Intervention de Valérie Pécresse

Réunion du 22 novembre 2011 à 21h45
Loi de finances pour 2012 — Article 16 ter suite

Valérie Pécresse, ministre :

L’article 16 ter, introduit à l’Assemblée nationale par le biais de l’adoption d’un amendement gouvernemental, a un double objet.

Il s’agit tout d’abord de réaffecter au budget de l’État 94 millions d’euros prélevés sur les recettes des opérateurs, au titre de la mise en œuvre du plan d’équilibre des finances publiques du 24 août dernier. C’est selon le même principe que nous vous avons demandé de consentir un effort supplémentaire de 200 millions d’euros sur les dotations aux collectivités territoriales.

Depuis cinq ans, en effet, la révision générale des politiques publiques s’est essentiellement appliquée aux ministères. Or il n’est pas normal que ces derniers supportent seuls la politique d’économie de l’État. L’État, c’est aussi les opérateurs des ministères, et certains d’entre eux, Mme Bricq l’a rappelé, sont vraiment des acteurs majeurs de politiques nationales.

Par conséquent, nous avons décidé que les opérateurs de l’État devaient participer à cet effort d’économie supplémentaire. Je rappelle qu’ils avaient pris l’engagement de baisser leurs dépenses de fonctionnement de 2, 5 % par an pendant trois ans. Or, aujourd’hui, il n’est pas encore totalement certain que cet objectif de réduction des dépenses de fonctionnement ait été atteint.

Par ailleurs, comme l’a dit M. Marini, nous avons voulu fixer des règles du jeu claires, afin d’éviter les levées de boucliers que suscitent toujours des mesures particulières, par exemple la suppression d’une niche fiscale.

Les taxes affectées sont des impôts qui ont une dynamique propre, totalement indépendante de celle du budget de l’État ou des autres impôts, parfois même du rythme de la croissance. Le Parlement, qui lève l’impôt, aura compétence pour suivre l’évolution du produit de ces taxes et décider, en cas de dépassement des plafonds fixés, de la réaffectation du surplus, reversé au budget de l’État, à la réduction du déficit ou à la mise en œuvre, par l’opérateur, de politiques autres que celles qui lui avaient été assignées dans le projet de loi de finances.

Telle est l’idée qui a guidé notre démarche. Nous avons tiré les conséquences de l’application de cette règle pour toute une série d’opérateurs de l’État ; c’est l’objet de l’article 16 ter.

Comme en témoignent les amendements et sous-amendements présentés, il y a cependant débat sur le périmètre de la mesure de plafonnement. Les positions en présence relèvent de différentes logiques.

Mme la rapporteure générale propose, si je ne me trompe, d’exclure du champ du plafonnement les structures n’étant pas juridiquement des opérateurs de l’État, par exemple l’Association pour le soutien du théâtre privé, les centres techniques industriels ou les autorités administratives indépendantes.

M. Assouline, pour sa part, propose d’exempter les opérateurs des secteurs de la culture, tel le CNC, de la recherche – l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie – et du sport – le Centre national pour le développement du sport.

À cet égard, j’indique que la plupart des opérateurs du secteur de l’enseignement supérieur sont déjà exclus du champ du dispositif, puisque les universités autonomes le sont, ainsi que ceux du secteur de la recherche, dont les organismes ont obtenu du Premier ministre une garantie d’emplois, ce qui fait qu’ils ne sont pas soumis à la règle de la non-compensation d’un départ à la retraite sur deux. Par conséquent, seule l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, qui est certes un centre de recherche, mais qui dépend du ministère de l’environnement, est visée par le sous-amendement de la commission de la culture.

Le Gouvernement, quant à lui, propose de ne modifier que le champ des taxes affectées au CNC concernées par le plafonnement, en excluant de ce dernier celles qui correspondent à des soutiens automatiques – je pense, par exemple, à des taxes qui financent un tel soutien à la création de salles de cinéma ou au financement de films –, parce qu’elles s’apparentent davantage à des redevances pour service rendu qu’à de véritables taxes. Ne demeurerait soumise au plafonnement que la taxe due par les distributeurs de services de télévision.

Par ailleurs, le Gouvernement propose de réintégrer dans le périmètre du plafonnement deux taxes qui avaient été oubliées, affectées l’une au Centre national pour le développement du sport, l’autre à l’Office français de l’immigration et de l’intégration.

M. Leleux propose, de son côté, d’exempter du dispositif de droit commun toutes les taxes affectées au CNC et de ne plafonner que pour la seule année 2012 la taxe due par les distributeurs de services de télévision, à la condition que le rendement des autres taxes atteigne le niveau attendu. On perçoit très clairement derrière votre sous-amendement, monsieur le sénateur, une forte volonté du CNC de se défendre, ce qui n’est pas forcément illégitime.

Le Gouvernement est défavorable à toutes les propositions visant à modifier le périmètre du plafonnement, car tous ces acteurs publics, s’ils ne sont pas forcément des opérateurs de l’État stricto sensu, sont financés par des taxes, c’est-à-dire par des impôts. Or il revient au Parlement d’exercer son pouvoir de contrôle sur les taxes et les impôts. Si le produit des taxes affectées augmente beaucoup plus vite que celui des autres recettes de l’État, il lui appartiendra de décider quel usage sera fait des surplus éventuels.

Il sera alors possible, monsieur Assouline, de les réaffecter aux opérateurs de la culture ou de la recherche si vous décidez que ces secteurs sont prioritaires ! Vous serez maîtres, mesdames, messieurs les sénateurs, de la destination des surplus, qui pourront aller soit aux opérateurs, soit à la réduction du déficit. Pour notre part, nous avons fait le choix de la seconde option, mais on peut imaginer que le législateur veuille en décider autrement. La réaffectation pourra aussi varier selon les années, même si je pense personnellement que la réduction du déficit sera la priorité des priorités au cours des dix prochaines années, d’autant que les budgets des opérateurs de la culture sont en constante augmentation depuis cinq ans, malgré la crise !

L’un des amendements du Gouvernement prévoit des ajustements du niveau des plafonds de ressources issues des taxes pour les centres techniques industriels et l’Association pour le soutien du théâtre privé, organismes que Mme Bricq propose pour sa part d’exclure du périmètre du dispositif.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion