Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 21 novembre 2011 à 14h30
Loi de finances pour 2012 — Articles additionnels après l'article 5

Photo de Nicole BricqNicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances :

L'encre n'avait même pas eu le temps de sécher…

Mais ne nous querellons pas sur les mérites respectifs du Parlement et du Gouvernement.

Vous avez parlé, à juste titre, madame la ministre, du crédit d’impôt recherche, qui représente un effort en termes de finances publiques, me semble-t-il, de près de 5 milliards d’euros en tendanciel, avec un montant estimé à 2, 3 milliards d'euros en 2012.

Je ne retirerai pas mon amendement, car il me semble nécessaire de rétablir ce dispositif pour préserver la faible croissance que nous pourrions connaître en 2012 et en 2013. Mais j'accepte que l’on étudie l’impact des dispositifs incitatifs, y compris le crédit d’impôt recherche, sur lequel nous, parlementaires, avons du mal à voir clair.

L’année dernière, le rapport des députés Alain Claeys et Jean-Pierre Gorges a mis en évidence, à la suite des travaux de la commission des finances, que le dispositif du CIR pouvait entraîner un certain effet d'aubaine et d'optimisation, notamment pour les grandes entreprises.

Madame la ministre, vous avez fait allusion au débat que nous avions eu sur l’amendement présenté par le président Arthuis – le groupe socialiste avait déposé, me semble-t-il, un amendement identique –, qui supprimait la fraction du crédit d’impôt recherche subventionnée au taux de 5 % au-delà de 100 millions d'euros des dépenses de recherche et développement. À l’époque, nous l’avions soutenu, car nous avions considéré qu'il fallait éviter les effets d'aubaine, sans parler du jeu des filiales qui « remontent » le bénéfice du CIR au niveau de la holding. Cela s’apparente à de l'optimisation fiscale…

Le Gouvernement nous avait communiqué un rapport de l'Inspection générale des finances de septembre 2010. Il s'était opposé à l’initiative du président Arthuis au nom de la nécessaire stabilité du dispositif du crédit d’impôt recherche.

J'entends bien le message : dans les grandes entreprises, les décisions d’investissement dans la recherche ne se décident pas du jour au lendemain. Je voudrais reprendre l’exemple du groupe automobile, dont je parlais précédemment, qui va supprimer des emplois en France : une telle décision a aussi des conséquences sur la recherche et le développement. Le Gouvernement devrait en être bien conscient ! Nous devons donc regarder de très près cette dépense fiscale.

Tout le monde s’accorde à reconnaître que le dispositif entraîne certainement des effets d'aubaine, mais personne ne veut qu’on y touche maintenant ! Je veux bien qu'un cycle de recherche ne produise pas ses effets tout de suite, mais, à un moment ou à un autre, nous devrons mesurer l’impact réel d’une dépense qui représente tout de même, je le répète, 5 milliards d'euros en rythme de croisière.

Madame la ministre, je vous ai entendu vanter le CIR qui nous permet, selon vous, d’offrir le meilleur système au monde d’aide à la recherche. Vendredi dernier, vous nous avez parlé de la convergence avec l'Allemagne, un pays qui – je le constate – n'a pas de dispositif similaire. Et pourtant son effort de recherche publique et privée est bien supérieur à celui de la France, compte tenu de son tissu industriel. On pense toujours que l’Allemagne, c'est la machine-outil ; mais ils en sont bien loin ! Tous les efforts en matière de compétitivité ont été portés sur l'innovation, sans que les entreprises bénéficient pour autant d'une niche fiscale de cette nature.

Si vous n'aviez pas évoqué le crédit d’impôt recherche, je n'aurais pas fait cette digression. Nous devrons vraiment essayer de cerner les effets d’optimisation de cette dépense fiscale. Il y a quelques années, notre ancien rapporteur spécial, qui est aujourd'hui préfet, Christian Gaudin avait, comme certains députés, beaucoup travaillé sur ce sujet. La commission des finances devra reprendre en 2012 le travail qu’il avait initié afin qu’il puisse porter ses fruits en 2013, année de tous les dangers pour nos finances publiques.

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