Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans la période que nous connaissons, il n’est malheureusement pas possible d’envisager que la France puisse se redresser sans un effort national. Et le budget de l’outre-mer traduit cette nécessité.
Plusieurs points me semblent devoir être soulignés.
Tout d’abord, il faut aider l’outil productif à se consolider et à se développer ; le maintien du dispositif des zones franches d’activité le permet sans aucun doute.
Ensuite, et n’en déplaise à certains, les niches fiscales ont été conçues comme un levier pour l’économie de nos territoires. Leur rabotage, légitimé par un gain de recettes fiscales, risque cependant de peser plus sur les économies ultramarines que sur le reste du territoire national. Cependant, je sais que le Gouvernement a dû procéder à des arbitrages difficiles et aussi qu’il a clairement la volonté de réorienter la défiscalisation pour qu’elle puisse profiter davantage à des ménages aux revenus plus modestes.
Par ailleurs, nous ne pouvons que nous féliciter que nos économies fragiles conservent le taux réduit de TVA, ce qui nous permet de mieux résister à la concurrence des pays voisins.
Ensuite, et c’est pour moi une satisfaction, la sanctuarisation de la LBU, d’une part, et le maintien de la défiscalisation sur le logement social, d’autre part, sont des mesures essentielles au regard des défis que nos territoires doivent affronter en la matière.
Enfin, nous ne pouvons également que nous féliciter des mesures prises pour développer le SMA, cette formidable école de la deuxième chance, qui peut combattre l’illettrisme et favoriser le retour à l’emploi.
En effet, l’illettrisme persiste à la Réunion, à un niveau bien supérieur à celui de la métropole. Je souhaite, comme beaucoup de mes collègues, que le Gouvernement mette davantage de moyens pour l’éducation dans nos territoires.
Nous le savons tous, il faut que la solidarité nationale s’applique pleinement pour redresser les comptes de la France, mais il faut tout autant qu’elle s’applique lorsqu’il s’agit de soutenir les territoires ne répondant pas aux critères socio-économiques que nous souhaitons pour notre pays. Je parle du niveau de vie, de la démographie médicale, du niveau de protection, de la sécurité, du logement, des revenus ou encore de l’éducation.
Si les outre-mer permettent à la France d’être présente sur les trois océans et que cela constitue une chance, des équipements universitaires, des équipements sanitaires, des équipements de lutte contre les catastrophes, et j’en passe, pourraient parfaitement être de puissants vecteurs de rayonnement de la France dans l’environnement régional de chacun de ces territoires. En somme, ce serait une chance réelle pour la France tout entière.
Madame la ministre, vous avez eu l’occasion de rappeler tout au long de cette « année des outre-mer » tous les atouts que recèlent nos territoires, toute la richesse de nos cultures métissées, de nos peuples aux histoires si différentes, des histoires toutefois intimement liées depuis plusieurs siècles de l’Histoire de la France – avec un grand H !
Nous avons, je crois, besoin d’une véritable éducation à l’outre-mer. Il faut que, dans l’esprit de chaque Français, de chacun de ceux qui vivent ou séjournent en France, l’outre-mer et la métropole soient les éléments indissociables de la République. Le vrai défi de l’outre-mer, il est là. Nous avons besoin du Gouvernement pour le relever.
Nous ne devons plus voir le territoire national amputé de ses outre-mer sur les sites Internet des ministères, des entreprises, des établissements publics, ou encore dans la presse. Je sais que vous êtes sensible à cette question, madame la ministre, mais il reste beaucoup à faire. Permettez-moi de citer deux exemples très simples.
D’une part, dans les discours ou les communiqués sur l’état de la France, on sépare systématiquement l’outre-mer de la partie européenne du territoire national. Je m’étonne, et le mot est faible, quand j’entends les commentaires sur les statistiques du chômage parler d’un chômage en France « à 9, 3 %, et à 9, 6 % si l’on inclut l’outre-mer » ! C’est nier une vérité ! L’outre-mer n’est pas une option ! L’outre-mer n’est pas secondaire !
D’autre part, pourquoi les bulletins météo ne parlent que de la métropole tout en prétendant annoncer « le temps en France » ?
Ces deux exemples peuvent sembler anecdotiques, et peut-être même faire sourire. Mais une information plus complète et des discours respectueux de la place de nos territoires au sein de la République participeraient à une « conscientisation » de l’outre-mer que j’appelle de mes vœux. Ce sont des mesures qui ne coûtent rien, mais qui auraient, j’en suis convaincue, plusieurs effets très positifs.
En effet, améliorer la place de l’outre-mer dans l’esprit de chacun, c’est permettre de casser les a priori, c’est servir l’égalité des chances des Français d’outre-mer, c’est faciliter l’acceptation par tous des efforts nécessaires par la nation pour tel ou tel territoire, c’est aussi valoriser tous les atouts de ces territoires pour leur donner une meilleure visibilité. Or une meilleure visibilité, c’est une meilleure attractivité touristique, et vous connaissez tous l’importance du tourisme pour notre économie.
En somme, c’est la question de notre ambition pour l’outre-mer, donc de notre ambition pour la France. La vraie puissance de la France, nous la trouverons dans l’union et dans la sérénité du dialogue entre tous les Français, mais aussi dans la fierté et la promotion de nos différences.
Le vrai défi, il est devant nous, et il va au-delà de 2012. Et c’est à nous, responsables publics, qu’il revient de tout mettre en œuvre pour que cette ambition devienne réalité.
D’ici là, l’urgence est bien sûr l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer » et, plus généralement, du présent projet de loi de finances, qui, s’il ne peut pas contenter tout le monde, n’en reste pas moins un projet de budget courageux dans un contexte international particulièrement difficile. C’est pourquoi je le voterai.