En effet, les crédits du programme 147, « Politique de la ville et Grand Paris », baissent de plus de 14 % en autorisations d’engagement et de plus de 12 % en crédits de paiement. Ainsi, en trois ans, ils auront diminué d’un tiers.
Ce recul est inacceptable quand on sait les difficultés que certains de nos concitoyens éprouvent dans leur vie quotidienne. Le dernier rapport de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles le montre, chiffres à l’appui : les habitants des quartiers prioritaires s’appauvrissent, l’écart se creuse avec les autres territoires de la ville en matière de revenus, d’emploi et de qualifications professionnelles. Songez que, dans les deux cents quartiers classés « les plus difficiles », le taux de chômage des jeunes dépasse 40 % !
L’écart se creuse aussi en matière de santé : des maladies infectieuses qu’on croyait éradiquées – je pense en particulier à la tuberculose – réapparaissent dans certains quartiers. À Clichy-sous-Bois, par exemple, le taux d’incidence de la tuberculose est actuellement trente fois plus élevé que la moyenne nationale. Cette maladie, excellent marqueur de pauvreté, recule peut-être à l’échelle du territoire, mais elle réapparaît dans les zones les plus pauvres, avec des chiffres – est-ce un hasard ? – comparables à ceux des pays africains.
Dans les quartiers populaires, on hésite plus qu’ailleurs à se soigner, par manque de moyens et de médecins. L’écart se creuse, encore, dans les pratiques de loisirs, l’accès à la culture et, finalement, les valeurs mêmes auxquelles on adhère. Mes chers collègues, je vous invite à lire à cet égard l’enquête intitulée Banlieue de la République, que Gilles Kepel et ses collaborateurs viennent de publier grâce à l’Institut Montaigne. Il y est montré que les quartiers pauvres sont encore « mis au ban », c'est-à-dire à l’extérieur, et que nous vivons dans une société de plus en plus riche, mais où les pauvres sont toujours plus nombreux et encore « relégués » dans des territoires de la ville où, quoi que l’on en dise, les politiques publiques n’atteignent pas encore les objectifs qu’elles se fixent.
La baisse des crédits du programme « Politique de la ville et Grand Paris » est donc non seulement injuste, mais également irresponsable, car ce que nous ne faisons pas aujourd’hui, nous aurons à le faire demain, et cela coûtera beaucoup plus cher.
Monsieur le ministre, vous nous avez dit que vous étiez parvenu à « limiter la casse ». Je crains que ce ne soit pas suffisant, compte tenu des coups de rabot antérieurs, même si vous avez exprimé votre volonté de rendre les communes prioritaires.
Je sais gré à M. le Premier ministre d’avoir rétabli l’an passé un portefeuille ministériel de plein exercice pour la ville. Toutefois, je suis inquiet, s’ils venaient à être confirmés, des propos tenus par M. le ministre de l’intérieur, lequel propose de fondre les ministères de la ville et de l’intérieur. Nous serions alors à contre-courant de ce qu’il faut faire pour redonner espoir aux villes de banlieue et, surtout, à leurs habitants !