Avant de donner l’avis de la commission, je souhaiterais faire une mise au point, dans un souci de cohérence et d’honnêteté intellectuelle.
J’ai évoqué hier l’étude de l’Inspection générale des finances pour souligner la mauvaise note – un score de 1 – accordée aux exonérations sur les heures supplémentaires. En contrepartie, je dois dire aujourd’hui que cette étude attribue à la mesure d’allégement de charges sur les bas salaires la meilleure note, avec un score de 3.
Cela ne nous empêche nullement de reconsidérer le problème, de l’analyser dans le détail, selon le type des entreprises concernées, et d’éviter à tout prix les effets d’aubaine. La commission a exprimé le souhait que ces allégements, qui représentent une masse financière de 21, 8 milliards d’euros, qui concernent une dizaine de millions de salariés et plus de 1, 5 million d’employeurs, soient mieux ciblés.
J’en viens maintenant aux cinq amendements que nous examinons.
L’amendement n° 63 rectifié bis, défendu par Mme Isabelle Pasquet, a pour objet de prévoir l’extinction progressive du mécanisme des allégements généraux de cotisations sociales sur les bas salaires. C’est donc le plus radical des amendements qui nous sont proposés.
Une étude d’impact nous paraît absolument nécessaire avant de voter une telle mesure, de façon à déterminer ses effets sur l’emploi, en particulier dans la période de crise et de hausse du chômage que nous traversons. La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
L’amendement n° 303 rectifié bis, présenté par M. Gilbert Barbier, vise à figer le SMIC à son niveau du 1er janvier 2011 pour le calcul des allégements généraux. La borne de 1, 6 SMIC serait donc gelée, ce qui aurait pour effet de réduire progressivement le champ des allégements. Il faut noter que la commission des affaires sociales avait déjà proposé cet amendement, qui a le mérite de la progressivité, dans le cadre de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011.
Pour cet amendement, comme pour les quatre autres en discussion, la commission souligne la nécessité d’une étude d’impact à même de déterminer les effets des ajustements proposés sur l’emploi, mais aussi sur les salaires et le pouvoir d’achat. C'est la raison pour laquelle la commission en demande le retrait. Sinon, son avis serait défavorable.
L’amendement n° 292 rectifié bis, présenté par Mme Anne-Marie Escoffier, tend à abaisser la borne de 1, 6 SMIC à 1, 5 SMIC, afin de réduire le champ des allégements généraux.
Comme pour l’amendement précédent, la commission estime qu’une étude d’impact est nécessaire. Elle demande donc le retrait de cette disposition, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
L’amendement n° 64 rectifié ter, proposé par M. Dominique Watrin, a pour objet de restreindre le champ des allégements généraux en en limitant le bénéfice aux entreprises de moins de dix salariés. L’adoption d’un tel amendement, qui serait d’application immédiate, aurait un impact assez violent sur les comptes des entreprises, sur leur compétitivité et sur l’emploi.
C’est pourquoi il me semble nécessaire d’en mesurer les conséquences avant d’envisager de le mettre en application : j’en demande donc le retrait, sinon mon avis serait défavorable.
Enfin, l’amendement n° 65 rectifié bis, présenté par Mme Laurence Cohen, vise à conditionner le bénéfice des allégements généraux à la conclusion d’un accord relatif à l’égalité professionnelle par l’employeur ou à l’élaboration par celui-ci d’un plan d’action destiné à respecter cet objectif.
Pour la commission des affaires sociales, l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est un objectif prioritaire. L’adoption de nombreuses lois au cours des dernières années ne semble malheureusement pas avoir fait beaucoup évoluer la situation, puisque l’on constate encore des écarts de salaires importants entre les femmes et les hommes dans notre pays.
Même si la commission est réservée sur l’idée d’interférer dans la conclusion d’accords dans l’entreprise, elle partage pleinement le souci exprimé par les auteurs de cet amendement. Leur proposition est radicale, car elle supprime complètement le bénéfice des allégements généraux en cas de non-conclusion d’un tel accord. Néanmoins, pour faire progresser une cause qui n’avance pas assez vite à nos yeux, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.