Intervention de Isabelle Pasquet

Réunion du 8 novembre 2011 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2012 — Article 1er

Photo de Isabelle PasquetIsabelle Pasquet :

Chaque année, le vote de l’article 1er – vote qui consiste à approuver rétrospectivement le tableau d’équilibre de l’année précédente – nous donne l’occasion de souligner que le projet de loi de financement de la sécurité sociale initial – en l’occurrence celui de 2010 – était totalement inadapté.

C’est un exercice dont nous pourrions nous passer si à l’avenir le Gouvernement décidait tout à la fois de présenter des projets de loi de financement sincères et de prendre les mesures nécessaires au rééquilibrage pérenne et durable des comptes sociaux. Hélas ! nous en sommes loin, et les prévisions annoncées hier ne changent rien !

Personne ne peut se satisfaire du fait qu’en 2010 le déficit du régime général se soit élevé à 23, 9 milliards d’euros, soit une hausse de 3, 9 milliards d’euros par rapport à 2010, et cela alors même que le Gouvernement avait entrepris sa politique de réduction des dépenses sociales.

Cela témoigne d’une réalité : la réduction des dépenses, même si elle constitue un bon élément comptable de réduction des déficits, est loin d’être suffisante pour parvenir à l’équilibre tout en étant un mauvais outil au regard des besoins des populations.

Nous n’avons de cesse de le dire, le retour à l’équilibre des comptes publics comme des comptes sociaux repose d’abord et avant tout sur l’emploi : pour les comptes publics, car l’emploi fonde le paiement des impôts et la consommation des ménages ; pour les comptes sociaux, car l’augmentation du nombre de salariés engendre mécaniquement une augmentation de la masse des cotisations sociales, salariales comme patronales.

Nous le savions déjà, mais nous sommes confortés par la lecture du rapport de l’Assemblée nationale : « Initialement évaluée à moins 0, 4 %, l’évolution de la masse salariale s’est finalement révélée positive (plus 2, 0 %), ce qui se traduit mécaniquement par plus de 5 milliards d’euros de recettes supplémentaires ». Preuve est faite que les politiques qui conduisent à la rigueur sociale et salariale nuisent considérablement à moyen terme aux comptes sociaux puisqu’elles ont pour effet de les tarir.

Cette année 2010, que nous sommes appelés à examiner de manière rétrospective, devrait donc servir de boussole au Gouvernement : vous devriez, madame la secrétaire d'État, tirer les conséquences de cet article 1er et prendre dès aujourd’hui les mesures nécessaires pour renforcer les salaires et sécuriser l’emploi, notamment dans les grandes entreprises, qui continuent de licencier tout en percevant d’importants bénéfices, parfois alors même qu’elles reçoivent des deniers publics, notamment sous la forme d’exonérations de cotisations sociales.

On sait aujourd’hui qu’il manque d’ores et déjà 1, 5 milliard d’euros aux comptes sociaux par rapport au projet de loi de financement de la sécurité sociale tel que vous l’aviez déposé en raison de la révision du taux de croissance.

Le groupe CRC, vous fait la proposition suivante : plutôt que de réduire la dépense sociale, en réduisant par exemple l’ONDAM, qui est déjà notoirement insuffisant, pourquoi ne pas prévoir une hausse automatique de tous les salaires ? Cela présenterait l’avantage de générer des rentrées tant fiscales que sociales et vaudrait mieux que la poursuite de votre politique comptable qui continue depuis des années à faire la preuve de son inefficacité.

D’ailleurs, cet article 1er en témoigne puisque, si nous sommes appelés à nous réjouir d’un gain inattendu de 5 milliards d’euros, nous ne pouvons que regretter le creusement du déficit de la sécurité sociale : il était de 21, 7 milliards d’euros en 2009, de 9, 7 milliards d’euros en 2008, de 9, 1 milliards d’euros en 2007, de 7, 8 milliards d’euros en 2006. En trois ans, il a donc presque triplé !

Malgré l’évolution de la masse salariale, qui a permis une hausse toute modérée des recettes, nous ne voterons pas cet article : le voter, ce serait accepter de maintenir une situation de déficit qui pourrait être résorbée avec une autre politique.

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