Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, dans le projet de loi de finances pour 2012, les crédits de la mission « Ville et logement » s’élèvent à 7, 719 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 7, 595 milliards d'euros en crédits de paiement.
Cette mission, la dixième plus importante du budget de l’État, présente trois particularités.
Tout d'abord, elle est constituée à 99 % de dépenses d’intervention, dont l’évolution est donc immédiatement ressentie, sur le terrain, par les ménages, les entreprises, les associations et les collectivités.
Ensuite, le montant des dépenses budgétaires de la mission est presque deux fois moindre que celui des dépenses fiscales qui lui sont rattachées. La disparition du dispositif Scellier, que l’Assemblée nationale a entérinée, n’interviendra pas avant un an, et les dépenses générationnelles perdureront. Si l’on met de côté les taux réduits de TVA, les dépenses fiscales rattachées, dont l’augmentation a été rapide et constante depuis 2007, n’ont pas toutes la même efficacité au regard des objectifs de la mission : certaines ont favorisé la hausse des prix du foncier et du logement.
Enfin, nous ne disposons que d’une faible marge de manœuvre sur les dépenses budgétaires que nous examinons, puisque plus des deux tiers des crédits de la mission sont destinés à financer les aides personnelles au logement, les APL. Celles-ci, qui sont affectées de façon mécanique, constituent un indicateur de la baisse des revenus des ménages et de la montée de la précarité du fait de la crise.
Malheureusement, le Gouvernement a répondu à cette situation en faisant adopter par l’Assemblée nationale, sous la forme d’un article non rattaché, une réduction de 88 millions d’euros des crédits affectés aux APL, via une limitation à 1 % de la revalorisation de leur barème. Cette dernière est inférieure à celle que prévoyait le dispositif traditionnel, qui consistait en une indexation sur l’évolution de l’indice de référence des loyers.
Malgré tout, la hausse du montant des crédits affectés aux APL entraîne l’augmentation des crédits de la mission. Toutefois – il ne faut pas s’y tromper –, les crédits des autres actions stagnent ou diminuent, alors que cette mission devrait constituer une priorité, dans la mesure où elle concerne le premier poste du budget des ménages. Par ailleurs, les choix opérés sont irréalistes : la mission est sous-budgétisée, à un niveau inférieur aux montants prévus en loi de finances initiale, alors même que ceux-ci se sont révélés insuffisants et ont donc dû être abondés en cours d’année.
J’en viens maintenant aux points principaux des quatre programmes de la mission. Trois d’entre eux concernent la politique du logement ; le quatrième traite de la politique de la ville.
Le programme 177, « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables », représente 1, 2 milliard d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Le montant prévu dans la loi de finances initiale pour 2011 est donc reconduit.
Voilà un parfait exemple de l’irréalisme que je viens de souligner. En effet, ce programme était manifestement sous-budgété : depuis plusieurs années, les dotations initiales doivent être abondées en cours d’année par des décrets d’avance et des lois de finances rectificatives.
Face au mécontentement des associations, le Premier ministre a annoncé, le 26 septembre dernier, que le projet de loi de finances rectificative qui sera examiné dans quelques jours prévoirait une rallonge de 75 millions d’euros pour l’hébergement et l’accès au logement. L’annonce est belle mais, si une partie de cette somme complétera les crédits de l’année 2011, l’autre ne sera allouée qu’en 2012. Pourquoi ne pas inclure directement dans le projet de loi de finances pour 2012 les sommes inscrites dans le prochain projet de loi de finances rectificative pour 2011 mais dont le versement n’interviendra qu’en 2012 ?
Les associations agissant dans le domaine de l’hébergement et de la réinsertion sociale se trouvent dans une situation d’insécurité financière, que la politique du « logement d’abord » ne fait qu’accroître. Lors du dernier conseil des ministres, vous avez déclaré, monsieur le ministre, que votre stratégie était « partagée avec les associations ». Pourtant, le 10 novembre dernier, leurs responsables ont manifesté devant le Sénat pour clamer leur mécontentement, affirmer leur attachement à « un toit pour toutes et tous » et dénoncer les conséquences d’une politique qui jette les personnes sans domicile dans la rue, dans des campements indignes ou aux urgences hospitalières.
Concrètement, votre politique du « logement d’abord » consiste à remplacer les crédits destinés à l’hébergement d’urgence par des sommes consacrées à la construction de logements qui n’existent pas encore.