Intervention de André Gattolin

Réunion du 23 novembre 2011 à 9h30
Loi de finances pour 2012 — Article 30 et participation de la france au budget de l'union européenne

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les instances européennes sont sur le point d’arrêter leur projet de budget pour l’année 2012.

À l’échelon de l’Union européenne, comme à celui des États membres, l’heure est décidément à l’austérité. Nous ne connaissons pas encore le niveau réel du budget 2011, mais nous savons qu’il sera à peine supérieur au budget de l’an passé.

Les discussions, à Bruxelles, vont en effet se solder par une augmentation d’environ 2 % du budget européen par rapport à l’année en cours, soit à peine de quoi compenser les effets de l’inflation, située au même niveau, selon les chiffres les plus récents d’Eurostat et de la Banque centrale européenne. Le problème est que, dans ce contexte, l’article 30 du projet de loi de finances pour 2012, que nous examinons, n’a pas beaucoup de sens.

En effet, il recouvre à la fois la ressource dite « TVA », soit la part de la TVA réservée au financement de l’Union européenne, et la ressource attribuée en fonction du revenu national brut de notre pays, c’est-à-dire deux types de recettes qui ne sont pas calculées de la même façon, ne renvoyant pas à la même réalité et ne reposant pas sur les mêmes assiettes.

En outre, la somme avancée est, selon toute vraisemblance, en décalage avec la réalité, puisque, au cours des vingt dernières années, jamais l’évaluation initiale du prélèvement sur recettes ne s’est révélée juste – elle fut tantôt supérieure, tantôt inférieure –, sauf à de très rares exceptions ou grâce à des « effets d’optique ».

À partir de là, je vois mal comment nous pourrions ne pas nous abstenir purement et simplement sur cet article.

À cet égard, je saisis l’occasion qui m’est donnée pour élargir le débat. Cette somme de 19 milliards d’euros représentant la contribution française au budget de l’Union européenne est tout à la fois trop faible et trop importante.

Elle est trop faible, parce que nous savons déjà que le budget de l’Union européenne, tel qu’il vient d’être adopté, ne suffira pas à son bon fonctionnement pour l’année 2012.

Nous savons aussi qu’il est trop largement déconnecté des objectifs qu’il est supposé atteindre.

Les discussions qui se terminent à Bruxelles rappellent tristement celles de l’an dernier, à l’issue desquelles les propositions de nos collègues parlementaires européens avaient été repoussées par les États membres. À l’époque, les gouvernements nationaux avaient refusé d’augmenter le budget communautaire de plus de 2, 9 % par rapport à 2010.

Le résultat est là : le Parlement européen a révélé très récemment, le 7 novembre dernier, que l’Union avait urgemment besoin de 550 millions d’euros supplémentaires pour pouvoir terminer l’année sans devoir couper dans des programmes aussi importants que le Fonds social européen, dont il est inutile ici de rappeler le rôle qu’il joue dans nos territoires, en particulier dans les plus en difficultés.

Pourtant, l’histoire se répète. Loin de retenir la leçon, nous reproduisons aujourd’hui exactement la même erreur. Avec un budget prévisionnel pratiquement stable en euros constants, nous serons, à la fin de l’année prochaine, loin du compte.

Dans leurs propositions, la Commission européenne et le Parlement européen tablaient, tous les deux, sur une augmentation du budget global proche de 5 %. Il s’agissait là d’une augmentation, certes importante, mais surtout cohérente compte tenu des compétences, en plein développement, de l’Union européenne.

Aussi, il est fort probable que, d’ici à la fin de l’exercice 2012, plusieurs centaines de millions d’euros, au moins, manqueront de nouveau au budget de l’Union pour remplir les missions que nous lui attribuons.

Mais cette somme est également trop importante dans la mesure où nul ne peut se satisfaire d’une situation dans laquelle le budget communautaire, théoriquement autonome des budgets nationaux, dépend à ce point des finances des États membres.

En effet, ce qu’on appelle les « ressources propres traditionnelles » de l’Union européenne ne représente, aujourd’hui, que 14 % de son budget global, contre 86 % pour les ressources apportées par les États membres, alors que ces dernières ne sont censées servir, initialement, qu’à d’éventuels rééquilibrages.

La situation qui en découle est quelque peu ubuesque, si je peux me permettre ce terme.

D’un côté, la Commission européenne, dans ses recommandations, demande aux États membres plus de rigueur budgétaire. De l’autre, ces mêmes États sont déjà contraints financièrement à plus d’austérité pour ne pas être déclassés par les marchés financiers.

Parallèlement, afin d’être en mesure de mener non seulement des politiques d’investissement pour l’avenir du continent, mais aussi des politiques de rééquilibrage et de cohésion économique et sociale au sein de l’Union, les institutions européennes réclament l’accroissement du budget fédéral.

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