Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je suis de ceux qui, parmi des milliers d’autres, ont traversé la « grande bleue » entre 1954 et 1962 pour appliquer la volonté de la France sur le sol algérien, marqué, depuis les événements survenus le 1er novembre 1954 dans les gorges de Rassira, par le mécontentement, puis la révolte, la rébellion et, enfin, disons-le, la guerre !
Monsieur le secrétaire d’État, nous sommes partis sans hésitation, sans un murmure, en acceptant les volontés des gouvernements successifs, qui furent, dans un premier temps, que la terre algérienne reste une province française, avant qu’une autre vision des choses, d’ailleurs positive, ne prévale.
Mais le conflit s’enlisait, se durcissait ; le sang coulait inutilement, comme souvent dans les guerres. Il fallait porter un regard constructif sur l’avenir.
Alors – je le dis sans sectarisme, ni esprit partisan –, le plus grand des Français, celui qui a été élu par le pays entier, a été appelé. Il a considéré la France et le monde avec son exceptionnelle capacité d’analyse de visionnaire. C’est ainsi qu’a été engagée l’œuvre de pacification, beaucoup ayant pris conscience qu’un cessez-le-feu était nécessaire, dans l’intérêt des deux pays. Mais déjà le mal était déjà fait, monsieur le secrétaire d’État ! Plus de 30 000 soldats français avaient inutilement laissé leur vie sur ces terres d’Afrique du Nord, de même que de nombreux Algériens… Alors, pourquoi continuer ?
Le message de la France à un nouveau soldat repose sur la dernière phrase des bases de la discipline, que je peux réciter par cœur, ayant été sous-lieutenant en Algérie : « La réclamation n’est permise au subordonné que lorsqu’il a obéi. »
Oui, nous avons obéi, laissant en métropole nos parents, nos fiancées, notre formation interrompue, et peut-être aussi notre avenir ! Notre idéal de jeunes de vingt ans a été, en outre, quelque peu mis à l’épreuve…
Oui, les soldats de l’armée française ont obéi dans l’exécution de leurs différentes missions. Il est normal qu’ils revendiquent aujourd'hui leurs droits, après avoir fait leur devoir !
Monsieur le secrétaire d’État, désormais, quand nous regardons la rubrique décès dans notre presse locale, nous voyons très souvent figurer la mention « ancien d’Afrique du Nord » ou « ancien d’Algérie ». Cela signifie que les paupières de ceux qui ont connu le stress de la peur, de la solitude, de l’incertitude, qui ont été blessés ou qui ont vu la mort de près, se ferment définitivement. Pour faire partie des associations d’anciens combattants, je sais que les souvenirs d’Algérie restent forts dans les mémoires, même si notre nombre se réduit tous les jours.
Toutes les morts, comme toutes les guerres, sont souvent inutiles – si l’on peut tirer des enseignements pour l’avenir, on ne peut pas supprimer le passé –, mais soyons conscients que les anciens d’Afrique du Nord, je le dis avec beaucoup de modestie et sans faux orgueil, resteront un exemple de discipline, de dignité et de solidarité. Ils souhaiteraient que cette reconnaissance soit plus forte, mais leur demande est pacifique. Ils ne descendent pas dans la rue et ne cassent rien. C’est une aspiration silencieuse.
Oui, depuis cinquante ans, nous pouvons nous réjouir et être fiers que la France ait su éviter tout conflit mondial ! Si des choses peuvent nous opposer, ce constat essentiel doit nous réunir. Nous nous félicitons donc que, depuis 1962, la France ne se soit pas engagée dans des dossiers difficiles.
Oui, je le répète, notre nombre diminue tous les jours et ceux qui restent ne sont pas des casseurs de société ; ce sont des bâtisseurs qui peuvent regarder dans le rétroviseur de leur vie et être fiers des familles qu’ils ont construites !
Votre nomination, monsieur Marc Laffineur, au poste de secrétaire d’État auprès du ministre de la défense et des anciens combattants est un événement positif. Cette officialisation a été, pour ceux qui ont servi la France en Algérie, un signe fort de reconnaissance et d’approbation. Il fallait le dire, ce que je fais aujourd’hui dans cet hémicycle avec beaucoup de vérité et sans aucune démagogie.
Les anciens combattants représentent encore une force humaine et sociale de première importance avec plus de 1, 5 million de personnes titulaires de la carte du combattant, auxquelles s’ajoutent les veuves et les orphelins, soit plus de 3 millions de personnes très attachées à leur représentation ministérielle et à vous, monsieur le secrétaire d’État, qui apportez cette référence voulue par le Président de la République à la guerre d’Algérie. Cette référence dépasse les clivages politiques : de droite ou de gauche, quand nous étions en Algérie et que les balles sifflaient à nos oreilles, nous souhaitions tous retrouver la France et la paix ! Je vous remercie, grâce à vous, toutes les personnes qui ont souffert lors de cette guerre se sentent plus soutenues et mieux comprises.
Malgré un contexte budgétaire difficile, le Gouvernement a voulu apporter aux anciens combattants une réponse, comme le Président de la République s’y était engagé. Ils méritent cette reconnaissance.
Rendons à César ce qui lui appartient : le projet de loi de finances pour 2012 prévoit de revaloriser de 4 points la retraite du combattant. Pour être actif dans le monde des anciens combattants, sur le plan local comme sur le plan national, je puis vous assurer, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, que le geste du Président de la République a été apprécié !
En définitive, la retraite du combattant aura été augmentée de 30 % entre 2007 et 2012. Reconnaissons que les engagements du Président de la République ont été respectés intégralement. C’est la raison pour laquelle, en mon nom propre, mais pas uniquement, je vous dis encore une fois merci !