Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 14 novembre 2011 à 21h45
Financement de la sécurité sociale pour 2012 — Article 48

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Nous partageons tout à fait ce que vient de dire M. le rapporteur général. L’examen de l’article 48 nous plonge dans une grande inquiétude.

Nous avons pris acte, mes chers collègues, que le Gouvernement avait décidé de réduire considérablement l’ONDAM par rapport à son estimation initiale, dans l’espoir de générer 500 millions d’euros. Il serait sans doute plus juste de dire : dans l’espoir de faire supporter sur les établissements publics de santé ces déficits.

Cela risque, à terme, de remettre en cause ce qui fait la spécificité de notre système de santé : le fait que tous nos concitoyens puissent accéder, si leur état de santé l’exige, à une offre hospitalière à la fois de très grande qualité et ne dépendant pas des capacités contributives des patients.

À l’inverse, les cliniques à but lucratif, qui sont de moins en moins la propriété de médecins, et de plus en plus celle de grands groupes financiers et assurantiels, recherchent toujours plus la rentabilité. Leur objectif est donc de dégager suffisamment de bénéfices pour rétribuer leurs actionnaires au maximum.

Pour ne prendre qu’un exemple, celui de « la Générale de santé », et selon des documents que l’on peut consulter sur son propre site internet, son chiffre d’affaires était, en 2010, en hausse de 8 % par rapport à 2009, le résultat net du groupe en augmentation de 147, 5 %, et le bénéfice net par action marquait l’année dernière une hausse plus que significative de 146, 5 %.

Les établissements publics et les établissements privés commerciaux n’ont pas la même finalité, nous le savons tous ici, ni la même mission. Quand, pour les uns, il est question d’assurer la satisfaction des besoins en santé de la population, y compris de nos concitoyens les plus fragiles, pour les autres, il est question, de générer du profit.

Chercher à imposer une convergence tarifaire, c’est d’abord et avant tout nier cette différence pourtant fondamentale et qui n’est pas sans lien sur les prix pratiqués.

Pour satisfaire les actionnaires, des cliniques privées posent leurs règles : pas de patients aux pathologies lourdes, pas de bénéficiaires de la couverture maladie universelle, la CMU, ou de l’aide médicale de l’État, l’AME, pas d’urgences, sauf si elles permettent de capter la patientèle, pas de SDF, pas de personnes lourdement dépendantes ou se trouvant dans un état extrêmement critique. Les hôpitaux, quant à eux, acceptent tous les patients, sans aucune discrimination.

Cela a naturellement une conséquence financière. Ainsi, bien que l’enveloppe MIGAC soit censée prendre en charge les missions d’intérêt général, la prise en charge n’est que partielle. Certaines missions ne sont pas couvertes par la dotation, ou ne le sont que partiellement. Les coûts consacrés à ces missions de service public non prises en compte dans l’enveloppe MIGAC se retrouvent donc dans la partie tarifaire du financement, ce qui a pour effet d’augmenter artificiellement les coûts des hôpitaux par rapport à ceux des cliniques à but lucratif. Or les hôpitaux étant quasiment les seuls à assumer ces missions, la convergence que vous voulez imposer est faussée.

C’est pourquoi il nous semble légitime et urgent d’abroger un mécanisme déjà repoussé à 2018 tant il est inopérant et dont la seule finalité est l’instauration d’un marché de la santé, quasi indistinct entre les cliniques et les hôpitaux.

Nous avions déposé un amendement à ce sujet, malheureusement retoqué en raison de l’article 40 de la Constitution ; croyez bien que nous le regrettons.

Par conséquent, nous voterons contre cet article.

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