L’article 16 ter instaure le plafonnement du montant des taxes affectées aux opérateurs de l’État, en se fondant sur le montant des charges estimées pour l’année suivante. Les ressources affectées excédant le plafond arrêté au préalable seraient ainsi reversées au budget de l’État.
On peut condamner la débudgétisation des actions que permet le financement de ces opérateurs par des taxes affectées, mais plafonner ces taxes ne permet en aucun cas d’accroître la lisibilité par la rebudgétisation. Celle-ci aura pour seul effet d’appauvrir ces opérateurs, qui sont pourtant chargés de missions extrêmement importantes et toujours plus nombreuses.
Je voudrais prendre l’exemple emblématique des opérateurs culturels de l’État, car ils ont fait l’objet d’une étude spécifique de la mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale sur le financement de la culture. Je pense notamment au Centre national du cinéma et de l’image animée, le CNC, mais aussi au Centre des monuments nationaux, au Centre national du livre ou encore au Centre national des variétés, de la chanson et du jazz.
Le cas du CNC est révélateur de l’ineptie du système en ce que cet opérateur est intégralement financé par des ressources affectées. Il dispose de prérogatives relevant normalement du ministère de la culture et de la communication et permet le bon fonctionnement du cinéma français par une action globale, par des subventions et des péréquations qui assurent la diversité de la production ainsi que le maillage territorial des salles de cinéma.
Les ressources d’une des taxes affectées, à savoir la taxe sur les services de télévision, ayant été sous-évaluées et le CNC bénéficiant en conséquence de moyens plus importants que prévu, le Gouvernement souhaite, dans une vision court-termiste influencée par la rigueur budgétaire et l’objectif de réduction des déficits, récupérer cet excédent.
Ce faisant, il ne se préoccupe nullement des besoins en financement d’un secteur cinématographique guidé par le principe de l’exception culturelle, qui fait la force du cinéma français, ni même du potentiel économique de cette activité qui crée pourtant des milliers d’emplois.
On confie sans cesse de nouvelles missions au CNC, notamment le financement du système de péréquation pour la numérisation de toutes les salles – un certain nombre de collectivités locales rencontrent de très grandes difficultés à cet égard –, mais, dans le même temps, on plafonne ses ressources.
Ce plafonnement est censé répondre au risque de mener une politique de l’offre adaptée a posteriori en fonction du niveau de ressources, et non une politique de la demande répondant à des charges.
J’objecterai que, en matière cinématographique, et plus largement culturelle, il n’est point de financement et d’offre inutiles et que l’évaluation a priori des charges s’opère nécessairement au détriment de la création.
Cet article de rigueur ne traduit aucune vision, aucune ambition politique, si ce n’est celle de réduire les dépenses. Nous demandons sa suppression, car son adoption pourrait tout à fait signer la fin de l’exception culturelle, et plus largement la fin d’une intervention politique dégagée des impératifs économiques dictés par les marchés financiers.