Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Immigration, asile et intégration », en particulier son action 2, Garantie de l'exercice du droit d'asile, a pour objectif de garantir aux demandeurs d'asile un traitement optimal et humain de leur demande, ainsi qu'une bonne prise en charge en termes de conditions matérielles, d'accueil et d'accès aux soins pendant la durée d'instruction de leur dossier.
L'OFPRA, puis, en cas de recours, la CNDA, qui relève du programme « Conseil d'État et autres juridictions administratives », instruisent les demandes d'asile.
La France est, selon vous, monsieur le ministre, le deuxième pays destinataire de demandes d'asile, après les États-Unis. Cette réalité s'inscrit dans le droit-fil de la tradition d'accueil de la République et de la défense par notre pays des droits de l'homme partout dans le monde. C'est l'honneur de la France !
En 2010, ce sont plus de 52 000 demandes qui ont été enregistrées auprès de l'OFPRA, et les estimations pour 2011 sont de l'ordre de 60 000 demandes, ce qui représente une augmentation de plus de 14 %.
Sur le papier, le projet de budget pour 2012 semble répondre à cette croissance des demandes.
Le programme 303 concentre la majorité des crédits dévolus à la mission « Immigration, asile et intégration » avec 87, 5 % du total. Les autorisations d'engagement – 553 millions d'euros en 2012, contre 490 millions d'euros en 2011 – sont en augmentation de 12, 78 % et les crédits de paiement – 560 millions d'euros en 2012, contre 488 millions d'euros en 2011 – progressent de 14, 67 %. L'action 2 passe d'une dotation de 327, 75 millions d'euros en 2011 à 408, 91 millions d'euros en 2012, soit une hausse de 24, 76 %.
L'accueil des demandeurs d'asile voit aussi son enveloppe augmenter. Pour l'hébergement d'urgence, les crédits engagés en loi de finances initiale pour 2011 étaient de 40 millions d'euros ; ils passent à 90 millions d'euros. Il en va de même pour l'allocation temporaire d'attente, pour laquelle les crédits engagés l'an passé en loi de finances initiale se montaient seulement à 54 millions d'euros, contre près de 90 millions d'euros cette année.
Si cet effort peut être souligné, force est de constater que les crédits inscrits restent notoirement insuffisants pour apporter une réponse positive aux problèmes prioritaires que sont les délais trop longs de l'instruction des dossiers des demandeurs d'asile, qui varient de 130 à 150 jours à l'OFPRA et atteignent plus de deux ans s'il y a un recours auprès de la CNDA.
Les mesures prises lors des années précédentes, en particulier le recrutement d'agents supplémentaires, n'ont pas encore porté leurs fruits, en raison de l'augmentation parallèle du nombre de dossiers.
La CNDA est confrontée aux mêmes problèmes, le nombre de recours déposés auprès d'elle s'étant élevé à plus de 15 000 au cours du premier semestre 2011, en hausse de plus 10 % par rapport à la même période de 2010. Cette croissance des entrées a rapidement affecté les délais de jugement. Le délai prévisible moyen de jugement a dépassé quinze mois à la fin de 2009, contre un peu plus de dix mois à la fin de 2008.
Ces délais sont totalement inacceptables ! Laisser un demandeur d'asile aussi longtemps dans l'incertitude est inhumain et retarde son intégration dans la société française. En outre, monsieur le ministre, cela pèse aussi sur les finances publiques !
L'hébergement en CADA reste insuffisant. Un effort a, certes, été accompli ces dernières années puisque plus de 21 000 places sont disponibles dans les CADA en 2011, mais ce nombre reste malheureusement bien en deçà des besoins réels. Les hébergements d'urgence se multiplient, posant de graves problèmes financiers aux communes et départements concernés.
Quant à l'allocation temporaire d'attente, elle est sous-budgétisée, comme c'est le cas depuis plusieurs années. Les crédits prévus pour 2012 restent largement inférieurs à ceux qui ont été ajoutés en gestion au titre de l'exercice de 2011 : près de 90 millions d'euros sont inscrits au présent projet de loi de finances, alors que 151 millions d'euros devraient être consommés en 2011.
Monsieur le ministre, il faut croire que, chaque année, vous sous-estimez volontairement les dépenses puisque vous savez très bien que la dotation initiale sera très rapidement insuffisante. L'établissement d'un budget sincère suppose d'inscrire les crédits correspondant aux besoins prévisibles !
Dès lors, on ne peut qu'être scandalisé quand votre nouvelle réponse à ce douloureux problème est une remise en cause du droit d'asile : c'est un véritable recul, une régression au regard de l'humanisme.