Intervention de Marc Daunis

Réunion du 5 juillet 2010 à 14h30
Réforme des collectivités territoriales — Article 35

Photo de Marc DaunisMarc Daunis :

J’en veux pour preuve l’autonomie fiscale des régions et leur capacité à s’administrer librement qui ont été réduites à epsilon.

La discussion de l’article 35 constitue, sinon le moment clef, comme on a pu le dire, au moins un point extrêmement important de nos débats.

C'est pourquoi je vous invite, après Pierre-Yves Collombat, à vous demander si la question de la compétence générale se pose vraiment aujourd'hui avec une acuité particulière, si elle constitue un élément nodal de dysfonctionnement, au point d’exiger impérieusement une décision rapide et une clarification immédiate.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, soyons sérieux ! Comme Gérard Collomb l’a souligné, cet article n’est pas essentiel pour vous. Il ne s’agit que d’un problème technique de clarification des compétences. Du reste, vous supprimez la clause de compétence générale sans pour autant préciser le rôle respectif des uns et des autres !

Il est évident que, si votre propos – et je ne vous fais pas ici un procès d’intention – est avant tout d’ôter aux régions, aux départements et aux autres collectivités cette clause de compétence générale, le débat prend une tout autre tournure !

C'est pourquoi je dois évoquer non seulement l’article 39 de la Constitution, auquel notre collègue Hervé Maurey a fait référence tout à l’heure, sans doute à juste titre, mais aussi son article 72, qui, à travers ce que l’on a appelé la subsidiarité, établit l’importance de la clause de compétence générale pour l’administration des collectivités territoriales. Permettez-moi de le souligner, cet article 35 du projet de loi, s’il était adopté, contredirait le vote que nous avons émis naguère sur l’article 72 de la Constitution.

Poursuivons notre raisonnement. Pourquoi prenez-vous de tels risques ? C’est là que réside le véritable archaïsme ! Votre logique peut être ramenée à une équation extrêmement simple : « désengagement de l’État + asphyxie financière organisée + fin de la compétence générale = impossibilité pour toute une partie de notre territoire de continuer à s’organiser et à s’administrer librement ».

Dès lors, et je le dis avec beaucoup de gravité, la porte est ouverte à la privatisation de tout un pan de l’activité publique. Cette évolution relève non pas d’un choix technique de gestion, mais d’une obligation. C’est l’ère des PPP, les partenariats publics privés, mais aussi de l’externalisation et de l’impossibilité pour les collectivités de jouer leur rôle de solidarité ! On s’en remet au secteur privé pour l’exercice de compétences essentielles qui ressortissent selon nous à l’initiative publique, à savoir le développement des territoires et la solidarité entre nos concitoyens.

En conclusion, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, au moment de l’examen de cet article, nous vous demandons d’être modernes, d’avoir une conception des collectivités territoriales et de la décentralisation qui soit tournée vers l’avenir, au lieu de vous complaire dans de petits calculs frileux et archaïques et de vous replier sur un État qui ne sera jamais plus tel que vous le rêvez.

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