Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire a confié à cinq corapporteurs l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».
En ce qui me concerne, je traiterai des crédits du programme 174 « Énergie, climat et après-mines ».
Les crédits, de 693 millions d’euros en autorisations d’engagement en 2012, sont en baisse de 6, 5 % ; mais des dépenses fiscales importantes sont rattachées à ce programme, au premier rang desquelles le crédit d’impôt développement durable, le fameux CIDD ! J’y reviendrai plus longuement.
Je commencerai par une remarque sur la lutte contre le changement climatique.
Les mesures en faveur de la qualité de l’air font l’objet d’une diminution importante de 6, 6 millions d’euros en 2012 contre 15 millions d’euros en 2011, soit une baisse d’environ 60 %. Je relève notamment que la pollution par les particules entraîne, chaque année, la mort de 40 000 personnes.
Pourtant, les crédits consacrés au plan particules diminuent de 3, 8 millions d’euros à 253 000 euros, soit une réduction d’environ 90 % !
Cela dit, les priorités définies par ce programme m’ont conduit à faire le point sur l’avancement de la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement concernant les questions énergétiques. Le CIDD est un crédit d’impôt, dont le taux pouvait atteindre, à l’origine, 50 %, pour des dépenses d’équipement portant sur l’efficacité énergétique ou l’intégration d’énergies renouvelables. L’article 43 du projet de loi de finances pour 2012 vise à recentrer le dispositif sur les rénovations importantes, qui apportent de meilleurs résultats en termes d’efficacité énergétique.
Cette disposition apparemment vertueuse présente deux inconvénients. D’une part, je crains que les ménages à faibles revenus n’aient qu’un accès limité au dispositif, car ils n’auront pas nécessairement, en période de crise économique, les moyens de mener des « bouquets » de travaux importants dans leur logement. D’autre part, les sommes consacrées au total au CIDD diminuent considérablement, puisqu’elles sont estimées à 1, 4 milliard d’euros pour 2012, contre 2, 625 milliards d’euros en 2010. Or ces chiffres ne prennent pas en compte la diminution supplémentaire de 20 % des taux de ce crédit d’impôt, annoncée par le Premier ministre le 7 novembre dernier et votée par l’Assemblée nationale. De plus, les professionnels souffrent de la grande instabilité de ce dispositif, qui les prive de la visibilité dont ils ont besoin pour planifier leurs investissements. Je considère donc que le recul du CIDD porte préjudice à la capacité de notre pays à atteindre les objectifs d’amélioration de son efficacité énergétique qu’il s’est lui-même fixés.
Or, force est de le constater, les autres objectifs du Grenelle de l’environnement risquent eux aussi de ne pas être atteints sans une inflexion des politiques menées actuellement. Ainsi le constat n’est-il guère optimiste pour ce qui concerne le développement des énergies renouvelables.
En premier lieu, la production de biocarburants s’est beaucoup développée depuis 2006, passant de 680 kilotonnes-équivalent-pétrole à 2 708 kilotonnes-équivalent-pétrole par an. On sait cependant qu’il faudra veiller, à l’avenir, à donner la priorité à la production alimentaire.
En second lieu, l’électricité d’origine renouvelable progresse de manière insuffisante. L’éolien avance à un rythme de 1 000 mégawatts par an environ, alors qu’il faudrait plutôt viser 1 400 mégawatts, pour parvenir à une puissance installée de 19 000 mégawatts en 2020, conformément aux objectifs fixés. Le poids de la réglementation ne cesse de s’accroître sur les porteurs de projet. La limitation du tarif d’achat aux parcs d’éoliennes comportant au moins cinq mâts bloquerait environ 10 % des projets en France et la procédure des installations classées pour la protection de l’environnement, ou ICPE, s’ajoute à celle qui est liée à l’obtention d’un permis de construire. S’agissant de l’éolien en mer, pour lequel la France ne manque pas d’atouts, il faut espérer que les appels d’offres porteront rapidement leurs fruits et permettront de créer enfin une véritable filière industrielle.
Le secteur photovoltaïque, pour sa part, a accumulé les difficultés. À un contexte international de surproduction s’est ajoutée, en France, une évolution réglementaire pour le moins chaotique. Les tarifs d’achat baissent de manière difficilement prévisible et les critères du Grenelle de l’environnement sont interprétés comme un plafond, alors qu’il devrait s’agir d’un plancher. Le secteur aurait perdu environ 10 000 emplois.
La production de chaleur, qui représente plus de la moitié des objectifs du Grenelle de l’environnement en matière de développement des énergies renouvelables, est aussi en retard. Alors que l’efficacité du fonds chaleur renouvelable est reconnue, celui-ci ne peut plus espérer, dans le contexte budgétaire actuel, qu’un maintien de ses financements et non une augmentation, pourtant nécessaire, et d’ailleurs prévue, pour atteindre les objectifs fixés en matière de production de chaleur.
Je formulerai une dernière remarque, relative à la filière nucléaire. Je m’interroge sur les conditions de coopération au sein de « l’équipe de France du nucléaire », qui réunit Areva et EDF. Est-il normal qu’EDF se fournisse en combustible auprès de la filière française pour moins de la moitié du tonnage nécessaire ? Je ne saurais trop engager l’État à garantir une coopération renforcée entre les entreprises dont le capital est majoritairement public.
En conclusion, je regrette que les avancées du Grenelle de l’environnement ne soient que partiellement traduites dans les faits, alors que la promotion des énergies renouvelables devrait être l’une des grandes priorités de la politique énergétique. C’est pourquoi j’ai proposé à la commission de l’économie de rendre un avis défavorable sur les crédits du programme 174.