L’exercice 2010 a atteint un déficit record qui entraîne avec lui celui de toutes les branches de la sécurité sociale et celui du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV.
Les années passent, les lois de financement de la sécurité sociale se succèdent et nous n’avons de cesse de le répéter : nous avons besoin de financements nouveaux pour préserver ce formidable acquis que sont la sécurité sociale, la solidarité, afin de satisfaire nos besoins de santé face à l’allongement de la vie et aux progrès de la médecine.
Certes, la crise économique n’a pas épargné notre pays, mais, si la sécurité sociale avait affronté cette dernière sans le handicap sévère d’un déficit structurel de 10 milliards d'euros, elle aurait pu y faire face dans des conditions différentes.
Rappelons que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 devait permettre le retour à l’équilibre en 2008. Nous en sommes bien loin ! Bien pis, les déficits structurels se sont accrus, au point d’atteindre un niveau inégalé en 2010. Cela a été rappelé par le rapporteur général de la commission des affaires sociales et c’est ce qu’a souligné le rapport de la Cour des comptes.
Madame la secrétaire d'État, vous devez assumer le fait que c’est la série de choix du Gouvernement qui est davantage responsable de ce trou abyssal que la crise elle-même. La chute historique de 2010 est tout d’abord marquée par une absence de ressources ; c’est là le mal évident de votre politique.
Je tiens à revenir sur les exonérations de cotisations sociales que vous offrez en cadeau aux entreprises et qui privent massivement la sécurité sociale de ressources.
Certes, le sujet est complexe et il n’est pas question de supprimer ces exonérations sans réflexion approfondie préalable. Nous savons que, pour les salaires inférieurs à 1, 6 SMIC – cela concerne environ 800 000 de nos concitoyens –, l’arrêt brutal de cette mesure entraînerait probablement la mise au chômage de 200 000 personnes.
Pour autant, ces exonérations sont une trappe à pauvreté et n’ont pas de dynamique économique. Qui pis est, elles nous privent de possibles exonérations de cotisations sociales sur des emplois à valeur ajoutée, qui permettent la recherche, l’innovation et créent, eux, cette dynamique économique.
Pourtant, madame la secrétaire d'État, alors que le rapporteur général de l'Assemblée nationale a ouvert ce débat avec le soutien des députés de l’opposition et que les sénateurs de l’opposition hier, sénateurs de la majorité aujourd'hui le réclament, le Gouvernement refuse toute discussion. Cette attitude est très grave.
L’aggravation du déficit de plus de 13 milliards d'euros par rapport au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 s’explique aussi par des pertes de recettes dues pour l’essentiel – 8 milliards d'euros – à la très forte révision à la baisse de la masse salariale du secteur privé.
Ce retournement brutal s’est traduit par une baisse de 0, 2 point des cotisations et contributions sur les revenus d’activité. Quant aux prélèvements sociaux sur les revenus du capital, composés pour les trois quarts de la CSG, ils ont connu une forte chute, estimée à 14 %, soit une perte de recettes d’un peu plus de 2 milliards d'euros.
Depuis huit ans, le Gouvernement stigmatise les assurés, notamment les malades en les faisant davantage payer. Il s’exerce à des colmatages qui ne cessent de creuser les inégalités face à la santé. Les seules solutions apportées, les seules pistes évoquées s’attaquent à diminuer les dépenses, alors que, plus que jamais, le trou est dû à une diminution des rentrées. Pour le Gouvernement, diminuer les dépenses consiste à s’attaquer aux plus précaires d’entre nous en creusant les inégalités face à la santé, en déremboursant les médicaments, en multipliant les franchises médicales et en opérant un transfert de charges sur le dos des mutuelles.
Que deviennent les niches sociales ? Une fois de plus, le Gouvernement est parcimonieux sur ce dossier !
Le modèle qui a fait la prospérité de notre système de sécurité sociale n’est plus aujourd’hui adapté aux lourds défis des décennies futures. Notre système prend l’eau, la protection sociale protège de moins en moins d’individus et de plus en plus mal.
Nous le constatons, les comptes de 2010 traduisent une situation tendue et difficile, sans réflexion sur l’avenir, et donnent le sentiment que le Gouvernement navigue à vue. Les annonces qu’a faites M. le Premier ministre hier soir ne sont pas pour nous rassurer : aucune projection précise ne nous est proposée. Aucune mesure de fond n’est prévue : il s’agit d’une batterie de mesures de poche, de « mesurettes » – osons le mot ! –, destinées à contenir une situation financière explosive.
Le retard pris dans l’engagement de réformes structurelles, dont chacun sait depuis longtemps qu’elles sont absolument indispensables, pourrait être payé fort cher dans le contexte de récession actuelle.
Nous n’acceptons pas la démarche du Gouvernement. Nous n’acceptons pas les dispositions relatives à l’exercice 2010. C’est pourquoi, comme l’a indiqué si justement le rapporteur général de la commission des affaires sociales, nous voterons contre cet article 2 et, de façon plus générale, contre la première partie de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.