Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 23 novembre 2011 à 15h00
Loi de finances pour 2012 — État a, amendements 121 50

Photo de Nicole BricqNicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances :

Cela s’explique par l’adoption, après l’article 4, d’un amendement du groupe socialiste-EELV, l’amendement n° I-121 rectifié, que nous avions analysé – les débats en séance publique l’attestent – comme un dispositif ciblé sur les LBO, et qui semble avoir en réalité une portée beaucoup plus large : il apparaît que, s’il était mis en œuvre, le rendement de l’impôt sur les sociétés serait majoré de près de 50 %.

Madame la ministre, nous avons souligné à plusieurs reprises que l’impôt sur les sociétés était mité soit par des niches, c'est-à-dire des dépenses fiscales, soit par des modalités de calcul. La somme de ces niches et de ces modalités de calcul est supérieure au produit de l’impôt sur les sociétés, qui est de l’ordre de 41 milliards d’euros. C’est tout de même assez extraordinaire : voilà un impôt dont le rendement est inférieur au montant des exonérations auxquelles il donne lieu !

Par cet amendement, nous avons donc, me semble-t-il, fait œuvre utile.

Je précise que cet amendement avait été rectifié en séance publique. J’avais en effet demandé à ses auteurs de ramener le rapport entre les capitaux propres et la dette financière, pour ce qui est des LBO, de 66 % à 50 %. Aussi aimerais-je savoir si vos services ministériels se sont fondés, pour réaliser l’évaluation, sur la version initiale de l’amendement ou sur sa version rectifiée. Pour la bonne information du Sénat, il serait intéressant de savoir quelle hypothèse a été retenue au moment d’effectuer ce chiffrage, que je n’ai aucune raison de contester, car je fais confiance à vos services.

Quoi qu’il en soit, l’intention des auteurs de l’amendement n’était pas de parvenir à un tel résultat, et je ne serais pas surprise que nos collègues qui composeront la commission mixte paritaire ou ceux de l'Assemblée nationale ne retiennent pas ce dispositif en l’état.

Même si ce chiffrage nous surprend – nous, mais aussi tous nos collègues –, il a une vertu : il met en lumière la complexité de l’impôt sur les sociétés et le jeu quelquefois très puissant de ses différentes modalités de calcul. D’où l’intérêt qu’il y aurait à ouvrir – et je sais que vous n’y êtes pas hostile, madame la ministre – le chantier de l’assiette de l’impôt sur les sociétés. Du reste, la commission des finances doit poursuivre ses travaux en la matière.

Il n’y a pas à s’inquiéter de l’effet optique de cette mesure sur le solde budgétaire de l’année 2012, car nous n’en sommes encore qu’à la première partie. Lorsque nous tirerons toutes les conséquences de nos votes à la fin de la deuxième partie – un budget s’envisage dans sa totalité –, étant entendu que nous rejetterons de nombreuses missions, il y aura des surprises encore plus importantes.

Je l’ai dit en préambule de cette discussion budgétaire, le propre d’un Sénat d’opposition est de s’opposer au Gouvernement. Nous n’avons pas voulu ici définir un projet, car nous n’en avions pas les moyens, et j’ai bien pris la précaution de le préciser à plusieurs reprises. En revanche, nous avons voulu montrer qu’il existait un chemin différent.

On peut s’amuser à faire ce que le président de la commission des finances appelle un travail de greffier ou de notaire, mais, si vous voulez bien me pardonner une expression un peu triviale, madame la ministre, ce ne sont pas forcément, selon qu’on emprunte votre chemin ou le nôtre, les mêmes qui paient !

Si l’on écarte la surprise dont j’ai fait état, nous avons amélioré le solde budgétaire d’une dizaine de milliards d’euros – vous ne pouvez plus nous reprocher de ne pas nous soucier des déficits ! –, en revenant notamment sur les dispositifs issus de la loi TEPA et sur la réforme de la fiscalité du patrimoine.

Par ailleurs, nous avons amélioré le rendement de l’impôt sur les sociétés de 3 milliards d’euros environ, ce qui constitue un premier pas.

Les votes du Sénat sur la première partie auront permis de montrer que la majorité sénatoriale n’a pas l’intention de creuser les déficits. Voilà qui devrait nous dispenser à l’avenir de polémiquer sur ce sujet, un sujet qui concerne tous les agents économiques, tous les Français, toutes les options politiques, du moins toutes celles qui se reconnaissent dans la République.

Sous le bénéfice de ces explications, la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° I-217, qui retranscrit fidèlement les votes du Sénat lors de l’examen de la première partie.

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