Intervention de Michel Magras

Réunion du 24 novembre 2011 à 21h45
Loi de finances pour 2012 — Outre-mer

Photo de Michel MagrasMichel Magras :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il me revient de m’exprimer au nom du groupe UMP sur les crédits de la mission « Outre-mer » pour 2012.

À ce titre, madame la ministre, le groupe UMP a souhaité s’adresser à vous en tant que représentante de la permanence gouvernementale, et souligner la politique qui a été conduite en faveur de l’outre-mer tout au long de la législature qui s’achève.

Au regard des engagements pris en 2007, je crois avant tout que ce quinquennat doit être placé sous le signe de la parole tenue. Le Président de la République, et avec lui le Gouvernement, se sont engagés sur des priorités dont on peut dire qu’elles ont été respectées, en dépit de la conjoncture difficile.

Le Président de la République avait dicté une feuille de route sur la base des principes suivants : « un rapport d’égal à égal, un rapport de maturité, un rapport de confiance mutuelle ; le respect des différences mais aussi la conscience profonde de ce qui nous rassemble ».

Chacun des territoires a été entendu.

Avec le CIOM, le Gouvernement a en effet mis en place un cadre permettant de prendre en compte les attentes propres à chaque territoire. L’outre-mer, comme chacun le sait, se caractérise d’abord par son hétérogénéité, tant dans sa composition que par ses besoins. Le conseil des ministres du 26 octobre dernier a dressé un premier bilan de l’action mise en œuvre. Le groupe UMP, pour sa part, se félicite de cet inventaire qui fait état de la réalisation de 90 % des 137 mesures, achevées ou en voie de l’être à brève échéance.

Le CIOM, comme vous le savez, a constitué une des réponses à la crise sociale qui a agité la Guadeloupe en 2009. C’est pourquoi nous tenons également à saluer la mission Doligé-Larcher, instituée sur l’initiative du président Gérard Larcher, qui s’est placée, et avec elle le Sénat dans son ensemble, au plus près de chacun des territoires.

La consécration de 2011 comme « Année des outre-mer » participait de la volonté, voire de l’exigence de mettre en avant nos territoires, leurs atouts et leurs potentialités, notamment économiques.

Toujours au titre du bilan, les chantiers institutionnels, quant à eux, sont à placer au crédit de l’engagement pris par le Gouvernement de respecter la volonté des territoires. Sur ce point, le groupe UMP se félicite non seulement que l’on ait offert aux populations la possibilité de s’exprimer, mais surtout que cette expression ait trouvé rapidement une traduction législative.

Ainsi, en Martinique et en Guyane, la population a été consultée sur deux projets alternatifs, et les lois organiques instituant les assemblées uniques ont été adoptées rapidement. De même, à Mayotte, la départementalisation a été achevée, faisant de cette île le 101e’ département français. En Nouvelle-Calédonie, on ne peut que se réjouir du dialogue retrouvé, tout comme, en Polynésie, de l’instauration des conditions de la stabilisation institutionnelle. J’ajouterai, pour clore ce chapitre institutionnel, le respect, en Guadeloupe, de la position des élus qui n’ont pas souhaité de consultation.

Unanimement, l’outre-mer a exprimé de manière forte, récurrente, une demande légitime de continuité territoriale. Initié par la loi Girardin, le dispositif n’a cessé d’évoluer pour mieux répondre aux attentes et en corriger les imperfections. C’est une mesure que le groupe UMP inscrit au crédit du bilan gouvernemental vers plus de justice et de lien avec la République.

Faire du logement et de l’emploi une priorité, cela s’impose dans le contexte de l’outre-mer, aujourd’hui comme au début du quinquennat.

En matière de logement, nous sommes en effet tous ici conscients de l’immensité des besoins. Mais, dans le contexte budgétaire actuel, le financement du logement social par le maintien de la LBU, complété par la défiscalisation, reste un moyen pragmatique pour maintenir un niveau et des délais de construction raisonnables. Avec le doublement des opérations financées sur trois ans, la défiscalisation du logement outre-mer donne des résultats encourageants.

Je sais aussi que nombreux sont ceux de mes collègues qui jugent ces dispositifs encore largement insuffisants face à l’ampleur des retards. Je suis persuadé que le Gouvernement a recherché une solution de compromis entre contrainte budgétaire et satisfaction des besoins.

Le groupe UMP se satisfait des avancées de la politique conduite dans le domaine du logement. Pour autant, nous vous demandons, madame la ministre, de tenir compte du rapport de l’Inspection générale des finances et de faire mener, à la lumière de ses conclusions, une analyse coût-bénéfice, afin d’envisager un rééquilibrage entre LBU et dépense fiscale dans ce même esprit de compromis, mais dans le seul but de répondre à l’urgence du logement en outre-mer.

L’étude de l’Inspection générale des finances conclut en effet : « Le mécanisme de défiscalisation renchérit environ d’un tiers le coût d’une opération pour l’État par rapport à un financement sur crédits budgétaires. » Le logement en outre-mer est une priorité pour le Gouvernement ; il l’est aussi pour le groupe UMP. Dans ces conditions, tout doit être mis en œuvre pour passer de l’encourageant au satisfaisant.

En matière d’emplois et de formation, si la politique menée ne peut être évaluée à l’aune de votre seul ministère, madame la ministre, puisque l’ensemble des financements ne se retrouvent pas au sein de la mission « Outre-mer », votre ministère a néanmoins en charge la gestion des crédits du service militaire adapté, le SMA, dont l’efficacité n’a cessé d’être démontrée. Ce dispositif a été renforcé en cours de mandature et devrait atteindre plus de 5 000 places en 2012.

Comme vous l’avez souligné, madame la ministre, la politique en faveur de l’emploi outre-mer ne peut se résumer au seul SMA, ni aux seuls dispositifs de formation et d’insertion. Elle doit s’inscrire dans un cadre global favorisant l’activité et la compétitivité des entreprises. Le groupe UMP approuve donc, sans réserve, que le Gouvernement ait fait du développement endogène un des piliers de la politique outre-mer.

En ce sens, la création des zones franches et le maintien des exonérations de charges sociales constituent des outils de nature à créer les conditions d’une compétitivité durable, de l’activité économique et, partant, de l’emploi. Nous vous encourageons à poursuivre dans cette voie.

Nous souhaitons néanmoins attirer votre attention sur la nécessité de définir un cadre fiscal pérenne permettant, par sa stabilité, de renforcer la visibilité des entreprises.

Avant de clore ce bilan général et non exhaustif de la mandature, permettez-moi, madame la ministre, mes chers collègues, d’évoquer un point qui me tient particulièrement à cœur.

Au titre de la mission sur le tourisme et l’environnement en Guadeloupe et en Martinique, qui m’a été confiée par la commission de l’économie, j’ai mené une réflexion sur la défiscalisation, en matière hôtelière en particulier, qui a abouti à une proposition qui me semble pouvoir s’appliquer à de nombreux secteurs.

Je proposais, en effet, de passer d’une défiscalisation « d’opportunité » à une défiscalisation « de projet », par le biais d’un mécanisme qui conditionnerait le bénéfice de l’exonération pour l’investisseur à des objectifs prédéterminés. Avec ce système, l’exonération serait accordée en plusieurs étapes, à la condition que chaque phase du projet ait été menée à son terme.

Ce dispositif devrait avoir un double bénéfice. D’une part, en liant davantage l’investisseur et l’exploitant par une obligation de résultat, on atténuerait l’effet d’aubaine qui a tendance, me semble-t-il, à réduire la portée de la défiscalisation. D’autre part, on situerait le rapport à la défiscalisation dans le long terme ; cela supposerait, certes, d’allonger la durée de l’avantage fiscal, mais inscrirait aussi celui-ci dans une optique de développement durable, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui

La défiscalisation peut être un outil utile s’il est mieux défini et mieux utilisé. Je crois qu’il est impératif et urgent, madame la ministre, de le corriger. J’espère que cette réflexion sera conduite à son terme.

J’en arrive aux crédits de la mission « Outre-mer » pour 2012.

Dans un monde idéal, nous aurions aimé que la mission « Outre-mer » n’ait pas à contribuer, elle aussi, à l’effort de réduction du déficit national, et même que ses crédits soient augmentés à hauteur des besoins. Mais, dans le monde réel, chacun doit apporter sa part à la situation des finances publiques.

Le groupe UMP considère que vous nous présentez, madame la ministre, un budget « de circonstance ».

Malgré tout, le niveau de crédits de paiement reste identique à celui de 2011 pour votre seul ministère qui, je le rappelle, ne gère que 12 % de l’ensemble des crédits de paiement que le budget de l’État consacre à l’outre-mer. La mission « Outre-mer » que vous nous présentez aujourd’hui nous semble, sans aucun doute, l’aboutissement d’arbitrages mûrement pesés, autrement dit de choix opérés parmi les priorités.

Mes chers collègues, dans ce contexte économique difficile, je n’ignore ni la déception de certains d’entre vous, ni le raisonnement selon lequel il faudrait, au contraire, renforcer les interventions budgétaires pour ne pas fragiliser davantage la situation de l’outre-mer. Madame la ministre, vous avez choisi pour votre part de tenir un langage de vérité.

Sans entrer dans le détail des chiffres, le groupe UMP tient à relever quelques grands axes du budget 2012.

Nous soulignons, tout d’abord, que les objectifs de la LODEOM ont été sauvegardés, et les zones franches maintenues, en dépit de la suppression de l’abattement d’un tiers au titre de l’impôt sur les sociétés. Cet arbitrage devra préserver l’essentiel du tissu économique ultramarin ; même lorsqu’il se traduira par une augmentation de l’impôt, l’effet attendu de la réduction sera sauvegardé pour une très large part.

S’agissant de la défiscalisation des investissements productifs, l’effort de 10 % pèsera sur l’investisseur, et non sur l’exploitant ultramarin, dont le taux de rétrocession a été maintenu.

De même, les exonérations de charges patronales et la défiscalisation du logement social ont été exclues du « coup de rabot » supplémentaire de 10 %.

Pour conclure sur la défiscalisation, je ne peux toutefois, à titre personnel, m’empêcher de regretter l’amputation de 10 millions d’euros des crédits de l’aide à la rénovation hôtelière, alors que j’avais plaidé pour que, au sein du secteur touristique, les crédits soient prioritairement orientés vers ce domaine.

La continuité territoriale, autre engagement de la LODEOM, conserve un niveau de crédits satisfaisant. Je crois que nous nous accordons tous à reconnaître les avancées de ce dispositif et les quelques ajustements qu’il mérite, afin, par exemple, de mieux prendre en compte le coût réel du transport au départ de la Polynésie et de la Nouvelle-Calédonie, par le biais du relèvement des plafonds de ressource dans cette région.

Je ne reviendrai sur le financement du logement social que pour souligner la sanctuarisation de la LBU.

En conclusion, le groupe UMP tient à saluer la création du conseil du SMA, et espère qu’il constituera une instance de renforcement et d’optimisation d’un dispositif qui fait incontestablement ses preuves en outre-mer.

Les membres du groupe UMP, particulièrement conscients que vous avez dû, madame la ministre, conduire votre politique en des temps de difficultés exceptionnelles, voteront les crédits de la mission « Outre-mer ».

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