Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, si la France est une puissance moyenne à vocation universelle, c’est parce qu’elle est capable d’avoir une vision du monde qui dépasse ses propres intérêts. Notre aide au développement est là pour en témoigner.
Ce fut longtemps l’honneur de la France que d’être à la tête de la lutte contre le sous-développement, d’agir sans relâche pour l’égalité d’accès aux droits fondamentaux, à la vie, à la santé, à l’éducation, qu’on soit né à Paris, à Ziguinchor ou à Ndjamena.
C’est également l’intérêt des Français que de contribuer à l’avènement d’un monde plus sûr. La persistance du terrorisme, la résurgence de la piraterie, le retour des pandémies ont bien montré que le sous-développement constituait un terreau favorable à des menaces qui touchent les pays du Sud aussi bien que ceux du Nord et dont nul ne sera à l’abri.
Pourtant, les ambitions de la France en matière d’aide au développement ont significativement faibli.
Nous sommes fiers de déclarer à l’OCDE 10 milliards d’euros d’aide publique au développement, mais nous savons tous ici que ce chiffre ne correspond aucunement à la réalité des financements véritablement disponibles pour des projets de coopération sur le terrain au Tchad, au Mali ou au Niger. Je ne vous parlerai pas des centaines de millions d’euros que nous déclarerons au titre de l’accueil des réfugiés ou des étudiants étrangers en France, du loyer de la Maison de la francophonie ou des subventions à des territoires d’outre-mer français : tout cela est connu.
Prenons simplement l’exemple des prêts que nous octroyons à la Chine. Le Gouvernement nous assure que ceux-ci ne comportent plus de bonification et qu’ils contribuent à la défense des entreprises françaises, lesquelles devraient donc se redresser ! Voilà plusieurs centaines de millions d’euros qui sont déclarés au titre de l’aide publique au développement, alors qu’il ne s’agit ni d’une aide, ni d’un effort public, ni même de développement. C’est dire si nous mesurons notre générosité au moyen d’un thermomètre largement faussé !
Je crois que les autorités françaises, toutes majorités confondues, ont fini par croire elles-mêmes à ces chiffres, alors que, en réalité, depuis une dizaine d’années, nos moyens d’intervention en subventions dans les zones prioritaires de la coopération française – je veux parler de l’Afrique subsaharienne et des quatorze pays prioritaires – sont en diminution, comme l’a souligné Jean-Claude Peyronnet.
La réalité, c’est que notre coopération s’est éloignée, sans le dire, de son « cœur de métier », de l’Afrique subsaharienne et des secteurs traditionnels de l’éducation et de la santé. Entendons-nous bien : je me félicite de ce qu’elle se soit émancipée des pays qui composaient ce qu’on appelait le « champ », pour ne pas dire les ex-colonies. Il est important de tisser des partenariats durables avec de nouveaux pays émergents. L’Agence française de développement le fait avec professionnalisme, et à un coût budgétaire très limité.
Ce qui nous inquiète, c’est la diminution des moyens budgétaires pour intervenir sous forme de subventions dans des pays dont la capacité d’endettement est limitée, voire nulle.