Tout cela est louable, puisque les abus sont nombreux dans ces secteurs. Mais il s’agit de missions très lourdes pour la DGCCRF.
Si l’on se souvient par ailleurs que ces missions nouvelles s’ajoutent à celles qui ont été créées par la loi de modernisation de l’économie, par la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, puis par la loi Lagarde portant réforme du crédit à la consommation ; si l’on considère en outre que la législation européenne impose chaque année à la DGCCRF des contrôles sur un nombre croissant de produits alimentaires et non alimentaires, le tableau alors obtenu est celui d’une DGCCRF croulant littéralement sous le poids de ses missions nouvelles.
D’un autre côté, et dans le même temps – c’est la seconde lame des ciseaux –, la DGCCRF voit, année après année, ses crédits et ses effectifs baisser. En 2012, elle perdra une centaine d’agents. Entre 2008 et 2012, ses effectifs seront passés de 3 500 à 3 000 agents, soit une baisse de 15 %.
Comment la DGCCRF peut-elle faire face à l’écart croissant entre le champ des contrôles qu’elle doit effectuer et les moyens dont elle dispose pour les réaliser ?
Selon le discours officiel, monsieur le secrétaire d’État, tout va bien : la réorganisation des services permettrait de dégager des gains de productivité et d’adapter les moyens aux missions grâce à une efficacité accrue.
Je ne partage pas cet optimisme. En effet, les chiffres sont là : le recul de 15 % des effectifs de la DGCCRF s’est accompagné d’une baisse de 13 % des contrôles effectués. On comptait en effet un million de contrôles en 2006 ; on n’en dénombre plus que 870 000 en 2010.
Les suites données à ces contrôles changent elles aussi fortement. La DGCCRF se contente de plus en plus de simples rappels à la réglementation, qui demandent peu de temps aux agents mais donnent de moins en moins lieu à des actions administratives ou judiciaires. Celles-ci ont baissé de 10 % depuis 2007.
N’étant plus en mesure de couvrir le champ entier de ses missions, la DGCCRF organise son programme de contrôles de telle sorte que les moyens dont elle dispose soient, par définition, toujours en quantité suffisante. Elle définit ainsi chaque année, sur la base d’une directive nationale d’orientation, ses champs de contrôle prioritaires. De la sorte, des pans entiers des échanges échappent tous les ans à ses contrôles.
Par principe, donc, les moyens ne manquent jamais, puisque ce sont les missions qui s’adaptent aux moyens et non l’inverse !
Au-delà des chiffres, on peut s’interroger aussi sur la capacité de la DGCCRF à maintenir la qualité des contrôles effectués.
D’une part, en effet, certaines remontées de terrain suggèrent que la réorganisation des services déconcentrés, particulièrement au niveau départemental, a conduit à marginaliser les agents de la DGCCRF au sein des nouvelles structures avec, à la clé, une désorganisation de leur travail et une perte d’efficience de leur action.
D’autre part, la nature des contrôles change, manque de temps et culte du chiffre obligent. On demande de plus en plus aux agents de faire de simples inspections, c’est-à-dire de vérifier un nombre de points prédéfinis à partir d’une grille d’évaluation standardisée. Ils font par exemple le tour des restaurants d’un secteur pour vérifier que les restaurateurs ont bien apposé sur leur vitrine les affiches adéquates, comme : « La TVA baisse, les prix aussi. » En une heure, un agent peut ainsi contrôler quelques dizaines de restaurants, avec un effet marginal sur le bien-être des consommateurs mais un impact très positif sur les statistiques de performance du ministère. En revanche, les enquêtes de terrain approfondies, qui permettent de détecter les vraies fraudes, sont en recul.