Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite avant tout rappeler que l'agriculture a une vocation de production. Pour nourrir 7 milliards d'êtres humains aujourd'hui, et 9 milliards en 2050, il faut produire.
La France, avec 30 millions d'hectares de surface agricole utilisée, est bien placée en Europe pour jouer un rôle éminent. Remarquons que l'agriculture et l'agroalimentaire contribuent, à hauteur de 8 milliards d'euros, à améliorer le solde de notre balance commerciale.
Cependant, on ne continuera à produire en France que si l'agriculteur gagne sa vie, s'il n'est pas écrasé sous le poids des contraintes et des charges. Je salue donc la politique de baisse de charges mise en œuvre par le Gouvernement, sur l'initiative de M. le ministre Bruno Le Maire
Après ces propos liminaires, je souhaite évoquer trois points importants : la forêt, les assurances agricoles et la viticulture.
Premier sujet, la forêt fait l'objet du programme 149. Ses crédits sont en légère décrue de 2 %, à 362, 5 millions d'euros. N'en tirons cependant pas la conclusion que l'État abandonne la forêt, bien au contraire.
D'abord, une partie de la baisse correspond à une mesure de transfert de la subvention pour charge de service public de l'Inventaire forestier national, l'IFN, vers le programme 159 « Information géographique et cartographique », conséquence de sa fusion avec l'Institut géographique national, l'IGN.
Ensuite, le budget continue à être mobilisé pour faire face aux conséquences de la tempête Klaus du mois de janvier 2009. Les crédits du plan de restauration des chablis demeurent à un niveau élevé, 95 millions d'euros pour 2012.
Enfin, je me félicite de l'effort de l'État pour participer au redressement des finances de l'ONF dans le cadre du nouveau contrat d'objectifs et de moyens signé au mois de juillet dernier pour la période 2012-2016.
La dotation de l'ONF s'élève à 185, 4 millions d'euros, dont 46 millions d'euros de contribution exceptionnelle. Ses ressources seront également accrues par la création d'une contribution calculée à la surface aux frais de garderie de l'ONF versés par les communes forestières, prévue à l'article 48 du projet de loi de finances pour 2012, rattaché à la présente mission.
Deuxième sujet, le rythme de progression des assurances agricoles n'est pas rapide, en tout cas pas à la hauteur de nos attentes, exprimées lors de la discussion de la LMAP.
L'enveloppe budgétaire destinée à subventionner les contrats d'assurance a baissé, passant de 133 millions d'euros à 100 millions d'euros au total, soit de 33 millions d'euros à 25 millions d'euros au niveau du budget de l'État, l'Europe prenant en charge 75 % de ces sommes.
Cette situation nous amène à demander une réflexion plus globale sur les freins à l'assurance. Certes, celle-ci est subventionnée jusqu'à 65 %. Mais la combinaison d'une exigence de perte de 30 % pour déclencher l'assurance, fixée dans la réglementation européenne, et d'une franchise de 25 % minimum conduit l'agriculteur à penser légitimement que l'assurance n'apporte pas une garantie suffisante.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer si, dans le cadre de la réforme de la PAC, nous pourrons assouplir les règles relatives aux franchises et aux seuils de perte à partir desquels l'assurance subventionnée peut être déclenchée ?
Par ailleurs, pouvez-vous nous indiquer où en est la réflexion du Gouvernement sur la mise en place d'une réassurance publique, chère à notre collègue Jean-Paul Emorine, qui constituait l'un des engagements pris durant la discussion de la LMAP ?
Troisième sujet, la viticulture. Peu de crédits y sont spécifiquement consacrés dans le projet de budget pour 2012, même si on peut penser que l'exonération des charges sur le travail permanent sera susceptible de bénéficier aussi aux viticulteurs.
Actions de promotion, arrachage et restructuration de vignobles relèvent essentiellement de crédits européens, à hauteur de plus de 250 millions d'euros.
Je rappelle que la production de vin est essentielle au sein de la « ferme France ». En 2011, nous retrouvons d'ailleurs, devant l'Italie, la première place européenne, donc mondiale, grâce à une récolte estimée à 50 millions d'hectolitres. Avec 18 milliards d'euros de chiffre d'affaires et un excédent extérieur de 6 milliards d'euros, les vins et spiritueux français sont un maillon fort de l'agriculture.
La politique d'amélioration de la qualité commence à porter ses fruits, mais une menace pointe : la réforme de l'organisation commune de marché unique de 2008 a accouché d'une catastrophe dont nous n'avons pas encore réussi à nous débarrasser : la fin des droits de plantation.
Instaurés pour contingenter la production, limiter les surproductions, garantir la qualité, protéger les terroirs traditionnels de la viticulture et éviter l'industrialisation de la vigne, les droits de plantation sont voués à disparaître, au plus tôt en 2016, au plus tard en 2018.
Le 4 avril dernier, le Sénat avait organisé un grand colloque pour soutenir le maintien de ces droits de plantation, en présence de M. le ministre et de parlementaires européens nous ayant apporté leur concours.
Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ont appelé au rétablissement de ces droits. Aujourd'hui, quatorze États s'opposent à une telle suppression. Cette mobilisation n'a pas suffi à infléchir la position de la Commission européenne, qui, dans la nouvelle proposition de règlement portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole, après 2013, a maintenu la suppression des droits de plantation. Je le rappelle que les textes de la future PAC sont soumis à codécision, impliquant un accord du Parlement européen, qui nous soutient et s'oppose à la libéralisation des droits.
Monsieur le ministre, nous avons l'impression que nous faisons du surplace sur ce dossier depuis l'été. Où en est la bataille diplomatique à Bruxelles pour abroger la décision, sachant qu'il manque encore soixante-six voix, provenant d'au moins deux États membres différents, pour parvenir à une majorité qualifiée au Conseil ?
La commission de l'économie a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales ». Pour ma part, j'émets, à titre personnel, un avis favorable à leur adoption, ce qui n'étonnera personne.