Comme nous le faisons régulièrement depuis plusieurs années, nous proposons ici de supprimer progressivement les exonérations de cotisations générales qui ont fait la preuve de leur inefficacité en termes d’emploi et qui pèsent sur les salaires comme sur la protection sociale.
Permettez-moi, mes chers collègues, de placer deux éléments en perspective : d’une part, les exonérations de cotisations sociales, au sein desquelles les exonérations générales pèsent pour beaucoup, représentaient, en 2004, 17 milliards d’euros, soit près de 1, 2 % du PIB ; d’autre part, cette année, alors que la masse salariale prévue pour 2012 est inférieure à celle de 2004, les seules exonérations générales, dites « Fillon », représentent 20, 1 milliards d’euros, soit plus qu’en 2004.
Le mécanisme qui explique cette évolution, nous ne le connaissons que trop : pour la Cour des comptes, il s’agit d’une trappe à bas salaires. Elle n’est d’ailleurs pas la seule à développer cette analyse : une étude de la revue Économie et statistique, éditée par l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, publiée en août 2010, qualifiait de « très incertains » les résultats des exonérations « Fillon » accordées en 2003, précisant même : « le risque de voir se créer des “ trappes à bas salaire ” est par ailleurs souligné, les exonérations poussant, par exemple, les employeurs à baisser les salaires d’embauche et à réduire leur progression ». Nous faisons nôtre ce constat, comme vous vous en doutez !
Or ces exonérations de cotisations sociales constituent le poste le plus important de toutes les politiques de l’emploi : c’est même, en réalité, la seule politique que propose aujourd’hui le Gouvernement en matière d’emploi.
Pour lui, comme pour le patronat, l’importance des salaires et des cotisations sociales aurait pour effet, en France, de « plomber » le coût du travail, rendant ainsi moins compétitif notre pays. Nous contestons cette analyse, car nous constatons que la part des salaires dans la valeur ajoutée, charges incluses, ne cesse de diminuer.
Les salariés de Fralib, à Gémenos, le racontent parfaitement : ils font la démonstration que leur grille de salaire a subi, en vingt ans, une perte de l’ordre de 40 % par rapport au SMIC. Ainsi, un salarié embauché aujourd’hui gagne 3 % de plus que SMIC, alors que, s’il avait été embauché il y a vingt ans, il aurait gagné 46 % de plus que le SMIC. Sur la même période, les gains de productivité des salariés de Fralib ont, eux, connu une augmentation de plus de 50 % ! Cette évolution n’empêche pas les actionnaires de fermer l’usine, la considérant comme trop peu rentable…
Cet exemple témoigne de ce que nous ne cessons de dénoncer : ce ne sont pas les salaires qui plombent l’emploi, mais les actionnaires ! Pourtant, les salariés paient le prix de ces exonérations dans la mesure où, pour en conserver le bénéfice, les employeurs les contraignent à accepter des temps partiels, des boulots précaires et des salaires de misère.
En revanche, aucune mesure n’est prise pour encadrer le partager des dividendes. Il y aurait pourtant une mesure simple – et de bon sens ! – à adopter : aucune exonération de cotisations sociales pour les entreprises qui versent des dividendes aux actionnaires ; nous y reviendrons certainement à l’occasion de l’examen de l’article 22.
Cet amendement tend donc à supprimer progressivement ces exonérations, compte tenu de leurs effets négatifs sur l’emploi, la rémunération et l’accès à la formation professionnelle.