Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, l’article 42 affirme effectivement le principe de gratuité des prestations en nature pour les assurés du régime spécial des mines et leurs ayants droit.
Je rappellerai que le régime minier est le fruit d’une histoire à la fois industrielle et sociale, où les efforts des mineurs pour relever l’économie française ont su, très tôt, rencontrer la mobilisation syndicale.
Nous n’aimons pas, pour notre part, l’expression « régime spécial ». Ce qu’il y avait de spécial dans ce métier, c’étaient bien plutôt les risques, les dangers, les maladies auxquels étaient exposés les mineurs.
Parce que ce métier était pénible et dangereux, parce que les mineurs voyaient leur espérance de vie réduite du fait de leur activité professionnelle, il était tout simplement légitime que ceux-ci et leurs ayants droit puissent bénéficier d’une gratuité complète des soins.
Jusqu’à l’insertion de cet article, cette gratuité fut malheureusement remise en cause, notamment en août 2009, en raison de l’application des franchises médicales. Je partage à cet égard les propos qui viennent d’être tenus et j’aurai l’occasion de m’en expliquer.
Je sais qu’il est difficile de comprendre, lorsque l’on est extérieur au monde des bassins miniers, les différentes dispositions de ce régime spécifique et leur raison d’être.
C'est pourquoi je veux répéter ce que ma collègue a souligné, mais avec plus de force encore : les mineurs et leurs ayants droit n’ont jamais été des privilégiés.
J’ai parlé à l’instant des conditions de travail. J’évoquerai aussi les conditions dans lesquelles les mineurs étaient logés. Certains logements datent du début du XXe siècle et 20 000 n’ont pas encore été complètement réhabilités malgré les progrès accomplis.
Je veux rappeler que les mineurs ont cotisé durant toute leur vie à un taux supérieur à celui du régime général, ce qui a d’ailleurs permis aux moments forts du régime de constituer un patrimoine, aujourd'hui transféré avec le décret du 30 août 2011 à une structure nationale.
Madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je ne peux m’empêcher non plus d’évoquer l’histoire, la grande grève patriotique des mineurs du Nord–Pas-de-Calais au cours des mois de mai et juin 1941. Ce fut le premier mouvement de masse contre l’occupant nazi : plus de mille mineurs et femmes de mineurs arrêtés, emprisonnés, déportés, dont plusieurs centaines ne sont jamais revenues.
La profession minière a joué un rôle irremplaçable dans le redressement de la France, au prix de milliers de victimes par silicose et à la suite de catastrophes minières. Aucun gouvernement, je tiens à le préciser, n’avait jusqu’alors osé remettre en cause l’existence même du régime minier.
Il faut analyser cet article 42 au regard de la question fondamentale de la proximité des soins. Si nous y reviendrons dans le cadre de la discussion des amendements à venir, je précise que nous touchons là à deux enjeux majeurs.
Premièrement, il importe que celles et ceux qui relèvent du régime minier puissent disposer de structures de soins de premiers recours adaptées, connaissant leur situation sanitaire et sociale particulière et respectant le principe de gratuité. La proximité, c’est pour eux la garantie d’une médecine de qualité et disponible. Ne l’oublions surtout pas, en moyenne, les mineurs et leurs ayants droit ont plus de soixante-dix ans et sont très peu mobiles.
Que deviendront les 180 centres médicaux répertoriés sur le bassin minier du Nord–Pas-de-Calais ? Tout le monde s’accorde à le reconnaître, y compris le directeur de l’ARS, que j’ai rencontré, ces dispensaires et centres de santé, qui sont aujourd'hui, faut-il le préciser, ouverts à toute la population, constituent un atout incontournable pour rattraper les retards de santé constatés partout.
Deuxièmement, il faut souligner que le problème de la gratuité des frais de transport se pose encore aujourd'hui, tant les assurés ont parfois besoin d’accéder à des structures de soins éloignées. La gratuité est indispensable compte tenu de la faiblesse des pensions avec lesquelles doivent vivre les retraités et les ayants droit des mines.
La seule solution résiderait en fait dans le rétablissement du b du 2° de l’article 2 du décret du 24 décembre 1992, dit « article 2-2-b », que le Gouvernement a supprimé. Nous avions, pour notre part, déposé un amendement en ce sens, lequel a été, malheureusement, frappé d’irrecevabilité.
Il conviendrait également d’aborder la question de la revalorisation des pensions, qui ne devrait pas dépasser 3 %, alors que les retraites des mineurs sont inférieures de près de 20 % à celles du régime général.
Enfin, se pose la question du maintien de l’emploi des salariés de ce régime.
Madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, au drame sanitaire que prépare la dissolution du régime minier, il ne faudrait pas ajouter un drame social dans des territoires qui souffrent déjà, plus que d’autres, de la précarité, du chômage, de la pauvreté et des retards de santé. J’y reviendrai lors de la présentation des amendements.