De même, la réforme de l’éducation prioritaire et celle de l’enseignement professionnel témoignent d’une même volonté de mettre en tension les segments les plus fragiles du système scolaire, où se concentrent beaucoup d’enfants de milieux défavorisés, qui sont en même temps stigmatisés au nom de la lutte contre la violence scolaire et le décrochage.

Cela permet symboliquement de « légitimer » tous les dispositifs qu’on leur impose.

Car, contrairement à ce que vous dites, monsieur le ministre, le processus de démocratisation scolaire n’est pas allé à son terme. Ce qui a abouti, c’est la massification, ou une « démocratisation quantitative qui ne s’est pas accompagnée d’une diminution des inégalités sociales, [qui] se sont juste décalées dans le temps », pour citer le chercheur en sciences de l’éducation, Jean-Yves Rochex.

Aussi, face à la dénaturation du service public d’éducation, de sa visée, de ses missions, doit s’engager, dès maintenant, la relance du processus de démocratisation scolaire pour construire l’école de la réussite pour toutes et tous. C’est l’ambition qu’il faut avoir pour l’école !

Dans cette perspective, la maîtrise des savoirs, véritable pouvoir de transformation sociale et d’émancipation, est un enjeu décisif pour la démocratie.

Cette question des savoirs est première. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la loi Fillon de 2005 a instauré le « socle commun de connaissances et de compétences », un concept de « compétences » entendu dans sa seule dimension « mécaniste et utilitariste » d’employabilité, au service du développement de la compétitivité de l’économie, fidèle en cela à la stratégie de Lisbonne, avec une équation à résoudre : concilier les besoins de l’économie en matière de formation et de qualification et la nécessité de contrôler le coût, toujours jugé excessif, des systèmes éducatifs. Comment ? Par le tri entre ceux qui maîtrisent le « socle » et ceux qui ne le maîtrisent pas et la sélection au moyen des outils d’évaluation que sont le livret de compétences et les évaluations dans le primaire.

Il faut remettre en cause cette forme d’évaluation institutionnelle – consistant davantage à entraîner les élèves à acquérir des compétences pour renseigner ledit livret – qui se fait au détriment des apprentissages, fragmente les savoirs, alors que leur maîtrise est indispensable pour comprendre le monde et agir sur sa transformation.

Construire cette école de la réussite nécessite de refonder l’école sur le modèle de l’élève qui n’a que l’école pour apprendre les savoirs scolaires.

Aussi, à la notion de « socle commun », j’oppose celle de « culture commune », moteur d’émancipation.

À « l’individualisation des parcours », j’oppose la « personnalisation des parcours ».

« Personnaliser », comme l’a analysé Jacques Bernardin, du Groupe français d’éducation nouvelle, « n’est pas individualiser, mais engager chacun dans un processus de transformation grâce à la confrontation réglée à la fois par l’exigence de la preuve […] et par la normativité propre à l’objet. »

Il faut un temps scolaire rallongé jusqu’à dix-huit ans et ouvrir droit à la scolarisation dès deux ans. Il faut s’appuyer sur un programme unique jusqu’à la fin du collège, maintenir des filières véritables et ambitieuses comme outils supplémentaires à la démocratisation et non à la sélection des meilleurs. Il faut aussi des diplômes nationaux.

Autant d’armes pour lutter contre les inégalités !

Cela implique aussi une nouvelle « posture professionnelle ». Elle ne sera pas possible si la formation initiale et continue reste à l’état de ruine.

Il faut donc immédiatement rétablir les moyens pour une formation pédagogique et disciplinaire, initiale et continue des enseignants, en lien étroit avec la recherche.

Enseigner est un métier qui s’apprend, et dans un cadre fondé sur des concours et un recrutement nationaux.

La question des inégalités, de leur résorption, pose aussi celle du rôle des collectivités territoriales. Partenaires, au même titre que les parents, celles-ci ne sauraient suppléer au désengagement financier de l’État. La part de ce dernier dans la dépense intérieure d’éducation n’a en effet cessé de diminuer – 65, 2 % en 2000, contre 59, 4 % en 2010 –, quand celle des collectivités territoriales passait de 19, 9 % à 24, 6 %.

L’échelon territorial, aussi séduisante que soit cette idée, ne saurait devenir celui du pilotage de notre système éducatif.

Je m’inscris en faux contre l’évidence qui voudrait que l’accroissement de l’autonomie des établissements et l’instauration d’une contractualisation territoriale soient susceptibles de réduire l’échec scolaire. Non, l’ambition pour notre école doit être celle non pas d’une adaptabilité à des réalités territoriales, budgétaires ou économiques, mais bien d’une émancipation individuelle et collective !

Ce budget tourne le dos à cet objectif ; mon groupe votera donc contre les crédits de la mission « Enseignement scolaire ». §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il existe deux façons de lire ce budget : avec les yeux d’un membre du Gouvernement ou avec le regard d’un parlementaire et d’un élu local, à la lumière de ce que nous vivons dans nos communes, au contact de nos concitoyens.

Monsieur le ministre, vous n’échappez d’ailleurs pas à cette double contradiction puisque vous êtes aussi élu local.

Commençons par votre lecture en tant que membre du Gouvernement.

Vous avez raison de rappeler que, aujourd’hui, le budget de l’éducation est le premier budget de l’État, ce qui, on l’oublie trop souvent, n’a pas toujours été le cas, loin s’en faut, dans la longue histoire de nos républiques. On peut faire au Gouvernement tous les reproches possibles, mais on ne peut nier que, en cette période de crise, l’éducation reste sa priorité ou, tout au moins, qu’elle occupe le premier rang de sa hiérarchie budgétaire.

Nous avons également notre lecture, nous autres parlementaires et élus locaux, nourrie non seulement par la remontée du terrain, par les doléances des familles, des enseignants, parfois des jeunes, mais aussi par les questions que posent certaines enquêtes internationales quant à l’efficacité de notre système, pour ne plus dire notre modèle.

Il y a donc deux lectures contradictoires, dont l’une ne saurait être tout à fait vraie et l’autre tout à fait fausse.

On a beau tourner le problème dans tous les sens, on en revient toujours à la question des moyens, d’autant que les défis auxquels vous devez faire face dépassent de loin le cadre de vos attributions ministérielles.

Aujourd’hui, on ne vous demande plus seulement d’être le ministre de l’instruction publique, comme c’était le cas sous la IIIe République, on vous demande également d’être le ministre de l’intérieur, tant il est vrai que la sécurité au sein et aux abords des établissements scolaires alimente l’angoisse des familles.

On vous demande d’être le ministre de l’aménagement rural, tant il est vrai que les élus tiennent avec raison à leur école. On peut certes fantasmer sur le village du siècle dernier, avec son maire, son instituteur, son curé, son garde champêtre et son médecin ; nous sommes en 2011, et il est vain de pleurer sur les curés et les médecins disparus. Tâchons au moins de conserver nos maires et nos instituteurs !

On vous demande d’être le ministre de la ville, tant la précarisation et la ghettoïsation de nos banlieues compliquent le rôle d’ascenseur social que joue l’école.

On vous demande d’être le ministre de la famille, tant elle a abdiqué les responsabilités qui étaient les siennes depuis l’aube des temps.

On vous demande d’être le ministre de la culture, tant les enseignements artistiques peinent à se frayer un chemin dans des programmations pléthoriques.

Je pourrais poursuivre indéfiniment cette liste, puisque tous les secteurs ou presque de notre vie publique sont concernés.

Bref, l’éducation nationale étant au carrefour de toutes les contradictions et lacunes de notre société, celui qui en a la charge, à défaut d’être le Premier ministre, pourrait bien être le premier des ministres, ce qui justifie sans doute le fait que lui soit confié le premier budget de l’État.

Mais ce qui est vrai du ministre au sommet de la pyramide l’est également de l’enseignant à sa base, sinon davantage encore, surtout lorsqu’il s’agit de jeunes professeurs des écoles, souvent inexpérimentés, à qui l’on demande certes d’être enseignant mais aussi, parfois, assistante sociale, policier, artiste, spécialiste des nouvelles technologies ; à qui l’on demande souvent, surtout chez les petits, de remplacer le père ou la mère défaillants.

Oui, dans cette école primaire où tout se joue dès le plus jeune âge, l’enseignant d’aujourd’hui ne doit pas se contenter d’inculquer les fondamentaux du savoir, il doit également soigner les fondamentaux du cœur, gronder ou consoler, mais ne pas gronder trop fort ni consoler trop près, afin d’échapper aux suspicions de violences faites à mineur ou de pédophilie.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Ce faisant, je ne sais pas si le métier d’enseignant est encore le plus beau métier du monde, mais il est à coup sûr devenu le plus complexe.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

C’est pourquoi il faut une bonne formation des enseignants !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

C’est pourquoi nous en revenons encore et toujours à la question des moyens : comment faire plus alors que les contraintes financières nationales et internationales nous enjoignent de faire moins ?

À budget constant de l’État, faut-il augmenter le nombre des fonctionnaires de l’éducation nationale ? Au détriment de quel domaine ? De la justice ? De la sécurité ? De la santé ?

Peut-on créer des milliers de postes supplémentaires sans porter atteinte aux autres secteurs et tout en réduisant les déficits ?

Nous le savons bien, ces questions seront au cœur des débats électoraux du printemps ; nous n’y répondrons pas ce soir au Sénat. Mais nous sommes peut-être tous d’accord sur un point : s’agissant de l’éducation – j’ai tenu un autre discours, la semaine dernière, au sujet des musées nationaux – la RGPP atteint ses limites.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Nous avons suffisamment dégraissé le mammouth : aujourd’hui, nous avons atteint l’os !

Monsieur le ministre, je prends volontiers acte du fait que, à plusieurs reprises, vos interventions ont mis l’accent sur deux points : la formation et la revalorisation des carrières enseignantes. Dans le premier domaine, je salue les efforts que vous avez accomplis ; dans le second, je les déplore.

Concernant la revalorisation, il est vrai que les dernières mesures que vous avez annoncées vont dans le bon sens, notamment s’agissant des nouveaux enseignants. Il faut poursuivre dans cette voie, car à la complexité croissante du métier répond l’exigence d’une meilleure rémunération.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

M. Jean-Jacques Pignard. En revanche, vous savez que, sur le plan de la formation, je suis bien plus sceptique.

M. Alain Néri s’exclame

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Je tiens à préciser que je n’ai jamais été un ardent défenseur des IUFM, de leur pédagogisme confus, de leur sociologisme prétentieux et de leur dogmatisme présomptueux.

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Mes chers collègues, vous aurez compris que je n’ai guère d’affinités avec M. Philippe Meirieu, étant rhodanien moi-même, et je crois que M. Gérard Collomb en a encore moins !

À mon sens, l’IUFM ne constitue pas la solution. Je regrette d’ailleurs que l’université, avec la mastérisation, ait hérité du référentiel bondissant…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

… et reste dans la même logique : celle de propos abstraits et abscons, alors même qu’un jeune enseignant a besoin d’être formé sur le terrain, accompagné pas à pas par un véritable professionnel, en suivant de véritables stages.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

Pourquoi pas !

Nous n’avons pas d’autre choix que d’innover et d’inventer : peut-être ces innovations et ces inventions pourront-elles concrétiser des suggestions a priori décoiffantes.

Mon collègue et ami Yves Pozzo di Borgo, qui connaît bien l’éducation nationale pour en avoir été inspecteur général, proposera de mettre un terme à cette aberration des heures supplémentaires, auxquelles plusieurs orateurs ont fait maintes allusions, tout en prolongeant de deux heures le temps réglementaire et en l’annualisant, quitte à réduire ces grandes vacances qui n’ont peut-être plus aujourd’hui leur raison d’être.

Les enseignants sont prêts à accepter ces propositions, dès lors que sera satisfaite la double exigence que je viens de mentionner : la qualité de leur formation et l’augmentation de leur rémunération.

La dureté des temps ne nous laisse d’autre choix que celui de l’innovation.

Pour conclure, monsieur le ministre, j’ai parfaitement conscience que ce budget ne répond pas à toutes nos attentes, loin s’en faut, et que vous avez été contraint de l’élaborer dans des conditions particulièrement difficiles sur le plan tant national qu’international, compte tenu du poids de la crise. Vous avez évité le pire, permettez-moi de l’affirmer.

Je ne me reconnais évidemment pas dans certaines critiques excessives de l’opposition, qui fait mine d’ignorer les difficultés de l’heure, comme l’environnement international dans lequel nous vivons. Je déplore plus encore les propos outranciers de certains leaders de cette opposition, qui vous ont charitablement qualifié de cancre. À mes yeux, vous n’êtes pas un cancre ; vous êtes aujourd’hui chargé de résoudre la quadrature du cercle, et cette tâche est tout sauf aisée !

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Résolvez d’abord le manque de régulation des marchés financiers !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Pignard

M. Jean-Jacques Pignard. Le groupe de l’Union centriste et républicaine votera les crédits de cette mission, en reconnaissant qu’il y a peut-être en vous quelque chose qui évoque parfois le désarroi de l’élève Törless.

Applaudissements sur les travées de l ’ UCR et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Domeizel

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire » affectés à l’enseignement professionnel que portera mon intervention.

Nul ne me contredira si j’insiste sur la nécessité d’une rénovation de la voie professionnelle, qui doit cesser de constituer une voie de garage pour devenir une filière de prestige pour les jeunes qui quittent le collège. En effet, plus d’un tiers des élèves du second degré empruntent la voie professionnelle. C’est dire si cette filière est importante !

Les crédits concernés s’élèvent à 6, 729 milliards d’euros, contre 6, 677 milliards d’euros en 2011. Au milieu des nombreuses coupes claires auxquelles le présent projet de loi de finances procède, nous nous réjouissons de cette augmentation de 0, 8 %. Reconnaissez, monsieur le ministre, que c’est l’effort minimum que vous pouviez consentir en faveur de cette branche, après avoir mis en place la « rénovation de la voie professionnelle ».

Toutefois, il est regrettable que, cette année, la poursuite de l’application du passage du baccalauréat professionnel en trois ans au lieu de quatre vous conduise à supprimer 455 postes dans les lycées professionnels. Quant aux crédits pédagogiques, ils diminuent de 4, 6 % par rapport à 2011.

Par ailleurs, il ne fait aucun doute que les coupes budgétaires dans les crédits de la mission générale d’insertion, qui doit faciliter l’accès à la formation professionnelle, se réduisant de 3, 88 millions d’euros à 3, 71 millions d’euros, feront de nouvelles victimes parmi les élèves. En l’occurrence, je ne parle pas des décrocheurs, mais de ceux qui sont « décrochés » par le système scolaire. Cette réalité est d’autant plus regrettable que ces derniers constituent l’un des publics prioritaires de la réforme de la voie professionnelle.

Monsieur le ministre, permettez-moi de rappeler à nos collègues – peut-être ainsi qu’à vous-même – l’un des trois objectifs de cette réforme : réduire le nombre de jeunes qui quittent l’école sans diplôme, en les incitant à suivre au moins une « formation courte ».

Nous pouvons également regretter la suppression de lycées professionnels, dont les effectifs sont inférieurs à 200 élèves : dix-sept établissements ont été fermés ces dernières années. Certes, vingt établissements de réinsertion scolaire ont été créés, mais c’est peu si l’on veut répondre aux 180 000 jeunes « perdus de vue » chaque année.

Il serait trop simple de reporter l’enseignement professionnel sur les centres de formation d’apprentis, les CFA, dont les régions sont les « premiers financeurs ». L’Association des régions de France n’a d’ailleurs pas manqué de souligner le déséquilibre existant entre la formation initiale et l’apprentissage, l’absence de chiffrage, le manque de concertation ; bref, de dénoncer une réforme inadaptée aux professeurs de lycée professionnel.

Même la loi du 28 juillet 2011 pour le développement de l’alternance et la sécurisation des parcours professionnels n’a pas atteint ses objectifs.

La réforme de la voie professionnelle que vous avez mise en œuvre est loin de porter ses fruits. En effet, avant même d’être parvenue à son terme, elle se traduit par un nouvel essor du décrochage scolaire.

Nous nous félicitons de l’augmentation du nombre de bacheliers professionnels. Mais ce mouvement n’est-il pas dû mécaniquement à la superposition transitoire des baccalauréats professionnels et des anciens brevets d’études professionnelles, les BEP ? Cet effet, qualifié du terme imagé de « bourrelet », disparaîtra dès l’année 2013.

Monsieur le ministre, votre réforme a reçu un accueil très contrasté. Les enseignants se montrent très critiques quant aux modalités d’application, tant sur le plan matériel que pédagogique. Ils pointent le manque d’accompagnement de l’inspection, l’hétérogénéité accrue des classes, les difficultés d’articulation entre la certification intermédiaire, à savoir les CAP et BEP, et la préparation au baccalauréat.

Pendant ce temps, les inégalités entre les établissements se creusent du fait de leur autonomie accrue. Cette évolution risque de provoquer la perte de spécificité du métier de professeur de lycée professionnel.

Faut-il rappeler l’absence quasi systématique de passerelles effectives à ce jour entre formations ? Les quelques passerelles – lorsqu’elles sont possibles – nécessiteront forcément un accompagnement adapté des élèves en phase de transition. Mais chacun sait que le suivi personnalisé est, malheureusement, inégalement appliqué ; de fait, chaque établissement fixe ses propres règles d’accompagnement, le réservant à certaines classes ou certains niveaux, bien sûr faute de moyens.

Heureusement, et on peut le comprendre, le message de revalorisation symbolique du baccalauréat professionnel semble être bien accueilli par les élèves et leurs familles, tout comme la possibilité de s’inscrire en BTS après le baccalauréat. Toutefois, il convient de prendre garde à la forte demande sociale à l’entrée des sections de techniciens supérieurs que cette réforme va entraîner en 2013. Il s’agira alors de ne point décevoir l’espoir de ces familles des classes moyennes et populaires.

Parallèlement, il faudra veiller à ne pas brouiller la distinction entre, d’une part, la voie technologique permettant de poursuivre ses études dans le supérieur et, d’autre part, la voie professionnelle destinée à l’insertion dans le monde du travail, laquelle constitue l’un des trois objectifs assignés à la réforme.

Par ailleurs, avant de réfléchir à la possibilité de rendre l’alternance obligatoire lors des dernières années de préparation au baccalauréat professionnel et au certificat d’aptitude professionnelle, comme l’a demandé le Président de la République, ne serait-il pas d’abord judicieux d’évaluer et d’harmoniser la réforme du baccalauréat professionnel en trois ans ?

Pour finir, j’insisterai sur le fait qu’une part importante des élèves choisit encore sa spécialité en fonction de l’offre de formation disponible localement, plus qu’en fonction d’un projet professionnel. Au choix de l’élève et de sa famille s’ajoute celui de l’institution elle-même, qui répond davantage à une logique de remplissage des formations existantes, sans tenir compte des réels projets professionnels de l’élève.

La clé de la valorisation de la voie professionnelle réside donc dans le « calibrage » de l’offre de formation et de sa répartition géographique. Or, au vu des fermetures d’établissements et de la tendance à vouloir se défausser sur l’apprentissage aux dépens de l’enseignement professionnel sous statut scolaire, cette valorisation paraît surtout s’estomper. Ce mouvement s’accompagne de la poursuite de la baisse du nombre de professeurs et du désengagement de l’État vers les collectivités territoriales.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, les chiffres n’étant pas à la hauteur de l’enjeu, le groupe socialiste ne votera pas le budget de l’enseignement professionnel.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget pour 2012 de la mission « Enseignement scolaire » répond à deux priorités essentielles : d’une part, la mise en œuvre concrète des engagements du Président de la République en matière de personnalisation des enseignements et des parcours scolaires ; d’autre part, la mise en place d’une vraie politique de ressources humaines, en accord avec la maîtrise des dépenses publiques.

Ce budget illustre aussi clairement la priorité donnée par le Gouvernement à l’avenir de la jeunesse. La mission « Enseignement scolaire » représente 61 milliards d’euros, soit un cinquième du budget, ce qui en fait le premier poste de dépenses de l’État.

Vous avez, monsieur le ministre, la volonté de mener des réformes ambitieuses, et si le temps des réformes est un temps long, des résultats encourageants sont cependant perceptibles.

Même si les résultats ne sont pas ceux que l’on pouvait escompter, l’enquête internationale PISA – programme international pour le suivi des acquis des élèves –, publiée en décembre 2010, montre que le système éducatif français obtient des résultats corrects, dans la moyenne des grands pays développés.

Notre système éducatif doit encore s’améliorer, et c’est toute l’ambition de la poursuite de la politique mise en œuvre par le Gouvernement depuis 2007, qui repose sur trois piliers majeurs : l’aide personnalisée apportée à chaque élève ; la responsabilisation des établissements pouvant conduire à leur autonomie ; enfin, la valorisation des enseignants, qui bénéficient d’un « nouveau pacte de carrière » à propos duquel vous avez explicité des mesures importantes lors du salon européen de l’éducation le 24 novembre dernier, mais j’y reviendrai.

Grâce aux dispositifs de l’aide personnalisée, de l’accompagnement éducatif, des stages de remise à niveau ou passerelles et du tutorat, l’élève dispose, de l’école maternelle à la terminale, d’un accompagnement personnalisé tout au long de sa scolarité.

Je souhaiterais axer mon propos sur les dispositifs d’accompagnement des élèves étendus aux premières des lycées généraux et technologiques dès la rentrée de 2011.

Les nouvelles premières générales amorcent la spécialisation progressive des élèves, tout en conservant un important tronc commun aux trois séries. Les élèves qui en éprouvent alors le besoin peuvent changer de série, en cours d’année, en bénéficiant de stages passerelles pour se remettre à niveau dans les disciplines spécifiques de la série qu’ils souhaitent intégrer. C’est un excellent outil afin d’éviter le décrochage scolaire, encore trop fréquent chez nos jeunes.

Les résultats du baccalauréat 2011 ont vu accéder 71, 6 % d’une classe d’âge à ce diplôme : c’est un chiffre historique, de six points supérieur aux dernières statistiques, qui stagnaient depuis quinze ans.

En cohérence avec l’un des trois points clés de la réforme du lycée, à savoir « mieux orienter », l’orientation active, en liaison avec l’enseignement supérieur, s’adresse aux élèves dès la classe de première du lycée général et technologique. Elle permet donc aux lycéens d’accéder à une information générale sur les filières de l’enseignement supérieur ainsi qu’à un conseil personnalisé.

Des lycéens mieux formés et mieux accompagnés sur la vie universitaire et ses cursus, c’est la garantie d’étudiants motivés et dont l’accès et la réussite aux diplômes universitaires n’en seront que facilités ; c’est tout l’esprit des objectifs de Lisbonne, qui visent à ce que 50 % des bacheliers puissent atteindre un niveau bac+3.

Nous saluons ces avancées notables, car il est important de porter un intérêt spécifique à la réussite de chaque élève, quel qu’il soit.

Je pense à l’attention toute particulière qui a été apportée aux élèves handicapés, dont la scolarisation en milieu ordinaire a augmenté de près de 60 % depuis la rentrée de 2004.

Les assistants de scolarisation remplaceront progressivement les contrats aidés afin de pérenniser et de parfaire la professionnalisation de l’accompagnement de chaque élève handicapé. C’est un objectif très important alors que l’on a trop souvent entendu parler du manque de formation de ces personnels.

Monsieur le ministre, vous avez laissé davantage d’autonomie aux établissements, afin de leur permettre de prendre en compte les réalités du terrain et de mieux adapter les réponses pédagogiques aux besoins des élèves.

À ce titre, dans un rapport d’information que j’ai présenté l’an dernier au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, à la suite d’une mission effectuée en Finlande, j’ai souligné que ce n’est pas à l’élève de s’adapter à l’école, mais à l’école de s’adapter à l’élève. C’est fidèle à cet esprit que le système finlandais repose non seulement sur une forte autonomie pédagogique des établissements, déterminée par les communes, mais aussi sur une autonomie de recrutement des enseignants.

S’il est évident que, en France, l’État doit conserver la maîtrise complète des programmes et des diplômes, il est indispensable que les chefs d’établissement disposent de davantage de marges de manœuvre pour adapter au mieux l’enseignement au profil des élèves. Nous savons, monsieur le ministre, que vous souhaitez mener cette réflexion en profondeur.

Enfin, la mission « Enseignement scolaire » prévoit le financement des mesures en faveur de la gestion des personnels et la revalorisation de la condition enseignante.

Comme vous l’avez rappelé, le nouveau pacte de carrière des enseignants, ambitieux et complet, répond à quatre engagements : une meilleure formation des enseignants ; un meilleur accompagnement tout au long de leur vie professionnelle ; des possibilités plus larges et réelles de mobilité et d’évolution de parcours ; un métier mieux considéré et mieux rémunéré.

Le statut des enseignants n’a guère évolué depuis les années cinquante. Cela mérite réflexion ! Une adaptation à la société du XXIe siècle est indispensable. La priorité est que les enseignants retrouvent statut social, considération et autorité.

Cette reconnaissance accrue permettra aux enseignants de s’investir pleinement dans leur mission : la réussite de chaque élève.

Il s’agit ainsi de construire une politique de ressources humaines ambitieuse, avec des enseignants mieux formés, mieux accompagnés et mieux payés.

Lors du salon européen de l’éducation, le 24 novembre dernier, vous avez explicité les mesures de revalorisation indemnitaire des personnels enseignants et non enseignants pour l’année 2012 ainsi que la revalorisation indiciaire qui concerne les jeunes professeurs. Cette revalorisation était nécessaire pour rééquilibrer la pyramide des rémunérations entre anciens et nouveaux professeurs, concrétiser financièrement l’élévation du niveau de recrutement des enseignants et garantir l’attractivité du métier.

Pour conclure, nous ne pouvons que souscrire à votre volonté d’améliorer l’efficacité du système scolaire, de consolider les réformes entreprises et d’assurer l’équité de traitement des territoires, en renforçant les chances de réussite de chaque élève et en permettant d’assurer la qualité des enseignements.

Pour accompagner le nécessaire mouvement de modernisation de l’enseignement scolaire que vous poursuivez, vous pouvez compter sur le soutien du groupe de l’UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Mme Colette Mélot. Le groupe de l’UMP votera donc les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner.

Mme Michèle André et M. Alain Néri applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’évoquerai plus particulièrement le budget de l’enseignement technique agricole. S’il constitue l’un des six programmes de la mission « Enseignement scolaire », il en reste malheureusement, depuis toujours, le parent pauvre, ne représentant que quelque 2 % de ses crédits.

C’est à ce point un parent pauvre que, chaque année, les sénateurs et les députés, tour à tour, sont obligés de trouver des « ficelles » pour abonder ce budget et ne pas le laisser au triste sort dans lequel le Gouvernement s’obstine à vouloir l’abandonner. Malgré cela, l’enseignement technique agricole reste en sous-financement chronique.

La politique menée par le Gouvernement ces dernières années en matière d’enseignement, en particulier les suppressions massives de postes auxquelles il a procédé, n’ont fait que renforcer ce sous-financement et n’ont rien arrangé. J’en veux pour preuve l’avis du Conseil économique, social et environnemental en date du 13 septembre dernier : « La France affiche aujourd’hui une performance éducative décevante […] De surcroît cette situation s’est fortement dégradée depuis dix ans. […] Plus récemment, […], de très sévères restrictions budgétaires et des suppressions de postes sont venues compromettre un peu plus cette situation ». C’est le CESE qui le dit !

Pour être plus précis, rappelons quelques chiffres.

Depuis 2007, 80 000 postes ont été supprimés au sein de l’éducation nationale. Cela a abouti, entre autres conséquences, à la surcharge des classes, à des difficultés de remplacement des enseignants, à la non-scolarisation des enfants de moins de trois ans et à la diminution de l’offre de formation professionnelle des enseignants, qu’il s’agisse de la formation initiale, avec la fermeture des instituts universitaires de formation des maîtres, qui avaient succédé aux écoles normales, ou de la formation continue, sacrifiée sur l’autel de la réduction des moyens de remplacements.

Le taux d’encadrement des élèves de notre pays est le plus faible des pays de l’OCDE. On constate que, entre 2000 et 2010, le taux de scolarisation des enfants de moins de trois ans est passé de 34, 5 % à 13, 6 %. On assiste à une mise en péril de la scolarisation des enfants en maternelle alors que, de tous bords politiques, on se dit convaincu de l’intérêt de la scolarisation précoce des enfants, en particulier pour les plus défavorisés d’entre eux.

N’oublions pas non plus les 160 000 jeunes qui quittent chaque année notre système éducatif sans aucune formation, sans qualification et donc, peut-on le craindre, sans avenir.

Quant aux enseignants, leur situation s’est tellement dégradée ces dernières années que certains songent même à se reconvertir et à changer de profession !

Marques d’approbation sur certaines travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques-Bernard Magner

Cette année, le budget de restriction que nous propose le Gouvernement pour l’enseignement scolaire prévoit 14 280 suppressions de postes. Les crédits sont en recul de 1, 75 % par rapport à 2011, compte tenu de la prévision d’inflation et du poids des pensions.

Dans ce contexte de rigueur budgétaire, l’enseignement agricole, quant à lui, perd 280 postes équivalents temps plein, après la suppression de 214 emplois en 2011, de 244 emplois en 2010 et de 152 emplois en 2009, et ce alors même que le ministre de l’agriculture avait, en 2009, annoncé un moratoire à ce sujet. Nous en sommes bien loin !

Cette perte de 280 emplois correspond à un taux de non-remplacement de plus de 68, 3 % des départs à la retraite, soit l’un des plus élevés du budget de l’État.

Le régime auquel est soumis l’enseignement technique agricole est extrêmement sévère ; pour lui, ce n’est pas le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux, ce qui est déjà très difficile à supporter, ce sont deux fonctionnaires sur trois qui ne seront pas remplacés ! En conséquence, l’insécurité des personnels est organisée : ces derniers sont sur-précarisés, ils ne reçoivent aucune reconnaissance professionnelle et leurs conditions de travail sont fortement dégradées.

Bien évidemment, il y a une très forte présence de contractuels dans ce secteur, pour lesquels le Gouvernement a annoncé l’adoption prochaine d’une loi de titularisation. Mais, là encore, c’est la portion congrue. Le nombre de postes qui seraient ouverts au titre de la « déprécarisation » est très faible : seulement 200 postes d’enseignants et 100 de non-enseignants, pour 2 950 ayants droit en 2012 et 3 500 sur la durée du plan prévue.

Il convient de remarquer que l’enseignement agricole public étant de petite dimension, il est encore plus problématique de trouver les postes à supprimer et d’organiser ainsi la pénurie qui en résulte. L’application mathématique de la règle du non-remplacement d’un nombre élevé de départs à la retraite n’est pas adaptée à des effectifs d’enseignants peu nombreux et qui remplissent des missions tout à fait spécifiques.

Parallèlement, il est assez déroutant de constater que l’enseignement agricole privé est largement favorisé par rapport à l’enseignement agricole public : les suppressions de postes y sont moindres, les fermetures de classes également. À ce sujet, il faut rappeler que, en 2009, le Gouvernement a signé des protocoles avec les fédérations de l’enseignement agricole privé afin de lui assurer un financement pérenne.

Face à cela, on peut dire que le Gouvernement a manqué d’ambition et de détermination en faveur de l’enseignement agricole public, qui est ainsi engagé dans une espèce de « cercle vicieux » : réduction de l’offre de formation, fermeture de classes, baisse des effectifs, baisse des moyens, diminution de l’offre de formation, et ainsi de suite.

L’excuse apportée par le Gouvernement d’un passage de quatre à trois années pour l’obtention du baccalauréat professionnel ne saurait, à elle seule, justifier autant de désaffection.

À terme, c’est une très forte menace qui pèse sur l’enseignement agricole public, alors qu’il est complémentaire de l’enseignement général, les formations y sont, en général, de qualité et les taux d’insertion professionnelle sont excellents, sans doute parce que les formations proposées sont en adéquation avec les besoins des entreprises et des territoires.

« Instruire, c’est construire », déclarait Victor Hugo lors de l’examen de la loi Falloux en 1850 à la tribune de l’Assemblée nationale. Quand on considère la dégradation des moyens mis aujourd’hui à la disposition de l’enseignement public et plus précisément de l’enseignement technique agricole public, on peut craindre que, plutôt que construire, on s’attache à démolir.

Pour toutes ces raisons, les membres de la majorité sénatoriale de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication ont décidé de proposer le rejet des crédits du budget de l’enseignement technique agricole et, plus généralement, de la mission « Enseignement scolaire », tels qu’ils figurent dans le projet de loi finances pour 2012.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire » est toujours l’occasion d’entendre des propos paradoxaux.

L’éducation nationale mobilise 20 % des crédits de la Nation. C’est le premier budget de France. Pourtant, depuis des dizaines d’années, des orateurs se succèdent à la tribune de l’Assemblée nationale et du Sénat pour dénoncer l’incapacité des gouvernements, quelle que soit leur couleur politique, à affecter les crédits nécessaires à l’enseignement de nos enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Parallèlement, beaucoup trouvent que les moyens considérables que nous consacrons à ce secteur ne trouvent pas leur récompense.

Est-ce à dire que la qualité des formations est insuffisante ? Les Françaises et les Français n’atteignent-ils pas un niveau leur permettant de rivaliser avec les autres habitants des pays de l’Union européenne ou de l’OCDE ? Ne serions-nous pas en mesure d’être parmi les champions internationaux ?

En réalité, monsieur le ministre – nous sommes nombreux à le penser –, nous ne sommes pas les plus mauvais, loin s’en faut. Pourtant, vous devez régulièrement justifier le nombre d’enseignants rapporté au nombre d’élèves et rappeler l’évolution des chiffres depuis 1990. Lorsque l’on compare nos résultats avec ceux de nos voisins européens, on s’aperçoit que ce ne sont pas forcément ceux qui proportionnellement contribuent le plus au service de l’éducation qui sont les mieux récompensés. Certains pays, certes plus petits que le nôtre, ont des résultats sans doute bien supérieurs à ceux que peut produire notre système éducatif.

Aujourd'hui, je pense avant tout aux enseignants. Sachez, mes chers collègues, que les crédits que nous allons voter ou pas, mais qui, au final – je l’espère pour eux –, seront adoptés avant le 31 décembre, permettront d’abord de les rémunérer.

Si je pense à eux, c’est parce que leur métier est difficile, à l’image de celui de ministre de l’éducation nationale, comme cela a été rappelé. Avouons que les enseignants sont conduits à exercer tant de fonctions à la fois : suppléer des parents défaillants, combattre les violences, éveiller les élèves à toutes sortes de techniques, aux arts. En somme, ils doivent tout simplement les préparer à la société dans laquelle nous vivons.

De quoi ont-ils besoin ? Bien sûr, d’être rémunérés, et je salue l’effort réalisé par le Gouvernement pour que les enseignants puissent être mieux rémunérés en début de carrière. Ils ont aussi besoin, me semble-t-il, de bénéficier d’un soutien moral de la Nation, des élus, de nous tous, dans l’exercice d’un métier de plus en plus difficile. En effet, tout le monde ici le sait, un certain nombre d’étudiants qui comptaient embrasser cette belle carrière renoncent à leur projet en cours de route. Ils sont sans doute victimes de ce mal-être d’une société dans laquelle nous avons parfois du mal à nous reconnaître.

Monsieur le ministre, je profite du temps qui m’est imparti pour appeler votre attention sur quelques points.

Le premier est la nécessité d’adapter la formation offerte aux jeunes aux besoins de notre économie, idée qui est toujours combattue par certains. Pour ma part, je fais partie de ceux qui estiment qu’il n’est pas inutile que l’État se préoccupe de cet aspect de la question. Pour cela, il faut se rapprocher du terrain. De nombreuses expériences montrent en effet que les besoins exprimés par les entreprises doivent conduire les responsables, au sein des rectorats ou des conseils régionaux, à ouvrir de nouvelles filières et, si nécessaire, à fermer celles qui ne permettent pas de déboucher sur un emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

L’adaptation de notre outil de formation s’impose à tout moment.

Le deuxième point a trait à un problème que j’observe depuis longtemps : nous sommes vraiment mauvais pour l’apprentissage des langues étrangères. Disant cela, je ne veux évidemment froisser aucun professeur d’anglais, d’allemand ou d’italien, mais il n’est pas inutile de rappeler que les Français sont les derniers de la classe. Il faut bien admettre que, après des années d’apprentissage de l’anglais, nous sommes incapables de soutenir une vraie conversation avec nos voisins d’outre-Manche.

Pourtant, ce ne sont pas les moyens qui manquent. La qualité des enseignants n’est pas non plus en cause. Le problème, me semble-t-il, est culturel. On a sans doute trop longtemps considéré – en fait, pendant des siècles – que le français était la langue universelle, et nous nous sommes quelque peu endormis.

Le troisième point concerne un problème que nous rencontrons dans certaines parties de nos territoires.

La rénovation des baccalauréats professionnels fait que, là où il existait un bac pro bureautique à côté d’un bac pro secrétariat, il n’y aura plus qu’un bac pro tertiaire. Or, du fait de la diminution du nombre de postes, une nouvelle répartition va s’effectuer, si bien que, si un lycée professionnel n’a plus de baccalauréat professionnel tertiaire, il aura beaucoup de difficultés à nourrir les BTS. Je le souligne, car, dans certains de nos territoires – je représente un département qui n’est pas très peuplé –, cela devient particulièrement préoccupant.

Mon quatrième point concerne les personnes handicapées. Nous ne faisons pas les efforts qui s’imposent pour accueillir les enfants handicapés, je parle non pas de ceux qui sont accidentellement et provisoirement déficients, mais de ceux qui ont des difficultés à s’insérer dans la société et qui sont néanmoins aptes à apprendre un métier.

J’en viens à l’enseignement agricole privé.

Dans un département rural comme le mien, l’enseignement agricole privé contribue largement à former des jeunes à des métiers qui existent et pour lesquels il y a de grands besoins. Or, en dépit des postes maintenus, ce secteur rencontre de graves difficultés. Il souffre notamment d’un manque de locaux techniques et de bâtiments adaptés pour accueillir les élèves, qui viennent souvent de loin.

Pour terminer – je remercie Mme la présidente d’accommoder sa patience à ma tardité, si je puis paraphraser Malherbe –, je veux livrer une petite anecdote.

J’assistais, voilà quelques jours, dans mon département à une manifestation originale : il s’agissait de baptiser une école publique élémentaire. Après une large consultation, les parents et les enseignants ont choisi de la dénommer « Le Petit Nicolas ».

J’ai trouvé, comme les autres élus d’ailleurs, qu’un certain nombre des élèves de cette école ressemblaient à ce que nous étions autrefois, c’est-à-dire aux héros de la bande dessinée de Goscinny et Sempé. Il y avait bien sûr, Agnan, le meilleur élève, Alceste, celui qui mange sans cesse ou encore Clotaire, celui qui est assis au fond de la classe parce qu’il ne fait rien.

En fait, j’ai retrouvé dans le visage de ces enfants le même regard que nous portions, voilà une cinquantaine d’années, vers les adultes qui veillaient sur nous, un regard qui demandait simplement de tout faire pour pouvoir avoir, demain, une place dans notre société. Merci d’y contribuer, monsieur le ministre ; vous avez notre soutien !

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur le programme « Vie de l’élève ».

Votre politique, monsieur le ministre, hypothèque gravement l’avenir de notre jeunesse, en particulier celle qui subit à l’intérieur de l’école les inégalités sociales grandissantes qu’elle subit déjà à l’extérieur. Si l’on n’attend pas de l’école qu’elle soit le salut de la société, on peut exiger qu’elle n’aggrave pas cette injustice sociale.

Les conditions de scolarisation des élèves sont un élément fondamental de la réussite scolaire et de l’égalité des chances. Si l’école est un lieu d’acquisition de savoirs, elle est également un espace de socialisation, de transmission de valeurs, d’apprentissage d’exercice de la responsabilité et de pratique de la citoyenneté.

La réussite scolaire est aussi une question de bien-être et d’épanouissement.

Vous affirmez que le rôle des conseillers principaux d’éducation est déterminant dans la prévention de l’absentéisme et de la violence – deux phénomènes bien réels et ô combien inquiétants. Soit ! Mais alors pourquoi baisser de 4 % cette ligne budgétaire ? Les crédits passent de 2, 2 milliards d’euros à 2, 1 milliards d’euros avec une diminution des postes, alors que la présence d’adultes est primordiale dans la lutte contre les violences, les addictions et le harcèlement.

En primaire, le montant des crédits pour le financement des actions pédagogiques liées aux besoins particuliers baisse de 73 %. Ces crédits sont pourtant destinés à financer la prévention et le traitement des difficultés scolaires des enfants.

Ce manque d’ambition se retrouve particulièrement dans le peu de cas que vous faites de la médecine scolaire, et ce malgré les rapports de la Cour des comptes, des parlementaires et les manifestations diverses. Mais, jusqu’à présent, ces alertes sont restées lettre morte.

Monsieur le ministre, ce qui est particulièrement notable, dans l’expression des personnels de santé scolaire, c’est ce sentiment d’abandon de la part des pouvoirs publics. J’ai mis en place un groupe de travail composé de sénateurs socialistes sur la médecine scolaire. Toutes les auditions font non seulement ressortir les graves difficultés que rencontre ce secteur, mais aussi et surtout son utilité absolue.

Pourtant, les professionnels – médecins et infirmiers – restent très mobilisés sur le terrain. Ils sont particulièrement investis et motivés par leurs missions. Ils sont d’ailleurs force de propositions pour faire évoluer ce service public, auquel ils sont attachés, et qui a un rôle fondamental dans la promotion de la santé des élèves.

La santé scolaire est dotée, dans le projet de loi de finances pour 2012, d’un budget de 440 millions d’euros, ce qui représente 0, 73% du budget de l’éducation nationale et correspond à une augmentation de 0, 5 %, en deçà du taux de l’inflation.

La médecine scolaire doit être un outil fort dans la lutte qu’il convient de mener contre les inégalités sociales dans les parcours scolaires. La détection, le plus tôt possible, des problèmes de santé est l’un des facteurs essentiels de la réussite scolaire, et donc sociale de l’élève. Or, considérant les politiques menées actuellement par le Gouvernement – déremboursement des médicaments, surcoût des mutuelles, précarisation accrue –, et malgré les indicateurs de pauvreté qui font apparaître une recrudescence des maladies telles que la tuberculose et la gale, on observe un renoncement dramatique des familles les plus modestes à assurer la santé de leur enfant.

Nous avons la chance de bénéficier d’un service public de santé de proximité qui permet le suivi des enfants à partir de trois ans – et non plus dès deux ans, puisque la préscolarisation a été réduite à portion congrue ! – jusqu’aux jeunes adultes en fin d’études universitaires. Il s’agit là d’une spécificité française et d’un atout considérable en matière de prévention sanitaire, que vous n’avez pas su valoriser, ni même préserver.

Or les études internationales convergent pour reconnaître la période scolaire comme étant le moment clé de la construction des inégalités de santé et pour relever l’importance du « retour sur investissement », durant cette période, en matière de santé publique et d’éducation à la santé.

Ce matin, votre collègue Laurent Wauquiez a dit à propos de l’enseignement supérieur : « Il faut investir dans [la santé], car c’est à cette période de leur vie que les étudiants adoptent ou non de bons comportements. » Alors, monsieur le ministre, faites-le !

Si les personnels ont su adapter leurs pratiques, les textes réglementaires, eux, n’ont pas suivi, ce qui a entraîné une absence de hiérarchisation des diverses missions et un manque d’objectifs clairs.

Une réflexion interministérielle était en cours sur l’évolution de ces missions, mais il semblerait qu’elle soit stoppée du fait, notamment, du refus du ministère de la fonction publique de reconnaître les infirmières scolaires en catégorie A, contrairement à l’engagement du Président de la République. Pouvez-vous nous préciser, monsieur le ministre, ce qu’il en est vraiment ? En effet, cette situation crée chez elles un fort sentiment d’injustice par rapport à leurs collègues de la fonction hospitalière. Pourtant, leur rôle est ô combien essentiel à la bonne marche d’un établissement scolaire tant par les gestes techniques que par l’écoute apportée à chaque situation.

De plus, les infirmières scolaires rendent compte au rectorat de leur travail via le logiciel SAGESSE, un outil de gestion au quotidien, mais dont les données ne remontent pas, hélas ! au-delà des rectorats.

L’institution ne manifeste que peu d’intérêt pour le travail réel accompli par les personnels de santé scolaire, sauf pour ce qui concerne le taux de réalisation des bilans de santé des enfants âgés de six ans !

Des mesures urgentes sont nécessaires pour revaloriser la profession de médecin scolaire. Face au manque d’attractivité du métier – près de 200 postes sont vacants – et aux perspectives démographiques encore plus défavorables que pour les autres professions médicales, nous ne pouvons faire l’impasse plus longtemps sur ce sujet.

Comment ignorer l’indécence des salaires des médecins de l’éducation nationale, alors que celui des médecins de prévention des personnels est de l’ordre du double ? Dès lors, comment espérer recruter, après un concours d’entrée dans la fonction publique, de jeunes médecins avec un salaire inférieur à celui qu’ils perçoivent au cours de leurs études en tant qu’interne ?

Au regard de l’étendue de leur secteur, qui a doublé en moins de dix ans, avec un médecin pour un nombre d’élèves compris entre 10 000 et 17 000, les médecins ne sont plus en mesure de se déplacer dans les établissements scolaires. Cette pénurie entraîne un transfert de tâches vers l’infirmière.

Vous l’aurez compris, monsieur le ministre, c’est à la mise en œuvre d’une véritable politique de santé scolaire que nous appelons, celle-là même que vous n’avez pas su définir, ni a fortiori mettre en œuvre en dix ans !

Une fois les missions redéfinies, il faudra s’atteler à la question des partenariats entre tous les acteurs de la santé, afin de définir une structure pour assurer le pilotage politique local – pourquoi pas les Agences régionales de santé ? – et créer des pôles cohérents de coopération entre la médecine scolaire, la médecine de ville, la protection maternelle et infantile et les centres médico-psycho-pédagogiques.

Par ailleurs, comme le pointent les responsables de l’EHES, l’École des hautes études en santé sociale, il existe un maillon manquant entre l’infirmière et le médecin. Aussi faut-il se demander s’il ne convient pas d’avoir un ingénieur de santé scolaire diplômé d’un master de pratiques avancées.

Nous ne pouvons plus faire l’impasse sur une véritable politique publique de prise en charge de l’enfant et de l’adolescent dans sa globalité et donc dans la construction d’un projet politique partagé de médecine publique de prévention. À la question : « A-t-on besoin d’une médecine scolaire ? » La réponse est résolument oui ! Parce que santé et scolarité sont devenues indissociables, parce qu’il s’agit d’un réel enjeu pour l’avenir de notre jeunesse et parce que nous sommes convaincus que le service public a encore un rôle fondamental à jouer dans la promotion de la santé des élèves ! Mais nous en reparlerons certainement dans les mois qui viennent, monsieur le ministre.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Michel

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis cinq ans, nous déplorons que l’ambition affichée par la majorité pour passer « de l’école pour tous à la réussite de chacun » ne soit restée qu’un slogan. En agissant comme un tamis éducatif qui retient les « meilleurs », sans se préoccuper des élèves les plus en difficulté, le Gouvernement aura effectivement mis fin à l’école pour tous.

Alors même que votre bilan est unanimement reconnu comme désastreux par les parents d’élèves, par les personnels éducatifs et par les élus locaux, vous poursuivez aveuglément le démantèlement de l’éducation nationale, monsieur le ministre.

Il y a quelques semaines, Mme Pécresse prétendait devant les députés que le gouvernement auquel vous appartenez s’était toujours refusé à réduire la politique scolaire à une question de chiffres et qu’il y avait, dans ce pays, une exigence de résultat. Pourtant, vous n’avez développé depuis cinq ans qu’une politique quantitative déconnectée des impératifs pédagogiques, et ce budget pour 2012 en est une désolante illustration.

Je ne reprendrai pas les chiffres cités par les orateurs qui m’ont précédée. Mais vous poursuivez votre politique de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, sans mener aucune réflexion sur les enjeux éducatifs ni sur les besoins propres à chaque territoire, alors que tous les rapports institutionnels pointent un déficit en matière d’encadrement et de moyens, notamment dans les écoles maternelles et élémentaires, ce qui est préjudiciable aux élèves les plus en difficulté.

De toute évidence, les conclusions apportées par l’OCDE, par la Cour des comptes et par le Centre d’analyse stratégique n’ont jamais franchi les portes du « 110 de la rue de Grenelle ».

Pour ce qui concerne les résultats, où sont-ils, monsieur le ministre ?

Au cours de cette législature, l’enseignement de premier degré public aura connu 27 637 réductions de postes avec, comme seul objectif pédagogique, la suppression des RASED et la fin de la préscolarisation dès deux ans.

Le premier maillon éducatif qui conditionne la suite des apprentissages est laissé à l’abandon au nom d’un prétendu réalisme budgétaire. En parallèle, la proportion d’élèves en très grande difficulté croît de manière considérable et le poids des inégalités sociales tend à s’alourdir.

De la même manière, nous protestons vivement contre la nouvelle baisse des crédits, hors titre 2, accordés aux missions pédagogiques : près de 20 % en moins dans le premier degré par rapport à 2011, ce qui correspond à une division des crédits par treize en cinq ans.

L’assèchement des moyens matériels, que le vote de ce budget ne manquerait pas d’amplifier, empêcherait durablement de favoriser les innovations et la personnalisation des parcours pédagogiques, pourtant nécessaires. Ainsi, 20 % des élèves ne maîtrisent pas les fondamentaux à l’entrée en sixième. Je vous rappelle que, à la sortie du collège, la proportion des élèves les plus faibles est passée, en dix ans, de 15 % à 18 %. Or qui sont les plus touchés ? Ce sont les enfants des milieux sociaux défavorisés, la part des élèves en grande difficulté ayant doublé entre 2003 et 2009.

Au lieu de concentrer les moyens là où ils sont les plus nécessaires et de dynamiser l’éducation prioritaire, notamment en relançant la préscolarisation dans les zones dites sensibles, vous accentuez le déséquilibre entre les niveaux d’enseignement.

Concernant la gestion des ressources humaines, le constat est, à notre grand désarroi, identique. Les coupes budgétaires drastiques fragilisent durablement les équipes pédagogiques.

Alors qu’il serait urgent de revenir sur la désastreuse réforme de la mastérisation, le budget consacré à la formation des professeurs est, cette année encore, réduit à portion congrue. En effet, celle-ci ne répond en rien à la volonté d’améliorer la formation initiale et l’entrée dans le métier des enseignants. Au contraire, elle n’est qu’une simple parade pour réaliser des suppressions de postes. Avec quels résultats ?

D’une part, les primo-entrants souffrent sur le terrain de ne pas avoir appris leur métier. Dans les académies de Poitiers et de Paris, on signale une proportion très importante de jeunes professeurs en grande difficulté.

D’autre part, une véritable crise des vocations s’est installée dans notre pays. À la session de 2011, 20 % des postes ouverts au titre du CAPES sont restés vacants, faute de candidats. En mathématiques, ce taux est monté à 40 %, pour atteindre 58 % en lettres classiques. C’est une crise sans précédent !

Enfin, la précarisation des enseignants s’est accrue par un recours massif aux emplois de vacataires et de contractuels, dont le nombre a augmenté de 76 % entre 2005 et 2010. Plus que jamais, à raison, ces enseignants manifestent leur colère.

Pourtant, nous le savons tous, la formation des enseignants est un levier essentiel pour améliorer le système éducatif.

Comme l’ont déjà dit Mmes les rapporteures pour avis Françoise Cartron et Brigitte Gonthier-Maurin, la décision que vient de rendre le Conseil d’État va, sans nul doute, vous contraindre au dialogue, monsieur le ministre.

S’il était adopté en l’état, ce budget entraverait encore un peu plus le dynamisme de nos territoires, qui souffrent de ces étranglements budgétaires.

Nous, sénatrices et sénateurs de gauche, nous déplorons le traitement différencié entre les académies sans qu’aucune corrélation puisse être établie en fonction des difficultés propres à chaque territoire. Je pense aux départements d’outre-mer qui méritent une attention particulière et à la désectorisation qui n’a fait qu’amplifier les inégalités entre les territoires et la ghettoïsation de certains établissements.

À ce propos, les conclusions de la Cour des comptes sur les conséquences de l’assouplissement de la carte scolaire sont sans appel : sur l’ensemble des collèges appartenant aux réseaux ambition réussite, près de 80 % d’entre eux ont perdu des élèves. Ces établissements concentrent donc inévitablement les facteurs d’inégalité contre lesquels doit lutter la politique d’éducation prioritaire.

Je pense également aux communes rurales où l’école représente un service public de proximité indispensable. À cet égard, je relève que la charte des services publics, qui imposait que toute fermeture de classe se fasse de manière concertée, n’a jamais été respectée.

Loin de revenir sur cette politique, le Gouvernement accentue la désertification scolaire au détriment des territoires qui cumulent déjà nombre de difficultés.

Par conséquent, nous estimons, à juste titre, que les crédits de la mission « Enseignement scolaire » tels qu’ils nous sont proposés ne soutiennent pas cet idéal républicain de la réussite pour tous.

Alors que notre jeunesse doit être au cœur de nos politiques publiques, et ce d’autant plus en cette période de crise, elle se retrouve sacrifiée sur l’autel de ce que vous prétendez être le réalisme budgétaire.

Monsieur le ministre, les économies de bouts de chandelles que vous réalisez aujourd’hui seront les charges insupportables auxquelles nous serons demain confrontés, lorsqu’un nombre toujours croissant d’élèves seront en grande difficulté du fait d’un déficit en matière d’encadrement et d’accompagnement. D’ailleurs, au sein même de votre majorité, certains députés de l’UMP, dont le président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, se sont abstenus lors du vote des crédits relatifs à l’enseignement scolaire.

Parce que ce budget ne porte aucune ambition, parce qu’il renforce l’incohérence et l’opacité de la gestion des personnels, nous, sénatrices et sénateurs socialistes, voterons contre ces crédits.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE et au banc de la commission

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les Français sont nuls en langue étrangère ; voilà en tout cas ce qu’on nous ressasse depuis des années. Mais, contrairement à M. Jean-Claude Lenoir, je ne crois pas que ce soit une fatalité !

Les résultats des Français aux évaluations internationales sont toutefois médiocres. L’exemple du TOEFL – Test of english as a foreign language – n’est pas très glorieux : le score moyen obtenu par les étudiants en 2008 place la France loin derrière l’Allemagne et les Pays-Bas. Inutile, donc, de se voiler la face ; nous sommes confrontés à un véritable problème, mais aussi à un formidable défi !

La bonne maîtrise d’une langue vivante est aujourd’hui un prérequis pour tous. Mais, au-delà de la compétence fondamentale à acquérir – je peux en témoigner, puisque j’ai baigné durant trente ans dans une culture et une langue différentes –, l’ouverture à l’altérité, l’enrichissement engendré par l’appréhension d’une culture différente, d’un autre système de pensée, sont autant d’atouts qu’offre l’apprentissage des langues étrangères.

Certes, aujourd’hui, notre gouvernement est plus enclin à nous proposer un projet de repli sur soi et de peur des étrangers... Et, pourtant, on encourage nos enfants à mieux maîtriser leurs langues.

Nous n’en sommes pas à un paradoxe près et, monsieur le ministre, nous ne pouvons que nous féliciter de votre initiative d’avoir mis en place le comité stratégique des langues, qui doit rendre son rapport à la fin de l’année. Nous espérons que la commission de la culture, de l’éducation et de la communication en aura rapidement connaissance.

La volonté affichée est remarquable : déjà, à l’automne 2009, le Président de la République, annonçant un plan d’urgence pour les langues vivantes étrangères, manifestait son ambition de former des bacheliers bilingues, voire trilingues.

Les pistes évoquées sont tout aussi ambitieuses : sans surcoût, ni embauche supplémentaire, vous proposez un apprentissage dès l’âge de trois ans et une « exploration des diverses modalités d’apprentissage »... Beau programme que l’on ne peut que saluer !

Mais il semble bien que nous ne vivions pas dans le même monde. Le monde de l’éducation, que je connais, a vu ses assistants de langues vivantes supprimés, ...

Debut de section - PermalienPhoto de Claudine Lepage

... les formations continues des enseignants rabotées et le nombre d’élèves par classe croître encore en raison des 14 200 suppressions de postes. Dans ces conditions, vous comprendrez que la communauté éducative comme les parents manifestent une certaine réserve.

Même si, depuis la réforme de la formation des enseignants, un certificat de compétences en langues est exigé, nous savons tous parfaitement que, en attendant, la majorité des enseignants en poste n’a pas le niveau requis et devra, en l’absence d’assistants de langues vivantes, assurer ces cours de langues sans formation dans la langue ni dans l’enseignement de cette langue. Or, même avec le recours aux technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement, TICE, que vous préconisez, on ne peut pas enseigner une langue que l’on ne maîtrise pas !

Je ne peux que regretter cette politique d’affichage pour laquelle, notamment, « l’enseignement précoce dès l’école maternelle avec les TICE » serait la panacée.

Encore faudrait-il d’ailleurs être certain de la pérennisation de l’école maternelle. Après la discussion confisquée ici même, voilà quelques semaines, de la proposition de loi de Mme Françoise Cartron, il est permis de nourrir certaines inquiétudes. Mais c’est un autre débat…

Justement, nul ne peut nier l’intérêt de cet apprentissage de l’anglais dès trois ans. Mais ne nous berçons pas d’illusions : le vrai bénéfice réside dans l’exposition précoce, mais surtout suffisante aux langues étrangères. Or tous les enfants n’ont pas la chance de baigner dans un univers familial bilingue ou de langue différente du français. Dans ces conditions, deux fois trois quarts d’heure de pseudo-enseignement par semaine n’ont aucun sens si l’on vise un véritable apprentissage.

Bien sûr, mon intention n’est pas de décourager initiatives et bonnes volontés, mais je tiens à dénoncer ce miroir aux alouettes qui ne suscitera que déception chez les enfants, les enseignants et les parents.

Il est parfaitement illusoire et malhonnête de laisser penser, comme vous le dites, monsieur le ministre, que l’on pourra « réinventer » l’enseignement des langues vivantes sans y consacrer un minimum de moyens. À cet égard, les échanges d’enseignants seraient déjà profitables. Nous disposons de l’outil permettant d’y parvenir, le programme Jules Verne, qui ne demande qu’à être développé.

En tout état de cause, il semblerait plus réaliste d’envisager d’abord, pour les plus petits, un éveil aux différentes langues, avec un objectif d’éducation à la diversité, comme le préconise le linguiste Claude Hagège.

J’aimerais aborder maintenant la question des sections internationales.

L’ouverture sur des cultures différentes est bien leur objectif, puisqu’elles scolarisent des élèves déjà empreints d’une double, voire d’une triple culture, parce qu’ils sont d’origine étrangère, qu’ils ont vécu à l’étranger ou sont issus de familles expatriées. Les cours y sont assurés par des enseignants français recrutés sur profil et étrangers intervenant alors dans leur langue pour des enseignements spécifiques.

Ainsi, contrairement aux sections européennes, ces sections internationales présentent, certes, un enseignement renforcé en langue, mais surtout une pédagogie culturellement différenciée. C’est là que réside tout leur intérêt.

La France compte plusieurs lycées au statut d’établissement international, celui de Saint-Germain-en-Laye, par exemple. La capitale dispose non pas d’un tel établissement, mais d’un lycée comportant six sections internationales près de la porte de Clichy. La cité scolaire Honoré de Balzac bénéficie d’une riche mixité sociale : sur les 2 000 élèves, 50 % sont inscrits en sections internationales et 50 %, inscrits en section générale, sont des enfants du secteur.

Les bienfaits de cette grande hétérogénéité sociale, alliée à l’ambiance multiculturelle, sont reconnus par tous. Cependant, de fortes tensions concrétisées par des mouvements de grève des professeurs et des élèves existent depuis plusieurs mois.

Une grande inquiétude est aussi manifeste chez les parents, qui s’interrogent sur les moyens : malgré sa localisation, l’établissement ne bénéficie pas du programme ECLAIR. Ils s’interrogent aussi sur les problèmes de personnels : manque de postes, non-remplacement de personnel, professeurs des sections internationales non recrutés sur un profil particulier propre à un enseignement pluriculturel, alors que les textes le commandent.

Au regard de l’absence de statut de lycée international de l’établissement, la pérennité même de ces sections est en question, puisque, si elles étaient « diluées » dans la section générale française, elles perdraient de facto toute spécificité pédagogique et ne seraient plus que des sections à enseignement linguistique renforcé.

Pour pallier ces tensions certaines et ces éventuels dysfonctionnements – le passage de quatre proviseurs en cinq ans et l’absence de projet d’établissement posent question –, plusieurs associations de parents d’élèves, auxquelles je m’associe, sollicitent la tenue d’assises sur l’avenir de la cité scolaire Honoré de Balzac, notamment dans sa dimension internationale. Pensez-vous, monsieur le ministre, répondre à cette demande ?

Même si, par ailleurs, la capitale ne dispose d’aucune école élémentaire internationale – hors un projet pilote, depuis vingt-cinq ans, d’école franco-allemande dans l’est parisien –, le lycée Balzac répond à un véritable besoin, comme en témoigne la croissance continue des demandes de scolarisation en sections internationales.

Beaucoup d’élèves effectuent des trajets de plusieurs heures, car, malgré l’ouverture récente de quelques sections dans d’autres lycées parisiens, Balzac offre la plus grande diversité. Et le nouveau lycée international, dont l’ouverture est annoncée à l’est de l’Île-de-France, ne pourra rivaliser, notamment aux yeux des expatriés et des entreprises multinationales, avec un établissement situé dans Paris intra-muros.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget de l’éducation nationale pour 2012, que j’ai l’honneur de vous présenter ce soir, est à la fois ambitieux et responsable : ambitieux, parce qu’il permet de financer dans des conditions satisfaisantes la troisième révolution de l’enseignement que nous avons engagée, celle de la personnalisation ; responsable, parce qu’il répond aux exigences budgétaires actuelles.

Face au contexte difficile lié à l’environnement international et aux contraintes budgétaires, le Gouvernement a dû faire des choix courageux.

Hors charge de la dette et hors pensions, la dépense de l’État diminuera donc en valeur et la masse salariale reculera pour la première fois depuis 1945.

En outre, la dépense totale de l’État, dette comprise, progressera moins vite que l’inflation ; elle régressera donc en volume.

Enfin, les dernières mesures annoncées par le Premier ministre permettront d’affermir notre objectif de déficit, toutes administrations confondues, de 4, 5 % du produit intérieur brut en 2012, crédibilisant ainsi le retour à l’équilibre des finances publiques sur lequel nous nous sommes engagés.

Ce budget repose aussi sur un équilibre entre la volonté du Gouvernement de préserver la croissance et la nécessaire réduction des déficits.

Cet équilibre, le Gouvernement le respecte depuis le début de la crise ; le Président de la République l’a encore évoqué aujourd’hui. Il nous préserve de mesures drastiques qu’ont dû prendre certains pays européens : je pense au gel, voire à la baisse des salaires ! Regardez l’Espagne, où le gouvernement a décidé unilatéralement de baisser la rémunération des enseignants de 5 %. Dans la province de Madrid, il leur a même été demandé de travailler deux heures de plus par semaine, sans aucune contrepartie.

Toutes ces mesures, nous les avons écartées, car, depuis le début de la crise, nous avons respecté l’équilibre que je viens de mentionner.

Malgré ce contexte difficile, l’effort de la Nation en faveur de l’éducation continue à progresser. Aussi, messieurs les rapporteurs spéciaux, je ne peux pas partager votre avis.

La mission « Enseignement scolaire » atteint pour la première fois 62, 3 milliards d’euros, dont 61 milliards d’euros au seul profit du ministère de l’éducation nationale. Cela représente une augmentation de 0, 9 % par rapport à 2011, ce qui est supérieur à la moyenne du budget de l’État.

Depuis 2007, le budget de l’éducation nationale aura donc progressé de 5, 6 %. L’investissement de la Nation pour l’école a donc été à la hauteur de l’enjeu.

Comme l’a rappelé M. Pignard, l’éducation nationale reste le premier poste de dépenses : un quart du budget de l’État, hors dette, et près de la moitié de la masse salariale, avec 57 milliards d’euros de dépenses de personnels.

Mais c’est également un budget responsable, puisque, pour la première fois, les dépenses de masse salariale diminuent hors pensions. Comment peut-on parler d’économies de bouts de chandelles, madame Michel ? Un poste de fonctionnaire, c’est 1 million d’euros d’économiser sur une carrière. Avec la retraite, cela représente une économie supplémentaire de 700 000 euros à 800 000 euros. Par conséquent, nous empêchons la dette de l’État de s’accroître de 1, 8 million d’euros.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Compte tenu de l’état des finances publiques, calculez l’impact sur la dette de l’État de la suppression de 150 000 fonctionnaires !

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Or certains proposent de créer 60 000 postes de fonctionnaires supplémentaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Néri

C’est la différence entre vous et nous !

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

M. Luc Chatel, ministre. Sur la durée d’une vie, faites le calcul : cela représente plus de 100 milliards d’euros supplémentaires pour la dette de l’État !

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

L’effort budgétaire consenti exige une gestion minutieuse de nos crédits et une optimisation permanente de notre système éducatif, nous en sommes d’accord, mesdames, messieurs les sénateurs. Cette recherche d’efficacité et de performance, cette gestion responsable et moderne des moyens importants que consacre l’État à l’éducation – nous devons des comptes à nos concitoyens – sont totalement au service de notre offre éducative.

Notre objectif est simple et totalement républicain : améliorer les résultats des élèves. Madame Gonthier-Maurin, je crois à la détection des meilleurs. Je crois l’école de la République capable – c’est d’ailleurs l’un de ses principes – de détecter les meilleurs talents pour les pousser vers l’excellence, mais aussi de repérer les enfants qui ont des difficultés pour leur apporter un soutien scolaire et éviter qu’ils ne quittent le système éducatif prématurément.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Nous nous rejoindrons peut-être sur un point : la personnalisation. C’est précisément la politique que nous portons.

Oui, nous voulons réaffirmer notre pacte républicain, donner une nouvelle dynamique à notre pays tout en élargissant et en diversifiant nos élites ! Notre objectif est de construire une solution pour chacun.

Je le répète, nous avons fixé un cap, celui de la personnalisation. Nous ne pouvons nous satisfaire que notre pays, cinquième puissance économique mondiale, soit aujourd'hui au-delà de la vingtième place dans les classements internationaux des systèmes éducatifs. Notre école, pour gagner en efficacité et mieux accomplir ses missions, doit changer. Eh bien, mesdames, messieurs les sénateurs, elle change !

Depuis cinq ans, nous inscrivons notre action dans la durée, dans un projet d’ensemble…

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

… et, contrairement à ce que j’ai pu entendre, les effets de cet engagement sont d’ores et déjà sensibles, comme l’a très justement souligné M. Carle.

Les résultats en hausse dans les évaluations en CE1 et en CM2 l’année dernière révèlent une meilleure maîtrise des fondamentaux. Nous avons constaté des progrès significatifs, en particulier une hausse de quatre points dans la maîtrise des fondamentaux en français dans les évaluations de CE1. En CM2, la progression est également perceptible, notamment en mathématiques, puisque les élèves ayant des acquis insuffisants ont diminué de 23 %.

Je note également que l’enquête CEDRE – Cycle des évaluations disciplinaires réalisées sur échantillon –, publiée pour la dernière fois en 2003, relevait à l’époque non pas 20 %, madame le sénateur, mais 15 % d’élèves ne maîtrisant pas les fondamentaux en entrant en sixième. Six ans après, en 2009, ce pourcentage d’élèves est passé à 13 %.

Sur la question de la voie professionnelle, que connaît bien Mme Gonthier-Maurin et qui a été évoquée par plusieurs d’entre vous, je note que les résultats du baccalauréat 2011 sont encourageants. Grâce au baccalauréat professionnel, 71 % d’une classe d’âge a obtenu le baccalauréat, alors que ce chiffre, comme l’a rappelé Mme Mélot, stagnait depuis une quinzaine d’années.

Nous avons voulu réformer la voie professionnelle. La session 2011 du baccalauréat a rassemblé 48 000 candidats supplémentaires, soit 37 000 diplômés de plus. C’est encourageant ! Je note surtout que, grâce à la réforme, 66 % des élèves poursuivent aujourd'hui leurs études au-delà du BEP, contre 50 % auparavant. L’objectif était justement de permettre aux élèves d’aller au-delà de ce niveau de qualification.

Je souligne également que les élèves engagés dans cette voie décrochent moins depuis la réforme. Ils étaient 15 % en 2010 à sortir de la seconde professionnelle, ce taux a baissé à 13 % en 2011. Ils étaient 20 % en 2010 à sortir de la première année de CAP, ce taux est descendu à 17 % en 2011. Tous ces chiffres sont encourageants.

Je voudrais rassurer M. Jean-Claude Lenoir au sujet des baccalauréats professionnels secrétariat, comptabilité et gestion. Ces spécialités ont fait l’objet d’une rénovation, qui conduira à la transformation en un seul baccalauréat professionnel intitulé gestion et administration.

C’est l’aboutissement de nombreux travaux menés depuis plusieurs années qui ont souligné les insuffisances de ces deux baccalauréats professionnels. Ils souffraient d’une inadéquation au marché de l’emploi, l’insertion professionnelle de ces diplômés étant la plus faible de tous les baccalauréats professionnels, et connaissaient une chute drastique de leurs effectifs depuis 2008. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de conduire cette rénovation.

Les réformes que nous avons entreprises pour assurer la réussite de chaque élève se déclinent autour de trois orientations : la personnalisation, que j’ai évoquée, l’autonomie et une politique de ressources humaines ambitieuse.

Nous voulons assurer une plus grande autonomie, parce que nous pensons que personnaliser, c’est être en mesure de s’adapter, donc de laisser les acteurs locaux innover, disposer d’une réelle marge de manœuvre à la fois pédagogique et organisationnelle. Pour être effective, cette personnalisation doit donc reposer sur l’autonomie de nos établissements scolaires, sur la confiance faite aux acteurs locaux de l’éducation nationale, pour libérer les initiatives locales et le système.

J’évoquais à l’instant une politique de ressources humaines ambitieuse. Avec la personnalisation, nos enseignants doivent s’emparer de nouvelles missions. Ils doivent pour cela disposer d’une meilleure formation, d’une plus grande reconnaissance et d’un suivi mieux assuré.

Plusieurs remarques ont été formulées sur la décision que le Conseil d’État a rendue le 28 novembre concernant la mastérisation. Je précise que le Conseil d’État a confirmé la légalité de l’arrêté du 12 mai 2006 définissant les compétences attendues des enseignants, des documentalistes et des conseillers principaux d’éducation stagiaires. En revanche, il a considéré que, sur la forme, mon ministère ne pouvait pas seul, sans celui de l’enseignement supérieur et de la recherche, modifier ou abroger le cahier des charges y afférent. Cette annulation repose donc exclusivement sur le fait qu’il s’agissait d’une compétence partagée. Cette décision ne produira pas ses effets immédiatement, le Conseil d’État ayant sursis à statuer et ne s’étant pas encore prononcé sur la date d’effet de cette annulation partielle. Nous allons donc, avec Laurent Wauquiez, faire un certain nombre de propositions sur le sujet.

J’évoquais une politique de ressources humaines ambitieuse. J’ai entendu, sur toutes les travées, des encouragements, des félicitations sur la revalorisation des carrières enseignantes. Je fais juste remarquer qu’elle n’est possible que parce que nous ne remplaçons pas la moitié des fonctionnaires partant à la retraite. Tout le monde sait qu’il est totalement irréaliste de promettre aux enseignants à la fois de recruter davantage et de mieux les payer.

Oui, nous avons fait un choix : moins d’enseignants, mieux rémunérés ! Je rappelle que, depuis 2007, 1, 4 milliard d'euros ont été réaffectés à la revalorisation des enseignants, ce qui nous a permis en particulier de procéder à une revalorisation très significative du début de carrière. J’ai annoncé la semaine dernière que la première fiche de paye des enseignants passerait la barre symbolique des 2 000 euros le 1er février prochain. En cinq ans, la première fiche de paye des enseignants aura donc augmenté de 18 %, comme l’a souligné M. Carle.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Connaissez-vous, mesdames, messieurs les sénateurs, une entreprise qui a augmenté ses salariés entre 2007 et 2012 de 18 % ? Il n’y en a pas beaucoup !

C’est un signal très fort que nous envoyons à nos jeunes enseignants de valorisation de leur carrière et de leur métier.

La rentrée 2011 a respecté les trois priorités que je viens d’énoncer : avec l’extension à la classe de première de la réforme du lycée général et technologique, avec l’accompagnement personnalisé, avec la poursuite d’expérimentations, qui s’inscrivent dans notre démarche de recherche d’autonomie, de marges de manœuvre, de confiance envers les acteurs locaux.

Plusieurs expérimentations montent en puissance cette année.

Je pense aux internats d’excellence, qui disposent de 10 000 places et devraient, à terme, atteindre une capacité de 20 000 places. Ils sont vingt-deux dorénavant à accueillir des élèves méritants issus de milieux défavorisés.

Je pense au dispositif ECLAIR, qui permet à plus de 300 collèges issus de l’éducation prioritaire d’offrir des solutions éducatives innovantes, avec une plus grande autonomie, notamment dans le recrutement des enseignants.

Je pense aux établissements de réinsertion scolaire, qui sont un succès puisque, sur les 153 élèves accueillis – des élèves très perturbateurs, pour lesquels nous n’avions pas de solution au préalable, qui avaient été renvoyés plusieurs fois de leur collège –, neuf sur dix sont réinsérés, un an après, soit dans leur collège, soit dans un lycée, soit dans un centre d’apprentis. C’est donc un succès qui ne méritait pas la polémique que nous avons connue l’année dernière.

Je pense aussi aux expérimentations dans le domaine du temps scolaire. Le nombre d’élèves bénéficiant d’une organisation profondément innovante des rythmes scolaires, avec les cours le matin et le sport l’après-midi, a doublé pour atteindre 15 000 depuis la rentrée.

Toutes les mesures qui permettent d’offrir une solution adaptée à chaque élève montent en puissance. C’est cela, la personnalisation !

Je veux parler de la lutte contre le décrochage scolaire. À cet égard, monsieur Domeizel, si vous me permettez cette précision, il ne faut pas confondre le décrochage scolaire et la réinsertion scolaire. Les décrocheurs scolaires ne sont pas tous des élèves très perturbateurs accueillis dans des établissements de réinsertion scolaire. Les décrocheurs sont des élèves qui abandonnent leurs études en cours de route. Ils sont trop nombreux. Sur 220 000, un tiers a été pris en charge par les missions locales. Nous avons décidé d’instaurer un nouveau dispositif de suivi personnalisé de chaque élève. Une solution sera proposée à chacun, grâce à la coordination des services de l’éducation nationale et de l’État dans les services déconcentrés.

En matière de solution adaptée à chaque élève, j’inclus la scolarisation des élèves handicapés. Nous avons accompli des efforts considérables, puisque 60 % d’élèves handicapés de plus sont scolarisés depuis le vote de la loi de 2005. Je rappelle que 90 % des 214 000 élèves scolarisés aujourd'hui le sont à temps complet.

En cette rentrée 2011, nous avons ouvert 2 000 postes d’assistants de scolarisation supplémentaires, conformément aux engagements du Président de la République. Le budget qui vous est présenté prévoit de créer 2 300 postes supplémentaires à la rentrée 2012. Après une augmentation des crédits destinés à la scolarisation des enfants handicapés de 13 % dans le budget 2011, nous vous proposons une augmentation de 30 % dans le budget 2012, soit 455 millions d'euros. C’est donc véritablement une priorité !

En ces temps difficiles, la gestion des moyens doit être particulièrement minutieuse. C'est la raison pour laquelle nous avons adopté la méthode du dialogue de gestion, à la suite des préconisations de la Cour des comptes, fondée sur le discernement. Cette méthode permet d’adapter les moyens pour les concentrer là où ils sont utiles, à l’issue d’un dialogue engagé avec les académies, assurant ainsi un véritable « sur mesure ».

Plutôt que de décider depuis la rue de Grenelle la répartition des moyens académie par académie, établissement par établissement, nous travaillons très en amont, en dialoguant avec chaque académie. Ce sont elles qui font des propositions, dans le cadre d’un schéma national, sur la répartition des moyens, afin de les affecter là où les besoins sont les plus importants.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, ce travail est actuellement en cours dans le cadre de la préparation de la rentrée scolaire 2012.

Ce travail nous a d'ailleurs permis d’effectuer des ajustements. Dans le primaire, j’avais annoncé l’année dernière que le nombre de fermetures de classes en 2011 serait de l’ordre de 1 500. À la rentrée, nous avons constaté 1 050 fermetures. Cela signifie que nous sommes capables de nous adapter à une situation locale selon les spécificités de tel ou tel secteur du territoire.

Je rappelle que le Président de la République s’est engagé, pour la rentrée 2012, à ce qu’il n’y ait pas plus de fermetures de classes que d’ouvertures. Les classes seront redéployées suivant l’évolution de la démographie dans les départements.

Je rappelle également que 176 millions d'euros sont affectés dans ce budget à la revalorisation des carrières enseignantes. Cette revalorisation touche les débuts de carrière, comme je l’évoquais tout à l’heure, avec les 2 000 euros bruts pour tout jeune enseignant.

Un certain nombre de mesures indemnitaires sont également prévues dans le cadre de l’exercice 2012 : la revalorisation de 50 % de la part variable de l’indemnité des directeurs d’écoles, qui était très attendue ; la montée en charge de l’indemnité pour fonction d’intérêt collectif, comme le tutorat au lycée ou l’accompagnement en matière d’orientation, et l’augmentation de l’indemnisation du contrôle en cours de formation ; la mise en place d’une prime de performance pour les personnels de direction et pour les enseignants qui exercent dans les établissements ECLAIR. Ainsi, 2 400 euros viendront s’ajouter à une part fixe de 1 100 euros, soit au total la possibilité de voir son salaire augmenter de quelque 300 euros par mois lorsqu’on sert dans un tel établissement. C’est très significatif !

Vous avez été nombreux à m’interroger sur la revalorisation des personnels médico-sociaux. Sachez qu’une circulaire réaffirmant l’importance du rôle de la médecine scolaire et définissant les priorités de celle-ci, en particulier la mission des médecins scolaires, est en cours de publication.

J’avais eu l’occasion d’annoncer des mesures fortes de revalorisation des médecins de l’éducation nationale. En effet, nombre d’entre vous sont, comme moi, des élus ruraux. Vous connaissez donc les difficultés que nous rencontrons aujourd'hui pour recruter des médecins dans certains territoires. L’éducation nationale n’y échappe pas.

Telle est la raison pour laquelle nous avons décidé de revaloriser la carrière des médecins de l’éducation nationale en début de carrière en instaurant un grade de deuxième classe. Le coût de cette mesure est estimé à 2, 3 millions d’euros pour 2012. Ensuite, nous créons un sixième et dernier échelon dans le premier grade. Le coût de cette mesure est estimé à 2 millions d’euros.

Au total, je le disais tout à l’heure, les personnels de l’éducation nationale auront bénéficié entre 2007 et 2012 de 1, 4 milliard d’euros.

Je tiens enfin à signaler deux éléments qui me semblent importants.

Notre gestion des dépenses hors titre 2 est, elle aussi, minutieuse. Le montant de ces dépenses s’élève à 3, 9 milliards d’euros, soit près de 100 millions d’euros de plus qu’en 2011. Cette augmentation est destinée au financement de notre politique d’accompagnement du handicap ainsi qu’à la construction de certains collèges et lycées outre-mer. Les autres dépenses sont contraintes, mais respectent les nouvelles règles de gouvernance des finances publiques.

Par ailleurs, comme l’a rappelé Mme Férat, nous souhaitons travailler en étroite coopération avec les autres acteurs de l’éducation, en particulier l’enseignement technique agricole. Bruno Lemaire et moi-même avons signé, le 8 septembre dernier, une convention instituant un partenariat étroit et une réunion annuelle entre tous les recteurs et directeurs régionaux de l’agriculture. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de présider la réunion qui s’est tenue le 20 septembre dernier. Des partenariats s’affirment également à l’échelon régional.

Je suis persuadé que ce dialogue entre les services a progressé et qu’il permettra une meilleure répartition des rôles, une meilleure organisation de la carte territoriale ainsi que des complémentarités entre l’enseignement agricole et l’enseignement scolaire.

Comme vous pouvez le constater, mesdames, messieurs les sénateurs, nous ne relâchons pas notre effort. Nous tenons le cap que nous nous sommes fixé, car la société de demain sera celle de la connaissance. Afin de relever ce défi, le Gouvernement, malgré les difficultés budgétaires, accroît l’effort de la Nation pour l’éducation de ses enfants.

Je rappelle que notre pays consacre 7 % de son produit intérieur brut à l’éducation. C’est plus que la moyenne des pays de l’OCDE et des pays de l’Union européenne. Pas à pas, nous construisons une politique de long terme, une politique de croissance, fondée sur les compétences accrues de nos concitoyens de demain, une école qui change, pour un monde qui change, une école entièrement mobilisée pour la réussite de chaque élève.

Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UCR.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme la présidente de la commission de la culture.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Monsieur le ministre, nous vous avons écouté avec attention et nous vous remercions de toutes les explications que vous nous avez données, même si elles ne nous suffisent pas.

En tant que présidente de commission de la culture, j’ai le regret de vous dire que la majorité a été très choquée par vos propos sur les bénéfices financiers résultant des suppressions de postes.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Nous avons en particulier été choqués par l’illustration d’une comptabilité à la personne, qui mettait en scène l’économie réalisée pour chaque suppression de poste d’enseignant fonctionnaire.

Nous ne souhaitons pas que ceux qui enseignent à nos enfants se regardent dans leur miroir le matin en se répétant : « J’aggrave la dette ! J’aggrave la dette ! J’aggrave la dette ! ». Nous souhaitons au contraire qu’ils puissent se dire : « Je construis chaque jour un peu plus d’humanité, je transmets des savoirs, je crée du lien, je suis un fonctionnaire consciencieux, la société m’en est reconnaissante, car ce qu’elle a de plus précieux, ce sont ses enfants ! »

Cette reconnaissance doit s’exprimer par un juste salaire et par une juste retraite.

Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B.

En euros

Mission

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Enseignement scolaire

Enseignement scolaire public du premier degré

Dont titre 2

18 100 175 220

18 100 175 220

Enseignement scolaire public du second degré

Dont titre 2

29 493 579 505

29 493 579 505

Vie de l’élève

Dont titre 2

1 777 141 264

1 777 141 264

Enseignement privé du premier et du second degrés

Dont titre 2

6 326 954 440

6 326 954 440

Soutien de la politique de l’éducation nationale

Dont titre 2

1 367 175 584

1 367 175 584

Enseignement technique agricole

Dont titre 2

830 993 637

830 993 637

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° II-365, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Enseignement scolaire public du premier degréDont Titre 2

Enseignement scolaire public du second degréDont Titre 2

267 960 000

267 960 000

Vie de l’élèveDont Titre 2

Enseignement privé du premier et du second degrésDont Titre 2

51 040 000

51 040 000

Soutien de la politique de l’éducation nationaleDont Titre 2

Enseignement technique agricoleDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Au cours de l’année scolaire 2010-2011, 511 637 heures supplémentaires années – les HSA – ont été effectuées dans l’enseignement public par 232 615 enseignants du second degré. Plus d’un enseignant sur deux – 56 % d’entre eux – effectuent des HSA, soit en moyenne 2, 19 HSA par enseignant.

Au total, 1, 096 milliard d’euros dans l’enseignement public, soit 84 % du total, et 218, 4 millions d’euros dans le privé, soit 16% du total, ont été consacrés au financement de l’ensemble des heures supplémentaires.

Ainsi, dans les crédits de la mission, 319 millions d’euros devraient être consacrés, comme l’an passé, aux seules exonérations de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu, conformément aux dispositions de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite « loi TEPA ».

Le présent amendement vise donc à supprimer, dans l’enseignement public et privé, les surcoûts induits par les exonérations sur les heures supplémentaires au titre de la loi TEPA. Il faut revenir sur le recours massif aux heures supplémentaires annuelles, lequel est extrêmement répandu dans l’enseignement scolaire du second degré.

Je veux dénoncer, non pas les dérives de la révision générale des politiques publiques, mais ses effets pervers. La RGPP conduit à supprimer des postes avec une rigueur mathématique alors que, en généralisant l’augmentation légale du temps de travail des enseignants devant les élèves – sans donc modifier leur temps de travail global –, notamment dans le secondaire, des économies substantielles pourraient être réalisées.

Ainsi, si nous augmentions simplement de deux heures le temps de travail par semaine, nous pourrions, selon les calculs, économiser 44 000 postes. Cette augmentation devrait être considérée dans un cadre annuel. Il est ainsi nécessaire de réfléchir à la durée des vacances scolaires annuelles, lesquelles sont bien trop longues en France et pèsent sur notre système éducatif.

Ces 44 000 postes économisés grâce à la hausse du temps de travail des professeurs permettraient de dégager les marges nécessaires à la revalorisation des salaires – même si elle a eu lieu, comme l’a rappelé M. le ministre –, à la création de nouveaux postes d’éducateurs spécialisés dans les zones d’éducation prioritaire ou dans les zones de violence. Elle permettrait également d’augmenter le nombre de postes d’infirmières scolaires.

Sur ce sujet, je partage l’avis de Mme Blondin, même si je déplore qu’elle ait accusé le Gouvernement de ne pas faire le travail. L’un des problèmes de la santé scolaire, c’est la pesanteur du système administratif. Depuis vingt ou trente ans, le nombre de postes dans ce secteur n’a pas augmenté. C’est aujourd'hui une priorité.

Si cet amendement était adopté, nous pourrions non seulement augmenter le nombre d’infirmières scolaires, mais également celui de médecins scolaires et surtout celui d’assistantes sociales. Il n’est pas acceptable aujourd'hui de compter une infirmière scolaire pour 10 000 élèves, sachant, en outre, que l’on assiste à une recrudescence des maladies infectieuses et que, dans les lycées, les avortements de gamines sont de plus en plus nombreux, faute de prévention, de suivi, de soins.

Tel est l’objet de cet amendement, que je vous invite, mes chers collègues, à adopter.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Cet amendement a pour objet de supprimer environ un quart des crédits, soit 319 millions d’euros, destinés au financement des heures supplémentaires effectuées par les enseignants.

Notre collègue Yves Pozzo di Borgo vise les exonérations de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu prévues par la loi TEPA. Parallèlement, il propose qu’un décret en Conseil d’État précise les conditions d’annualisation du temps de travail des enseignants.

Je rappelle que les crédits du titre 2 permettant la rémunération des heures supplémentaires recouvrent des situations diverses. Ils permettent le financement des heures supplémentaires années, de plus en plus utilisées pour faire face aux besoins de remplacements permanents en cours d’année, comme l’a montré notre rapport. Ils servent aussi au financement des heures supplémentaires effectives qui permettent, entre autres, d’assurer le remplacement des enseignants absents pour de courtes durées. Enfin, ils financent les heures d’interrogation dans les classes préparatoires aux grandes écoles.

Je rappelle également que les exonérations d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales prévues dans la loi TEPA, visées par notre collègue, concernent les différentes catégories d’heures supplémentaires. Mais, d’une part, les exonérations d’impôt sur le revenu sont une dépense fiscale qui ne relève pas des crédits de la mission « Enseignement scolaire » et, d’autre part, il ne peut pas être dérogé aux dispositions législatives et réglementaires applicables pour le paiement des cotisations sociales.

En d’autres termes, en réduisant de près de moitié les crédits inscrits au titre des HSA dans le projet de loi de finances pour 2012, l’amendement qui vous est soumis ce soir conduirait, s’il était adopté, à limiter le nombre d’heures supplémentaires effectuées.

Pour vos rapporteurs spéciaux, le recours aux heures supplémentaires permet en partie de satisfaire des besoins permanents. Reste qu’il conviendrait de procéder à des recrutements.

La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Monsieur le sénateur, vous l’avez rappelé, les enseignants sont aujourd'hui les premiers bénéficiaires du dispositif instauré par la loi TEPA. C’est une bonne chose, car celui-ci permet d’augmenter la rémunération, et donc le pouvoir d’achat, des enseignants volontaires pour travailler davantage. Si l’on supprimait aujourd'hui ces heures supplémentaires, le pouvoir d’achat de ces enseignants diminuerait de 6 % à 7 %.

En outre, ce dispositif a permis de mettre en place la personnalisation que j’évoquais tout à l’heure. À titre d’exemple, conformément au souhait du Président de la République, nous avons instauré au collège l’accompagnement éducatif, c'est-à-dire l’accueil des fameux « orphelins de seize heures ».

Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Tous les soirs, un million de collégiens – des élèves qui étaient auparavant laissés à eux-mêmes après seize heures – sont désormais accueillis.

Ce mot n’a rien d’insultant. Nous avons tous dans nos départements des élèves dont les deux parents travaillent ou qui vivent dans des familles monoparentales. Il n’y a donc pas lieu de s’offusquer.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Le rôle de l’éducation nationale était d’apporter une solution à ce problème. Telle est la raison pour laquelle nous avons institué l’accompagnement éducatif. Il s’agit d’un soutien scolaire personnalisé entre seize heures et dix-huit heures, sous la forme d’activités culturelles ou sportives.

Cet accompagnement, monsieur Pozzo di Borgo, est rendu possible grâce à la rémunération d’heures supplémentaires. C’est la raison pour laquelle nous sommes très attachés à ce dispositif.

De plus, comme l’a indiqué M. le rapporteur spécial, un certain nombre d’heures supplémentaires sont incompressibles dans la mesure où elles permettent de pallier les absences ponctuelles de professeurs.

J’ai bien compris l’esprit de votre amendement. En fait, vous souhaitez engager une réflexion globale sur la mission des enseignants, sur le contenu de leur travail et sur leur temps de service. C’est là un bon débat, que nous avons déjà eu, notamment en commission. Toutefois, comme je vous l’ai déjà dit, le Gouvernement n’a pas l’intention d’ouvrir ce dossier d’ici à la fin de la législature.

En revanche, c’est un bon sujet de débat pour les échéances du printemps prochain, si l’on en juge par les propositions que l’on entend ici ou là. Comme M. Carle l’a dit tout à l’heure lors de son intervention, il faut réfléchir à l’évolution des missions de l’école et des enseignants ainsi qu’aux questions de statut et de rémunération.

En tout état de cause, le Gouvernement n’est pas favorable à la suppression de la défiscalisation des heures supplémentaires des enseignants.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Monsieur Pozzo di Borgo, l'amendement n° II-365 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Si j’ai pris le cas des enseignants, c’est parce qu’ils représentent la moitié des postes dans la fonction publique.

De façon plus générale, nous avons en France un véritable problème de temps de travail. Les 35 heures, qui posent des difficultés dans le privé, ont également des incidences dans le public.

Permettez-moi d’évoquer une campagne qui a actuellement lieu en Chine sur internet. Il est dommage que Jean Besson, le président du groupe interparlementaire d’amitié France-République populaire de Chine, ne soit pas là, car il pourrait vous le confirmer.

Le gouvernement demande pourquoi il faudrait nous aider, nous, les Européens, et nous prêter de l’argent alors que notre PIB est trois fois supérieur à celui de la Chine, que nous travaillons trente-cinq heures par semaine, que nous partons à la retraite à l’âge de cinquante-cinq ans – ce n’est d’ailleurs pas exact – et que nous bénéficions de temps de vacances fantastiques. Les Chinois se demandent pourquoi, alors qu’ils travaillent soixante-dix heures par semaine, ils devraient financer la paresse des Européens !

C’est un des problèmes auquel nous devrons faire face dans les années à venir. Si nous voulons relancer l’économie, tout en faisant des économies budgétaires, nous allons devoir aborder la question du temps de travail dans la fonction publique de l’État, dans la fonction publique territoriale et dans le privé.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Pozzo di Borgo

Cet amendement me permettait de vous exposer le problème. Je regrette simplement que, depuis cinq ans, le Gouvernement, que je soutiens pourtant, n’ait pas eu le courage de l’aborder. Nous avons perdu du temps !

Je sais, monsieur le ministre, que les décisions viennent de plus haut. Sinon, vous auriez peut-être accepté mon amendement.

La campagne présidentielle va encore nous faire perdre six mois, mais ce sujet ressurgira à l’avenir.

Je retire donc cet amendement, qui visait à engager le débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° II-365 est retiré.

L'amendement n° II-391, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Modifier comme suit les crédits des programmes :

En euros

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Programmes

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Enseignement scolaire public du premier degréDont Titre 2

Enseignement scolaire public du second degréDont Titre 2

Vie de l’élèveDont Titre 2

Enseignement privé du premier et du second degrésDont Titre 2

Soutien de la politique de l’éducation nationaleDont Titre 2

Enseignement technique agricoleDont Titre 2

TOTAL

SOLDE

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Cet amendement d’ajustement n’a aucune conséquence sur les moyens qui sont dévolus à l’éducation nationale. Il s’agit d’un simple transfert et d’un changement de périmètre.

Il concerne tout d’abord le transfert à la Nouvelle-Calédonie de plusieurs compétences en matière d’enseignement du second degré public et privé, d’enseignement primaire privé, de santé scolaire et de documentation pédagogiques, qui interviendra le 1er janvier prochain.

Ce transfert de crédits porte sur 38 092 353 euros, qui viendront majorer la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».

La deuxième partie de l’amendement tire les conséquences budgétaires du transfert au STIF, le Syndicat des transports d’Île-de-France, des services déconcentrés du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, qui participaient à l’exercice des compétences transférées en 2009 en matière de plan de déplacements urbains, d’organisation et de fonctionnement des transports scolaires. Cela concerne une somme assez marginale au regard de la mission qui vous est proposée ce soir, puisqu’elle s’élève à 151 012 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Cet amendement a pour objet de prendre en compte deux transferts. Le premier entraîne une minoration de crédits de 38, 1 millions d’euros, le second une minoration de 151 012 euros.

Monsieur le ministre, les rapporteurs spéciaux de la commission des finances comprennent le sens de cet amendement, qui prend en compte les transferts de compétences et de services du ministère de l’éducation nationale en application de dispositions législatives.

Un amendement « miroir », l’amendement n° II-374, a majoré en conséquence les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », mais pour des montants différents. Il porte en effet sur une somme de 41, 3 millions d’euros pour la Nouvelle-Calédonie, et de 196 000 euros pour le STIF. Le Gouvernement peut-il nous expliquer si d’autres transferts de compétences et de crédits, depuis d’autres missions que la mission « Enseignement scolaire », concernent la Nouvelle-Calédonie et le STIF ?

Par ailleurs, les rapporteurs spéciaux estiment qu’il est regrettable que le présent amendement leur soit parvenu il y a quelques heures à peine, …

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

… et qu’il n’ait pas été déposé en même temps que l’amendement n° II-374. Cela nous aurait permis de l’examiner plus en détail, en amont de la séance publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Cela dit, dans la mesure où la commission des finances a proposé le rejet des crédits de la mission, elle ne peut pas être favorable à cet amendement du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Je voudrais apporter deux précisions à la suite des propos tenus par le rapporteur spécial.

Tout d’abord, si cet amendement vous est parvenu tardivement, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est parce que les discussions avec les représentants de Nouvelle-Calédonie étaient encore en cours il y a quelques jours. J’ai d’ailleurs reçu la semaine dernière la ministre chargée de l’éducation nationale sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie. Nous avions à affiner les montants du transfert au 1er janvier.

Ensuite, je ne suis pas le ministre chargé des collectivités territoriales, mais je peux vous dire que le différentiel entre la majoration de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et la minoration du budget de la mission « Enseignement scolaire » trouve son explication dans le fait que la majoration dépasse le seul transfert depuis la mission « Enseignement scolaire », même si sa part en est la plus conséquente. Je ne peux pas vous donner le détail des montants émanant des autres ministères, mais, concernant celui dont j’ai la charge, la somme que j’ai évoquée tout à l’heure correspond bien à cette opération !

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Françoise Cartron, rapporteure pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Parmi la liste des crédits que vous nous proposez de minorer figure le programme « Vie de l’élève », qui subit une minoration de près de 4 millions d’euros. Les crédits transférés à la Nouvelle-Calédonie seraient affectés en dépenses de fonctionnement et d’intervention, notamment en matière de santé scolaire.

Nous trouvons que ce transfert n’est pas adapté à la situation réelle de la médecine scolaire en Nouvelle-Calédonie.

La convention entre l’État et la Nouvelle-Calédonie « relative à l’organisation d’un service unique de gestion », qui traite de la santé scolaire, couvre un champ d’action minimal calqué sur celui qui prévaut en métropole, dont nous avons déjà souligné les carences.

Elle ne prend pas en compte la spécificité des problèmes de santé auxquels sont confrontées les familles et l’institution scolaire en Nouvelle-Calédonie. Je pense en particulier au type d’habitat propre au territoire. Il est donc indispensable de pouvoir mettre en œuvre des programmes de formation spécifiques, notamment sur l’hygiène de base.

Les inégalités territoriales en matière d’accès à la santé y sont particulièrement criantes. Ainsi, la province Nord et les îles sont insuffisamment dotées en personnels médicaux. Dans certaines provinces, songez que le dépistage des caries dentaires au collège se fait par tirage au sort !

Monsieur le ministre, les 4 millions d’euros du programme « Vie de l’élève » affectés à la médecine scolaire en Nouvelle-Calédonie ne sont pas du luxe pour ce territoire, où la santé scolaire aurait eu besoin, comme dans bien d’autres régions d’ailleurs, d’un véritable plan de rattrapage.

Ne serait-ce que pour cette raison, nous nous opposons à l’amendement déposé par le Gouvernement.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Enseignement scolaire », figurant à l’état B.

J’ai été saisie, dans le délai limite, d’une demande d’explication de vote de la part de Mme François Férat.

Vous avez la parole, ma chère collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Au terme de la discussion de cette mission, permettez-moi de revenir sur quelques points concernant l’enseignement agricole. C’est un sujet, vous le savez, dont je ne me lasse pas.

Si celui-ci a connu une légère évolution de ses crédits, il paie néanmoins son écot à la RGPP, puisque 280 emplois sont encore supprimés. Il se devait de contribuer à l’effort mais, je veux le dire ici, les limites de l’exercice ont été atteintes. Aller au-delà freinerait son développement.

Je me félicite de la levée de la réserve de précaution demandée par le ministre de l’agriculture. Celle-ci est de nature à répondre à un certain nombre de contraintes. Nous devrons être particulièrement vigilants sur d’éventuels gels de crédits.

Les effectifs sont en légère hausse. Il nous faut veiller à ce que le budget soit cohérent et adapté aux effectifs.

Pardonnez-moi d’insister, les crédits doivent être à la hauteur des besoins des jeunes et des familles. Nous serons attentifs à l’exécution du budget 2012 et au suivi du montant des reports de charge, tout comme nous surveillerons la mise en œuvre prochaine du plan triennal, tant sur l’aspect budgétaire que sur la qualité du dialogue entre l’ensemble des acteurs de l’enseignement agricole.

Je le rappelle, l’enseignement agricole est bien complémentaire de l’éducation nationale. Je ne reviendrai pas sur la convention qui vient d’être signée, car vous l’avez rappelée, monsieur le ministre. C’est une convention que j’appelais de mes vœux depuis de nombreuses années.

Vous le savez, je suis personnellement attachée à toutes les composantes de l’enseignement agricole, qu’il soit public ou privé. Je veux ici rappeler la qualité de cet enseignement, en matière tant de réussite aux examens que d’insertion professionnelle.

Cet après-midi, au cours de la séance des questions au Gouvernement, le ministre de l’agriculture a rappelé les chiffres du commerce extérieur liés à l’agriculture : ils présentent un excédent commercial de plus de 7 milliards d’euros ! Derrière ces chiffres, nous percevons la valeur de ce que représente l’agroalimentaire dans notre pays : l’excellence de nos produits – permettez-moi d’évoquer la viticulture, je ne suis pas champenoise pour rien ! – l’importance de l’aménagement de notre espace rural, sans oublier la noble mission de nourrir les hommes.

Tout cela et bien d’autres choses encore, nous le devons à l’enseignement agricole, à ces hommes et ces femmes qui ont choisi un jour d’étudier dans un de ces établissements. Nous le devons à tous les acteurs de l’enseignement agricole, dont l’excellence n’est plus à démontrer.

En conclusion, permettez-moi de vous dire que nous devons faire preuve d’un optimisme prudent, mesuré et vigilant. À nous de regarder l’avenir de l’enseignement agricole avec lucidité, mais aussi avec une forte volonté de le préserver.

Dans cette perspective, le groupe UCR votera les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Applaudissements sur les travées de l ’ UCR et de l ’ UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je mets aux voix les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Ces crédits ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

J’appelle en discussion les articles 51 septies et 51 octies et les amendements portant article additionnel qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Enseignement scolaire. »

Enseignement scolaire

Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’article L. 351-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 351 -3. – Lorsque la commission mentionnée à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles constate que la scolarisation d’un enfant dans une classe de l’enseignement public ou d’un établissement mentionné à l’article L. 442-1 du présent code requiert une aide individuelle dont elle détermine la quotité horaire, cette aide peut notamment être apportée par un assistant d’éducation recruté conformément aux modalités définies à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 916-1.

« Si cette scolarisation n’implique pas une aide individuelle mais que les besoins de l’élève justifient qu’il bénéficie d’une aide mutualisée, la commission mentionnée à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles en arrête le principe. Cette aide mutualisée est apportée par un assistant d’éducation recruté dans les conditions fixées au premier alinéa de l’article L. 916-1 du présent code.

« Si l’aide nécessaire à l’élève handicapé ne comporte pas de soutien pédagogique, ces assistants d’éducation mentionnés aux deux premiers alinéas du présent article peuvent être recrutés sans condition de diplôme.

« Les personnels en charge de l’aide à l’inclusion scolaire exercent leurs fonctions auprès des élèves pour lesquels une aide a été reconnue nécessaire par décision de la commission mentionnée à l’article L. 146-9 du code de l’action sociale et des familles. Leur contrat de travail précise le nom des écoles et des établissements scolaires au sein desquels ils sont susceptibles d’exercer leurs fonctions.

« L’aide individuelle mentionnée au premier alinéa du présent article peut, après accord entre l’inspecteur d’académie et la famille de l’élève, lorsque la continuité de l’aide est nécessaire à l’élève en fonction de la nature particulière de son handicap, être assurée par une association ou un groupement d’associations ayant conclu une convention avec l’État.

« Les modalités d’application du présent article, notamment la désignation des personnes chargées de l’aide mentionnée aux deux premiers alinéas et la nature de l’aide, sont déterminées par décret. » ;

2° L’article L. 916-1 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Des assistants d’éducation peuvent être recrutés par les établissements d’enseignement mentionnés au chapitre II du titre Ier et au titre II du livre IV pour exercer des fonctions d’assistance à l’équipe éducative en lien avec le projet d’établissement, notamment pour l’encadrement et la surveillance des élèves. Lorsqu’ils sont recrutés pour l’aide à l’inclusion scolaire des élèves handicapés, y compris en dehors du temps scolaire, leur recrutement intervient après accord de l’inspecteur d’académie. Ils peuvent également être recrutés par les établissements mentionnés à l’article L. 442-1, après accord de l’inspecteur d’académie, pour exercer des fonctions d’aide à l’inclusion scolaire des élèves handicapés, y compris en dehors du temps scolaire. » ;

b) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « accueil et à l’intégration scolaires » sont remplacés par les mots : « inclusion scolaire » ;

c) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « accueil et à l’intégration » sont remplacés par les mots : « inclusion scolaire » et la troisième occurrence du mot : « à » est remplacée par la référence : « au premier alinéa de ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

L’article 51 septies a été adopté à l’Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement. Il concerne les modalités de recrutement des assistants de scolarisation.

Je voudrais dire un mot sur ces assistants, nouvellement introduits dans le budget au programme 230, « Vie de l’élève », à l’action n° 3. Il est expliqué dans le programme annuel de performance qu’ils vont progressivement se substituer aux contrats aidés : 2 000 sont budgétés en 2012, mais 2 300 sont annoncés pour la rentrée 2012, sans que l’on sache s’il s’agit de 2 300 ou de 300 assistants supplémentaires !

Ces assistants de scolarisation seront recrutés sous statut d’assistant d’éducation, ou AED, et signeront des contrats de trois ans renouvelables une fois.

Vous apportez ainsi plusieurs modifications au code de l’éducation. Si les besoins d’un élève justifient qu’il bénéficie d’une aide non individuelle mais « mutualisée », alors l’assistant d’éducation est directement recruté par l’établissement concerné, après accord de l’inspecteur d’académie. Vous ouvrez également cette possibilité aux établissements privés sous contrat.

Cela signifie qu’ils seront payés sur les crédits du titre 6 et ne seront donc pas intégrés dans le plafond d’emploi. On ne progresse donc ni vers moins de précarité ni vers plus de transparence, du fait notamment des difficultés de vérification de l’utilisation des crédits du titre 6. Or on sait le sort réservé aux cagnottes, à l’image des crédits pédagogiques, qui ont été divisés par quatre cette année, «faute d’utilisation », nous avez-vous dit, monsieur le ministre…

De plus, je m’étonne que, dans la réécriture par le Gouvernement de l’article L.351-3 du code de l’éducation, ait disparu à l’alinéa 4, avant modification dudit article, la mention suivante : « Ces assistants d’éducation bénéficient d’une formation spécifique leur permettant de répondre aux besoins particuliers des élèves qui leur sont confiés. », alors que vous expliquez vouloir remplacer les contrats aidés par des professionnels mieux formés et plus qualifiés ! Or, si l’aide ne comporte pas de soutien pédagogique, ces assistants peuvent aussi être recrutés sans condition de diplôme.

Monsieur le ministre, je souhaiterais donc que vous clarifiiez cet élément et que vous nous indiquiez ce que pourrait contenir le décret qui doit déterminer les modalités d’application de cet article, notamment la désignation des personnes chargées de l’aide mutualisée, ainsi que la nature de celle-ci.

Ces observations étant faites, j’indique par avance que je me prononcerai en faveur de l’amendement présenté par la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° II-28, présenté par MM. Foucaud et Haut, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

II. - Le rapport prévu à l’article 121 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 et à l’article 160 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 est remis chaque année au plus tard le 30 juin.

La parole est à M. Claude Haut, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Cet amendement vise à compléter un article additionnel adopté par l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement.

Sans contester, bien évidemment, la nécessité de soutenir l’insertion des personnes handicapées, Thierry Foucaud et moi-même souhaitons que le Gouvernement fasse enfin un bilan des mesures adoptées en matière de handicap à l’école. M. le ministre a évoqué ce point il y a quelques minutes.

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010, puis du projet de loi de finances pour 2011, le Parlement avait adopté un amendement tendant à la remise, chaque année, d’un rapport sur les conditions de scolarisation en milieu ordinaire des enfants handicapés ; les incertitudes entourant les contrats aidés pour l’aide aux enfants handicapés soulèvent de nombreuses inquiétudes des parents, des enfants et des personnels éducatifs.

Il serait notamment souhaitable que la même personne puisse effectuer un suivi des enfants handicapés. Or, aujourd’hui, le recrutement sous statut précaire fragilise la situation professionnelle de la personne concernée.

C’est pourquoi nous demandons de nouveau qu’un rapport soit remis chaque année sur les conditions de scolarisation en milieu ordinaire des enfants handicapés.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

J’ai rappelé tout à l’heure l’effort consenti par le ministère de l’éducation à destination des enfants handicapés.

L’article 51 septies, qui a été adopté par l’Assemblée nationale, prévoit de préciser dans le code de l’éducation les modalités d’action des 2 000 emplois d’assistants de scolarisation annoncés par le Président de la République au moment de la Conférence nationale du handicap. Les inspecteurs d’académie pourront recruter ces assistants d’éducation sur des missions d’aide mutualisée. Cela signifie qu’ils pourront être recrutés soit pour des missions individuelles spécifiques, soit pour des missions mutualisées.

La commission des finances du Sénat demande un rapport. Je note qu’une disposition similaire avait déjà été adoptée lors du projet de loi de finances pour 2011. Mes services fourniront à votre assemblée, dans les prochains jours, le rapport sur l’exercice 2010.

Je ne suis pas opposé sur le principe à cet amendement, même si la remise d’un rapport est déjà prévue dans la loi de finances pour 2011.

Le Gouvernement s’en remet donc, sur ce point, à la sagesse du Sénat.

L'amendement est adopté.

L'article 51 septies est adopté.

Après l’article L. 914-1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 914-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 914 -1 -1. – Les personnels enseignants et de documentation mentionnés à l’article L. 914-1 peuvent bénéficier d’avantages temporaires de retraite dès leur cessation d’activité. Ces avantages, dont la charge financière est intégralement supportée par l’État, sont destinés à permettre à ces personnels de cesser leur activité dans les mêmes conditions que les maîtres titulaires de l’enseignement public.

« L’ouverture des droits aux avantages temporaires de retraite est subordonnée au respect des conditions suivantes :

« 1° Les bénéficiaires doivent être titulaires d’un contrat définitif ou d’un agrément au moment où ils sollicitent leur admission au régime temporaire de retraite ;

« 2° Les bénéficiaires doivent justifier d’une durée de services en qualité de personnels enseignants et de documentation habilités par agrément ou par contrat à exercer leurs fonctions dans les établissements d’enseignement privés liés par contrat à l’État ou reconnus par celui-ci. Les services d’enseignement en tant que maître délégué, les services de direction et de formation exercés concomitamment à une activité d’enseignement, les périodes de formation ainsi que les périodes accomplies au titre du service national actif sont pris en compte dans des conditions déterminées par voie réglementaire. Toutefois, la condition de durée de services n’est pas opposable aux bénéficiaires qui se trouvent dans l’incapacité permanente d’exercer leur fonction ;

« 3° Les bénéficiaires doivent satisfaire à l’une des conditions auxquelles est subordonnée la possibilité pour les maîtres titulaires de l’enseignement public de demander la liquidation de leur pension.

« Les avantages temporaires de retraite sont liquidés en ne prenant en compte que les services mentionnés au 2° du présent article, augmentés des majorations de durée d’assurance prévues aux articles L. 351-4, L. 351-4-1 et L. 351-5 du code de la sécurité sociale et des majorations pour enfants prévues par les régimes de retraite complémentaire mentionnés au livre IX du même code.

« Un coefficient de minoration ou de majoration est applicable aux avantages temporaires de retraite dans les mêmes conditions que pour les maîtres titulaires de l’enseignement public.

« Les avantages temporaires de retraite cessent d’être versés aux bénéficiaires auxquels aucun coefficient de minoration n’est applicable lorsqu’ils peuvent bénéficier d’une pension de vieillesse du régime général de sécurité sociale liquidée à taux plein. Ils cessent également d’être versés aux bénéficiaires auxquels un coefficient de minoration est applicable lorsqu’ils atteignent l’âge auquel le coefficient de minoration applicable à leur pension de vieillesse du régime général de sécurité sociale est le plus proche du coefficient de minoration qui était appliqué aux avantages temporaires de retraite.

« Les limites d’âge et les règles de cumul de pension de retraite et de rémunération des revenus d’activité applicables aux maîtres titulaires de l’enseignement public le sont également aux personnels enseignants et de documentation mentionnés à l’article L. 914-1 du présent code dans des conditions fixées par voie réglementaire.

« Les bénéficiaires des avantages temporaires de retraite ainsi que leurs ayants droit bénéficient des prestations en nature des assurances maladie et maternité du régime général de sécurité sociale.

« Les conditions dans lesquelles les maîtres des établissements d’enseignement privés sous contrat avec l’État en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française cessent leur activité et sont autorisés à cumuler les avantages temporaires de retraite institués par ces collectivités et les rémunérations servies directement ou indirectement par l’une des collectivités mentionnées à l’article L. 86-1 du code des pensions civiles et militaires de retraite sont fixées par voie réglementaire.

« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »

L'article 51 octies est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° II-29, présenté par MM. Foucaud et Haut, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l’article 51 octies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au plus tard le 30 avril 2012, le Gouvernement dépose au Parlement un rapport sur le nombre de maîtres auxiliaires, d’enseignants contractuels et de vacataires recrutés par le ministère de l’éducation nationale depuis le 31 décembre 2005, et détaillant la répartition de ces emplois par académie, leur incidence sur le plafond d’emplois du ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, ainsi que le recours aux services d’agences publiques ou privées.

La parole est à M. Claude Haut, rapporteur spécial.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Haut

Selon le ministère de l’éducation nationale et comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, le nombre de professeurs contractuels a augmenté de 76 % entre le 31 décembre 2005 et le 31 décembre 2010, révélant un recours accru à des personnels non titulaires pour assurer les métiers du service public de l’enseignement.

Afin de mieux connaître la précarisation du métier d’enseignant en France, le présent amendement vise à prévoir la remise d’un rapport au Parlement avant le 30 avril 2012, qui préciserait le nombre de maîtres auxiliaires, d’enseignants contractuels et de vacataires recrutés par le ministère, et qui détaillerait la répartition de ces emplois par académie, leur incidence sur le plafond d’emplois, ainsi que le recours aux services d’agences publiques ou privées.

En effet, il est de plus en plus fréquent que le ministère de l’éducation nationale ait recours aux services de Pôle emploi pour recruter ces professeurs contractuels alors que, dans le même temps, il diminue le nombre de postes offerts aux concours, ce qui n’est pas acceptable.

Une meilleure information sur ces postes de contractuels éclairerait le Sénat.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Monsieur le rapporteur spécial, je répondrai, comme je le fais régulièrement, en citant les chiffres exacts concernant les contractuels dans l’éducation nationale.

En 2002-2003, l’effectif des enseignants non titulaires était de 28 200 en moyenne sur l’année scolaire. En 2009-2010, il était de 22 700 enseignants, soit 5, 6 % des moyens d’enseignement de l’éducation nationale.

Je vous rappelle que le recours à des personnels contractuels est indispensable dans certains domaines de l’éducation nationale : d’abord, pour remplacer les enseignants titulaires absents de manière plus souple et réactive que ne le permet le système de titulaires remplaçants ; ensuite, pour recruter des professeurs spécialisés, notamment dans les lycées professionnels.

Le Gouvernement a beaucoup agi pour les contractuels. Un protocole d’accord a été signé au mois de mars dernier sur la sécurisation des parcours professionnels des agents contractuels de la fonction publique. Un projet de loi a été rédigé pour permettre l’accès à l’emploi titulaire et l’amélioration de l’emploi des agents contractuels. Par ailleurs, nous avons effectué un recensement : 13 000 personnes pourraient être concernées par le passage à un poste de titulaire. Ce chiffre est considérable. De réelles avancées sont donc enregistrées dans ce domaine.

Dans la mesure où je réponds régulièrement à des questions sur ce sujet, que ce soit dans le cadre d’auditions ou de questions au Gouvernement, je ne suis pas certain qu’un nouveau rapport soit nécessaire.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Françoise Cartron, rapporteure pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Lors de la présentation de mon rapport pour avis, j’ai souligné que la commission de la culture avait besoin de plus de transparence et de lisibilité en ce qui concerne la répartition de ces emplois et leur incidence par rapport au plafond d’emplois.

Le rapport demandé par la commission des finances va dans le sens voulu par la commission de la culture. Nous y sommes donc très favorables.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Il est bien tard ce soir pour débattre d’un budget aussi important.

Cela dit, je trouve éminemment paradoxal que l’on demande des rapports alors que l’on n’adopte pas les crédits de la mission concernée et que l’on est contre la politique voulue par le Gouvernement dans ce cadre.

Néanmoins, je salue l’initiative. Il est important que nous y voyions plus clair et que nous sachions ce que représentent ces postes sur le plan budgétaire.

Monsieur le ministre, vous avez fourni tout à l’heure des explications qui ont provoqué l’ire de la présidente de commission de la culture, car elle y a vu une mise en cause des enseignants. Étant ancien enseignant moi-même, je n’ai pas ressenti le rappel du coût d’un enseignant sur une année scolaire, voire sur la durée d’une vie professionnelle, comme une attaque. Ne souhaitons-nous pas tous que le personnel de l’éducation nationale soit très majoritairement employé en CDI ?

Nous avons besoin, plus particulièrement lors des débats budgétaires, de toutes les informations disponibles sur les sujets dont nous discutons. Les précisions demandées ici me semblent donc aller de soi. Néanmoins, compte tenu du paradoxe dont j’ai fait état précédemment, je m’abstiendrai.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 51 octies.

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° II-117 rectifié bis est présenté par Mme Férat, M. Arthuis et les membres du groupe de l'Union Centriste et Républicaine.

L'amendement n° II-369 est présenté par Mmes Gonthier-Maurin, Beaufils et Didier et M. Foucaud.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 51 octies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au plus tard le 30 avril 2012, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’enseignement agricole technique et supérieur détaillant l’évolution, depuis 2005, de la carte des formations, des effectifs d’élèves accueillis, des moyens financiers et en personnels, dans les établissements publics et dans les établissements privés.

La parole est à Mme Françoise Férat, pour présenter l'amendement n° II-117 rectifié bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Férat

Depuis la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF, force est de constater, année après année, au cours des différentes auditions préparatoires à l’étude du budget, qu’il est difficile d’appréhender la situation réelle de l’enseignement agricole. Un rapport permettant une analyse spécifique serait nécessaire à cette fin.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l'amendement n° II-369.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Cet amendement, que je présente pour la deuxième année consécutive, vise à obtenir du Gouvernement la remise d’un rapport détaillant l’évolution, depuis 2005, dans l’enseignement agricole technique et supérieur, de la carte des formations, des effectifs d’élèves accueillis, des moyens financiers et en personnels, dans les établissements publics et privés.

À partir de 2005, les effectifs des personnels de l’enseignement technique public n’ont cessé de se réduire, quel que soit le corps considéré. Les ingénieurs deviennent de plus en plus minoritaires parmi les enseignants. Dans le même temps, la proportion d’enseignants non titulaires augmente.

Depuis plusieurs années, l’enseignement agricole est en état de choc. Arbitrages et pratiques budgétaires successifs ont instauré la pénurie, ainsi que j’ai pu le constater cette année, lors des déplacements en régions que j’ai faits avec le Comité permanent de défense et de développement de l’enseignement agricole public.

Voilà plusieurs exercices budgétaires que le Parlement a adopté des mesures d’urgence pour apporter des corrections, mesures dont nous ne retrouvons pas toujours la transcription en exécution budgétaire.

En 2012, nous assistons à une nouvelle saignée – elle est d’ailleurs inégalée – avec 280 suppressions de postes.

Les documents budgétaires dont nous disposons sont parcellaires, manquent de lisibilité et de transparence notamment dans la gestion du plafond d’emplois. Nous sommes donc privés d’une vision d’ensemble, sur le plan tant national que local, alors même que cet enseignement fait la preuve de son efficacité.

Je connais l’existence et les rapports de l’Observatoire national de l’enseignement agricole, l’ONEA. Monsieur le ministre, vous les aviez invoqués l’année dernière pour donner un avis défavorable à mon amendement.

Mais, depuis 2008, le rapport de l’ONEA est devenu thématique et ne comporte plus de panorama de l’enseignement agricole, qui est pris en charge par la direction générale de l’enseignement et de la recherche au sein du ministère de l’agriculture. Or le panorama produit aujourd’hui par la DGER est lacunaire.

Par exemple, sur la question de l’évolution des effectifs des personnels, il ne distingue plus le second degré du supérieur et nous prive ainsi d’éléments de comparaison dans le temps.

C’est pourquoi cette question des effectifs et de leur évolution, primordiale, figure dans le rapport que je demande.

Autre exemple, le panorama de la DGER offre peu de recul chiffré sur l’évolution des effectifs d’élèves et, surtout, il ne fait pas la distinction entre les élèves qui sont scolarisés dans le public et ceux qui le sont dans le privé.

Enfin, sur l’exécution budgétaire, l’information est insuffisante, l’épisode du moratoire sur les suppressions d’emploi, invisible dans le projet de loi de finances rectificative comme dans le projet de loi de finances de 2011, en est une preuve flagrante.

Aussi, dans un souci de transparence et de parfaite information des parlementaires comme de l’opinion publique, je demande que l’on adopte cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Ces deux amendements visent à demander un rapport, avant le 30 avril 2012, sur l’enseignement agricole public et privé, détaillant notamment la carte des formations et les moyens financiers et en personnels.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin avait déjà déposé cet amendement l’année dernière. Cette année, notre collègue Jean Arthuis a présenté un amendement qui, avant d’être rectifié, n’allait pas aussi loin que celui de Mme Gonthier-Maurin mais qui est maintenant strictement identique.

Je partage la position de Mme Gonthier-Maurin sur la situation de l’enseignement agricole, qui est particulièrement préoccupante, avec la suppression de 280 nouveaux postes à la rentrée 2012, dont 60 % dans l’enseignement public, qui n’accueille pourtant que 37 % des élèves scolarisés.

Hors titre 2, les crédits d’aide sociale, qui incluent les bourses d’étude, sont en baisse de 0, 5 % par rapport à l’an dernier. Je n’évoquerai pas le nombre des élèves boursiers à cette heure avancée, mais un certain nombre d’éléments pourront utilement être transmis.

Enfin, les dépenses de fonctionnement et d’intervention sont pratiquement toutes en baisse de 2 % à 3 %.

Dans ce contexte, il est urgent de mieux connaître la situation actuelle en termes d’offres de formation, au regard de la répartition des moyens dont dispose l’enseignement technique agricole.

Tel est le sens des deux amendements qui nous sont proposés, auxquels la commission des finances a donné un avis favorable.

Debut de section - Permalien
Luc Chatel, ministre

Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur ces deux amendements identiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je mets aux voix les amendements identiques n° II-117 rectifié bis et II-369.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 51 octies.

Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 2 décembre 2011 :

À dix heures cinq :

1. Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l’Assemblée nationale (106, 2011-2012).

Examen des missions :

- Gestion des finances publiques et des ressources humaines et Provisions

Compte spécial : Gestion du patrimoine immobilier de l’État (+ articles 64 quater et 64 quinquies)

MM. Albéric de Montgolfier et Philippe Dallier, rapporteurs spéciaux (rapport n° 107, annexe n° 14) ;

Mme Jacqueline Gourault, rapporteure pour avis de la commission des lois (avis n° 112, tome X) ;

Mlle Sophie Joissains, rapporteur pour avis de la commission des lois (avis n° 112, tome XV).

- Engagements financiers de l’État

Compte spécial : Accords monétaires internationaux

Compte spécial : Avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics

Compte spécial : Participations financières de l’État

M. Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial (rapport n° 107, annexe n° 12) ;

M. Hervé Maurey, rapporteur pour avis de commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (avis n° 111, tome VIII).

- Régimes sociaux et de retraite

Compte spécial : Pensions (+ articles 65 et 66)

M. Francis Delattre, rapporteur spécial (rapport n° 107, annexe n° 22) ;

Mme Christiane Demontès, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 109, tome IV).

- Remboursements et dégrèvements

Mme Marie-France Beaufils, rapporteure spéciale (rapport n° 107, annexe n° 24).

À quatorze heures trente et le soir :

2. Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l’Assemblée nationale (106, 2011-2012).

Examen des missions :

- Immigration, asile et intégration

M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial (rapport n° 107, annexe n° 15) ;

MM. Alain Néri et Raymond Couderc, rapporteurs pours avis de la commission des affaires étrangères et de la défense (avis n° 108, tome IX) ;

M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur pour avis de la commission des lois (avis n° 112, tome II) ;

Mme Corinne Bouchoux, rapporteur pour avis de la commission des lois (avis n° 112, tome XI).

- Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales (+ articles 48, 48 bis et 48 ter)

Compte spécial : Développement agricole et rural

MM. Yannick Botrel et Joël Bourdin, rapporteurs spéciaux (rapport n° 107, annexe n° 3) ;

MM. Gérard César, Mmes Odette Herviaux et Renée Nicoux, MM. Henri Tandonnet et Raymond Vall, rapporteurs pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire (avis n° 111, tome I).

- Conseil et contrôle de l’État (+article 49 quater)

M. Charles Guené, rapporteur spécial (rapport n° 107, annexe n° 6) ;

M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis de la commission des lois (avis n° 112, tome IV) ;

M. André Reichardt, rapporteur pour avis de la commission des lois (avis n° 112, tome VI).

- Pouvoirs publics

M. Jean-Paul Emorine, rapporteur spécial (rapport n° 107, annexe n° 20) ;

M. Michel Delebarre, rapport pour avis de la commission des lois (avis n° 112, tome XVI).

- Direction de l’action du Gouvernement

Budget annexe : publications officielles et information administrative

M. Philippe Dominati, rapporteur spécial (rapport n° 107, annexe n° 9) ;

Mme Laurence Cohen, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n° 109, tome II) ;

M. Alain Anziani, rapporteur pour avis de la commission des lois (avis n° 112, tome V) ;

Mme Virginie Klès, rapporteur pour avis de la commission des lois (avis n° 112, tome XVII).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le vendredi 2 décembre 2011, à une heure cinq.