La séance est ouverte à dix heures.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 106, rapport n° 107).
SECONDE PARTIE
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Politique des territoires ».
La parole est à Mme la rapporteure spéciale.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m’en tiendrai ce matin, compte tenu du temps qui m’est imparti, à un exposé rapide et synthétique des faits marquants du projet de loi de finances pour 2012 concernant la politique des territoires.
J’observe tout d’abord que la mission conserve en 2012 un périmètre interministériel stable ainsi qu’une organisation inchangée pour ses deux programmes.
Elle constitue dans le présent projet de loi de finances, par le volume de ses crédits, la plus petite mission du budget général dotée d’objectifs de performance : 334, 07 millions d’euros en autorisations d'engagement et 340, 81 millions d’euros en crédits de paiement.
J’ai relevé que ces montants sont conformes aux plafonds prévus par la loi de programmation des finances publiques en vigueur, qui couvre la période 2011-2014.
Ces dotations ont même été ramenées par l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, à moins de 330 millions d’euros en autorisations d'engagement et à 336, 5 millions d’euros en crédits de paiement, et ce en application des plans d’économies supplémentaires annoncés par le Premier ministre les 24 août et 7 novembre 2011.
Mais je reviendrai sur ce point en conclusion.
La mission est placée au cœur de la politique transversale d’aménagement du territoire. Cependant, les actions de l’État participant de cette politique, naturellement au carrefour de nombreuses interventions publiques, excèdent de loin son périmètre.
Chaque année, en effet, 5 milliards d’euros environ sont engagés pour l’aménagement du territoire. La mission « Politique des territoires » ne représente en 2012 que 6, 5 % de la totalité de ces crédits ; c’est dire à quel point elle est modeste.
La mission se singularise, en outre, par des dépenses fiscales supérieures à ses crédits budgétaires, soit 421 millions d’euros, mais j’aurai l’occasion de revenir sur ce point sensible.
J’en viens maintenant aux deux programmes de la mission, dont le périmètre reste stable en 2012.
Le premier programme, « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », dont l’acronyme est PICPAT, piloté par le ministère de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire, correspond aux moyens mis à la disposition de la délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale, la DATAR.
Ses crédits seront employés au financement de nombreux dispositifs, dont je ne rappelle que les quatre principaux : les contrats État-région, dont la « génération » 2007-2013 entrera en 2012 dans sa sixième année d’exécution ; la prime d’aménagement du territoire, outil d’aide à la localisation d’activités et d’emplois dans certaines zones prioritaires du territoire ; le plan d’accompagnement du redéploiement des armées ; enfin, la politique des réseaux d’entreprises, pôles d’excellence rurale, pôles de compétitivité et « grappes d’entreprises », qui constituent une sorte de variante des pôles de compétitivité pour des réseaux d’entreprises de petite taille.
Je constate qu’un premier appel à projets a permis de sélectionner 42 grappes d’entreprises en 2010 et 84 en 2011, mais je mets en garde contre le risque de « saupoudrage » dans ce domaine.
J’en arrive au second programme de la mission, baptisé « Interventions territoriales de l’État », couramment désigné sous le nom de PITE, qui relève du Premier ministre mais qui a été confié à la gestion du ministère de l’intérieur.
Dérogatoire aux règles du droit commun budgétaire, ce programme a été reconduit et recomposé en 2009 sous la forme de quatre actions, qui correspondent à quatre plans interministériels de portée régionale, la majorité de ces crédits se trouvant affectée à l’action relative à la Corse.
Le programme d’investissements en faveur de la Corse sera, de plus, abondé par des fonds de concours, à hauteur de 40 millions d’euros en crédits de paiement, en provenance de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, ou AFITF, ce qui constitue une forme de « débudgétisation » regrettable.
Je vous remercie par avance, monsieur le ministre, de nous indiquer si vous partagez bien notre préoccupation de limiter les débudgétisations.
Le PITE retrace aussi trois autres actions : la « reconquête » de la qualité de l’eau en Bretagne, qui comporte notamment le « plan d’urgence nitrates » et le plan de lutte contre les algues vertes ; les dépenses consacrées à l’écologie du marais poitevin ; enfin, les actions mises en œuvre à la Guadeloupe et à la Martinique pour faire face aux dangers du chlordécone, ce pesticide hautement toxique qui a été utilisé contre le charançon du bananier.
J’ai relevé que la composition du PITE pourrait évoluer après 2012 et que le ministère de l’intérieur a demandé aux préfets de région de faire remonter des projets territoriaux.
Dans ce contexte, je m’interroge sur la possibilité d’inscrire au PITE une action spécifique destinée à résoudre les problèmes particuliers du Pays basque, qui pourrait compléter la convention dédiée à ce territoire et pour laquelle, à ce jour, le Gouvernement n’a donné aucune garantie de reconduction.
Monsieur le ministre, je souhaite que vous nous éclairiez sur ce sujet.
Avant de conclure, je voudrais formuler deux principales critiques.
En premier lieu, l’efficacité des mesures mises en œuvre par la mission me paraît incertaine et insuffisamment mesurée. Améliorer l’évaluation de ces dernières est donc nécessaire. Il faut connaître les résultats effectifs des pôles de compétitivité et des grappes d’entreprises, mais aussi des pôles d’excellence rurale ou encore de la prime d’aménagement du territoire, outil en faveur de l’emploi sur lequel la Cour des comptes a émis des réserves.
En second lieu, l’évaluation que je préconise concerne les dépenses fiscales rattachées au programme que gère la DATAR.
Trente dépenses fiscales lui sont en effet rattachées pour un montant total minimal estimé de 421 millions d’euros en 2012, soit un montant supérieur aux crédits de la mission. La tendance au saupoudrage en la matière est inacceptable.
Je m’inquiète réellement du résultat des évaluations issues du rapport Guillaume d’août 2011 consacré aux niches fiscales et sociales. Ce rapport s’est en effet montré très critique sur ces dispositifs, jugés quasi systématiquement inefficaces : sur les vingt et une dépenses fiscales de la mission évaluées, dix-huit ont le score le plus faible, à savoir zéro.
Déjà, en octobre 2010, le conseil des prélèvements obligatoires avait évoqué des dispositifs à « l’efficacité incertaine ».
Monsieur le ministre, quelles conséquences tirez-vous de ces évaluations assez calamiteuses ? Je rappelle que notre collègue François Marc, ancien rapporteur spécial, avait à plusieurs reprises exigé que ces dépenses fassent l’objet d’une évaluation rigoureuse de leurs performances. J’ajoute, pour ma part, qu’une remise à plat globale de ces mesures me semble à terme inévitable.
Pour conclure, je souligne ici que les fondements de la politique d’aménagement du territoire conduite par le Gouvernement depuis des années sont très largement responsables de l’impression de saupoudrage qui ressort des dispositifs que j’ai rappelés.
Il en résulte sur le terrain la perception d’une politique d’aménagement du territoire sans réelle lisibilité, ce qui est aggravé par l’extrême instabilité du rattachement ministériel de la DATAR.
Cette instabilité fragilise notre ambition en matière d’aménagement du territoire et laisse à penser qu’il ne s’agirait plus que d’une politique subsidiaire et marginalisée. Pourquoi le Gouvernement fait-il ce choix ?
Je ne m’étendrai pas non plus sur le manque de concertation qui caractérise les interventions unilatérales de l’État dans les territoires ; je pense au Grand Paris, mais aussi à la généralisation des projets d’intérêt général au travers desquels l’État impose ses vues aux collectivités. Qu’est donc devenue la décentralisation ?
En bref, je juge nécessaire d’accroître globalement l’efficacité des politiques d’aménagement du territoire, au delà même de la présente mission, dans une démarche de solidarité accrue entre les territoires et de recherche d’une plus grande cohérence.
Le choix de minorer de 4, 3 millions d’euros les crédits de la mission ne va pas dans ce sens : une telle contraction des moyens de cette dernière risque en effet de fragiliser ses dispositifs d’intervention et de mettre à mal la « soutenabilité » des engagements des actions concernées.
C’est pourquoi la commission des finances vous propose, mes chers collègues, de rejeter les crédits de la mission « Politique des territoires.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en période de crise, la politique des territoires est un enjeu essentiel pour aider ceux-ci à affronter les difficultés, pour accompagner les mutations et pour éviter que les inégalités ne se creusent entre les mieux armés et les plus défavorisés.
Le rapport pour avis que nous vous présentons aujourd’hui a donc pour objet de traiter cette question : la politique des territoires répond-elle aujourd’hui à cette mission essentielle de cohésion nationale dans une période de crise économique dont il n’est pas nécessaire, ici, de souligner la gravité ?
Nous avons donc examiné tant les crédits de la mission elle-même que, plus généralement, les crédits rassemblés dans le document de politique transversale, en resituant cette politique dans le cadre de la réforme de la politique européenne de cohésion.
Nous nous sommes enfin penchés sur les actions menées dans le cadre des PITE. Faute de temps, ce matin, pour développer ce point dans cette enceinte, mes chers collègues, je vous renvoie à mon rapport écrit.
Les crédits de la mission elle-même diminuent pour 2012 de 4, 6 % en autorisations d’engagement, mais augmentent de 5, 9 % en crédits de paiement.
L’évolution pourrait paraître contrastée, mais, si nous additionnons ces chiffres à ceux de l’évolution entre 2010 et 2011, soit une baisse de 5, 1 % en autorisations d'engagement et de 11, 1 % en crédits de paiement, on voit se préciser une réduction incontestable des moyens de l’aménagement du territoire en France, que le coup de rabot de l’Assemblée nationale – une baisse de 3 millions d’euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement – ne fait que confirmer.
Cette réduction se retrouve aussi dans les moyens humains de la DATAR, avec douze équivalents temps plein travaillé de moins en deux ans, soit une baisse de 8 % des effectifs.
Il est une autre illustration de cette absence de signal de l’État sur l’importance accordée à l’aménagement du territoire : aucun comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire n’a été organisé en 2011, le dernier remontant maintenant à mai 2010.
Nous serons évidemment attentifs aux conclusions de la réflexion engagée dans le cadre de la prospective « Territoires 2040 », mais nous pouvons déjà regretter l’absence d’intervention de la DATAR sur la hiérarchisation des projets inscrits au schéma national d’infrastructures de transport, le SNIT.
Nous savons pourtant qu’il ne sera pas possible de financer la totalité d’un tel catalogue – cela a été dit dans cet hémicycle ces derniers jours – et que la responsabilité de l’État serait justement d’établir une priorité parmi les projets en fonction de leur impact sur les territoires et de limiter ainsi le gaspillage de financement entre des infrastructures et des modes de transport souvent en concurrence – autoroutes, lignes à grande vitesse et nouveaux aéroports.
Ce manque d’engagement pour une politique volontariste d’aménagement du territoire se retrouve plus généralement dans la réduction forte de l’effort budgétaire global en faveur de l’ensemble des politiques contribuant à l’aménagement du territoire, rassemblées dans le document de politique transversale.
Entre 2010 et 2012, le total des autorisations d’engagement est passé à 5, 87 milliards d’euros – une diminution de 8, 8 % –, soit 500 millions d’euros de moins investis sur nos territoires.
Je ne détaillerai pas ici ces baisses, faute de temps ; le rapporteur pour avis que je suis s’étonne cependant que le document présenté par l’État ne permette guère de se faire une idée précise des raisons de ces diminutions, parfois spectaculaires : baisse de 29, 6 % des crédits consacrés à l’accompagnement des mutations économiques et au développement de l’emploi, baisse des deux tiers des crédits consacrés aux infrastructures de services de transport, pour ne prendre que ces deux exemples.
Monsieur le ministre, nous serions intéressés par des explications sur de telles réductions, s’agissant de politiques publiques pour le moins essentielles.
Quelques lignes de mon rapport écrit traite également du financement de l’action culturelle. Je ne citerai qu’un seul exemple : les moyens consacrés au développement culturel des territoires les moins favorisés – périphéries des zones urbaines, ou zones rurales isolées – passent de 4 millions d’euros, somme déjà modeste, à 343 000 euros, soit une baisse record de 91, 4 %.
Quel signal terrible et inquiétant, monsieur le ministre, lorsque l’on sait l’enjeu que représente la culture pour la cohésion sociale et pour l’attractivité des territoires les moins développés ou en mutation !
Permettez-moi de vous livrer en conclusion un sentiment sur cette « errance administrative » de l’aménagement du territoire, pour reprendre un terme entendu lors des auditions. Aujourd’hui accolé à l’agriculture, sans même un secrétaire d’État spécifique – vous avez exprimé ce regret lors de votre audition au Sénat voilà quelques semaines –, l’aménagement du territoire a perdu de sa lisibilité et de son importance. Nous n’avons par exemple guère fait entendre la voix de la France sur la réforme des fonds structurels concernant des points aussi intéressants que la création des régions intermédiaires, en préférant, si je reprends la réponse gouvernementale au cinquième rapport de la Commission européenne, privilégier la préservation des budgets de la politique agricole commune. Nous ne pouvons que le regretter, et serons vigilants à la réponse qu’apportera le Gouvernement aux nouvelles propositions de la Commission.
En tout état de cause, au vu de la baisse sensible des budgets tant de la mission « Politique des territoires » que de la politique transversale, et de l’absence de lisibilité générale de la politique d’aménagement du territoire, le rapporteur pour avis que je suis a proposé d’émettre un avis défavorable, lequel a été confirmé par la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire le 15 novembre dernier. §
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires » participe à l’effort de maîtrise des dépenses publiques. Si les crédits de cette mission pour 2012 sont certes présentés en baisse en autorisations d’engagement, ils sont en hausse en crédits de paiement, ce qui permet la poursuite des politiques engagées.
Ainsi, les pôles de compétitivité fonctionnent plutôt bien. Depuis leur lancement en 2005, 71 pôles ont été labellisés. L’enveloppe prévue pour la période 2009-2012 s’élève à 1, 5 milliard d’euros. La politique des pôles de compétitivité est articulée avec celle des grappes d’entreprises, qui se positionnent sur des actions plus proches du marché. Un total de 126 grappes d’entreprises a été sélectionné à l’issue de deux appels à projets, et une enveloppe de 24 millions d’euros sur deux ans est mobilisée par le Fonds national d’aménagement et de développement du territoire, le FNADT. Je considère que la proximité territoriale doit être un facteur important de développement des relations entre les grappes d’entreprises et les pôles de compétitivité.
D’une manière générale, j’estime que les politiques d’appels à projets, grâce à l’émulation qu’elles favorisent, donnent de meilleurs résultats que les politiques de « guichet ».
C’est cette procédure d’appels à projets qui a permis de sélectionner les pôles d’excellence rurale en deux vagues successives de 379, puis 263 PER. Les conventions des PER de la deuxième vague sont actuellement en cours de signature. L’enveloppe globale de 235 millions d’euros d’une génération à l’autre ayant été reconduite, le montant moyen d’aide par PER devrait être accru de 620 000 à 890 000 euros, ce dont je me félicite.
Je me suis également intéressé à l’action de l’Agence française pour les investissements internationaux, l’AFII, qui se trouve sous la double tutelle du ministre chargé de l’aménagement du territoire et du ministre chargé de l’économie et des finances.
L’AFII paraît très dynamique. L’évaluation de ses actions, qui a été faite au printemps 2011, montre qu’elle parvient à de bons résultats même en période de crise : 782 projets d’investissements étrangers en France ont été annoncés en 2010 contre 639 en 2009, soit une hausse de 22 %. Le nombre d’emplois induits s’élève à 31 815.
Cette bonne performance s’explique largement par l’ensemble des mesures prises au cours des dernières années pour renforcer l’attractivité de notre pays : réforme du crédit d’impôt recherche en 2008, lancement du Grand Paris en 2009, réforme de la taxe professionnelle et lancement du programme national des investissements d’avenir en 2010.
Toutefois, il me paraît important de lutter contre la concentration géographique des investissements étrangers sur quatre régions seulement, qui accueillent 61 % des projets, en assignant comme priorité à l’AFII la promotion des pôles de compétitivité et le soutien aux zones en mutation économique.
Le dispositif de la prime d’aménagement du territoire, la PAT, est financé pour 2012 par une dotation de 38, 6 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 33 millions d’euros en crédits de paiement, soit des niveaux stables depuis 2010.
Il a certes fait l’objet de critiques de la part de la Cour des comptes, qui s’est interrogée sur le caractère réellement incitatif de ces aides, dont les montants unitaires par projet demeurent modiques. Mais j’estime que c’est un élément de persuasion de la part de l’État, qui peut faire la différence dans la dernière ligne droite de la négociation de dossiers délicats. On estime que le dispositif PAT a permis en 2010 de créer 3 000 emplois et d’en maintenir 8 400.
C’est aussi dans le cadre de cette mission « Politique des territoires » que le Gouvernement soutient des politiques indispensables à l’attractivité des territoires ruraux. Ainsi, je me félicite de la pérennisation du dispositif des zones de revitalisation rurale, dont le coût fiscal, évalué à environ 130 millions d’euros, paraît modeste au regard de son grand intérêt pour les territoires ruraux concernés.
L’accent est mis cette année sur l’amélioration de l’offre de soins en milieu rural. Si j’approuve l’amélioration apportée par le programme des 250 maisons de santé pluridisciplinaires, je considère cependant que le redressement de la démographie médicale en zone rurale dépend à la fois du numerus clausus, qui est en inadéquation avec la réalité sur le terrain, et de la volonté de mettre en œuvre des mesures plus directives pour l’installation des médecins en milieu rural.
Quant à l’accord national « Plus de services au public » signé en septembre 2010 entre l’État et neuf opérateurs, il est expérimenté dans un premier temps dans vingt-trois départements. Les conventions départementales sont en cours de finalisation. Je constate toutefois une certaine frilosité des opérateurs à s’investir plus fortement dans cette opération.
Enfin, je voudrais évoquer le programme national de déploiement du très haut débit présenté en juin 2010, programme qui a pour objectif de parvenir à une couverture de 100 % des foyers en 2025.
Monsieur le ministre, peut-être serez-vous en mesure de nous apporter dès cette année des indications sur ce que pourraient être les recettes pérennes qui doivent alimenter le Fonds d’aménagement numérique du territoire, le FANT, destiné à prendre le relais de cette enveloppe de départ ?
Globalement, je crois que la mission « Politique des territoires » a réussi à préserver les marges de manœuvre permettant d’assurer la continuité de la politique de soutien aux territoires.
C’est pourquoi, à la différence de la majorité de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, j’émettrai à titre personnel et au nom du groupe UMP de la commission, un avis favorable à l’adoption de ces crédits et de ces différentes politiques à conforter. Je rappelle que, dans un contexte de crise économique, ce n’est pas tant le montant global des crédits qui importe que la qualité des actions menées et l’effet levier qu’elles procurent pour un aménagement du territoire fondé sur une logique de projets plutôt que sur une logique de guichet. §
Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je vous rappelle aussi que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Évelyne Didier.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, année après année, nous examinons au sein de cet hémicycle les crédits de la mission « Politique des territoires » en déplorant que cette mission ne reflète qu’à la marge la politique d’aménagement du territoire, par nature transversale. À ce titre, je rappelle notre incompréhension de voir ces crédits passer de ministère en ministère au gré des remaniements.
Concernant l’action Attractivité économique et compétitivité des territoires, la politique des pôles de compétitivité engagée depuis 2005 est une nouvelle fois confirmée. Pourtant, nous répétons inlassablement qu’une telle politique est erronée dans le sens où elle suppose d’identifier les territoires qui ont du potentiel de ceux qui en seraient dépourvus. Une telle conception entérine donc un désengagement de moyens et de compétences de pans entiers du territoire pour concentrer l’ensemble des ressources au sein de quelques pôles identifiés selon un principe de spécialisation dans un contexte de compétition internationale. Nous nous éloignons de la conception républicaine d’aménagement du territoire pour aller toujours plus vers celle de compétitivité, qui exclut toute dimension de solidarité, de cohésion et de péréquation entre les territoires.
Par ailleurs, en termes d’accompagnement de la mutation économique, c’est-à-dire, pour parler clair, de la désindustrialisation des territoires, nous estimons qu’un tel phénomène ne peut se combattre à coup d’exonérations fiscales ou sociales, d’aides ponctuelles au travers de la prime d’aménagement du territoire, mais qu’il requiert une réelle politique industrielle menée par le Gouvernement s’appuyant sur un pôle public de financement desserrant l’étau de l’accès au crédit, notamment pour les PME. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, et nous continuons de déplorer la perte de 500 000 emplois industriels depuis 2002. Dans ce cadre, la stagnation du niveau de crédits accordé à la PAT depuis 2010, à hauteur de 32, 6 millions d’euros en crédits de paiement, nous semble problématique.
Nous noterons au passage que le niveau des crédits de paiement pour l’ensemble de la mission, à hauteur de 341 millions d’euros, est inférieur à la dépense fiscale liée à cette mission, soit 397 millions d’euros. Cela nous interpelle et nous permet de qualifier les mesures gouvernementales en la matière de « saupoudrage » dont l’efficacité est contestable.
Concernant l’action n°2 du programme principal de cette mission, Développement solidaire et équilibré des territoires, comme Mme la ministre du budget le reconnaissait récemment, « le socle du modèle républicain, ce sont les services publics ».
Pourtant, le ministre en charge de ce budget, dans le cadre de l’examen en commission à l’Assemblée nationale de ces crédits, s’est permis de déclarer que « chacun doit bien comprendre que, faute de moyen, les services publics de demain ne pourront disposer des mêmes infrastructures ni fonctionner au même coût qu’aujourd’hui ». Ces propos ont le mérite de la franchise sur l’ambition du Gouvernement en la matière, c’est-à-dire la réduction progressive de la présence des services publics sur le territoire national.
Nous déplorons à ce titre la perte d’ingénierie publique au sein des collectivités comme de l’administration centrale. En effet, l’application de la révision générale des politiques publiques à l’ensemble des secteurs de manière mécanique et autoritaire par la suppression d’un fonctionnaire sur deux aboutit à des situations déplorables.
En effet, dans tous les secteurs d’intérêt général, l’État se désengage et rétracte la présence des services publics, comme cela a été organisé avec la réforme de la carte judiciaire, scolaire ou encore hospitalière. La présence postale a également été remise en cause au travers de la loi adoptée en 2009 par le Parlement.
Tous ces éléments conduisent à une dévitalisation des zones rurales, dévitalisation que vous ne pourrez combattre uniquement avec l’avènement des pôles d’excellence rurale, d’autant plus que, concernant ces PER, on assiste à la restriction des aides à chaque nouvel appel à projet.
L’attractivité des territoires passe d’abord – nous le réaffirmons – par la présence de services publics.
Les collectivités qui, dans ce cadre, sont également un acteur majeur de l’aménagement du territoire font aussi les frais de la rigueur gouvernementale. L’assèchement des ressources par le gel des dotations et la réforme de la taxe professionnelle conduisent à rétracter leur capacité d’investissement et donc leur capacité à faire vivre des services publics locaux. Cette situation est aggravée par le nouveau plan de rigueur annoncé par le Premier ministre, qui entérine une ponction de 200 millions d’euros sur le budget alloué aux collectivités locales.
On nous parle des ambitions du Gouvernement en termes d’offre de transport ainsi que d’aménagement numérique du territoire. Mais qu’en est-il réellement ?
Le fret, outil puissant d’aménagement du territoire, est purement abandonné ou laissé à l’appréciation d’opérateurs privés de proximité. Le réseau ferré est maintenu dans un état de délabrement tel que des lignes sont abandonnées. Certes, des efforts sont entrepris, mais il y a encore beaucoup à faire. Nous sommes dans ce cadre bien loin des engagements du Grenelle de rééquilibrage modal et des déclarations d’intention entourant l’élaboration du syndicat national d’infrastructures de transport, le SNIT.
Concernant l’aménagement numérique, vous comprendrez bien que l’horizon de 2025 pour l’accès de tous au très haut débit nous semble bien loin et très hypothétique. Nous regrettons la confiance de ce gouvernement en l’initiative privée pour développer ce réseau, car seuls les secteurs rentables sont développés. À terme, ce seront une nouvelle fois les collectivités qui devront intervenir pour garantir à nos concitoyens l’accès au service public dans les zones non rentables. C’est regrettable !
Pourquoi donc ne pas solliciter financièrement le secteur privé, dont les bénéfices sont importants, notamment pour alimenter le fonds d’aménagement numérique du territoire créé en 2009 ? Pourquoi ne pas intégrer, comme nous vous le demandons depuis de nombreuses années, l’accès au très haut débit dans le service universel ?
Aujourd’hui, l’accès à l’information et à la communication est plus que jamais un facteur structurant pour l’attractivité des territoires, comparable à celui de la desserte en infrastructures essentielles. Il nous faut en prendre la mesure et réaliser le fibrage optique de l’ensemble du territoire. Il s’agit de l’un des défis majeurs du XXIe siècle.
Pour la téléphonie mobile, je rappelle que 279 communes restent aujourd’hui en zone blanche. Les 600 millions d’euros d’investissements prévus permettront-ils de résoudre cette question et également de limiter les zones grises ?
Je voudrais, pour conclure, dire quelques mots sur les maisons de santé pluridisciplinaires dont le Gouvernement souhaite voir porter le nombre à 250.
Nous sommes pour notre part favorables à cette démarche, à la condition – j’y insiste – que les professionnels n’y pratiquent pas de dépassements d’honoraires.
Sur le fond, l’ensemble de ces politiques menées par le Gouvernement ont entraîné un malaise au sein des territoires, malaise qui n’est sans doute pas pour rien dans le basculement du Sénat à gauche. Il est temps que le Gouvernement entende le message des élus locaux et de la population.
La richesse de la France, c’est l’ensemble de ses territoires et de leurs habitants qu’il ne faut pas, au nom de la rigueur et de l’austérité, de l’appétit des banques et des fonds spéculatifs, abandonner au jeu de la concurrence mondialisée, concurrence qui accentue la fracture sociale au sein de notre pays.
La France va-t-elle devenir un désert avec quelques oasis qui concentreront toutes les activités ? C’est tout sauf de l’aménagement du territoire.
Pour toutes les raisons que je viens d’évoquer, nous voterons contre les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires » est, par le volume de ses crédits, la plus petite du budget général dotée d’objectifs de performance, mais aussi, paradoxalement, l’une des plus importantes par son objet, puisqu’elle vise à garantir la cohésion de la République.
Chacun a pu mesurer, lors du congrès des maires de France, qui s’est tenu la semaine dernière à Paris, combien les élus locaux sont inquiets pour l’avenir de leur territoire. Aux incertitudes sur les capacités financières futures des collectivités locales, que ne clarifie pas ce PLF pour 2012 – loin s’en faut – s’ajoute, pour beaucoup, un sentiment d’abandon.
Touchés de plein fouet par la mondialisation, par les mutations économiques et industrielles, les territoires ruraux voient se multiplier les fermetures ou les délocalisations d’usines. Ils sont victimes aussi de la politique menée par le Gouvernement, qui répond malheureusement à une logique de concentration ou de rentabilité dictée par la RGPP, laquelle s’assimile à un véritable jeu de Monopoly, avec élimination programmée des participants…
Avec la carte militaire, la carte judiciaire, la carte hospitalière, la carte scolaire, la carte pénitentiaire, tout un ensemble de services de l’État sont transférés sur les métropoles régionales ou économiques. Mais tous les départements ne sont pas irrigués par de telles métropoles !
Vous allez sans doute me dire, monsieur le ministre, qu’il ne sert à rien de se lamenter, mais je suis élu d’un département, le Lot, qui, s’il est attractif par la richesse de son patrimoine architectural, naturel et culinaire, avec sept restaurants étoilés au guide Michelin, …
… cumule aussi certains handicaps tels qu’une agriculture peu demandeuse de main-d’œuvre et donc peu pourvoyeuse d’emplois, un habitat dispersé – ce que l’on appelle le « mitage » –, très apprécié des habitants mais coûteux en services, un éloignement des grandes métropoles ou encore l’absence de TGV, couplée à une desserte ferroviaire précaire et cahotante qui fait les frais de la démarche de rentabilité de la SNCF.
Alors oui, il faut trouver les moyens de revitaliser ces territoires fragiles où il fait bon vivre, de leur ouvrir de nouvelles perspectives, d’y créer de nouvelles filières pour que les emplois s’y installent.
J’admets que nous avons bénéficié d’initiatives intéressantes comme les pôles de compétitivité, les grappes d’entreprises ou les pôles d’excellence rurale, pour lesquels des moyens significatifs ont été dégagés.
Ces actions ont eu plusieurs vertus, dont la première est d’avoir redonné confiance et fierté aux territoires, de leur avoir permis de révéler et d’exprimer des talents et, ainsi, d’avoir su créer des dynamiques positives. Il faut aujourd’hui les inscrire dans les politiques régionales européennes, dont les fonds, en particulier ceux qui sont issus du Fonds européen de développement régional, le FEDER, sont trop peu mobilisés. Il faut dire que les procédures sont complexes, qu’il faut jongler avec axes, mesures et autres sous-mesures, et attendre bien longtemps l’arrivée des financements européens.
Cependant, vous le savez bien, la réussite de ces initiatives dépend de la combinaison de multiples facteurs.
Le maintien des services de l’État et des services publics est évidemment essentiel, en particulier pour les territoires les plus isolés et à faible densité démographique. Je peux comprendre l’intérêt de mutualiser les moyens des opérateurs, mais, au-delà du problème de la formation des agents, soyons clairs, la mise en place des points relais multiservices ne doit pas conduire, une fois encore, à une concentration des services dans quelques villes.
L’accès aux soins est aussi un point incontournable. Les solutions de la loi Bachelot-Narquin ne correspondent pas à la réalité de ce que nous vivons sur le terrain. Il faut attendre parfois cinq ou six mois pour avoir accès à un spécialiste, contre deux ou trois semaines dans la région parisienne ou certaines villes du sud-est de la France. Le Lot, par exemple, n’a plus de pédiatres.
Les mesures incitatives comme le contrat d’engagement de service public ou le contrat santé solidarité sont, à l’évidence, insuffisantes. La loi Fourcade, adoptée en juillet dernier, a d’ailleurs enterré ce dernier contrat en supprimant la pénalité qui s’y attachait.
Quant aux maisons de santé pluridisciplinaires, c’est sans doute l’initiative qui répond le mieux aux aspirations des professionnels, notamment des jeunes et des femmes qui ne veulent plus exercer dans l’isolement. Cela étant, l’objectif de 250 maisons de ce type est loin de couvrir les besoins. Ayez aussi la franchise de reconnaître que ces créations sont possibles parce que les collectivités locales jouent le jeu, en les finançant presque autant que l’État.
Je crains que nous ne puissions à l’avenir faire l’économie de mesures plus directives, voire coercitives, qui dépasseront, nécessité oblige, la liberté d’installation. Les patients attendent des médecins ! Or, sur un plan strictement financier, ces derniers peuvent très bien vivre à la campagne. Leur présence confortera les pharmacies rurales et rassurera les populations.
L’accès aux nouvelles technologies constitue un autre enjeu de taille. En matière de téléphonie mobile, on nous dit que les fameuses zones blanches sont en voie de résorption. Certes, mais encore faut-il s’entendre sur la notion de couverture ! Je vous invite, monsieur le ministre, à venir dans le Lot : vous verrez qu’il y subsiste de nombreuses zones grises… Dans certaines communes, la réception varie, pouvant être nulle à certains endroits alors qu’elle est satisfaisante à proximité. Il faut alors héler un passant et lui demander où passe le mobile : ce peut être en haut du bourg, devant l’église ou même dans le cimetière. §En outre, les calculs de couverture sont effectués à l’extérieur des bâtiments et sans déplacement, les téléphones n’ayant alors de mobiles que le nom.
Quant à Internet, 95 % de la population aurait accès au haut débit. Là encore, il faut nuancer ! Vous avez fixé l’objectif du très haut débit pour tous d’ici à 2025, avec 900 millions d’euros destinés aux territoires ruraux dans le cadre de ce plan. C’est bien, mais je crois qu’un engagement plus substantiel serait bienvenu pour accélérer le processus et rapprocher l’échéance. Vous le savez, certaines zones moins rentables pour les opérateurs privés sont laissées à la charge des collectivités.
Bien d’autres aspects mériteraient des commentaires. En particulier, le maintien d’une agriculture forte et diversifiée apparaît comme la condition de la vitalité des territoires ruraux, de même que le développement des infrastructures de transport. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de dire vendredi ce que je pensais du schéma national d’infrastructures de transport, le SNIT.
Sur tous ces sujets, le Gouvernement doit tenir ses engagements. Le malaise des territoires est réel. Il faut aujourd’hui renouveler le pacte de confiance entre les collectivités et l’État. Pour les territoires les plus fragiles, la solidarité nationale est plus que jamais nécessaire et le groupe du RDSE, dans la tradition radicale et républicaine, milite plus que jamais pour un État péréquateur et aménageur.
Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste-EELV.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, élu du Gers, le département le plus rural de France, avec 16 % de sa population active dans le secteur agricole, je vois bien sûr l’aménagement du territoire à travers le prisme rural.
Je suis convaincu du potentiel de la ruralité, mais l’égalité des chances ne pourra pleinement s’exprimer qu’au moyen de la péréquation financière. Priorité proclamée du Gouvernement, qui doit en démontrer la réalité, la ruralité est placée sous votre autorité, monsieur le ministre, au même titre que l’agriculture et l’aménagement du territoire. J’en suis très heureux, car les profondes mutations de l’espace rural ont, depuis quelques années, bouleversé les territoires.
La mission « Politique des territoires », la plus petite en termes budgétaires, avec 334 millions d’euros de crédits – on atteint toutefois 5, 1 milliards d’euros si l’on regroupe les quinze missions transversales –, est fondamentale pour la structuration de notre pays.
Hélas, nous constatons, sans nous résigner pour autant, que les contraintes budgétaires pèsent sur cette mission comme sur l’ensemble de la loi de finances.
Dans son rapport, le comité présidé par Henri Guillaume juge que, sur les vingt et une niches fiscales de la mission, dix-huit sont inefficaces. Prenez-vous en considération ce rapport ? Quel sort réserverez-vous à ces niches ? Quel serait le montant des économies générées par l’éventuelle suppression des niches qui ont reçu un zéro en efficacité, monsieur le ministre ?
L’économie de 3 millions d’euros sur les crédits non consommés des contrats État-régions est une mesure de bon sens, qui contribue à la maîtrise des dépenses publiques mise en œuvre dans ce PLF pour 2012.
Les 235 millions d’euros alloués à la deuxième vague d’homologation des pôles d’excellence rurale encouragent la création de projets innovants et porteurs d’emplois. Ils constituent une réelle incitation à investir dans la ruralité. J’ai personnellement soutenu les PER gersois, qui participent au dynamisme de l’agriculture.
Quelle est votre position, monsieur le ministre, sur la prime à l’aménagement du territoire, de 32, 6 millions d’euros cette année ? Que répondez-vous aux critiques la Cour des comptes ? La PAT est pourtant, me semble-t-il, une mesure déterminante pour inciter les entreprises à s’installer dans les zones fragiles et dans celles qui sont ouvertes aux investissements étrangers.
L’application du programme national « très haut débit » pour la téléphonie mobile est décisif, car les zones rurales souffrent indubitablement d’une pénurie chronique dans les communications, que ce soient les routes, l’accès à l’internet ou la téléphonie mobile.
Chacun s’accorde sur le fait que l’horizon 2025 pour la couverture de l’ensemble du territoire est trop lointain. Envisagez-vous un nouveau calendrier, monsieur le ministre ? Il le faut ! Afin de contribuer à résorber les zones blanches et les zones grises, plus nombreuses en réalité que l’évaluation faite par l’ARCEP, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, j’ai saisi les ministres Éric Besson et Philippe Richert de la candidature du Gers pour devenir département rural pilote dans la mise en place de la technologie 4G. Je vous demande de soutenir ce projet, monsieur le ministre.
Vous serez jugé sur la réalité de votre politique visant à l’égalité des chances, en particulier si les territoires disposent d’une couverture numérique, absolument indispensable pour permettre l’implantation de PME.
L’attractivité et la compétitivité sont au cœur de la politique des territoires. Elles sont les éléments cardinaux de l’action de la DATAR, qui prépare, impulse et coordonne les politiques d’aménagement du territoire. La DATAR établit études et analyses sur les nouvelles ruralités à l’horizon 2030-2040, en relation avec des centres de recherche comme l’INRA, et formule des scénarios prospectifs permettant d’anticiper les évolutions. Pour une meilleure stratégie, envisagez-vous un rapprochement de la DATAR avec le Commissariat général à l’investissement ?
L’Agence française pour les investissements internationaux, nous le savons, promeut auprès des investisseurs étrangers l’attractivité territoriale et la compétitivité économique de notre pays, deuxième en Europe pour les investissements étrangers, après le Royaume-Uni et avant l’Allemagne. Nous pourrions renforcer sa régionalisation.
Nos atouts pour attirer les investissements sont nombreux dans les territoires ruraux : qualité de la main-d’œuvre, productivité horaire, formation, infrastructures ou qualité de vie. Néanmoins, il serait indispensable d’analyser la réalité des investissements internationaux sur notre sol. Quelle est la part des acquisitions immobilières ? Ces investissements ne constituent-ils pas souvent une prise de contrôle de PME ou de start-up destinée à acquérir savoir-faire et brevets avant, éventuellement, d’abandonner, dans un second temps, une coquille vide et des salariés à juste titre révoltés ?
Pour attirer de nouvelles entreprises et de nouvelles populations, il est indispensable d’avoir une large offre de services au public. Nous ne pouvons plus avoir une vision conservatrice des services publics. Elle doit évoluer de façon pragmatique et stratégique sur l’ensemble du territoire, car la cohérence et l’équilibre sont les principes inhérents à l’aménagement du territoire. À ce titre, pouvez-vous tirer des enseignements de l’application de l’accord national « Plus de services au public » dans les vingt-trois départements pilotes ?
Monsieur le ministre, la politique des territoires est certainement, aujourd’hui, l’une des missions les plus essentielles du budget. Vous devez donc être habité par une réflexion politique sur le long terme. L’aménagement harmonieux du territoire est un thème majeur, à travers lequel le Gouvernement doit nous présenter sa vision prospective de la France.
Dans une démarche de résilience, tentons de positiver la crise économique et les efforts budgétaires qu’elle entraîne pour stimuler toute notre créativité. Nous avons certes peu de moyens financiers, alors démontrons notre capacité imaginative ! Vous devez être lucide et créatif, avoir du bon sens et une forte volonté d’agir. Encouragez les initiatives innovantes et les talents pour rendre espoir à nos territoires. Ils vous démontreront qu’ils possèdent l’indispensable courage et l’intelligence nécessaire.
Le rapport du Conseil d’analyse économique, Créativité et innovation dans les territoires, est une mine de propositions pertinentes et audacieuses nous invitant à faire preuve de cette originalité nécessaire pour dynamiser l’économie des territoires, trop souvent endormie.
La crise accentue notre tendance au pessimisme et au culte du déclin, mais je suis convaincu que notre pays est très riche en ressources et talents. J’ajouterai aussi que nous devons avoir confiance en notre jeunesse !
Vos propositions doivent constituer un appel au courage et au bon sens, monsieur le ministre. Ce sont les vertus de la ruralité, et il faut que votre politique leur permette de se concrétiser.
Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l ’ UCR.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le ministre, vous me permettrez de commencer, à titre personnel, par des compliments. J’apprécie en effet votre action, votre présence sur le terrain. Vous êtes attaché au monde rural, et vous le montrez. Vous êtes un voisin de l’Orne, et vous connaissez ce département. Vous connaissez le dynamisme de ses élus, ses responsables, et nous comptons beaucoup sur vous.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Je n’irai pas jusqu’à dire que, ayant à rencontrer quelques-uns de vos collaborateurs dans les prochains jours pour soutenir des projets auxquels je tiens, je souhaitais, bien entendu, vous adresser ces quelques propos élogieux.
Sourires.
M. Jean-Claude Lenoir. Bien entendu, vous allez penser que je vais maintenant les atténuer quelque peu.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste-EELV.
En vérité, monsieur le ministre, vous avez eu raison de dire devant la commission que quelque chose manquait dans le dispositif gouvernemental. Vous pensiez à un secrétariat d’État
M. Jean-Jacques Mirassou s’exclame.
L’aménagement du territoire et l’aménagement rural devraient, me semble-t-il, relever du Premier ministre, car tous les ministères sont concernés. Il était un temps où la Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale, la DATAR, était rattachée directement au Premier ministre et avait donc la possibilité d’avoir une véritable influence sur l’ensemble des actions ministérielles. Mon propos va vous le démontrer.
Je crois au monde rural tout simplement parce que je suis moi-même issu de ses territoires. Je sais aussi les faiblesses d’un territoire rural intermédiaire, c’est-à-dire relativement proche de Paris, avec tous les atouts que l’on peut imaginer, mais en même temps situé à proximité de villes plus importantes, avec pour conséquence une diminution de certains services offerts aujourd'hui à la population.
Je souhaite attirer votre attention sur différents points.
Tout d’abord, l’emploi, qui est évidemment le problème sur lequel nous travaillons le plus.
Loin de moi, loin de vous, loin de tous, l’idée que l’activité industrielle forte doit se développer dans des centres importants. De nombreux pays – je pense notamment à l’Italie – ont démontré que l’entreprise a la capacité de se développer de façon extraordinaire en milieu rural. À ce titre, vous le savez, dans le département de l’Orne, un certain nombre de pôles industriels se sont développés, fortifiés par l’action, bien sûr, des dirigeants mais également des salariés, soutenus par les élus et aussi fortement par les pouvoirs publics, y compris lorsqu’il y a eu des reconversions ou des menaces sur certaines entreprises.
Il faut créer les conditions permettant à ces entreprises de continuer à se développer, notamment en ce qui concerne la formation des hommes et les transports.
Avec les transports, monsieur le ministre, nous sommes au cœur d’un vrai sujet. Nous sommes un territoire intermédiaire et nous voyons les liaisons ferroviaires décliner, en qualité et en quantité.
J’étais samedi dernier dans mon département, à la gare du Theil-sur-Huisne, avec un certain nombre de manifestants. Nous sommes restés très sagement sur le quai, mais nous avons manifesté auprès de la SNCF notre refus de voir que, en raison de l’étroitesse du fuseau qui dirige les voyageurs venant de plus loin vers Paris, la cadence diminue et des trains passent sans s’arrêter.
À l’heure où l’on parle d’aménagement du territoire, de développement durable, d’attractivité des territoires pour des personnes qui doivent utiliser le mode de transport offert par la SNCF, il n’est pas possible de se retrouver devant ce genre de situation.
En ce qui concerne maintenant les services publics, un certain nombre d’adaptations ont été acceptées, consenties par les élus, ces derniers ont même largement participé à leur modernisation. C’est que, au départ, un contrat avait été passé entre les élus et certains services publics, je pense notamment à La Poste.
Dans mon département, un certain nombre d’élus ont ainsi accepté d’accompagner La Poste dans l’aménagement des points relais. Aujourd’hui, on s’aperçoit que, dans un second temps, La Poste souhaite encore modifier son déploiement sur le terrain et diminuer le temps de présence de ses salariés.
Ce n’est pas possible, là aussi, monsieur le ministre, et j’appelle l’attention du Gouvernement sur la nécessité de faire en sorte que le contrat soit respecté.
Autre élément concernant l’aménagement du territoire : la présence médicale. J’ai été heureux d’entendre des représentants de la majorité sénatoriale soutenir que les pôles de santé, que vous nous avez proposé de créer dans nos territoires, étaient une excellente idée et que c’était sans doute la meilleure solution pour attirer des médecins et assurer la présence médicale sur notre territoire.
Là encore, monsieur le ministre, nous sommes prêts, bien sûr, à accompagner ces projets – certains figurent d’ailleurs dans le rapport – mais nous avons besoin d’une aide soutenue, car le coût de ces pôles de santé est particulièrement élevé.
J’en viens à la question du numérique.
Je lis dans le rapport que, selon les affirmations de l’ARCEP, 99, 5 % du territoire serait couvert par le haut débit.
Il faut appeler l’attention des responsables qui avancent de tels chiffres : qu’ils viennent sur place et ils pourront constater qu’une superficie importante de notre département n’a toujours pas accès au haut débit !
À un moment où l’on parle du très haut débit, les élus, très naturellement, relaient la demande de leurs concitoyens, qui réclament qu’au moins le haut débit fonctionne…
Les collectivités locales se sont beaucoup engagées en faveur du développement du numérique, du haut débit, et du très haut débit de demain. Il est important que les chiffres annoncés correspondent à la réalité.
Nous avons la possibilité d’attirer sur nos territoires une population plus jeune, qui travaille, qui entreprend, mais la condition est posée : c’est, bien entendu, le développement du numérique.
J’aborderai un autre sujet important, monsieur le ministre : l’action culturelle.
Il a existé pendant des décennies un vrai fossé entre le monde urbain et le monde rural.
Le monde rural n’avait pas les mêmes droits.
Moi-même, étant plus jeune, je me souviens du temps qu’il fallait pour que des films à grand succès arrivent dans les salles de nos petites communes. C’était tellement long que les camarades rencontrés dans des colonies vacances ou à la faveur de quelques déplacements nous avaient raconté dans le menu détail ces films de sorte que, quand on les voyait pour la première fois, on les connaissait évidemment du début à la fin !
Sourires.
Aujourd’hui, monsieur le ministre, le monde rural est riche en initiatives qui permettent d’offrir une programmation culturelle de qualité et il est extrêmement attaché aux actions de ce type. Encore faut-il, bien entendu, les soutenir !
Tels sont, monsieur le ministre, quelques-uns des points sur lesquels je souhaitais appeler votre attention, tant je suis convaincu que le mot « ruralité » rime avec « modernité ».
Nous avons aujourd’hui une population nouvelle qui, pour des raisons évidentes liées au cadre de vie et à la qualité des prestations offertes, préfère vivre à la campagne, mais les conditions que j’évoquais précédemment sont évidemment des préalables pour fortifier ces territoires.
Monsieur le ministre, vous nous présentez un budget dont j’ai entendu certains à cette tribune nous expliquer avec un art consommé du sophisme qu’il fallait voter contre. Je suis persuadé qu’avec le même budget une autre majorité se serait extasiée devant ce beau budget ! Est-ce à dire que, maintenant, au Sénat, il faut être contre le budget issu de nos délibérations pour soutenir le Gouvernement, et pour si on ne le soutient pas ?
Sourires.
Non, monsieur le ministre, je vous soutiendrai, car je ne crois pas aux acréantements de la gauche telle qu’elle se présente aujourd’hui !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UCR.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires » ne retrace pas l’intégralité de l’investissement de l’État – ou plutôt de son désengagement – dans les territoires ; pour autant, elle est hautement symptomatique et on est en droit de se demander si la présentation du budget concernant l’aménagement du territoire n’est pas volontairement fractionnée pour mieux cacher ses insuffisances.
De ce point de vue d’ailleurs, l’affaiblissement de la DATAR, outil stratégique et prospectif s’il en est, est tout à fait révélateur du manque de volonté politique qui devrait animer le Gouvernement dans ses choix.
L’augmentation des crédits de paiement largement tempérée – le mot est faible – par la diminution des autorisations d’engagement n’augure rien de bon pour l’avenir. Comme si cela n’était pas suffisant, voilà que nos collègues députés, sans doute moins attachés que nous aux territoires, n’ont rien trouvé de mieux que de donner un coup de rabot de 3 millions d’euros sur ces mêmes autorisations d’engagement et crédits de paiement.
Bref, là peut-être plus qu’ailleurs, on réduit la voilure en introduisant le double risque non seulement de l’accentuation du phénomène de saupoudrage, mais aussi d’une mise en concurrence potentiellement malsaine des territoires entre eux.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi, à ce stade du constat, d’élargir mon propos et d’être un peu plus généraliste, car l’actualité l’exige. Je pense, bien sûr, aux craintes exprimées avec force voilà quelques jours par l’ensemble des élus locaux, à l’occasion du Congrès des maires de France, sur le devenir des territoires qu’ils représentent.
Personne ne saurait ignorer le rôle essentiel que jouent les collectivités dans le cadre de l’aménagement du territoire. Elles sont parfois, et tour à tour, à l’origine des opérations et les assument à 100 %, ou interviennent dans le cadre d’un partenariat avec l’État ou d’autres collectivités territoriales.
Personne ne saurait non plus faire l’impasse sur quelque chose qui est omniprésent dans la discussion de ce projet de loi de finances et dans ce budget, mais qui n’est jamais nommément cité, je veux parler de la désormais tristement célèbre « révision générale des politiques publiques » qui, depuis maintenant quelques années, méthodiquement, consciencieusement, affaiblit nos territoires.
En clair, et pour être rapide, monsieur le ministre, car vous connaissez ces chiffres aussi bien que moi, cela se traduit par la bagatelle de 150 000 emplois de fonctionnaires supprimés en cinq ans, sacrifiés les uns sur l’autel de la carte judiciaire, d’autres sur l’autel de la carte scolaire, d’autres encore au nom de la réforme de la Poste, de la gendarmerie ou des trésoreries principales. Aujourd’hui, nous sommes devant ce formidable paradoxe qui veut que l’on demande aux collectivités territoriales de se substituer à l’État, notamment dans le cadre des services publics de proximité, tout en stigmatisant les conseils généraux et les conseils régionaux, trop dépensiers et pléthoriques en personnel aux yeux du Gouvernement. On sait comment cela a fini le 25 septembre 2011, lors des élections sénatoriales !
Le document présenté fait également allusion – il est peut-être utile de l’évoquer, monsieur le ministre – à la suppression de la taxe professionnelle, sans pour autant procéder à un bilan d’étape qui se voudrait objectif. §S’il existait, ce bilan révélerait d’ailleurs inévitablement que la suppression de cette taxe a entraîné mécaniquement la diminution des capacités d’investissement des collectivités territoriales, des capacités qui sont passées – mais, là encore, vous le savez aussi bien que moi – en ce qui concerne l’investissement public de la nation, de 75 % à 63 %. Bien entendu, cela a suscité des difficultés sérieuses pour les PME, notamment dans le bâtiment et les travaux publics. Ce marché de dupes – car c’est bien de cela qu’il s’agit ! – méritait d’être dénoncé.
Mais cela va plus loin encore : la baisse des investissements publics se traduit forcément par une altération de l’attractivité des communes et des territoires, ce qui est totalement antinomique par rapport au rééquilibrage souhaité à l’échelon de notre pays.
Tout cela va donc à l’encontre du but recherché.
Dans un autre registre, j’évoquerai le SNIT, le schéma national des infrastructures de transport.
La rédaction de ce document a, vous le savez, connu bien des difficultés, notamment du fait d’un manque de cohérence et de perspective politique, qui lui a trop souvent donné les apparences d’un cahier de doléances, s’éloignant, de ce fait, du texte destiné à orienter, pour les décennies à venir, notre politique des transports avec son corollaire, les infrastructures.
Ce manque de vision globale est sans doute dû à l’éloignement – et pour cause ! – de la DATAR, qui aurait pu jouer un rôle d’éclaireur et de fédérateur. On avait pourtant, là encore, l’occasion d’éviter les inexplicables inégalités de traitement entre les territoires, qui ont, du reste, été relevées par nombre de nos collègues.
Je conclurai mon propos en parlant des fonds consacrés, dans le cadre de la politique interministérielle du territoire, à l’offre de soins, des fonds qui ne connaissent qu’une évolution timide.
Ceux qui connaissent bien ce dossier approuvent la multiplication des maisons de santé pluridisciplinaires : cette nouvelle organisation des soins constitue un point de passage forcé. Toutefois, il est illusoire de penser que ces structures pourront, à elles seules, éradiquer les déserts médicaux, de plus en plus nombreux dans nos territoires.
Concernant la sécurité, il est impératif de mettre à la disposition de ce corps médical des plateaux techniques opérants et performants, leur permettant de travailler dans de bonnes conditions ; je pense notamment aux hôpitaux généraux, qui jouaient pleinement leur rôle.
Vous mettez en exergue un certain nombre de solutions innovantes, mais, malheureusement, force est de constater que les moyens ne suivent pas. En effet, avec la loi HPST, la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, vous êtes en train de démanteler, au nom d’une rentabilité illusoire, ces structures hospitalières en mettant en place la fameuse T2A, la tarification à l’activité.
Vous l’aurez compris, nous estimons que la mission « Politique des territoires », à l’instar de ce projet de loi de finances, ne témoigne d’aucune vision stratégique et n’est donc pas en mesure de donner à la France l’élan dont elle a besoin !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires » est là pour tendre au plus près du principe d’égalité entre les territoires. À cet égard, je salue, dans le contexte budgétaire actuel plus que contraint, l’évolution, certes légère, mais existante, voulue par le Gouvernement, des crédits octroyés à cette mission.
Couverture des territoires en téléphonie mobile, accès aux soins, maintien de socles de services publics, aménagement numérique des territoires, tels sont les quatre piliers retenus pour la politique d’aménagement en vue de renforcer la compétitivité et la solidarité de nos territoires et entre nos territoires.
Parallèlement, la réforme des implantations des armées a nécessité la mise en place d’un plan national d’accompagnement des territoires touchés par les restructurations militaires : 82 sites sont concernés.
Le nord-est de la France, qui comprend le département de l’Aisne, concentre l’essentiel des fermetures des sites militaires décidées dans le cadre de la RGPP. Une mission spécifique d’accompagnement a même été créée et confiée au préfet Hubert Blanc.
Dans le cadre de la mise en œuvre du Livre blanc sur la défense, le site de Laon-Couvron fermera ses portes en juillet 2012. Le 1er régiment d’artillerie de marine sera transféré à Châlons-en-Champagne, dans la Marne, département voisin. Cette fermeture concernera plus de 900 militaires et quelque 100 personnels civils, alors que ce territoire connaît déjà de grandes difficultés économiques.
Si l’année 2012 paraît, en partie, consacrée à la redynamisation des territoires affectés par le redéploiement des armées, je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, sur le maintien des crédits de reconversion prévus pour le site Laon-Couvron dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012, à savoir 10 millions d’euros.
Dans le cadre du CRSD, le contrat de redynamisation des sites de défense, les collectivités territoriales ont souhaité assurer le portage foncier et bénéficier de l’acquisition de cession à l’euro symbolique du site de Laon-Couvron, conformément au décret du 3 juillet 2009.
En effet, y est envisagé le développement d’une infrastructure dédiée à la conduite automobile sportive de loisirs, grâce à l’implication de partenaires spécialisés reconnus.
Comme vous pouvez le constater, les acteurs locaux travaillent à la reconversion du site, et certains investisseurs ont aujourd’hui confirmé leur intérêt.
C’est pourquoi il est nécessaire de recueillir une prompte estimation de la valeur de cette emprise militaire, afin de pouvoir concrétiser, dès le départ de l’armée, un projet qui est porté par tous les élus et attendu par la population.
Au début du mois de septembre dernier, j’avais d’ailleurs alerté Mme la ministre du budget sur le caractère urgent de cette question. À la mi-octobre, les services ministériels se sont rendus sur le site, mais nous ne disposons toujours pas, à ce jour, d’estimation.
Je souhaiterais aussi savoir, monsieur le ministre, où en est le rapport sur la mission Grand Nord-Est que devait remettre le préfet Hubert Blanc en 2009, soit il y a maintenant deux ans.
Enfin, je veux attirer l’attention du Gouvernement sur les opérations de dépollution conduites sur les sites militaires. Il semble que cette variable, au fort impact financier, ne soit pas toujours prise en compte dans le cadre des discussions portant sur le transfert de propriété des emprises venant à être libérées.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de vos réponses sur ces questions essentielles, qui concernent de nombreux territoires français.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UCR.
Monsieur le président, monsieur le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je tiens, tout d’abord, à saluer la pertinence du travail de notre collègue rapporteur pour avis Ronan Dantec, qui a su montrer l’insuffisance de ce budget en direction des territoires pour ce qui concerne tant le programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » que les quatre actions du programme « Interventions territoriales de l’État ».
Vous l’avez vous-même reconnu, monsieur le ministre, lors de la présentation de votre budget en commission, le 2 novembre dernier, la charge de travail est lourde en matière d’aménagement du territoire, et le besoin est considérable.
Or vous nous apportez pour toute réponse un budget de misère pour une mission dont l’examen ne nous occupera pas plus d’une heure trente sur la totalité de la discussion du projet de loi de finances… Les collectivités territoriales sont donc la dernière des préoccupations du Gouvernement !
Je concentrerai plus particulièrement mon propos sur l’aménagement du territoire.
La mission « Politique des territoires » représente 334 millions d’euros en autorisations d’engagement et 340 millions d’euros en crédits de paiement.
Alors que les collectivités locales expriment un mal-être frappant et que vous avez rappelé l’importance de ce budget, je m’étonne que l’Assemblée nationale, avec votre bénédiction d’ailleurs, soit parvenue à le minorer de 3 millions d’euros, et ce en vue de « contribuer au redressement des finances publiques ».
Pour ce qui concerne le principal programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », vous prévoyez, en 2012, une baisse des autorisations d’engagement de 5, 14 %. C’est autant d’argent en moins pour un programme qui finance des dispositifs essentiels en termes de préservation et de création d’emplois mais aussi d’attractivité de nos territoires.
Ce sont précisément dans les territoires que se jouent aujourd’hui les grands enjeux de demain, et c’est grâce aux politiques d’aménagement du territoire que l’État montre sa confiance aux collectivités locales et, au-delà, aux citoyens. Mais tel n’est, malheureusement, plus le cas depuis plusieurs années.
Les zones rurales et les zones peu denses sont ignorées par votre gouvernement, quand elles ne sont pas vilipendées parce qu’elles seraient dispendieuses ; seules comptent aujourd’hui les grandes agglomérations, et leur centre-ville.
Nous sommes plutôt ici dans une politique dite de « déménagement » du territoire. C’est peut-être un lieu commun que de le dire, mais c’est malheureusement la réalité.
Pour finir de montrer le manque d’engagement de l’État derrière les belles déclarations d’intention faites en matière de développement des territoires, je reprendrai trois exemples, que mes collègues ont déjà cités, mais il m’importe de les exposer de nouveau, ne serait-ce que pour mieux vous convaincre, monsieur le ministre.
Permettez-moi tout d’abord d’évoquer la question du très haut débit.
Malgré la mise en œuvre prévue, en 2012, du programme national « très haut débit » à hauteur d’1, 5 million d’euros pour les schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique des collectivités, l’engagement de l’État reste très insuffisant pour lutter contre la fracture numérique. Ce sont les collectivités territoriales qui n’ont plus qu’à mettre de l’argent sur la table !
Monsieur le ministre, les zones rurales attendent toujours des outils de financement. À l’heure actuelle, nos collectivités sont en première ligne pour financer les infrastructures du très haut débit dans les zones non rentables. La responsabilité est à chercher dans la liberté totale que vous avez laissée aux opérateurs privés, lesquels favorisent, naturellement, les secteurs à plus forte densité. Les associations d’élus demandent un engagement budgétaire plus substantiel, et c’est ce que préconise également notre collègue Hervé Maurey dans le rapport d’information qu’il a remis.
Tout à fait !
Monsieur le ministre, que faites-vous concrètement aujourd’hui ?
Dans ma région, la Bretagne, les opérateurs privés ont annoncé un investissement sur seulement 42 % du territoire ! Cela va se traduire par un besoin de financement par les collectivités locales de 1, 12 milliard d’euros a minima, avec une participation de l’État avoisinant les 290 millions d’euros. Les chiffres parlent d’eux-mêmes !
L’État n’a pas mis en place de dispositif analogue à celui qui est en vigueur pour l’électricité ou les déchets ménagers, qui permettait d’apporter une source de financement : il sera souvent impossible aux collectivités d’assumer cet investissement colossal. La date butoir de 2025 est absolument incompréhensible, a fortiori celle de 2030, dont il est également fait état.
L’État n’a pas pris la mesure de l’enjeu pour l’ensemble du territoire, mais a simplement fait en sorte de résoudre l’équation pour les zones « rentables », qui sont, en fait, les zones urbaines. La France ne se résume pas à une collection de quelques zones agglomérées denses. Les collectivités ne pourront faire face à cet enjeu – plus de 1 milliard d’euros pour la seule région Bretagne – qu’en mobilisant leurs sources communes de financement.
À l’heure où il est fait état de la « gabegie financière des collectivités locales », on ne peut que s’interroger. Il est plus que temps que l’État, qui a été alerté par de très nombreux élus, quelle que soit leur appartenance politique, prenne réellement conscience de l’enjeu, car, sans le numérique, il n’y aura pas, dans une économie désormais mondialisée, de croissance durable.
Permettez-moi maintenant d’aborder les maisons de santé pluridisciplinaires, un sujet qui a aussi été évoqué à plusieurs reprises.
Pour faciliter l’accès aux soins, il est prévu de créer 250 maisons de santé pluridisciplinaires, pour un budget de 10 millions d’euros en 2012.
Les maires, notamment dans les communes rurales, sont de plus en plus confrontés aux demandes de leurs concitoyens en termes d’offre médicale. Il faut le répéter, la création des maisons médicales est en soi une bonne chose, mais les agences régionales de santé demandent aujourd'hui, à juste titre, que tout projet de maison de santé soit également porté par une association de professionnels de santé. Les collectivités locales ne veulent pas que la maison médicale ait été financée en vain ou qu’elle ne soit pas suffisamment attractive pour des médecins.
Mais si l’on ne construit des maisons pluridisciplinaires de santé que là où il y a des médecins, on n’aura pas vraiment réglé le problème de la désertification médicale !
Ce n’est pourtant pas une fatalité : il nous faudra, à un moment donné, travailler en collaboration avec les médecins pour prévoir des méthodes plus coercitives.
On le sait, le départ du médecin généraliste, c’est d’abord une perte de chiffre d’affaires pour la pharmacie, puis la fermeture de l’officine, et le groupe infirmier resté sur place qui voit sa tâche tellement compliquée qu’il finit, lui aussi, par rejoindre le centre-ville. Voilà comment ces zones rurales – mais les zones périurbaines sont aussi concernées – deviennent de véritables déserts médicaux.
Cela avait été répété à maintes reprises lors de l’examen de la loi HPST, mais on ne nous avait pas entendus. Puis, progressivement, on s’est rendu compte que le mal faisait son œuvre et que les effets étaient absolument dévastateurs.
La loi HPST avait permis quelques petites avancées, que la loi Fourcade a complètement fait disparaître.
Certes, les maisons de santé pluridisciplinaires constituent une première réponse, mais la participation de l’État n’est pas, je le répète, assez élevée.
Quant aux bourses incitatives de 1 200 euros par mois, elles ne changent rien. Toutes les analyses le prouvent, ce n’est pas de l’argent que veulent les médecins. Ce n’est pas en versant des financements complémentaires que l’on motivera les internes. Ce n’est pas la bonne réponse.
En revanche, on sait que 58 % des Français ont renoncé à consulter un spécialiste à cause des délais. Il faut, en moyenne, 103 jours pour obtenir un rendez-vous chez un ophtalmologiste, et encore, en invoquant l’urgence…
La lutte contre les déserts médicaux est devenue aujourd’hui une nécessité pour tous les élus. La prise de conscience est collective. Mais cette nécessité criante n’a pas encore atteint les oreilles du Gouvernement ! Pourtant, il y a bien urgence.
Dans mon département, la moyenne d’âge des médecins généralistes est aujourd’hui de cinquante-six ans. Par conséquent, si rien n’est fait, dans les quatre ou cinq ans, vous imaginez bien qu’il n’y aura tout simplement plus aucun médecin !
On peut aussi s’interroger sur les coopérations hospitalières mises en place par la loi Bachelot-Narquin. Ce qui, à l’origine, semblait être une bonne chose se traduit, en fait, aujourd’hui, par le renforcement des grands centres hospitaliers et la fermeture de services hospitaliers, voire d’hôpitaux de proximité, ce qui est très grave ! De plus, nous constatons qu’il y a de moins en moins de spécialistes, ceci étant la conséquence de cela.
Le dernier point que je voudrais évoquer, bien que mon temps de parole soit bientôt écoulé, concerne les algues vertes.
Le programme 162 comprend bien une action Eau - Agriculture en Bretagne sur la problématique des nitrates. Mais qu’observe-t-on, sinon que, parallèlement, à cette politique de lutte contre les algues vertes que vous menez, les dispositions que vous avez prises permettent d’augmenter les quantités d’azote épandues à l’hectare ! Cette attitude paradoxale exacerbe les conflits entre une partie du monde agricole et les défenseurs de l’environnement. On croirait presque à un acte volontaire pour empêcher le dialogue et une évolution positive vers de vraies réponses partagées.
Je ne vais pas prolonger mon intervention.
M. Jean-Luc Fichet. Comme vous l’aurez compris, monsieur le ministre, nous ne voterons pas les crédits que vous nous proposez.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.
Sourires.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureux de présenter aujourd’hui les crédits pour 2012 de la mission « Politique des territoires ». Ce budget doit nous permettre de relever deux défis majeurs : le renforcement de l’attractivité de tous les territoires et la garantie de l’équilibre entre les territoires.
L’objectif de notre politique – car il en existe bien un, contrairement à ce que j’ai entendu ici ou là ! – est, sur le long terme, de garantir que, malgré les déplacements de plus en plus rapides de la population française, notamment vers le littoral, malgré le renforcement des atouts économiques de certaines régions au détriment d’autres, tout le monde, en France, trouvera sa place, pourra participer au développement économique et bénéficier du même accès aux services publics et au développement des technologies nouvelles comme le numérique.
Derrière la politique des territoires et l’aménagement du territoire, il y a une dimension à laquelle ce gouvernement et cette majorité sont profondément attachés, c’est celle de la fraternité entre les Français et entre les territoires.
Cette mission « Politique des territoires » est dotée de 331 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 337, 8 millions d’euros en crédits de paiement. Elle représente seulement 6 % des 5, 4 milliards d’euros qui sont consacrés par l’État à l’aménagement du territoire. Cela étant, je le précise notamment pour M. Jean-Jacques Mirassou, mais cela a été aussi abordé par M. Jean-Claude Lenoir, tous les départements ministériels sont évidemment concernés par l’aménagement du territoire, et cette politique reste bien placée sous l’autorité du Premier ministre.
Cette mission comprend deux programmes.
Le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » est géré par la DATAR et doté de 284 millions d’euros. On y trouve la fameuse prime d’aménagement du territoire, la PAT, dont certains d’entre vous ont fait mention dans leurs interventions et dont, je tiens à le dire, je souhaite le maintien.
Nous avons maintenu, à l’euro près, les crédits de la prime d’aménagement du territoire pour 2009-2010. J’ai parfaitement entendu les critiques de la Cour des comptes. Le problème, c’est que, n’étant pas soumise au suffrage des électeurs, ...
Sourires.
... à la sanction des citoyens français, ce qui n’est d’ailleurs, bien entendu, pas son rôle, la Cour n’a pas à rendre compte, en termes de maintien des emplois, de fermeture des usines ou d’installations, de la politique qui est conduite.
Or une politique qui a permis de maintenir 42 000 emplois entre 2007 et 2011, même si elle peut certainement être recentrée, améliorée, mérite, selon moi, d’être maintenue. Par conséquent, nous maintiendrons la prime d’aménagement du territoire et, avec elle, les emplois qu’elle permet de conserver.
Le programme 162 « Interventions territoriales de l’État », le PITE, géré par le ministère de l’intérieur et doté de 47 millions d’euros, finance notamment – je le précise pour Jean-Luc Fichet – la lutte contre la prolifération des algues vertes en application du plan de lutte contre les algues vertes, dont je suis certain qu’il donnera des résultats sur le long terme.
Comme vous l’avez rappelé, c’est uniquement grâce au travail de coordination et au dialogue entre les agriculteurs, les associations et les responsables locaux que nous arriverons à trouver les bonnes solutions.
Dans le cadre du plan de retour à l’équilibre des finances publiques, les crédits de cette mission diminueront de 4, 5 millions d’euros, ce qui représente moins de 1, 4 % du budget de cette mission présenté dans le projet de loi de finances pour 2012.
L’effort est réparti de manière équitable.
Les crédits alloués aux contrats de projets État-région, les CPER, sont réduits de 1 million d’euros, mais cela ne remet pas en cause les projets engagés.
Les crédits consacrés aux pôles de compétitivité et aux grappes d’entreprises sont réduits de 2 millions d’euros, mais ils seront réajustés en fonction du nombre de projets qui devraient être soutenus en 2012.
Enfin, les crédits du Fonds national d’aménagement du territoire, le FNADT, sont réduits de 1, 5 million d’euros. L’effort portera sur la section générale de ce fonds.
Malgré ces efforts d’économies, qui sont indispensables et dont cette mission ne peut s’exonérer pas plus que n’importe quelle autre d’ailleurs, nous serons en mesure de maintenir les deux grands objectifs de notre politique d’aménagement du territoire.
Le premier objectif consiste à renforcer l’attractivité du territoire, ce qui suppose que trois conditions soient remplies.
La première est l’amélioration de la couverture numérique du territoire, point qui a été souligné par l’ensemble des orateurs.
Aujourd’hui, et c’est un atout majeur, la France est l’un des pays développés les mieux couverts en numérique, avec un accès qui est l’un des moins coûteux, en particulier pour les ménages. Nous devons absolument maintenir et développer cet atout stratégique.
En juin 2010, nous avons lancé un programme national « très haut débit », avec comme objectif 70 % des foyers français raccordés au très haut débit en 2020 et 100 % en 2025. L’objectif est ambitieux, mais il devrait être atteint grâce, notamment, à l’enveloppe initiale de 2 milliards d’euros prévue pour financer les premiers travaux de couverture numérique.
Sur ces 2 milliards d’euros, 900 millions d’euros seront spécifiquement réservés aux projets de raccordement des collectivités dans les zones pour lesquelles les opérateurs n’ont pas pris l’engagement de déployer leurs propres réseaux. J’aurai l’occasion de rencontrer une nouvelle fois les principaux opérateurs pour leur rappeler leurs responsabilités en la matière, car tout ne peut pas reposer sur les efforts de l’État et des collectivités territoriales. Les opérateurs doivent également jouer leur rôle en matière d’aménagement du territoire et ne pas délaisser les territoires les moins peuplés.
Cent millions d’euros seront consacrés à des technologies autres que la fibre pour assurer la montée en débit des zones les plus difficilement accessibles.
J’ai parfaitement conscience que les 900 millions d’euros pour équiper les zones les moins denses ne suffiront pas à couvrir tous les besoins. Nous devons réfléchir au financement du Fonds d’aménagement numérique des territoires, afin de disposer de ressources à la fois suffisantes et pérennes pour garantir la poursuite de ce projet.
M. Hervé Maurey, sénateur de l’Eure, département cher à mon cœur, a fait en ce sens des propositions qui me paraissent intéressantes, ...
... mais il faudra que nous prenions rapidement des décisions sur le financement pérenne de ce Fonds d’aménagement numérique des territoires.
La deuxième condition nécessaire au renforcement de l’attractivité du territoire est la mise en commun de nos atouts à travers la politique des pôles et des grappes.
Je tiens à le dire à Mme Évelyne Didier, avec qui j’avais un point de désaccord sur ce sujet, les politiques de pôles, de regroupement de nos forces, de travail en commun, tout cela marche ! C’est même, à mon avis, l’une des perspectives essentielles pour ce pays, où il existe encore trop de divisions, trop de querelles entre les uns et les autres, trop de difficultés à faire travailler les PME avec les grandes entreprises, trop de difficultés à faire travailler ensemble les laboratoires de recherche et les entreprises qui doivent utiliser les résultats de ces recherches. J’ajoute, en tant que ministre de l’agriculture, qu’il y a encore trop de querelles entre les différents intervenants des filières, les producteurs, les industriels, les transformateurs et les distributeurs.
Ce pays s’en sortira si chacun apprend à travailler un peu mieux avec son voisin...
... et si on laisse de côté les querelles au profit de la coopération et du dialogue. Voilà ce qui fera la force de la France !
Les pôles de compétitivité et les grappes d’entreprises répondent à cette logique de travail en commun.
S’agissant des pôles de compétitivité, nous avons consacré 1, 5 milliard d’euros pour la période 2009-2011 au lancement d’une seconde phase.
S’agissant des grappes d’entreprises, elles doivent permettre aux petites entreprises d’améliorer leur compétitivité et leurs performances en mettant en commun un certain nombre de richesses. Cent vingt-six grappes ont été sélectionnées pour un budget total de 24 millions d’euros sur deux ans.
Pour vous parler très franchement, nous sommes plutôt débordés par la demande, parce que le dispositif donne des résultats. Il permet aussi de mettre en commun des services qui seraient coûteux pour une très petite entreprise, mais qui, à l’échelle de deux, trois, quatre ou cinq petites entreprises, le sont évidemment beaucoup moins.
Enfin, les pôles d’excellence rurale, dont Rémy Pointereau a beaucoup parlé dans son intervention, font également partie des moyens efficaces de redynamisation du territoire rural.
Depuis 2006, nous avons lancé quatre appels à projets nationaux. Au total, nous avons financé 652 projets pour près de 475 millions d’euros. Près d’un demi-milliard d’euros pour les pôles d’excellence rurale, c’est un effort considérable !
Je tiens à dire à Rémy Pointereau que ces pôles continueront à bénéficier de tout le soutien du Gouvernement, en particulier du ministre de l’agriculture.
Une troisième condition est nécessaire au renforcement de l’attractivité du territoire : le soutien à l’Agence française pour les investissements internationaux, l’AFII, qui joue un rôle essentiel pour le développement de l’emploi et la création de richesses dans nos territoires.
M. Aymeri de Montesquiou l’a dit aussi, la France est l’un des pays les plus attractifs en termes d’investissements étrangers.
Les résultats de l’Agence ont été remarquables en 2010 : 782 nouveaux projets d’investissements, en progression de 22 % par rapport à 2009, et près de 32 000 emplois nouveaux ou maintenus. C’est bien la preuve qu’il faut poursuivre cette politique d’attractivité et ce renforcement de l’Agence française pour les investissements internationaux.
À ce titre, la DATAR verse à l’Agence une subvention de 7 millions d’euros pour 2012, complétée par une aide de 15 millions d’euros du ministère de l’économie.
Le second grand objectif de notre politique d’aménagement du territoire est de garantir l’équilibre entre les territoires.
Au-delà de ce terme quelque peu technocratique d’« équilibre », c’est le principe de fraternité au sein de la République française qui est en jeu. Je parle de fraternité entre des citoyens qui, n’ayant pas choisi leur lieu de naissance, se retrouvent soit dans des régions dotées de tous les équipements numériques, tous les emplois, organismes de recherche, universités, soit, au contraire, dans des territoires ruraux plus délaissés, où l’accès au numérique est beaucoup plus compliqué, l’accès aux services publics est plus difficile, l’université est plus lointaine. Ce sont ces territoires ruraux qui doivent impérativement bénéficier d’un soutien plus important de la part du Gouvernement.
Les premiers territoires qui connaissent des situations difficiles sont ceux qui sont touchés par les restructurations de défense dont parlait M. Antoine Lefèvre.
Jeudi dernier, j’étais à Bordeaux, pour signer, avec Alain Juppé et Gérard Longuet, un accord pour la revitalisation d’une zone de défense. Nous ne laissons pas, nous ne laisserons pas à l’abandon les territoires qui étaient d’anciennes zones de défense ou qui comportaient d’anciens équipements militaires. Au contraire, nous prévoyons des dispositifs de soutien et de développement économique.
C’est ainsi que, pour le site de Laon-Couvron, dont vous nous avez parlé, les engagements de l’État, à savoir les 10 millions d’euros prévus, seront maintenus. Le rachat à l’euro près sera prévu également. Monsieur le sénateur, l’ensemble des engagements qui ont été pris auprès de vous seront donc tenus.
De manière plus générale, 320 millions d’euros sont consacrés à l’accompagnement de ces territoires, dont un tiers financé par le FNADT.
Certes, chaque territoire touché par une fermeture, qu’il s’agisse d’une base aérienne ou d’une base de l’armée de terre, subit bien évidemment, au-delà des pertes d’emplois et des pertes économiques, un véritable traumatisme. C’est toujours un déchirement de voir partir d’une commune ou d’un canton des militaires qui y étaient installés depuis des décennies. Il est donc impératif que nous continuions d’assurer l’accompagnement de ces territoires.
J’en viens au point qui me tient sans doute le plus à cœur : les territoires ruraux. Je le dis à M. Jean-Luc Fichet, s’il y a, au sein du Gouvernement, un ministre attaché au développement et à la défense des territoires ruraux, c’est bien le ministre de l’agriculture ! Et s’il y a bien un ministre qui s’occupe plus des territoires ruraux et des communes rurales que des zones urbaines, c’est bien le ministre de l’agriculture ! On me le reproche d’ailleurs parfois.
Oui, les territoires ruraux sont l’avenir de ce pays. Oui, ils ont été trop longtemps délaissés. Oui, on ne leur a pas apporté un soutien suffisant et, pendant des années, ils n’ont pas bénéficié d’une politique aussi cohérente que celle qui était destinée à un certain nombre de quartiers proches des grandes agglomérations.
Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Les territoires ruraux font partie de nos priorités politiques.
(Sourires.) Je passe en effet beaucoup de temps dans ce pays merveilleux, auquel je suis profondément attaché. Un contrat territorial couvre la période 2007-2013, et nous travaillons d’ores et déjà à un nouveau contrat pour l’après-2013. D’ailleurs, si je veux pouvoir continuer de me rendre régulièrement et en toute quiétude dans ma ferme de Saint-Pée-sur-Nivelle, j’ai tout intérêt à porter le développement d’un nouveau contrat territorial après 2013 !
Nouveaux sourires.
C’est vrai pour l’ensemble des territoires ruraux, et c’est vrai aussi en particulier pour l’un d’entre eux, qui me tient à cœur. Ce n’est pas à moi qu’il faut recommander, madame Espagnac, de soutenir le Pays basque ! §
Ce sera fait, madame le rapporteur spécial, j’en prends l’engagement !
Enfin, avant d’en venir à des développements plus précis, je rappelle que l’avenir des territoires ruraux est intimement lié au maintien des exploitations agricoles et au développement agricole : pas d’avenir pour ces territoires si les exploitants agricoles français mettent la clé sous la porte !
Le développement des territoires ruraux passe par le soutien à la politique agricole commune et le maintien de la prime nationale supplémentaire à la vache allaitante, la PNSVA, et de l’indemnité compensatoire de handicap naturel, l’ICHN, sans laquelle il n’y aurait plus de développement agricole dans les zones de montagne. Aucun agriculteur ne restera en Savoie, dans les Pyrénées, dans les Vosges ou dans le Jura, sans une ICHN permettant de compenser la difficulté du travail agricole dans ces territoires.
Le sort de l’agriculture dans les zones rurales dépend aussi du maintien de la prime herbagère agro-environnementale, la PHAE, et de l’ensemble des primes européennes en faveur de l’agriculture.
Oui, l’agriculture a toute sa place, y compris dans les territoires les plus reculés. Je le dis avec toute la conviction qui est la mienne, mesdames, messieurs les sénateurs, le jour où nous aurons abandonné les exploitations rurales installées dans ces zones de France les plus difficiles d’accès, plus un seul autre emploi ne s’y créera.
Aucune activité économique ne prendra la place des exploitations rurales que nous aurons laissé péricliter. C’est pour cette raison qu’il faut se battre pour leur maintien.
Au-delà de cette dimension agricole de la problématique des territoires ruraux, deux autres sujets sont particulièrement importants, la santé et les services publics.
Pour ce qui concerne la santé, mon département, l’Eure, est régulièrement classé quatre-vingt-dix-neuvième sur cent. Jean-Claude Lenoir le sait, même si son territoire est un peu mieux loti en termes d’accès aux médecins.
Les chiffres sont éloquents : on compte un médecin pour 200 habitants dans les Bouches-du-Rhône et un médecin pour 515 habitants dans l’Eure. Cela n’est pas acceptable !
Nous ne pouvons pas continuer ainsi, les difficultés liées à l’accès aux soins sont trop importantes. C’est que nous savons bien quelle réalité se cache derrière la sécheresse des chiffres. Nous voyons arriver à nos permanences d’élus des mères de famille dont les enfants ne savent pas lire parce qu’ils ne voient pas bien. Comme, pour obtenir un rendez-vous chez l’ophtalmologiste, il leur faut attendre six ou sept mois, l’année scolaire sera perdue, tout simplement parce que ces enfants n’auront pas eu accès à un spécialiste dans des délais acceptables.
Nous avons pris un certain nombre de décisions. Ainsi 250 maisons de santé pluridisciplinaires sont-elles programmées, 200 déjà opérationnelles, monsieur Requier. En outre, 160 bourses destinées aux étudiants en médecine qui décident de s’installer à la campagne ont déjà été attribuées.
Je vous ai déjà fait part de ma conviction personnelle en matière d’accès aux soins, mesdames, messieurs les sénateurs : si les mesures incitatives ne sont pas suivies d’effet, nous devrons aller plus loin. §Jamais les citoyens n’accepteront une telle rupture d’égalité dans un domaine aussi essentiel à leurs yeux, à savoir leur santé et celle de leurs proches.
Pour ce qui concerne l’accès aux services publics et leur fonctionnement, nous devons penser différemment. Ayons le courage de dire aux Français que l’on ne gardera pas dans chaque commune de France une poste avec deux employés présents matin, midi et soir !
L’accord de partenariat qui a été signé avec onze opérateurs nationaux doit permettre de faire fonctionner différemment, de manière aussi efficace mais plus économe, les services publics.
Pour les transports, monsieur Lenoir, il en est de même. Nous avons décidé le maintien des liaisons ferroviaires d’équilibre. Celles-ci sont effectivement essentielles dans votre territoire pour la vie quotidienne de vos concitoyens. Il ne s’agit pas de garder toute la ressource pour les seules lignes à grande vitesse.
Au-delà de ces deux priorités, la santé et les services publics, nous devons bien évidemment soutenir le développement économique des territoires ruraux, grâce à la fois aux zones de revitalisation rurale et aux fonds de cohésion.
S’agissant des zones de revitalisation rurale, nous avons mis en place, à votre demande, un groupe de travail parlementaire sur les critères de zonage. Toutefois, au vu des premiers résultats que vous m’avez remis, il me semble prématuré de revoir ce zonage. Je ne souhaite donc pas que nous prenions de décisions en la matière, sauf à exclure du dispositif de nombreuses communes rurales, lesquelles seraient alors confrontées à des difficultés insurmontables.
Enfin, pour financer le développement des territoires les plus fragiles, nous devons nous appuyer sur les fonds de cohésion. Monsieur Dantec, vous auriez dû assister à mon intervention sur ce sujet au congrès des maires de France. J’ai indiqué très clairement que le Gouvernement français était favorable à la création d’une nouvelle catégorie intermédiaire, regroupant les régions en transition.
Pourquoi n’ai-je pas annoncé plus tôt une telle décision ? La raison est très simple : nous devions auparavant réussir à maintenir le budget de la politique agricole commune. Nous avons livré une bataille très difficile, la Commission européenne souhaitant diminuer, voilà moins de deux ans, le budget de la PAC de 30 %. Or nous avons obtenu son maintien à l’euro près !
Après cette bataille, nous avons pu discuter des fonds de cohésion. La nouvelle catégorie intermédiaire, qui regroupera les régions en transition, permettra à dix régions françaises de sortir des dispositifs par paliers, et non pas brusquement.
Tels sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques éléments de réponse que je souhaitais vous présenter aujourd’hui sur la politique des territoires.
Il s’agit, j’en suis convaincu, d’un enjeu absolument essentiel pour nos compatriotes, lesquels ont parfois le sentiment que, selon que l’on habite dans une commune rurale un peu reculée, en zone de montagne ou dans un secteur d’accès difficile, ou que l’on vit dans le centre-ville de Paris, de Lyon, de Nantes ou de Marseille, les chances ne sont pas les mêmes. À nous de faire en sorte que cette politique leur permette d’accéder de la même manière à la République, où que ce soit sur notre territoire.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Politique des territoires », figurant à l’état B.
en euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Politique des territoires
Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire
Dont titre 2
10 467 873
10 467 873
Interventions territoriales de l’État
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Ces crédits ne sont pas adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Politique des territoires ».
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Économie » et du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».
La parole est à M. Christian Bourquin, rapporteur spécial.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est pour moi tout à la fois un grand bonheur et un grand honneur de siéger parmi vous et de succéder à François Rebsamen en tant que rapporteur des crédits de la mission « Économie » et du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes financiers », conjointement avec mon collègue André Ferrand.
Pour le sénateur fraîchement élu que je suis, l’exercice est nouveau. Aussi, pour aller à l’essentiel, je ne reviendrai pas sur la répartition des crédits programme par programme, vous renvoyant au rapport écrit, qui a été distribué.
Je souhaite en premier lieu partager quelques remarques d’ordre général sur les crédits de la mission. Ensuite, j’exprimerai l’avis de la commission sur la position à adopter concernant le vote des crédits de la mission et du compte de concours financiers.
Dans le contexte de crise économique et de restrictions budgétaires que nous connaissons, il n’est pas surprenant de constater que, par rapport aux crédits ouverts pour 2011, le budget de la mission « Économie » pour 2012 enregistre une diminution de 2, 6 %. Une telle contraction de 54 millions d’euros ramène ce budget de 2 063 millions d’euros pour 2011 à 2 009 millions d’euros pour 2012.
Alors que les dépenses de fonctionnement et de personnel sont épargnées par le « coup de rabot » budgétaire, j’attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait que l’effort d’économie se concentre sur les seules dépenses d’intervention. Le budget pour 2012 pénalisera donc particulièrement les moyens d’intervention de la mission pour ce qui concerne le soutien aux entreprises et le développement de leur activité et de l’emploi.
Je pense en particulier au Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, qui enregistre une réduction de sa dotation de 23, 1 millions d’euros, soit 36 % de moins qu’en 2011, passant ainsi de 64 millions d’euros à 40, 9 millions d’euros.
Ensuite, une série de dispositifs voient leur dotation diminuer pour 2012 : les actions pour le développement et l’initiative en faveur des entreprises, la subvention aux centres techniques industriels, qui est réduite de 2 millions d’euros, la dotation des politiques industrielles, la compensation par l’État des surcoûts de la mission de service public de transport postal de la presse par La Poste, et, enfin, les dépenses de promotion de l’image touristique de la France, sujet plus particulièrement dévolu à mon collègue André Ferrand.
Les réductions de crédits que je viens d’énumérer ne représentent certes que 3 % du budget global de la mission. Pourtant, elles portent sur des dispositifs particulièrement sensibles, notamment le FISAC, pour ce qui est du secteur du commerce et de l’artisanat dans les territoires.
En définitive, il apparaît paradoxal que, dans une période de croissance faible et même de crise, les seuls crédits de la mission « Économie » revus à la baisse soient ceux qui sont susceptibles de soutenir l’activité et d’exercer un effet contracyclique !
Comment, monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement compte-t-il soutenir la croissance avec un budget en décroissance ?
C’est bien le constat de cette insuffisance, monsieur Courteau, qui motive la décision de la commission des finances d’émettre un avis défavorable sur les crédits de la mission « Économie ».
Je souhaite à présent aborder le problème de la délocalisation à Metz de l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE.
Notre collègue, et mon prédécesseur dans ces fonctions, François Rebsamen, avait déjà alerté le Gouvernement sur la complexité de cette opération, ainsi que les risques de surcoût et de retard par rapport à l’échéancier de réalisation.
De fait, le budget de la mission « Économie » entérine un surcoût lié à la nécessité de recruter en plus grand nombre que prévu des agents destinés à rejoindre le nouveau centre statistique, ainsi qu’au report de 2013 à 2015 de la livraison des bureaux et de l’achèvement de la nouvelle réalisation.
Permettez-moi, monsieur le président, d’informer mes collègues que mon groupe, le RDSE, a déposé un amendement portant sur la réduction drastique du budget de fonctionnement de l’INSEE pour 2012. Après avoir été réduit de 5 % cette année, voilà qu’il le serait de 12 % l’année prochaine ! C’est, du moins, ce qu’ont prévu les députés.
En fait, comme les lignes budgétaires du FISAC et de l’INSEE sont juste côte à côte, on a procédé à un transfert : 1, 8 million d’euros qui avaient été retirés à l’établissement public d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, l’EPARECA, une composante du FISAC bien connue des élus locaux, lui ont ensuite été rendus par prélèvement sur le budget de l’INSEE.
En apparence, l’honneur est sauf pour l’EPARECA… Mais cette somme de 1, 8 million d’euros manquera à l’INSEE ; pour avoir travaillé avec l’ensemble des responsables de cet organisme, je puis vous dire qu’ils n’arriveront pas à produire, l’an prochain, les statistiques dont notre pays a besoin.
Je ne pense pas que nous voulions, ni les uns ni les autres, supprimer l’indice mensuel des prix à la consommation, les chiffres du chômage ou ceux de l’inflation…
Les résultats de la politique menée, à laquelle je suis pour ma part défavorable, ne sont pas bons ; mais la nécessité est impérieuse de conserver le thermomètre !
Pour conclure, je vais vous faire part de l’avis de la commission des finances sur les crédits de la mission « Économie ».
Je constate que nos collègues de l’Assemblée nationale, pourtant majoritairement favorables au Gouvernement, ont eux aussi regretté les déséquilibres de ce budget, comme je le fais.
C’est dans le but de le rééquilibrer qu’ils ont abondé de 1, 8 million d’euros, de la manière que je viens d’expliquer, la subvention allouée à l’EPARECA. Mais ce supplément de moyens ne suffira pas à rendre à cet établissement sa capacité d’action en faveur du tissu économique dans les territoires.
De plus, au cours des débats à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a réduit de 22 millions d’euros les crédits de la mission « Économie », en application des plans présentés par le Premier ministre, les 24 août et 7 novembre derniers, pour réaliser des économies supplémentaires.
Cette diminution, se répartissant entre ses quatre programmes, rend encore plus sévère la contraction des moyens d’intervention de la mission « Économie ». Pour cette raison, la commission des finances propose au Sénat d’en rejeter les crédits.
En revanche, elle propose l’adoption sans modification des crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Économie » est composée de quatre programmes budgétaires dont notre collègue Christian Bourquin, qui a succédé à François Rebsamen, et moi-même partageons désormais la charge d’être les rapporteurs.
Bien sûr, j’aurais aimé que nous partagions aussi les conclusions, en particulier sur le vote des crédits de la mission…
Vous comprendrez que ce ne soit pas le cas. En effet, je proposerai pour ma part l’adoption des crédits de la mission « Économie », ainsi que ceux du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».
Je souhaite d’abord vous faire part de mes observations générales sur le champ de la mission.
Celui-ci étant particulièrement vaste, et le temps qui m’est imparti très court, je mettrai l’accent sur deux sujets qui me paraissent aujourd’hui essentiels pour la situation économique et sociale de notre pays ; ils comptent aussi, je l’avoue, parmi les principaux centres d’intérêt et d’action du sénateur des Français de l’étranger que je suis.
Il s’agit de notre présence économique à l’étranger…
… et de nos performances dans le domaine du tourisme.
Ces deux sujets correspondent à des actions majeures de la mission, dirigées vers l’international et particulièrement créatrices d’emplois et de richesses.
J’aborde, pour commencer, la question de notre présence économique à l’étranger, notamment celle du rôle d’UBIFRANCE.
Je vous rappelle la situation très préoccupante du solde de nos échanges extérieurs : nous avons accusé un déficit de 75 milliards d’euros en 2011, l’Allemagne enregistrant au même moment un excédent de quelque 160 milliards d’euros.
Je ne me risquerai pas à tenter d’analyser de façon exhaustive les raisons de cette dégradation, qui paraît s’accélérer d’année en année ; toutefois je ne crois pas inutile de mettre brièvement en évidence un certain nombre de problèmes, afin de vous convaincre qu’il faut agir en priorité sur eux.
On sait bien, d’abord, que nous ne disposons pas de l’exceptionnel réseau d’entreprises de taille intermédiaire, les ETI, dont l’Allemagne bénéficie. Il faut nous demander quelles en sont les raisons et comment nous pourrions donner à nos patrons de PME l’envie de grandir !
On constate ensuite, en particulier lorsqu’on visite des usines et des entreprises à l’étranger, dans différents secteurs d’activités, que nous ne produisons pas les biens d’équipement spécifiquement nécessaires aux pays en fort développement, qui tirent la croissance mondiale.
La désindustrialisation de notre pays est malheureusement passée par là… Aujourd’hui, la reconquête est le grand enjeu. Comment regagner le terrain perdu ? Comment nous réindustrialiser ? Tels sont nos défis majeurs.
Le moment est venu d’une grande mobilisation. Ensuite, il sera trop tard.
Bien que toujours excédentaire, le solde de notre secteur agricole et agroalimentaire se dégrade et, en Europe, nos concurrents hollandais et allemands nous ont dépassés !
Même notre industrie automobile, dont nous étions naguère légitimement fiers, contribue aujourd’hui à la détérioration du solde de notre balance commerciale…
S’agissant enfin de la part des activités financée par le capital risque, notre situation est peu brillante par rapport à celle de nos voisins européens : il nous faudrait des business angels plus nombreux !
Notre secrétaire d’État au commerce extérieur dispose de pouvoirs trop limités pour pouvoir agir réellement sur les données fondamentales que je viens d’évoquer ; il s’efforce néanmoins d’améliorer le dispositif de promotion internationale de notre économie.
Avec « l’équipe de France de l’export », qui doit réunir tous les acteurs de France et de l’étranger et organiser leur jeu collectif, …
… il a entrepris un réel effort d’organisation et de synergie qui commence à produire des résultats tangibles sur le terrain.
Mais il faut, à l’étranger, mobiliser toujours davantage nos représentations diplomatiques…
… et obtenir aussi que le conseiller économique, qui représente la direction générale du Trésor auprès de l’ambassadeur, considère qu’il entre dans sa mission d’assurer la communication et la coordination entre tous les acteurs présents à l’étranger : UBIFRANCE, l’AFII, les chambres de commerce, OSEO, l’Agence française de développement, Atout France, tous nos chercheurs – quel que soit l’organisme dont ils dépendent –, la SOPEXA, PROMOSALONS, les conseillers du commerce extérieur de la France, pour ne citer que ceux-là.
Je sais, monsieur le secrétaire d’État, que votre collègue chargé du commerce extérieur, M. Pierre Lellouche, s’est particulièrement penché sur la fonction de conseiller du commerce extérieur de la France, afin d’essayer d’en apprécier la contribution.
Il a demandé au Conseil économique, social et environnemental comment cette cohorte de quelque 4 200 dirigeants d’entreprises, parmi lesquels plus de 2 500 sont installés à l’étranger, pourrait apporter davantage à notre présence économique hors de nos frontières.
Quant à moi, j’espère vivement que ces conseillers, devenus des acteurs de notre commerce extérieur, sauront trouver la réponse à cette question.
L’agence UBIFRANCE, quant à elle, voit ses moyens budgétaires préservés dans le cadre d’un nouveau contrat d’objectifs et de performance conclu avec l’État ; il faut s’en réjouir, car son champ d’action, du moins théorique, va s’étendre en 2012 à l’ensemble du monde.
Forte de réels succès quantitatifs, l’Agence, désireuse de suivre les recommandations de la Cour des comptes, s’efforce de mettre au point des indicateurs efficaces pour apprécier ses résultats qualitatifs, c’est-à-dire les effets de son action sur les réelles implantations d’entreprises françaises à l’étranger.
Cet établissement public industriel et commercial souhaite aussi améliorer l’efficience du dispositif de promotion de nos exportations agroalimentaires, en coopération avec la SOPEXA, la société pour l’expansion des ventes des produits agricoles et alimentaires français, déjà citée ; il a conscience, en effet, qu’il reste quelques marges de progrès dans le sens d’une plus grande synergie.
J’en viens maintenant au second sujet que je souhaite aborder et qui, monsieur le secrétaire d’État, vous concerne directement : le tourisme.
Je vous rappelle que j’ai récemment présenté avec notre collègue Michel Bécot, lui pour la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, moi pour la commission des finances, un rapport intitulé Le tourisme, un atout formidable pour la France.
Je ne vais pas reprendre ici les conclusions et les recommandations de ce rapport ; je renvoie toutes celles et tous ceux d’entre vous que le sujet intéresse, mes chers collègues, à la lecture de ce document.
Mais à vous, monsieur le secrétaire d’État, ainsi qu’à tous les acteurs concernés, je demande de nous aider à assurer le suivi et la mise en œuvre de ces recommandations.
Croyez bien que, de notre côté, nous serons attentifs aux résultats concrets de votre initiative en faveur de l’amélioration de la qualité de l’accueil en France, initiative que nous saluons.
Il est en effet extrêmement important, nous en sommes tous conscients, que l’accueil réservé par la France à ses visiteurs étrangers soit radicalement amélioré, en particulier lorsque ceux-ci arrivent à Roissy...
Nous suivrons donc avec une grande attention les progrès obtenus après la signature, le 1er mars dernier, de la charte que vous avez conclue avec de nombreux partenaires dont Aéroports de Paris, la RATP, la SNCF, France Congrès, la chambre de commerce et d’industrie de Paris, la Fédération nationale des artisans du taxi, etc.
Nous avons d’ailleurs observé qu’Aéroports de Paris avait déjà lancé une campagne de communication sur la qualité de ses services.
M. André Ferrand, rapporteur spécial. J’espère sincèrement que la charrue a bien été attelée après les bœufs, c’est-à-dire que les améliorations ont bien précédé leur annonce !
Sourires.
Nous savons que le groupement d’intérêt public Atout France est le fer de lance d’une politique aux acteurs extrêmement nombreux et divers, dans un secteur qui représente – on ne le rappellera jamais assez – 6, 2 % de notre PIB, c’est-à-dire autant que le secteur agricole et agroalimentaire, et plus de un million d’emplois directs, dont il faut souligner qu’ils ne sont pas délocalisables.
C’est pourquoi je regrette naturellement la réduction de 2 % de la dotation d’Atout France pour 2012.
Mais l’enjeu principal est probablement ailleurs. Il suffit, pour s’en convaincre, de comparer les 44, 7 millions d’euros de crédits du programme 223 « Tourisme » avec les quelque 1, 2 milliard d’euros représentés par l’ensemble des moyens publics contribuant à la politique du tourisme.
Reste que ces moyens sont extrêmement dispersés entre les offices de tourisme et les syndicats d’initiative, les comités départementaux et les comités régionaux du tourisme.
C’est pourquoi nous avons recommandé, dans notre rapport, d’optimiser l’emploi de ces ressources et d’en orienter une partie plus importante vers la promotion internationale de la destination France, en essayant de développer des synergies entre ces acteurs.
Nous avions aussi émis l’idée de sécuriser le recouvrement de la taxe de séjour et d’élargir son assiette au bénéfice des collectivités locales, tout en explorant la piste de la création d’une part additionnelle de cette taxe qui serait dédiée à la promotion de la destination France. Face à la communication très efficace de nos concurrents – je pense notamment à celle de l’Espagne –, il est indispensable que la marque touristique « Rendez-vous en France » s’impose auprès du grand public, en particulier sur les nouveaux marchés émergeant très rapidement, comme la Chine, la Russie, l’Inde et le Brésil.
Monsieur le secrétaire d’État, vous êtes chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. L’intitulé exhaustif de votre qualité rend compte de l’étendue du champ de vos fonctions. Je sais cependant tout l’intérêt que vous portez au tourisme. Je connais la conscience que vous avez de sa très grande importance en matière de créations de richesse et d’emploi. Je tiens à en témoigner devant la Haute Assemblée. Je tiens aussi à renouveler notre engagement aux côtés de tous les acteurs du tourisme et particulièrement de ceux qui ont la charge, avec vous monsieur le secrétaire d’État, de doter la France d’une grande politique volontariste en matière de tourisme. Je pense, vous le savez, à la partie de l’équipe de la direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services, la DGCIS, dédiée au tourisme ainsi, bien sûr, qu’au fer de lance de cette politique, Atout France !
Ainsi, au regard des observations que je viens de livrer, et même si je regrette la contrainte budgétaire que doit globalement supporter la mission « Économie » – il semble toutefois que ce soit la règle générale en ce moment –, je propose au Sénat, à titre personnel seulement, ce que je déplore, d’adopter les crédits de la mission « Économie » et du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes financiers ».
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ UCR.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission de l'économie ayant désigné plusieurs rapporteurs pour avis, je laisserai le soin à Michel Teston de parler des crédits de manière générale.
Je ciblerai quant à moi mon intervention sur un domaine qui m’est très cher : le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC.
La question du financement du FISAC, qui a tendance à revenir à chaque discussion budgétaire, se pose malheureusement une nouvelle fois cette année.
Pour 2012, le projet de loi de finances initiale prévoit en effet de doter le FISAC de 41 millions d’euros. Par rapport à 2011, cela représente, on l’a dit, une baisse de 22 millions d’euros, soit une diminution de 34 % des crédits. Je me demande si beaucoup de fonds d’intervention, de programmes ou d’opérateurs de l’État sont confrontés à une restriction de crédits aussi sévère que celle connue par le FISAC !
Si le FISAC a finalement pu disposer en 2011 de 64 millions d’euros au lieu des 43 millions d’euros initialement prévus, c’est parce que j’avais proposé un amendement pour limiter la baisse de ses moyens.
Nous nous étions tous mobilisés, d’une façon très consensuelle, pour le faire adopter, malgré l’avis contraire du Gouvernement.
Nous avions ainsi obtenu qu’en 2011 le FISAC obtienne une « rallonge » de 21 millions d’euros.
Les chiffres que j’ai pu recueillir auprès de la DGCIS concernant l’exécution des crédits du FISAC prouvent a posteriori que notre engagement était justifié.
Ces 64 millions d’euros n’étaient en effet pas de trop. L’année qui vient risque de commencer avec un volume de crédits reportés sur 2012 et donc déjà pré-engagés.
Imaginons un peu ce qui se serait passé si nous n’avions pas obtenu en 2011 la rallonge pour le FISAC… Avant même que l’année ne commence, la capacité d’intervention du FISAC était vraisemblablement obérée, et les nouveaux projets déposés en 2012 ne pouvaient être satisfaits.
Nous nous trouvons, me semble-t-il, devant une situation absurde. Le FISAC est un outil utile pour soutenir le développement du commerce de proximité ; la DGCIS dispose d’ailleurs de plusieurs études qui le prouvent. L’argent mis dans le FISAC est de l’argent bien dépensé : l’investissement génère activité économique, cohésion sociale et rentrées fiscales par la TVA.
Je rappelle d’ailleurs que le législateur, sur l’initiative du Sénat, avait inscrit dans la loi de modernisation de l’économie, la LME, un renforcement des missions du FISAC et une sécurisation de ses crédits.
Notre collègue Élisabeth Lamure, en tant que rapporteur de la LME, avait défendu des amendements allant dans ce sens.
Aujourd’hui, le FISAC est donc sous-doté au regard de ses missions.
Cependant, fait positif, à la suite de la déconcentration de l’instruction des dossiers au niveau des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, les DIRRECTE, les délais de traitement des dossiers ont été raccourcis. C’est une très bonne chose.
Pour revenir au FISAC, le constat est implacable, et je ne le démentirai pas. Néanmoins, compte tenu de la situation financière de la France, je ne proposerai pas d’amendement pour relever les crédits du FISAC, contrairement à ce que j’avais fait l’année dernière.
C’est dommage, mais il faut être responsable ; il faut être sérieux, mon cher collègue.
Cela dit, lorsque l’effort de redressement des comptes publics aura porté ses fruits, il me semble que la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire devra rouvrir le dossier du FISAC, de ses missions et de ses moyens.
S’agissant des missions, le FISAC est peut-être victime de son succès. Il faudrait sans doute réfléchir à recentrer son action prioritairement sur le soutien au commerce de proximité, notamment en milieu rural et dans les quartiers sensibles.
Plus largement, je crois qu’il faut penser le FISAC comme un outil intégré au service d’une politique plus globale, comme le Sénat avait tenté de le faire dans la LME. Il me semble donc impératif de doter le FISAC de ressources stables et suffisantes pour en faire le bras armé d’une politique faisant du commerce de proximité un atout, au service à la fois du développement économique et de l’aménagement du territoire.
Vous l’avez compris, bien que je déplore la moindre dotation du FISAC par rapport à l’année dernière, je voterai, compte tenu de la situation financière de la France, l’ensemble de ces crédits.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai souhaité porter mon attention sur les missions et les moyens de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF.
C’est un sujet d’actualité, puisque le Sénat va bientôt examiner un projet de loi visant à améliorer l’information et la protection des consommateurs. Ce texte donne à ces derniers de nouveaux droits et impose des obligations renforcées aux professionnels. Cependant, nous savons tous que créer des obligations et des droits formels est insuffisant si, dans le même temps, ne sont pas créées ou renforcées les institutions qui pourront aider les personnes, en l’occurrence les consommateurs, à effectivement exercer ces droits et à faire valoir ces obligations.
La DGCCRF étant la principale institution chargée de protéger les consommateurs, la question est donc simple : après cinq ans de révision générale des politiques publiques, est-elle encore en état d’assumer effectivement le rôle renforcé que la loi veut lui attribuer ?
J’aurais aimé répondre par l’affirmative. Malheureusement, mon sentiment est que la DGCCRF est aujourd’hui une administration sinistrée.
Tout d’abord, elle est confrontée à un effet de ciseaux entre l’extension du champ de ses missions et la limitation continue de ses moyens.
D’un côté, loi après loi, directive européenne après directive européenne, sa charge de travail se trouve considérablement augmentée. Ainsi, le projet de loi renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs, dont je viens de parler, crée de nouvelles règles pour encadrer les relations d’affiliation entre les commerçants indépendants et leur tête de réseau dans le domaine de la grande distribution. C’est la DGCCRF qui sera chargée de veiller au respect de ces règles nouvelles. Elle devra contrôler aussi le respect des indications géographiques étendues aux produits artisanaux et industriels, contrôler les activités de syndic de copropriété ou encore l’exercice de la profession de diagnostiqueur…
Tout cela est louable, puisque les abus sont nombreux dans ces secteurs. Mais il s’agit de missions très lourdes pour la DGCCRF.
Si l’on se souvient par ailleurs que ces missions nouvelles s’ajoutent à celles qui ont été créées par la loi de modernisation de l’économie, par la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, puis par la loi Lagarde portant réforme du crédit à la consommation ; si l’on considère en outre que la législation européenne impose chaque année à la DGCCRF des contrôles sur un nombre croissant de produits alimentaires et non alimentaires, le tableau alors obtenu est celui d’une DGCCRF croulant littéralement sous le poids de ses missions nouvelles.
D’un autre côté, et dans le même temps – c’est la seconde lame des ciseaux –, la DGCCRF voit, année après année, ses crédits et ses effectifs baisser. En 2012, elle perdra une centaine d’agents. Entre 2008 et 2012, ses effectifs seront passés de 3 500 à 3 000 agents, soit une baisse de 15 %.
Comment la DGCCRF peut-elle faire face à l’écart croissant entre le champ des contrôles qu’elle doit effectuer et les moyens dont elle dispose pour les réaliser ?
Selon le discours officiel, monsieur le secrétaire d’État, tout va bien : la réorganisation des services permettrait de dégager des gains de productivité et d’adapter les moyens aux missions grâce à une efficacité accrue.
Je ne partage pas cet optimisme. En effet, les chiffres sont là : le recul de 15 % des effectifs de la DGCCRF s’est accompagné d’une baisse de 13 % des contrôles effectués. On comptait en effet un million de contrôles en 2006 ; on n’en dénombre plus que 870 000 en 2010.
Les suites données à ces contrôles changent elles aussi fortement. La DGCCRF se contente de plus en plus de simples rappels à la réglementation, qui demandent peu de temps aux agents mais donnent de moins en moins lieu à des actions administratives ou judiciaires. Celles-ci ont baissé de 10 % depuis 2007.
N’étant plus en mesure de couvrir le champ entier de ses missions, la DGCCRF organise son programme de contrôles de telle sorte que les moyens dont elle dispose soient, par définition, toujours en quantité suffisante. Elle définit ainsi chaque année, sur la base d’une directive nationale d’orientation, ses champs de contrôle prioritaires. De la sorte, des pans entiers des échanges échappent tous les ans à ses contrôles.
Par principe, donc, les moyens ne manquent jamais, puisque ce sont les missions qui s’adaptent aux moyens et non l’inverse !
Au-delà des chiffres, on peut s’interroger aussi sur la capacité de la DGCCRF à maintenir la qualité des contrôles effectués.
D’une part, en effet, certaines remontées de terrain suggèrent que la réorganisation des services déconcentrés, particulièrement au niveau départemental, a conduit à marginaliser les agents de la DGCCRF au sein des nouvelles structures avec, à la clé, une désorganisation de leur travail et une perte d’efficience de leur action.
D’autre part, la nature des contrôles change, manque de temps et culte du chiffre obligent. On demande de plus en plus aux agents de faire de simples inspections, c’est-à-dire de vérifier un nombre de points prédéfinis à partir d’une grille d’évaluation standardisée. Ils font par exemple le tour des restaurants d’un secteur pour vérifier que les restaurateurs ont bien apposé sur leur vitrine les affiches adéquates, comme : « La TVA baisse, les prix aussi. » En une heure, un agent peut ainsi contrôler quelques dizaines de restaurants, avec un effet marginal sur le bien-être des consommateurs mais un impact très positif sur les statistiques de performance du ministère. En revanche, les enquêtes de terrain approfondies, qui permettent de détecter les vraies fraudes, sont en recul.
La DGCCRF est donc en train de passer d’une activité de police économique dans le domaine de la concurrence et de la consommation à un simple travail d’audit et d’accompagnement des entreprises. Ce n’est pas ce que nos concitoyens attendent en priorité de cette administration.
Mme Évelyne Didier, rapporteure pour avis. Pour toutes ces raisons, on peut affirmer que les moyens ne sont pas au niveau des ambitions affichées.
Applaudissementssur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au sein de la mission « Économie », j’ai choisi de m’intéresser cette année au programme « Tourisme », qui regroupe une partie des moyens consacrés par l’État au développement de ce secteur essentiel pour l’économie nationale.
La révision méthodologique des comptes satellites du tourisme, qui était en cours depuis plusieurs années, est enfin achevée. Elle conduit à réévaluer à la hausse l’importance économique du tourisme, dont la part dans le PIB s’élèverait à 7, 1 % en 2010, au lieu de 6, 2 % pour la dernière année connue, 2007.
D’autres chiffres-clés permettent de mesurer l’importance du tourisme dans l’économie française : les recettes touristiques se sont élevées à 35, 1 milliards d’euros en 2010 ; elles dégagent un solde positif de 6, 1 milliards d’euros, ce qui fait du tourisme l’un des premiers postes excédentaires de la balance des paiements.
En outre, le secteur du tourisme fournit près de 1 million d’emplois directs.
Dans un contexte de forte reprise du tourisme mondial, avec une hausse de 7 % des arrivées internationales en 2010, la France demeure la première destination touristique mondiale, devant les États-Unis et la Chine. Toutefois, notre pays n’est que troisième en termes de recettes du tourisme international, derrière les États-Unis et l’Espagne. Nous avons encore des marges de progression et il est urgent d’œuvrer pleinement en ce sens.
Le programme « Tourisme » est l’un des plus petits programmes budgétaires. Pour 2012, sa dotation présente une réduction par rapport à 2011. Cette baisse s’explique principalement, il faut le souligner, par l’achèvement de l’opération de participation à l’exposition universelle de Shanghai, entre mai et novembre 2010, qui a été un grand succès. Le pavillon de la France a été le plus visité, avec 10, 2 millions de visiteurs, devançant même le pavillon chinois !
Toutefois, je veux souligner que le soutien de l’État à la politique du tourisme ne se limite pas aux seuls crédits du département ministériel chargé du tourisme. Nous disposons, pour la première fois cette année, d’un document de politique transversale qui recense les crédits consacrés par d’autres ministères à la politique de soutien de l’activité touristique.
Le montant total des crédits, répartis entre vingt-quatre programmes relevant de douze missions différentes, s’élève pour 2012 à 1, 9 milliard d’euros en autorisations d’engagement et à 2 milliards d’euros en crédits de paiement.
Le lien entre ces crédits et la politique du tourisme semble parfois très indirect, mais il était utile de rappeler tous ces chiffres qui sont intéressants à connaître pour mieux apprécier les ordres de grandeur.
L’action de l’État dans le domaine du tourisme est relayée par certains établissements autonomes, qui jouent un rôle de levier efficace. Je pense, notamment, à Atout France, qui résulte de la fusion en 2009 de Maison de la France, chargée de la promotion de l’image de la France à l’étranger, et d’ODIT France, chargé de l’ingénierie touristique.
Atout France, qui dispose de trente-deux bureaux à l’étranger, a déployé en 2011 la nouvelle marque de destination de notre pays, baptisée « Rendez-vous en France ». L’Agence a également mis en place cette année un nouveau site internet grand public faisant office de vitrine commerciale de la diversité de l’offre touristique française ; il sera progressivement enrichi grâce à l’apport direct des départements et des régions.
À ce sujet, je suis tout à fait favorable à la mise en réseau des offices de tourisme départementaux et régionaux afin qu’ils travaillent dans le même sens et optimisent leurs moyens au travers des conseils régionaux du tourisme.
Le budget d’Atout France fait largement appel au partenariat : sur un total de 76, 4 millions d’euros pour 2011, la subvention pour charges de service public devrait s’élever à 34, 7 millions d’euros et les ressources issues du partenariat à 36, 1 millions d’euros. Cet effet multiplicateur est intéressant, mais suppose le maintien à un niveau suffisant de la subvention de l’État. Si celle-ci devait diminuer davantage, c’est la crédibilité même d’Atout France à l’égard de son millier de partenaires qui se trouverait compromise.
À côté des crédits, il existe un certain nombre de dépenses fiscales en faveur du tourisme.
La décision récemment annoncée par le Gouvernement de relever de 5, 5 % à 7 % le taux réduit de TVA, avec un certain nombre d’exceptions pour les biens et services de première nécessité, me paraît acceptable, car elle ne remet pas en cause le bénéfice du taux réduit de TVA pour la restauration, qui a produit des effets en termes de création d’emplois et a aidé, ne l’oublions pas, à traverser la crise. Surtout, par sa portée générale, cette décision évite de stigmatiser la profession.
En revanche, je serai plus critique quant à la taxe de 2 % sur les nuitées de 200 euros ou plus, qui a été instaurée dans le cadre de la loi de finances rectificative du 19 septembre dernier.
Cette taxe, qui était initialement ciblée sur les hôtels de luxe des catégories 4 ou 5 étoiles, représentant 5 % du parc hôtelier, est désormais calée sur un seuil qui ne correspond pas forcément à la notion de luxe. À Paris, 70 % des nuitées seraient concernées. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous confirmer l’intention du Gouvernement de supprimer cette taxe afin qu’elle ne s’ajoute pas au relèvement du taux réduit de TVA ?
Je voudrais, pour finir, évoquer le problème du vieillissement du parc des hébergements touristiques. La question est particulièrement cruciale pour les résidences de tourisme à l’issue de la période de défiscalisation qui a suivi leur construction. On se retrouve ainsi, dans les stations de tourisme, avec des « volets clos » ou des « lits froids », qui ne font plus l’objet d’aucune offre locative. Ces logements sont obsolescents et les structures de propriété éclatées nuisent à leur bon entretien.
J’approuve donc la mise en place, au mois de février dernier, d’un groupe de travail qui associe élus du littoral et élus de la montagne afin de bâtir un plan d’action pour la rénovation de l’immobilier de loisir. Ce plan, sorte de boîte à outils juridiques et financiers, serait mis à la disposition des élus pour piloter la rénovation, en s’inspirant des techniques utilisées pour la rénovation urbaine.
En conclusion, à la différence de la majorité de la commission de l’économie, je donnerai à titre personnel un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Économie », que je voterai.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission de l’économie, madame, messieurs les rapporteurs, chers collègues, les crédits de la mission « Économie » font, cette année encore, les frais des mesures de rigueur et enregistrent une baisse nominale de 2, 8 %, ou de 4, 5 % en tenant compte de l’inflation.
Depuis 2010, à périmètre constant, ces crédits ont baissé de 4, 8 %, voire de 8, 2 %, si l’on tient compte de l’inflation !
Mon intervention portera plus particulièrement sur les actions 134 et 13, consacrées au service postal et aux communications électroniques, dont les crédits reculent de 3, 1 %.
Les budgets de ces actions illustrent parfaitement les carences de l’État dans le financement des quatre missions de service public de La Poste.
Le service universel n’est plus financé, en partie, par le secteur réservé. À la place de ce monopole résiduel, il est prévu de créer un fonds de compensation alimenté par les opérateurs. Or ce système existe pour la téléphonie fixe et il fonctionne mal.
La dotation budgétaire pour le transport et la distribution de la presse se situe à 202, 35 millions d’euros, soit un recul de 4, 4 % !
L’accessibilité bancaire est compensée par une « rémunération complémentaire de l’État » qui décroît continuellement sur la période 2012-2014.
Enfin, la mission de présence territoriale est financée, en partie, par un fonds de péréquation, qui certes passe de 135 millions d’euros à 170 millions d’euros, mais dont le financement repose sur les collectivités locales et non sur l’État.
Dans le domaine des communications électroniques, les lacunes et les incertitudes sont aussi nombreuses.
Les opérateurs des réseaux à très haut débit mobile, la 4G, ceux qui sont déjà retenus pour la bande de fréquences des 2, 6 gigahertz et ceux qui vont l’être pour la bande de fréquences des 800 mégahertz, auront respectivement douze et quinze ans pour remplir leurs obligations de couverture… Ne trouvez-vous pas cela un peu long ?
Pour la téléphonie mobile 2G et 3G, comme l’ont relevé par ailleurs nos collègues Bruno Sido et Hervé Maurey, les critères de couverture en zones blanches ne sont pas pertinents et des zones grises subsistent.
En matière de haut débit, il faut aller vers le haut débit pour tous à un niveau suffisamment élevé, et en tout cas bien supérieur aux 512 kilobits du plan « France numérique 2012 ».
S’agissant du très haut débit et du programme national « très haut débit », le PNTHD, le constat est fait que les moyens d’atteindre les objectifs ambitieux fixés par le chef de l’État ne sont pas mobilisés. Les opérateurs privés peuvent se déployer partout et ne sont en rien tenus par leurs engagements. Par ailleurs, au titre du grand emprunt, 900 millions d’euros seulement sont prévus pour accompagner les collectivités locales cantonnées dans des zones peu denses.
Ma conclusion est la suivante : en période de crise, il est plus que jamais nécessaire de s’interroger sur la pertinence d’un certain nombre de niches fiscales. Ne faudrait-il pas supprimer celles qui sont économiquement inefficaces et socialement injustes ? Ne faudrait-il pas redéployer les crédits ainsi libérés pour bien assurer les services essentiels et préparer l’avenir ?
Or, avec ce budget, l’État n’accompagne pas La Poste pour maintenir la présence postale. Il réduit ses contributions pour les trois autres missions de service public de La Poste ou il diminue les crédits du FISAC, qui sont partout essentiels pour le maintien des services à la population, dans les zones rurales comme dans les zones urbaines sensibles.
L’État n’accompagne pas non plus suffisamment les collectivités en matière de désenclavement numérique des zones peu denses.
Pour ces raisons, la commission de l’économie a émis un avis défavorable sur les crédits de la mission « Économie ».
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, pour la première fois, à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, la commission des lois a décidé de se saisir pour avis des crédits du programme « Développement des entreprises et de l’emploi » de la mission « Économie ».
En effet, notre commission a souhaité, par cet avis, vérifier l’emploi des crédits correspondant à son domaine traditionnel de compétences en matière d’amélioration et de simplification de l’environnement juridique des entreprises, de protection et de sécurité des consommateurs, de régulation des marchés et de mise en œuvre du droit de la concurrence.
Je ne reviendrai pas sur la réduction forte, déjà évoquée, des crédits du programme. Dans ce contexte budgétaire difficile, qui appelle, bien sûr, des mesures fortes de la part du Gouvernement, je souhaite néanmoins vous faire part de notre inquiétude quant à la capacité des administrations concernées à continuer à exercer leurs missions correctement, en particulier en matière de protection des consommateurs, c’est-à-dire notre protection à tous.
À cet égard, je tiens à saluer le travail accompli par les agents de l’État qui sont chargés de cette mission.
Monsieur le secrétaire d’État, en ces temps de crise, ce programme budgétaire apporte beaucoup à nos entreprises, en particulier à nos PME. Aussi, plutôt que de m’appesantir sur ce qui fonctionne, je pense par exemple à l’efficacité économique de l’accompagnement de nos entreprises par OSEO, vous me permettrez de présenter trois observations sur les sujets qui nous préoccupent.
Premièrement, dans le sillage de la révision générale des politiques publiques, la réforme de l’administration territoriale de l’État a profondément transformé l’organisation des services déconcentrés au sein de nouvelles directions régionales, aux compétences plus larges, et surtout au sein de vastes directions départementales interministérielles placées sous l’autorité des préfets, au nombre de deux ou trois par département.
Ainsi, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, ne dispose plus de ses propres services déconcentrés, mais doit s’adresser aux préfets pour transmettre ses instructions en matière de contrôle, par exemple. Comme l’a souligné ma collègue Évelyne Didier, les missions des anciennes directions régionales et surtout départementales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes peuvent paraître diluées, voire délaissées par manque d’effectifs, au sein des nouvelles directions. Nous éprouvons des inquiétudes à ce sujet.
Le consommateur victime de comportements condamnables de la part d’un professionnel saura-t-il trouver, au sein de la nouvelle direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations, les fonctionnaires chargés de le défendre ?
Deuxièmement, la commission des lois a souhaité dresser un premier bilan du nouveau statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée, l’EIRL, créé par la loi du 15 juin 2010 dont Jean-Jacques Hyest était rapporteur.
Ce nouveau statut, qui s’ajoute aux statuts existants, permet à un entrepreneur individuel de séparer son patrimoine personnel de son patrimoine professionnel, sans avoir à créer de société, de sorte qu’en principe seul son patrimoine professionnel est appelé à supporter ses dettes professionnelles. Ainsi, une défaillance économique ne menace plus ses biens personnels ni la vie de sa famille.
Ce texte était réclamé et attendu depuis très longtemps par les milieux de l’artisanat. Le dispositif est opérationnel depuis le mois de janvier et a donné lieu à une intense campagne de communication, même si tous les décrets d’application ne sont pas encore parus. Or, au 30 octobre 2011, on ne recensait que 4 908 EIRL. Je rappelle que, selon l’étude d’impact du projet de loi, la prévision était de 100 000 EIRL pour la fin de 2012, hypothèse jugée réaliste. Au rythme actuel, il est particulièrement douteux que nous atteignions ce chiffre. Cette situation rappelle le modeste succès de l’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, l’EURL, créée en 1985.
Quand bien même le cumul des deux régimes est possible, le statut de l’auto-entrepreneur, dont le succès ne se dément pas, ne freine-t-il pas le développement de l’EIRL en le rendant moins attractif, en dépit de la possibilité d’opter pour l’impôt sur les sociétés ? Sur le fond, la multiplication des statuts ne rend-elle pas plus difficile le choix de l’entrepreneur ? La simplification véritable ne consisterait-elle pas à rationaliser le paysage ?
Enfin, troisièmement, la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation a procédé au regroupement auprès de l’Institut national de la consommation de la Commission des clauses abusives, de la Commission de la sécurité des consommateurs et de la nouvelle Commission de la médiation de la consommation.
Ce regroupement est très positif, car il mutualise les moyens et les effectifs, ce qui permet de réaliser des économies, tout en donnant à chaque organisme des capacités d’action et d’expertise démultipliées, grâce à la mise en place de services communs.
Or, à ce jour, plus d’un an après la publication de la loi, le regroupement de ces instances n’est toujours pas effectif, car les crédits de personnel correspondant au fonctionnement des commissions n’ont, semble-t-il, toujours pas été transférés à l’Institut national de la consommation. Il n’y a donc toujours pas de services communs. Cette situation d’incertitude fragilise nécessairement les missions exercées par ces instances. Je ne doute pas que le Gouvernement saura rapidement prendre les décisions administratives nécessaires pour y remédier.
Quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, nous sommes tous ici attachés à ce que la législation que nous votons soit correctement et réellement appliquée. Je vous remercie donc, monsieur le secrétaire d'État, de nous fournir les réponses qui, je l’espère, sauront rassurer le Sénat et sa commission des lois. Celle-ci a donné un avis défavorable à l’adoption des crédits de cette mission, mais, à titre personnel, je les voterai.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Je vous rappelle aussi que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Nathalie Goulet.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en tant que membre de la commission des affaires étrangère, j’ai une assez bonne expérience des relations internationales. Le fait d’avoir été vice-présidente de la mission commune d’information sur la désindustrialisation des territoires explique aussi mon intérêt pour cette mission.
Monsieur le secrétaire d’État, sans surprise, je m’attacherai, au sein du programme 134 relatif à l’attractivité du territoire, à l’action n° 7, Développement international et compétitivité des territoires.
Non sans constance, j’égrènerai les remarques que je fais chaque année à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances et que j’ai également formulées lors des débats sur la loi de modernisation de l’économie.
Je rejoins l’avis de M. André Ferrand, mais je suis sans doute un peu plus sévère que lui. L’équipe France marche en ordre dispersé, parfois avec des snipers, parfois avec des joueurs qui tirent contre leur camp.
M. Antoine Lefèvre s’exclame.
Tout bien considéré, le programme 134 montre les limites de la loi organique relative aux lois de finances, qui, de ce point de vue, me semble périmée
L’action de votre ministère est transversale et devrait être mieux coordonnée. Vœu pieux ! En baisse de 4, 5 % inflation comprise, la mission « Économie » mérite que l’on s’attache à l’efficacité des dépenses. Puisqu’il faut dépenser moins, dépensons mieux !
Monsieur le secrétaire d’État, l’attractivité commence à la porte de nos consulats. Que dire de cette absurde politique des visas, dénoncée par Adrien Gouteyron dans de multiples rapports, qui nuit à notre image en interdisant notre pays à de jeunes diplômants chercheurs ?
Une fois franchi le seuil des ambassades, nous tombons sur les missions économiques. Vaste sujet ! On y trouve peu de coopérants parlant la langue du pays. Ces missions, qui facturent des prestations, bénéficient de financements publics sans aucune obligation de résultat.
À ce stade, je vous ferai deux propositions simples.
Tout d’abord, je vous suggère d’instaurer une obligation de résultat avec une incidence sur les primes d’expatriation. Vous verrez, cela ira beaucoup mieux !
Ensuite, pourquoi ne pas créer un escadron de fiscalistes volants dans les pays à forte capacité financière, les pays du Golfe, que je connais un peu, le Japon et même les États-Unis ?
En effet, les postes et les ambassades sont absolument incapables de renseigner les futurs porteurs de projets économiques ou immobiliers, qui sont souvent surpris et rebutés, quand ils arrivent sur notre territoire, par un système dont la lisibilité est, avouons-le, aléatoire.
Vous me répondrez qu’il y a UBIFRANCE et l’Agence française pour les investissements internationaux, l’AFII. Vaste sujet encore ! J’ai le souvenir d’un brillant colloque d’UBIFRANCE sur les investissements dans les pays du Golfe organisé… le premier jour du ramadan.
Sourires.
Quant à l’AFFII, l’État finance à hauteur de 22 millions d’euros cette structure, qui permet de « vendre la destination France » pour des implantations d’entreprises internationales.
J’émets le vœu que la commission des finances du Sénat puisse exercer son pouvoir d’enquête sur place et sur pièce ou qu’elle demande à la Cour des comptes un contrôle sur ces deux institutions, afin que nous ayons une idée un peu plus claire des tenants et des aboutissants de leur gestion.
Il serait opportun que ces appuis à l’implantation d’entreprises soient assortis de mesures d’interdiction des licenciements boursiers. Je pense notamment au site de Honeywell dans le Calvados, dont la fermeture, qui se ressent aussi dans mon département de l’Orne, est toujours d’actualité alors que l’entreprise connaît une hausse de 45 % de ses bénéfices. Ce licenciement purement boursier, qui concerne plus de 320 personnes, est absolument scandaleux !
Je me suis associée à la question orale qui vous a été posée la semaine dernière par Jean-Pierre Godefroy, et je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de me donner quelques explications sur le suivi de la table ronde qui est programmée.
Je n’oublie pas que j’ai fait partie de la mission commune d’information sur la désindustrialisation des territoires. Je vous communiquerai la liste des licenciements et des fermetures d’emplois dans le Grand Ouest, publiée par Ouest France ce week-end ; c’est absolument alarmant.
Je souhaiterais – brièvement, car mon temps de parole est limité – formuler d’autres propositions et quelques remarques, monsieur le secrétaire d’État.
Premièrement, je veux parler de l’optimisation des réseaux, et, au premier chef, des réseaux étudiants. Les mesures que je suggère ne coûteraient rien, ce qui, en matière budgétaire, est toujours bon à prendre !
Quand ils ont étudié en France, les jeunes ne sont pas suivis. Comment, dès lors, constituer ou animer un réseau ? Personne aujourd’hui en France n’a une idée précise du nombre et de la qualité des stagiaires qui sont venus étudier dans notre pays.
Quand un industriel français veut se rendre à l’étranger, il ne dispose même pas de la liste des gens qui, dans son secteur d’activité, ont travaillé ou ont été formés en France, bien souvent d'ailleurs grâce à des bourses ou des programmes d’échanges. D’ailleurs, les ambassades n’ont pas non plus ces listes.
Il s’agit donc d’une valeur ajoutée créée par la France sans aucun effet sur l’économie.
Nos partenaires anglais et allemands parviennent, eux, à rester en contact, par adresse électronique, avec 70 % des anciens stagiaires. Le taux de suivi, chez nous, est d’un peu moins de 10 %, sur la base du volontariat et par courrier postal. À l’ère de l’informatique et du numérique, je pense que l’on pourrait faire beaucoup mieux pour animer ces réseaux.
Deuxièmement, je souhaite évoquer la coopération décentralisée.
Au total, 4 754 collectivités territoriales françaises mènent près de 12 000 projets dans 139 pays, ce qui vous donne déjà, mes chers collègues, une idée de leur répartition. Les collectivités territoriales ont financé à plus de 70 millions d’euros, sur leurs fonds propres, ces coopérations. Les cofinancements ont été accordés par différents ministères.
La région Basse-Normandie a une coopération avec le Fujian – 38 millions d’habitants –, dont les responsables semblent avoir du mal à comprendre pourquoi la Haute-Normandie, elle, mène une coopération avec Zhijiang, qui compte 51 millions d’habitants. Nous retrouvons à l’international les aberrations de notre système.
Troisièmement, tout aussi grave est la méfiance à l’égard de la diplomatie parlementaire.
Contrairement à ce qui se passe au Royaume-Uni, en Allemagne et dans les autres pays anglo-saxons, les parlements sont mal considérés et les parlementaires ne sont pas assez utilisés à l’appui de nos entreprises.
Les parlementaires en mission sont regardés par les administrations comme de joyeux vacanciers voyageant sur argent public.
Sourires.
Mon temps de parole étant épuisé, monsieur le secrétaire d’État, je conclurai mon intervention par une dernière proposition : je suis candidate à toute mission que vous pourrez me confier afin d’étudier dans quelles conditions – on n’est jamais mieux servi que par soi-même !
Sourires.
Mme Nathalie Goulet. Je l’ai vu faire dans les Émirats arabes unis et au Qatar à une autre époque, et je vous assure que notre assemblée constitue une plus-value importante pour l’équipe France.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l ’ UCR et de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la discussion de la mission « Économie » faisant immédiatement suite à celle de la mission « Politique des territoires », j’y retrouve un certain nombre de points qui inspireront mon propos.
Votre périmètre d’action, monsieur le secrétaire d’État, est considérable, puisque vous êtes en charge du tourisme, mais aussi du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, des services, des professions libérales et de la consommation… Je vous félicite, car vous exercez bien vos différentes missions.
D’ailleurs, je veux témoigner, comme pourra également le faire le président de la commission de l’économie, que lors de votre audition devant la commission vous avez tenu un long mais très intéressant propos, et personne ne s’en est plaint.
Le premier point que j’évoquerai a trait au tourisme, plus précisément à l’accueil des étrangers à Paris, non pas dans la capitale, mais dans les aéroports de Paris. Chaque fois, nous sommes consternés par les conditions, en particulier matérielles, dans lesquelles nous sommes accueillis.
Queues interminables, services de police insuffisants – à qui la faute ? Je l’ignore –, …
Sourires.
… encore qu’ils soient très nombreux à finalement se présenter, surtout, grandes difficultés pour rallier la capitale par le RER, lequel véhicule à la fois des banlieusards et des touristes qui portent des valises, ce qui n’a rien de surprenant ; le problème est que les voitures sont justement conçues pour ne pas accueillir de valises, pour des raisons de sécurité.
Cela étant, dans un contexte budgétaire difficile, il faut s’attacher, je le répète, à dépenser moins mais à dépenser mieux. J’évoquerai deux points sur lesquels il est possible de faire beaucoup mieux.
Tout d’abord, dans nos territoires, nous le savons, et je me réfère au débat de tout à l'heure, l’activité économique repose beaucoup sur le commerce et l’artisanat. Les collectivités locales s’emploient avec beaucoup de succès à favoriser l’accueil de commerçants, le renouvellement de leurs équipements, la modernisation et la mise aux normes des ateliers d’artisans.
Pour cela, nous disposons du Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC, dispositif financier qui nous permet de nourrir des opérations collectives de modernisation, les OCM.
Je rejoins ceux de mes collègues qui se sont exprimés sur ce sujet à cette tribune : franchement, il n’est pas possible, eu égard à la valeur ajoutée qu’apporte le FISAC, à l’effet de levier qu’il permet, de demeurer muets et immobiles devant la réduction de ses crédits.
Nous en avons besoin. La valeur ajoutée, c’est-à-dire la plus-value apportée par ces crédits, est considérable ; il est d'ailleurs possible, monsieur le secrétaire d’État, de vérifier en permanence le rapport entre les crédits, au demeurant assez modestes, qui sont accordés, et les effets produits sur l’activité des commerces et des ateliers d’artisans.
Je vous demande, monsieur le secrétaire d’État, d’examiner cette question avec beaucoup d’attention. Il y va du développement de l’artisanat, qui est le premier employeur de France, mais aussi du développement de nos territoires, notamment ruraux.
Le second thème que j’aborderai concerne l’exportation.
Tout d’abord, je rappelle que les missions économiques n’existent plus et qu’elles ont été remplacées par UBIFRANCE.
Je me souviens, pour avoir participé par le passé à des déplacements de parlementaires dans certains pays, des volumineux rapports qui nous étaient fournis nous expliquant en détail ce qu’il fallait savoir sur le pays. Nous portions un intérêt poli à ces documents, qui, généralement, étaient oubliés dans la chambre d’hôtel, pour le seul bénéfice, peut-être, de la femme de chambre…
Mme Nathalie Goulet s’exclame.
Aujourd’hui, nous disposons de cette force de frappe qu’est UBIFRANCE. Pour avoir accompagné deux missions organisées par cette structure, l’une en Chine et l’autre au Brésil, je peux témoigner de la qualité des prestations qui sont proposées par UBIFRANCE et de l’efficacité des actions qui sont conduites.
Ce sont avant tout les petites entreprises – ne nous y trompons pas – qui profitent des services d’UBIFRANCE, et même parfois les très petites entreprises, venues prospecter un marché pour un produit, que ce soit un produit du terroir, tel qu’un vin, une technologie, un produit issu d’un atelier mécanique ou un produit lié à l’informatique.
La prise en charge est immédiate et rien n’est laissé au hasard. Les rendez-vous sont préparés. Le chef d’une petite entreprise se retrouve devant un interlocuteur selon un calendrier et un horaire préétablis. Le taux de satisfaction atteint 80 %. Pour ce qui concerne les recommandations qui ont un effet induit sur l’activité de l’entreprise, le taux est de 84 %.
Est-il permis de dire – de temps en temps, il est bon de se remonter le moral ! – que, en 2010, pour la première fois depuis longtemps, le nombre des exportateurs a augmenté, le solde est positif. Cette situation ne s’était pas produite depuis des années.
Bien sûr, cela ne s’est pas fait par hasard ; le savoir-faire et le travail des entreprises l’expliquent, mais il y a aussi des agents qui sont d’utiles relais.
Je souhaite donc, monsieur le secrétaire d’État, que ce message soit entendu : l’action menée est bonne, me semble-t-il ; les moyens accordés apparaissent – y compris au rapporteur spécial André Ferrand – suffisants ; mes chers collègues, c’est de l’argent public bien employé !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, faut-il rappeler que notre dernier excédent commercial remonte à 2002 ? Depuis lors, la dégradation est constante et, en 2011, nous devrions établir un nouveau record, avec un déficit de 75 milliards d’euros.
Dans son dernier rapport annuel, la Cour des comptes a analysé les facteurs expliquant cette situation : un taux de change euro-dollar défavorable, une compétitivité insuffisante de nos entreprises, une concentration trop importante de nos exportations autour de quelques filières et des « gros contrats » qui ne sont pas toujours rentables.
Trois années après la réforme d’UBIFRANCE, on constate que le succès des programmes d’accompagnement de cette structure est plus évalué à l’aune du nombre d’entreprises accompagnées ou de contacts réalisés qu’en fonction du lien entre l’entreprise suivie et l’intérêt pour l’économie française.
L’effet de cette politique du chiffre sur notre balance commerciale est d’ailleurs invisible. Corollaire de cette politique, les bureaux d’UBIFRANCE sont installés non pas là où il faudrait aider les entreprises à être présentes à long terme, mais là où des prestations peuvent être vendues rapidement.
En voulant vendre au maximum son expertise, UBIFRANCE communique plus sur ses services que sur l’intérêt des marchés : cette attitude n’aide pas les entreprises à avoir une démarche réfléchie sur leurs priorités à l’international.
Les prestations proposées par UBIFRANCE étant fortement subventionnées, elles sont destructrices pour les sociétés de conseil ou les chambres de commerce françaises à l’étranger, qui ne peuvent lutter contre cette distorsion des règles du marché.
Des régions entières du monde se trouvent dépossédées de toute structure dédiée à l’aide aux entreprises françaises, comme l’Europe balkanique, alors que les perspectives d’adhésion de certains pays de la zone à l’Union européenne ouvrent de formidables occasions, ou l’Afrique subsahélienne, qui bénéficie pourtant d’une croissance économique soutenue et d’un marché de plusieurs centaines de millions de consommateurs ! Comment inciter les entreprises françaises à se développer à l’exportation lorsque l’État se désengage de zones entières du monde ?
La séparation entre UBIFRANCE et la mission économique a supprimé toute possibilité de mêler l’analyse macroéconomique et l’analyse macroéconomique. Pourtant, cette synergie était très utile pour défendre nos intérêts lors de négociations commerciales et pour favoriser les analyses de long terme ; elle l’était aussi dans les pays où le rôle de l’État dans l’économie est décisif et où une intervention d’un service de l’ambassade avait, pour une PME, une signification.
Tandis que les grandes entreprises et les grands contrats ont encore droit aujourd'hui, ce qui est bien normal, aux services, bien souvent non tarifés, des ambassades et des missions économiques qui les aident à obtenir de gros contrats, les PME sont orientées directement vers UBIFRANCE, aux prestations payantes, et seulement dans les zones où des bureaux de cette structure sont présents.
Monsieur le secrétaire d'État, vous nous demandez de doter l’action n° 7, Développement international et compétitivité des territoires, de 120 millions d’euros, dont 80 millions d’euros pour UBIFRANCE.
Malgré les belles brochures que cet organisme édite, l’efficacité d’UBIFRANCE n’est pas prouvée. Nous ne pouvons nous passer d’une stratégie globale pour aider nos entreprises à acquérir la culture de l’expansion économique et à disposer de moyens financiers pour y parvenir, tout en favorisant l’orientation de l’épargne des Français vers le financement des entreprises plutôt que vers la spéculation sur la dette souveraine ou l’immobilier. C’est à cette condition que notre commerce extérieur pourra s’appuyer sur un socle élargi d’entreprises, comme chez nos voisins allemands, italiens ou autrichiens.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les crédits de la mission « Économie » marquent un net recul. Une fois encore, un amendement du Gouvernement a tendu à grever cette mission de plus de 12 millions d’euros.
Aucune véritable priorité ne semble se dégager, si ce n’est la nécessité de réconforter les agences de notations. Or cette mission contient des programmes essentiels, qui concernent aussi bien le développement des entreprises, des PME, de l’artisanat, des professions libérales et de l’emploi que l’industrie, la filière énergétique et le développement des télécommunications.
Monsieur le secrétaire d'État, ces domaines sont des secteurs clefs, fragilisés par la crise actuelle, qui a été provoquée par les marchés financiers, ces entités virtuelles opposées à la réalité productive et économique dont nous parlons ce matin. Comme l’a souligné M. le rapporteur spécial Christian Bourquin, comment pouvez-vous affirmer soutenir la croissance avec un tel budget ?
Ainsi, le programme emblématique « Développement des entreprises et de l’emploi » est en baisse de 7, 3 % par rapport à 2011 et connaît un reflux de 12 % par rapport à 2009. Ce programme est celui qui est le plus affecté par la politique d’austérité annoncée par le Gouvernement. Cela vient d’être démontré, la diminution de sa dotation pénalise particulièrement les moyens d’intervention de la mission pour le soutien aux entreprises et le développement de leur activité et de l’emploi, moyens qui sont en baisse de 25 %.
Pis, en cette période critique, vous accentuez la fragilité de certaines entreprises et territoires. Ainsi, et ce n’est qu’un exemple, les crédits du FISAC, dont nous avons longuement parlé ce matin, diminuent d’année en année, avec une baisse de 33 % en 2011 et de 36 % annoncée pour 2012. C’est l’offre commerciale et artisanale de proximité dans des zones rurales ou urbaines fragilisées qui est touchée. Vous prenez le risque de faire disparaître des emplois non délocalisables, qui irriguent pourtant notre territoire. La lutte contre le chômage, qui connaît des hausses record, devrait pourtant être la priorité du Gouvernement !
De même, la dotation en faveur des politiques industrielles diminue de 9 %. La politique industrielle promise par le Président de la République n’a jamais vu le jour. Au contraire, la spirale de la fermeture de sites, des délocalisations, de la précarisation des emplois et de la hausse du nombre de travailleurs pauvres n’a pas été enrayée. La désindustrialisation que nous vivons met en danger notre pays. Pour rester dans une actualité alarmante, tout le monde à Peugeot, monsieur le secrétaire d'État, se souvient du triste épisode de Gandrange.
Selon l’INSEE, pour le seul mois de septembre dernier, la production de l’ensemble de l’industrie a diminué de 2 %. Pourtant, M. Baroin se félicitait que le solde en matière d’emplois nets dans l’industrie était positif, pour la première fois en dix ans. C’était oublier que plus de 700 000 emplois salariés directs ont été supprimés pendant cette même période !
Nous espérions que ce budget serait l’occasion d’affirmer l’émergence d’une politique volontariste destinée à soutenir la filière industrielle dans son ensemble et à faire émerger une filière liée aux énergies nouvelles. Nous espérions que ce budget permettrait à la France de « demeurer une grande nation industrielle », et de « pérenniser l’emploi industriel sur le long terme », comme l’annonçait le Président de la République l’an dernier. Il n’en est rien, et c’est même visiblement le contraire qui se produit. Or l’État ne peut continuer à se désintéresser à ce point de son tissu productif. Nous refusons d’abdiquer face à ce qui nous est présenté comme une fatalité.
Les crédits en direction du développement et régulation des télécommunications, des postes et de la société de l’information sont en baisse de 4 %. Or, monsieur le secrétaire d'État, c’est aujourd'hui que le déploiement du haut et très haut débit est indispensable pour assurer l’installation et la pérennité des entreprises sur les territoires. Le Président de la République a annoncé, à l’issue des Assises des territoires ruraux, que son objectif était d’assurer la couverture du territoire national à très haut débit en 2025. Il sera bien sûr trop tard ! C’est aujourd’hui que le territoire économique se construit et que la fracture numérique se creuse.
Pourtant, le Fonds d’aménagement numérique du territoire, créé par la loi du 17 décembre 2009, n’est toujours pas alimenté, alors que tout le monde, à droite comme à gauche, s’est prononcé en faveur d’un financement pérenne de ce fonds. Monsieur le secrétaire d'État, quand et comment sera-t-il alimenté ? Taxer les opérateurs privés est, selon nous, incontournable. Cette vérité n’est pas dangereuse : c’est un impératif d’aménagement du territoire et un enjeu industriel pour notre pays.
Pour conclure, alors que le Gouvernement présente un projet de loi renforçant le droit des consommateurs, les crédits en faveur de leur protection économique et de leur sécurité sont en baisse de 1 %. Cette incohérence pourrait prêter à sourire si elle ne caractérisait pas le budget de la mission « Économie » et si elle n’était pas contradictoire avec la mission d’accompagnement qui doit être celle de l’État pour aider nos entreprises à traverser cette crise sans précédent.
Vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d'État, nous ne pouvons décemment pas voter ce projet de budget.
Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j’interviens traditionnellement pour parler de l’artisanat, mais, aujourd'hui, mon propos portera sur les crédits du programme 223 relatif au tourisme.
Je voudrais, à cet égard, rappeler le poids considérable du tourisme au sein de l’économie française.
La politique du tourisme est également soutenue dans d’autres programmes budgétaires, ainsi que par les collectivités locales. Avec mes collègues, nous nous félicitons, monsieur le secrétaire d'État, de pouvoir désormais disposer d’un document de politique transversale, tant réclamé, montrant que les crédits du tourisme atteignent au total près de 2 milliards d’euros pour l’année 2012.
Disposer d’un document horizontal qui récapitule l’ensemble des crédits consacrés au tourisme dans tous les budgets de l’État permettra, à l’évidence, une meilleure identification des acteurs et une meilleure orientation des actions stratégiques à mener en faveur du tourisme, pour une plus grande efficacité.
En effet, le tourisme est indéniablement un secteur clef pour l’économie et le rayonnement international de notre pays. Il l’est d’autant plus aujourd’hui, dans le contexte économique que nous connaissons.
Malgré de terribles contraintes budgétaires, le Gouvernement est bien conscient qu’il est nécessaire de maintenir une politique ambitieuse en faveur des secteurs qui sont les moteurs de notre économie, ceux qui sont les plus stratégiques pour la croissance et l’emploi. Il est toutefois nécessaire d’accentuer la coordination entre le niveau national et l’échelon local sur ce sujet. Vous l’avez d’ailleurs bien compris, monsieur le secrétaire d'État, puisque vous avez déjà signé des conventions avec les régions Île-de-France et Rhône-Alpes.
Il faut bien évidemment continuer dans cette voie pour définir une stratégie touristique plus efficace et de meilleure qualité.
En Alsace, nous réfléchissons à une réunion du comité régional du tourisme et des agences de développement touristique dans le cadre de nos travaux, dont la presse s’est largement fait l’écho, sur le Conseil d’Alsace, Avec Philippe Richert, j'espère que nous pourrons porter le Conseil d’Alsace sur les fonts baptismaux le 1er décembre prochain. Nous pourrons ultérieurement, si vous y agréez, monsieur le secrétaire d'État, signer à notre tour une convention avec l’État.
Cela a été dit, la France dispose depuis 2009 d’un opérateur unique, Atout France, chargé du développement et de la promotion de la « Destination France ». Je me réjouis que la dotation de cet opérateur pour 2012 reste à un niveau quasiment stable, avec 33, 3 millions d’euros, tandis que nos principaux concurrents européens ont diminué, depuis cette année, leurs dotations de manière importante, de 25 % pour l’Espagne et de 50 % pour l’Italie. Il est vrai que ces pays connaissent des difficultés, mais ils ont, contrairement à nous, toujours fait porter, de façon substantielle, leurs efforts sur le tourisme.
La modification du plafond des crédits de la mission « Économie » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2012 au titre de la mise en œuvre du plan d’économies supplémentaires d’un milliard d’euros, annoncé par le Premier ministre le 24 août dernier, n’aura que peu d’incidences sur la politique du tourisme poursuivie par le Gouvernement. En effet, les crédits nécessaires à la mobilisation des partenariats, qui sont de droit, n’ont pas été touchés.
Comme vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d'État, ce qui importe, c’est que 2 milliards d’euros soient mobilisés pour le tourisme en 2012, et tel est bien le cas.
Je voudrais maintenant aborder la question de l’immobilier touristique dans les stations du littoral et de montagne, qui datent le plus souvent des années soixante-dix. Nous sommes tous conscients qu’un mouvement massif de réhabilitation s’impose aujourd'hui. Les investissements en matière d’hébergement fléchissent depuis 2008, alors même que le secteur de l’hôtellerie et des résidences du tourisme nécessite un nouvel effort afin de procéder à la rénovation et à la montée en gamme des établissements, dans le cadre de la réforme du classement hôtelier et des nouvelles normes de sécurité et d’accessibilité.
Un groupe de travail a été mis en place en février dernier, sur votre initiative, monsieur le secrétaire d'État. Pouvez-vous d’ores et déjà nous dresser un bilan d’étape ?
Le risque que de nombreux hôtels de taille modeste, notamment en milieu rural, disparaissent du fait des exigences en matière de mise aux normes est réel. En effet, après les normes incendie, les normes d’accessibilité aux personnes handicapées sont, dans un grand nombre de cas, très difficilement réalisables par les petits hôtels. Qu’en est-il, monsieur le secrétaire d'État, des engagements qui avaient été pris pour assouplir la mise en œuvre de cette nouvelle réglementation ?
Je conclurai mon propos en rappelant que vous avez signé, en mars dernier, une charte pour l’amélioration de la qualité de l’accueil des touristes. On ne peut que se féliciter de cette initiative, qui tend à renforcer l’attractivité de notre offre.
Il est important de faire observer que, si la France reste la première destination touristique au monde, elle n’est qu’au troisième rang mondial derrière les États-Unis et l’Espagne en termes de recettes touristiques globales. Cela signifie qu’une bonne partie des 77 millions de touristes qui viennent en France ne fait que traverser notre pays pour se rendre chez nos voisins. Or la France ne peut naturellement pas devenir un pays de transit où les visiteurs ne séjourneraient pas suffisamment longtemps. Il faut agir sur ce plan : on ne fera jamais assez pour mieux accueillir les touristes en France.
Dans notre pays, le tourisme a bien résisté à la crise économique mondiale qui sévit depuis trois ans. Toutefois, le maintien de la place de la France comme première destination touristique mondiale suppose que le Gouvernement poursuive la politique ambitieuse et volontaire entreprise en la matière.
Monsieur le secrétaire d’État, c'est la raison pour laquelle les membres du groupe UMP et moi-même tenons aujourd'hui à vous renouveler leur confiance en votant les crédits réservés au tourisme pour l’année 2012.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention portera elle aussi sur le montant des crédits alloués au Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, le FISAC. Ce montant est source d’inquiétude depuis maintenant plusieurs années.
En effet, à chaque projet de loi de finances, le Gouvernement s’évertue à réduire les crédits alloués à ce fonds, malgré les objections des parlementaires, de gauche comme de droite.
Malheureusement, 2012 n’échappe pas à la tradition. Ainsi, pour la quatrième année consécutive, les crédits du FISAC enregistrent une baisse substantielle, de 36 %. Ils sont ainsi passés de 100 millions d’euros en 2009 à 78 millions en 2010, puis à 64 millions en 2011, avant d’atteindre, cette année, le triste record de 40, 9 millions d’euros.
Le calcul est simple : en quatre ans, les fonds alloués au FISAC auront enregistré une baisse vertigineuse de 54, 6 % !
Et encore, la situation aurait pu être bien pire l’année dernière, si les parlementaires ne s’étaient pas mobilisés pour que le budget initial de 43 millions d’euros soit abondé de 21 millions d’euros en crédits de paiement, et cela, je tiens à le rappeler, contre l’avis du Gouvernement.
Nous sommes nombreux, dans cet hémicycle, à déplorer cette situation. Le FISAC est un outil privilégié du maintien et du développement des activités sur les territoires, particulièrement dans les zones rurales ou urbaines fragiles. Dans la période de crise que nous traversons, il est impensable de réduire une nouvelle fois la capacité d’intervention du fonds, d’autant plus que, nous le savons tous, les crédits de ce dernier étaient déjà insuffisants les années passées, au vu des besoins de nos territoires.
Pourtant, le Gouvernement semble s’obstiner, année après année, à le raboter encore et encore. Les justifications sont nombreuses : on nous parle de budget contraint, de redressement nécessaire des comptes publics…
Ainsi, alors même que certaines injustices fiscales coûtent des milliards d’euros à la France et aux Français chaque année, le Gouvernement préfère économiser quelques millions sur des outils aussi utiles pour nos territoires que le FISAC !
C’est vrai, ma chère collègue.
Monsieur le secrétaire d’État, je sais que, pour votre part, vous préférez justifier cette diminution des crédits par une volonté de « recentrage » des activités du FISAC vers le soutien au commerce de proximité.
Lors de votre audition au Sénat, le 9 novembre dernier, vous indiquiez vouloir faire de l’artisanat « un des éléments majeurs de croissance et d’emploi » pour notre pays. Or, si vous baissez le budget du FISAC tout en le recentrant sur le commerce de proximité, cela se fera forcément et inévitablement au détriment des petites entreprises et de l’artisanat. Je suis de ceux qui s’interrogent sur la possibilité de faire mieux avec moins ! §
Pourtant, l’efficacité du FISAC n’est plus à prouver : les indicateurs de performance de la mission montrent que le taux de pérennité à trois ans des entreprises aidées est de 91 % ! J’ai donc du mal à comprendre votre logique, monsieur le secrétaire d'État.
Je tiens également à préciser que, au-delà du manque flagrant de moyens, le FISAC connaît aujourd’hui de graves dysfonctionnements, qui mettent en péril de très nombreuses entreprises, notamment dans le cadre des « démarches collectives territorialisées », les DCT, portées par les pays. On relève dans certains territoires, dont celui dont je suis l’élue, que le versement des crédits de l’État accuse plus de deux ans de retard, preuve s’il en est que nous sommes confrontés à un manque cruel de moyens ou, peut-être, de personnels pour traiter les dossiers.
Comme vous pouvez l’imaginer, de nombreux artisans et commerçants se retrouvent ainsi, à cause de ce retard, dans des situations dramatiques. En effet, après avoir reçu un avis favorable des comités de pilotage des DCT, où siègent les services de l’État, ils ont engagé des frais d’investissement importants, contracté parfois des emprunts, monté des plans de financement tenant compte de l’aide accordée. Or ils attendent toujours que l’État leur verse la part qu’il leur doit !
Mes chers collègues, le budget pour 2012 maltraite donc une nouvelle fois le FISAC. Notre collègue Michel Teston, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, tentera d’en limiter les dégâts en vous proposant d’adopter un amendement de la commission abondant le fonds de 9 millions d’euros.
Pour conclure, je tiens à rappeler que l’un des objectifs du FISAC est de répondre « aux menaces pesant sur l’existence de l’offre commerciale et artisanale de proximité dans les zones rurales ou urbaines fragilisées par les évolutions économiques et sociales ».
Or, aujourd’hui, nos territoires ruraux et périurbains traversent une crise profonde, tant économique et politique que sociale. Il serait donc plus que jamais nécessaire de les soutenir.
Le FISAC fait partie des outils qui le permettent.
Mme Renée Nicoux. Je déplore donc profondément qu’il soit sacrifié sur l’autel de la rigueur budgétaire, qui n’aura d’autre résultat que l’aggravation de la situation de l’emploi dans le commerce et l’artisanat.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la durée de mon intervention – quelques minutes, conformément au temps de parole qui m’a été accordé – sera proportionnelle à la portion congrue que le Gouvernement attribue à un secteur économique majeur pour la France : le programme 223 « Tourisme » est doté, dans le projet de loi de finances, de moins de 2, 5 % des crédits de la mission « Économie ».
Par rapport à l’année précédente, ce budget est en baisse de 12 % en crédits de paiement et de 18 % en autorisations d’engagement. En montant, environ 44 millions d’euros de crédits de paiement sont prévus pour le tourisme, sur 2 milliards d’euros pour l’ensemble de la mission « Économie ». À titre de comparaison, 44 millions d’euros correspondent au budget de certains départements pour l’entretien des routes !
Autant dire que ce budget n’est absolument pas à la hauteur des enjeux que représente le tourisme, qui constitue le poste excédentaire le plus élevé de la balance des paiements, avec un solde positif de près de 7 milliards d’euros, et totalise plus d’un million d’emplois non délocalisables ! Je regrette d’autant plus le mauvais traitement budgétaire du tourisme que celui-ci est, lui aussi, soumis aux aléas climatiques ou économiques – je pense notamment à la baisse du pouvoir d’achat – : pour la troisième année consécutive, le Gouvernement diminue de plus de 10 % les crédits consacrés au tourisme, à sa promotion internationale et à son développement.
C’est d’autant plus regrettable que la position de la France régresse dans le tourisme international en termes de recettes globales : nous ne sommes plus qu’au troisième rang, après les États-Unis et l’Espagne, et nous devons faire face à la montée en puissance de nouvelles destinations et aux efforts fournis par certains de nos concurrents directs.
Dans un récent rapport d’information du Sénat, daté de juin 2011, nos deux collègues UMP André Ferrand et Michel Bécot constatent d’ailleurs très justement qu’« il manque encore [en France] une “grande politique du tourisme” et les moyens nécessaires pour la mettre en œuvre ».
La loi de 2009 de développement et de modernisation des services touristiques n’aurait-elle donc eu comme objectif que de préparer ce désengagement de l’État ?
Présenté comme une « carte maîtresse », Atout France, l’opérateur unique chargé du développement et de la promotion de la destination France, voit sa dotation baisser de 4 % à la suite de l’examen du budget à l’Assemblée nationale, alors que ses missions avaient été renforcées et continuent à l’être.
Je souhaite, à cet égard, qu’un bilan de l’action d’Atout France puisse nous être présenté, après deux années de fonctionnement, pour que nous puissions également apprécier son rôle et l’adéquation de ses moyens avec les objectifs qui lui sont assignés.
J’insisterai sur deux points en particulier.
Le premier concerne la très coûteuse mise aux normes, en matière d’incendie et d’accessibilité, pour les petits établissements hôteliers, notamment dans les zones rurales.
Monsieur le secrétaire d’État, dans un rapport, le Contrôle général économique et financier, le CGEF, a alerté sur cette situation, sur laquelle je vous ai moi-même interpellé en avril dernier par un courrier resté sans réponse à ce jour.
Dans ce rapport, le CGEF révèle que les mesures sur la sécurité, couplées aux dispositions relatives à l’accessibilité aux handicapés des lieux recevant du public, applicables avant 2015 – mesures que nous approuvons par ailleurs – pourraient entraîner la disparition de 3 000 à 4 000 établissements familiaux en cinq ans, soit 30 % du parc hôtelier indépendant.
Certes, un arrêté du 26 octobre dernier rétablit la catégorie précédemment supprimée des très petits hôtels pouvant accueillir au maximum vingt personnes, pour lesquels certaines normes de sécurité, comme l’encloisonnement des escaliers, ne s’appliqueront pas ; ce texte offre également la possibilité de déposer un échéancier des mises en conformité. Toutefois, cela ne résoudra pas toutes les difficultés.
Plutôt que de baisser la TVA dans la restauration, mesure qui coûte 3 milliards d’euros par an aux recettes de l’État, il aurait été plus pertinent de prévoir un plan de soutien, ne serait-ce que de quelques millions d’euros par an, pour l’hôtellerie indépendante, de même d'ailleurs que pour les résidences de tourisme… Un tel plan aurait eu en outre une incidence positive sur le secteur du BTP et sur l’emploi.
J’en viens à mon second point.
J’évoquerai un dernier chiffre, attristant et alarmant : cette année, en France, trois millions de personnes supplémentaires ne sont pas parties en vacances, du fait de la crise et de la baisse du pouvoir d’achat. En réponse, le Gouvernement a réduit de plus de 16 % l’action n° 3 du programme « Tourisme », Politiques favorisant l’accès aux vacances, via l’ANCV et les chèques-vacances : le nombre prévisionnel de personnes bénéficiaires passerait ainsi de 300 000 à 240 000, ce qui bat en brèche la dimension sociale et familiale du tourisme et des loisirs.
Vous comprendrez donc que je sois déçu par le projet de budget du tourisme pour 2012 : un secteur aussi important en termes économiques, créateur d’emplois et pourvoyeur de devises pour notre balance commerciale très mal en point mériterait une politique plus ambitieuse et plus cohérente.
Privilégier les économies sur le court terme pour satisfaire les agences de notation aura des conséquences sur la santé de ce secteur essentiel pour la France.
En outre, à moyen terme, plusieurs milliers d’emplois sont menacés. Votre stratégie ne s’en soucie guère, pas plus qu’elle ne se préoccupe du service rendu, ni même des vertus économiques, sociales et culturelles du tourisme : c’est la raison pour laquelle nous voterons contre les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures dix.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures dix.