Intervention de Charles Revet

Réunion du 2 décembre 2011 à 10h00
Loi de finances pour 2012 — Compte d'affectation spéciale : développement agricole et rural

Photo de Charles RevetCharles Revet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire a pris sa part de responsabilité dans la lutte contre les déficits. Son budget a, en effet, été élaboré dans le strict respect des plafonds de crédits arrêtés par le Parlement dans le cadre de la loi du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014. Il a également le mérite de tenir les engagements pris au cours des années précédentes. C'est notamment le cas des crédits dédiés aux mesures concourant au revenu des exploitants agricoles.

En effet, vous avez souhaité retenir, monsieur le ministre, un certain nombre de priorités pour 2012, en réponse, dans la plupart des cas, à une situation conjoncturelle particulièrement difficile.

Ces priorités répondent à la nécessité soit d'apporter des solutions à la situation économique dégradée de nombreuses filières, soit de renforcer la compétitivité de l'agriculture française.

J'évoquerai les plans stratégiques de développement des filières, la reconduction des compléments nationaux aux soutiens communautaires, avec le maintien d'une enveloppe constante pour les indemnités compensatoires de handicap naturel, les ICHN, ou les primes herbagères agro-environnementales, les PHAE, prorogées jusqu'en 2014, ou encore d'une politique en faveur d'un développement équilibré de la forêt.

L'installation des jeunes agriculteurs reste un axe important de ce budget, et il faut s'en féliciter. L'enveloppe budgétaire consacrée à la politique d'installation avait enregistré en 2009 une augmentation importante de 13, 3 %, pour accompagner la réforme des parcours à l'installation. Depuis lors, elle est reconduite à l'identique, et ce sera encore le cas pour 2012.

Il s'agit donc d'un budget qui permet de contribuer à la compétitivité de l'agriculture française, celle-ci passant par la maîtrise des coûts de production, la dotation au titre des charges patronales pour l'embauche de travailleurs occasionnels étant stabilisée.

Parallèlement, un allégement de charges de 210 millions d'euros pour le travail permanent est venu en complément, et il faut s'en réjouir. En effet, nos collègues députés ont adopté un amendement visant à mettre en œuvre un dispositif d'abaissement du coût du travail des salariés permanents dans l'agriculture. Nous le savons, l'emploi salarié permanent ne représente malheureusement que 15 % des emplois du secteur de la production agricole, et il a tendance à diminuer depuis quelques années.

Cette mesure vise à enrayer la précarisation des emplois agricoles et à favoriser l'embauche de salariés permanents. Nous vous remercions, monsieur le ministre, d'y avoir été favorable. Bien évidemment, ce dispositif d'exonération des cotisations doit être soumis à l'examen de la Commission européenne.

Une telle disposition marque une avancée dans la prise en compte de la problématique relative à l'emploi permanent, bien qu'elle ne permette pas de ramener le coût du travail en France aux niveaux observés dans d'autres pays de l'Union européenne.

En Allemagne, par exemple, le coût du travail n'est pas le même. Nous savons que les emplois agricoles y sont massivement occupés par des intérimaires étrangers, mis à disposition par des sociétés prestataires de service dont le siège est situé hors d'Allemagne. Même s'il existe une rotation des personnes, cette main-d'œuvre n'est pas occasionnelle, et fait partie intégrante du process de production. Les conséquences sont des coûts sensiblement plus faibles.

On assiste de plus en Allemagne à la prédominance d'installations modernes dans près de 85 % des fermes, permettant aux agriculteurs d'utiliser l'énergie créée dans le cadre de leurs propres productions agricoles. C'est ainsi qu'il existe aujourd'hui 4 000 installations de biogaz, pour une capacité totale de production d'énergie de 1 400 mégawatts. Au niveau européen, l'Allemagne se place en tête en matière de biogaz, avec une part de 50, 5 % de la production.

Le développement des installations de méthanisation dans ce pays, notamment pour l'élevage du porc, a bien entendu une incidence sur le prix de revient de la viande porcine et sur la compétitivité des ateliers de production porcine.

Dans le secteur du porc, l'ensemble des deux facteurs, coût du travail et développement de la méthanisation, crée pour notre pays une source de distorsion de concurrence qui ne nous est pas favorable, et nos élevages de porcs ont bien du mal à faire face.

Par ailleurs, la Commission européenne a annoncé les grandes lignes de la PAC pour 2013, à l'occasion de la présentation du cadre financier pluriannuel 2014-2020. Elle met en avant une convergence européenne des soutiens, une convergence nationale, un verdissement qui s'ajoute à la conditionnalité, ainsi que des mesures de renforcement du pouvoir de marché des agriculteurs et des mesures de gestion de marché, de crise et d'urgence.

La convergence européenne devra tenir compte des différences de coûts de production et de la parité du pouvoir d'achat entre États membres. Elle ne devra pas se traduire par une remise en cause profonde des économies agricoles des pays membres.

Au-delà des soutiens, il faudra aussi disposer des moyens de régulation à même de limiter les effets de la volatilité des marchés résultant de problèmes climatiques, sanitaires ou de marché, et permettre aux producteurs de tirer leur revenu de l'activité qu'ils exercent.

Enfin, les agriculteurs devront pouvoir disposer d'outils individuels de gestion de leurs risques.

Je souhaite maintenant évoquer les mesures prises en faveur de la pêche et de l'aquaculture. Ayant été rapporteur du volet « pêche et aquaculture » du projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche en 2010, il s'agit là d'un sujet qui me tient tout particulièrement à cœur.

Il est important de le rappeler, ce volet de la LMAP a constitué le complément indispensable de la concertation organisée dans le cadre des Assises de la pêche, qui a notamment permis à notre pays d'être le premier à présenter, à la fin de l'année 2009, des propositions pour une réforme ambitieuse de la politique commune des pêches en 2012. Bien entendu, tout le mérite vous en revient, monsieur le ministre.

Toutes les mesures du plan pour une pêche durable et responsable, annoncé au mois de janvier 2008, ont été engagées et leur mise en œuvre a bien progressé. Ce plan avait été annoncé dans le contexte d'une hausse du prix du gazole, mais allait au-delà de ce seul aspect économique.

Il visait en effet à apporter une réponse durable aux défis écologique, social et économique auxquels la pêche française est aujourd'hui confrontée.

Parmi ses mesures, on retiendra la réforme de l'organisation professionnelle, évolution attendue de tous depuis de nombreuses années et organisée dans le cadre de la LMAP. Les pêcheurs sont désormais représentés au niveau local par un comité régional des pêches maritimes et des élevages marins, directement élu par les marins et les chefs d'entreprises, et, dans les départements qui en ont manifesté le souhait, par un comité départemental.

J'évoquerai également l'apport d'un soutien financier exceptionnel à l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer, pour renforcer son expertise halieutique et favoriser les partenariats entre les scientifiques et les pêcheurs.

La LMAP a eu pour ambition de mettre en place une véritable coopération entre pêcheurs et scientifiques – vous savez que j'avais beaucoup insisté sur ce point – concernant l'évaluation des stocks, coopération déterminante pour la fixation des quotas de pêche.

Ainsi, le Comité de liaison scientifique et technique des pêches maritimes et de l'aquaculture, créé par la LMAP, a été installé au mois de juillet dernier et s'est réuni une seconde fois cet automne. Il est désormais le lieu de rencontre qui permet des échanges fructueux entre scientifiques et pêcheurs et la prise en compte de l'expertise propre à chacun. Ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu'il faudrait élargir la mission de ce comité à l'ensemble des zones économiques maritimes, au-delà du niveau européen, c'est-à-dire au niveau du globe ?

Des organismes internationaux d'expertise participent au dispositif, comme le Conseil international pour l'exploration de la mer, le CIEM, ou encore la Commission générale des pêches pour la Méditerranée, la CGPM, la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique, l'ICCAT, la Commission des pêches pour l'Atlantique Centre-Ouest, la WECAFC, ou l'Organisation des pêcheries du Nord-Ouest Atlantique, la NAFO.

S'agissant du secteur des élevages marins, la LMAP a créé les schémas régionaux de développement de l'aquaculture marine, dont l'objectif est de permettre d'identifier et de réserver les espaces propices au développement de cette activité. Ces schémas sont actuellement en cours d'élaboration. Les premiers devraient être adoptés à la fin de cette année. Pouvez-vous nous le confirmer, monsieur le ministre ? Combien sont déjà finalisés et dans quels délais l'ensemble des schémas sera-t-il établi ?

Le plan pour une pêche durable et responsable prévoyait aussi les contrats bleus, démarche très innovante dans la filière pêche, validée par la Commission européenne.

Compte tenu du grand intérêt de la démarche pour la filière, vous avez décidé, monsieur le ministre, de reconduire ces contrats jusqu'en 2013. Nous nous en félicitons. Ainsi, 630 navires se sont portés candidats.

Le bilan des mesures de la LMAP pour le secteur de la pêche et de l'aquaculture, déjà très positif, est encore en progression. En tant que rapporteur, mais aussi à titre personnel, je m'en réjouis.

Je vous poserai une dernière question, monsieur le ministre. L'an dernier, lors de l'examen de ce même budget, j'avais évoqué la question de l'allongement des périodes de pêche à la coquille Saint-Jacques, notamment pour Dieppe et Fécamp, que vous connaissez bien et qui sont directement concernés. Vous m'aviez indiqué que ce sujet faisait l'objet de discussions et que les pêcheurs devaient s'entendre sur ce sujet. Qu'en est-il aujourd'hui, monsieur le ministre ?

Je vous remercie des réponses que vous pourrez m'apporter et j'apporte évidemment, avec le groupe UMP, mon soutien au projet de budget que vous nous présentez.

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