Intervention de Dominique Watrin

Réunion du 7 novembre 2011 à 22h00
Financement de la sécurité sociale pour 2012 — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de Dominique WatrinDominique Watrin :

Or les mesures d’austérité sont d’autant moins supportables qu’elles s’ajoutent à celles du même ordre qui ont été prises dans un passé récent : hausses du forfait hospitalier, instauration de franchises et de forfaits et, dans le cadre de la dernière loi de finances rectificative, augmentation de la taxe sur les mutuelles. Pour récupérer 1 milliard d’euros supplémentaires, vous transformez, non sans habileté, les mutuelles en collecteurs d’impôt, reportant sur elles l’impopularité des hausses de cotisations qu’elles ne pourront éviter.

Permettez-moi de m’arrêter aussi quelques instants sur l’instauration d’un secteur optionnel, c’est-à-dire sur l’autorisation, pour les professionnels de santé, de ne pas respecter les tarifs opposables. Là encore, vous renvoyez la responsabilité vers les mutuelles, censées rembourser les dépassements d’honoraires.

Alors que nos concitoyens nous font part chaque jour de la difficulté, voire de l’impossibilité, d’accéder à des médecins ne pratiquant pas de dépassements d’honoraires, votre seule réponse consiste en l’abandon du secteur 1. Alors que les dépassements d’honoraires ont augmenté de 50 % en dix ans, alors que les sommes qui sont parfois demandées à l’hôpital suscitent la colère, voire la révolte, des patients, vous ne trouvez rien de mieux à faire que de les étendre encore et de les officialiser.

Dans tous les cas de figure, ce sont les citoyens les plus modestes qui sont touchés. C’est pourquoi il aurait été plus sage, mais surtout plus juste, de prendre, comme nous vous le proposerons, des mesures propres à limiter les dépassements et à garantir le droit pour tous d’accéder à une médecine de qualité et à tarifs opposables.

Il faut aussi conditionner les aides à l’installation des professionnels de santé au respect des tarifs opposables, car la hausse constante du coût des consultations, conjuguée aux différents prélèvements que j’ai évoqués voilà un instant –franchises médicales ou participation de 1 euro –, a eu pour effet de faire croître, quoi que vous en disiez, le nombre de personnes renonçant à des soins. Tout cela entraînera l’explosion de la médecine d’urgence, celle qui est réalisée à l’hôpital, dont tout le monde s’accorde à dire qu’elle est coûteuse.

En résumé, votre politique est néfaste non seulement pour les patients, mais aussi pour les comptes de la sécurité sociale.

Concernant la branche famille, je salue l’augmentation du plafond de ressources pour le complément de libre choix du mode de garde et la majoration de son montant en faveur des parents isolés. Il s’agit d’une petite avancée, mais qui ne pèsera pas lourd face au report de la revalorisation des allocations familiales au 1er avril et à l’annonce par le Premier ministre d’une indexation de celles-ci sur la prévision de croissance à 1 %, et non plus l’inflation. S’il n’y avait pas du tout de croissance, les familles en paieraient-elles les conséquences alors qu’elles ne portent aucune responsabilité dans cet échec ?

Nous pensons en outre qu’il faut affirmer d’autres ambitions que celles qui sont inscrites dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La modification du décret qui permet d’inscrire plus d’enfants qu’une structure ne peut en accueillir est la démonstration qu’il faut impérativement créer des places d’accueil pour les jeunes enfants, prioritairement dans des structures collectives de qualité, pratiquant des tarifs compatibles avec la situation sociale des parents : c’est à cette condition aussi que l’on pourra favoriser le travail des femmes.

Je regrette d’ailleurs que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale n’intègre aucune mesure relative à la formation des professionnels de la petite enfance.

Nous ne pouvons pas davantage nous satisfaire du statu quo dans la branche accidents du travail et maladies professionnelles, s’agissant notamment du phénomène de sous-déclaration. Outre les reports de charges financières sur la branche maladie qui en résultent, cela témoigne des blocages qui persistent, au sein des entreprises, pour reconnaître qu’une maladie ou un accident est lié à l’activité professionnelle. Cela nous inquiète, car, au final, cela signifie que certaines maladies ou certains accidents professionnels sont insuffisamment pris en compte et ne peuvent donc pas faire l’objet de mesures préventives. Celles-ci font cruellement défaut.

Quant aux victimes, elles sont une nouvelle fois oubliées. Vous avez su les taxer en 2010 en fiscalisant leurs indemnités journalières, et en 2008 en les soumettant aux franchises médicales ; vous ne savez toujours pas les reconnaître dès lors qu’il s’agit d’organiser la compensation intégrale de leur préjudice. Aujourd’hui, une victime du travail est toujours moins bien indemnisée qu’une victime de la route : ce n’est pas supportable !

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