Nous commençons donc là l’étude de la dernière section de ce PLFSS pour 2012 relative au contrôle et à la lutte contre la fraude.
En raison de l’heure tardive et de la longueur de nos débats, dont je veux néanmoins souligner la qualité, j’essayerai d’être le plus bref possible. Néanmoins, je tiens à faire part, au nom du groupe socialiste-EELV, de certaines remarques qui nous paraissent importantes.
Premièrement, je le répète avec force, nous sommes évidemment tous d’accord pour combattre la fraude, non seulement en raison des pertes financières qui en résultent, et je reviendrai sur ce point, mais aussi au nom de l’égalité devant les charges et de la justice sociale.
Cessez donc de faire croire que la gauche se montrerait irresponsable et laxiste envers les fraudeurs alors que la droite serait, elle, vertueuse en s’emparant du problème à bras-le-corps !
Ce qui est vrai, force est de le constater, c’est que cette lutte s’apparente pour le Gouvernement et sa majorité à une véritable antienne : « fraude massive », « assistanat » et même « cancer de la société », voilà autant d’images qui correspondent, en effet, à une vision conflictuelle de la société, que nous sommes très loin de partager ! Cela n’est pas à la hauteur de la responsabilité qui nous incombe, d’autant plus que nous connaissons des temps difficiles.
Deuxièmement, je tiens à resituer le contexte : quels sont les montants en jeu ?
Pour répondre à cette question, il convient d’effectuer deux distinctions.
D’une part, la fraude estimée – notion imprécise, convenez-en, et aux frontières assez floues – n’est pas la fraude constatée. La fraude estimée oscille, selon les calculs de la Cour des comptes, entre 10 milliards d’euros et 19 milliards d’euros. Quant à la fraude détectée, elle est évaluée à 458 millions d’euros en 2010.
Les ordres de grandeur sont donc totalement différents et restent de toute façon faibles, comparés à la totalité des dépenses annuelles et du déficit, qui s’élèvent à 420 milliards d’euros.
D’autre part, il faut différencier la fraude aux prestations et la fraude aux prélèvements, plus couramment appelée « travail au noir » : la première représenterait entre 2 milliards d’euros et 3 milliards d’euros par an, la seconde, entre 8 milliards d’euros et 16 milliards d’euros par an.
Vous le voyez, c’est donc au travail illégal qu’il faudrait s’attaquer en priorité. Or le présent projet de loi ne s’y attelle que très peu et se concentre en grande partie sur ce que je qualifierai de « petite fraude ».
Troisièmement, je rappelle simplement que la part de la fraude, par nature, reste stable. Autrement dit, elle n’est responsable en rien du creusement du déficit.
Quatrièmement, je souligne que la fraude d’en haut, c’est-à-dire des riches, notamment au travers de l’évasion fiscale ou de la fraude aux prélèvements obligatoires, représente, elle, bien plus que celle des plus démunis !
Cinquièmement, et enfin, je mets en garde contre toutes les dérives qui découlent souvent d’un même discours et auxquelles d’aucuns voudraient nous habituer.
Certaines propositions, heureusement non reprises par le rapport de la MECSS, la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, telle que la carte Vitale biométrique, sont lourdes de conséquences.
Pour toutes ces raisons, il y a selon nous une forme de malhonnêteté à vouloir faire croire que la lutte contre la fraude sociale serait susceptible de résorber les déficits des comptes sociaux. Il faut plutôt regarder du côté de ceux qui profitent des cadeaux fiscaux accordés durant ce quinquennat ou qui peuvent s’allouer les services de conseillers fiscaux dans le but de payer toujours moins d’impôts !
Monsieur le ministre, mes chers collègues, notre position est claire : oui à la lutte contre la fraude, et ce à tous les niveaux ; mais non à une politique stigmatisante, qui vise toujours les mêmes !