Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » dans un contexte difficile, avec des moyens financiers particulièrement contraints.
Le budget qui nous est proposé se caractérise, sur la forme d’abord, par un manque de lisibilité. D’une part, les indicateurs de performance fournis sont dénués trop souvent de pertinence au regard de l’appréciation que nous sommes amenés à porter sur celui-ci. D’autre part, le périmètre de la mission est manifestement trop instable et empêche un travail satisfaisant de comparaison d’une année sur l’autre.
Prenons, par exemple, le périmètre du programme 113 « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité » qui a tellement évolué. Dans ce programme, eau, biodiversité et matières premières minérales non énergétiques sont agrégées dans l’action Gestion des milieux et biodiversité alors qu’ils étaient séparés en 2010. Cela ne facilite pas la lecture. En outre, cela permet de mieux dissimuler une baisse de crédits de plus de 16 % en 2011, baisse qui ne sera pas compensée cette année puisque les sommes allouées stagnent.
Par ailleurs, ce budget, sur le fond, ne traduit pas suffisamment les avancées du Grenelle. Il symbolise bien, en réalité, le choix qui est fait d’abandonner petit à petit les compétences et la capacité d’expertise dont disposait l’État en matière d’écologie.
Concernant les programmes 170 « Météorologie » et 159 « Information géographique et cartographique », ils sont séparés dans les documents budgétaires.
Cependant, il est prévu que l’Inventaire forestier national, l’IFN, sera intégré à l’Institut géographique national, l’IGN. Or, à la page 337 du « bleu », on trouve, dans le même tableau, les effectifs de l’IGN seul, puis, pour 2012, de l’IGN nouvelle version, c’est-à-dire du regroupement IGN et IFN, ce qui laisse croire à une hausse généreuse de 172 équivalents temps plein, alors que, en réalité, 30 équivalents temps plein sont perdus. Cette intégration n’est donc guidée que par des considérations budgétaires, par la sacro-sainte révision générale des politiques publiques, la RGPP, qui vise à mutualiser certains services, mais surtout à réduire le nombre de postes. Pourtant, dans le cas présent, ces deux établissements publics ont des missions tout à fait différentes et n’ont en commun que la dimension cartographique de leur travail.
Cette fusion entraîne une délocalisation des activités, que l’administration n’accompagne pas, notamment en ce qui concerne le logement, ce qui découragera à l’évidence certains agents devant quitter la province pour l’Île-de-France. Il en résultera sans doute, à terme, une perte de compétences.
Mais ce n’est pas tout. Cela préfigure surtout ce qui risque de se passer avec Météo-France dans un avenir proche. La fermeture annoncée de près de la moitié des centres départementaux et le déménagement des services parisiens vers Saint-Mandé, où est implanté l’IGN, n’est que la première pierre d’une nouvelle fusion, où, cette fois, l’IGN pourrait être absorbé par Météo-France. Ce regroupement ne peut mener qu’à l’affaiblissement et, à terme, au démantèlement des services publics.
J’en viens au programme 113 « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité ».
La faible hausse des crédits pour ce programme – qui tranche, il est vrai, avec la baisse de l’exercice précédent –, accompagnée d’un redéploiement en faveur de la préservation et de la restauration de la biodiversité, pourrait constituer un motif de satisfaction.
Pour autant, les moyens ne sont pas à la hauteur des enjeux : si quarante-six postes ont été créés, ce qui constitue un progrès, sur l’action Gestion des milieux et biodiversité pour répondre à une nouvelle ambition en la matière, j’ai peur que ces ouvertures de postes ne soient insuffisantes au vu des besoins qui naîtront de la création de trois nouveaux parcs nationaux et de quatre parcs naturels marins.
Par ailleurs, l’ensemble du programme perd 423 postes, en particulier des postes pour l’appui technique destiné à venir en aide aux petites collectivités locales. Certes, il a été annoncé que les extensions jusqu’à 40 mètres carrés ne seront plus soumises au permis de construire, mais feront l’objet d’une simple déclaration préalable. Dès lors, toutes les communes devront instruire davantage de demandes sans bénéficier de l’appui technique des services de l’État. Encore une fois, l’État transfère des compétences vers les collectivités, et ce sont avant tout les petites communes qui seront les plus impactées. Je ne suis pas sûre qu’une telle décision, si elle était appliquée, apporterait plus de souplesse aux administrés, comme cela a pu être avancé.
Je dirai également un mot de l’épineuse question de l’approbation des plans de prévention des risques technologiques, les PPRT, rendue délicate en raison de la difficulté qu’il y a à financer les mesures foncières. Le dispositif que vous avez introduit et qui prévoit de fixer à un tiers le taux de participation pour chacun des acteurs – État, collectivité et exploitant – permettra, nous l’espérons, d’améliorer un peu la situation.
Toutefois, la réduction des risques à la source, notamment par des améliorations dans les process industriels, pourrait être plus avantageuse. Mais encore faudrait-il que l’Inspection des installations classées ait les moyens de ses ambitions : ses missions tendent à s’élargir du fait de nouvelles réglementations, nationales et européennes, ce qui enrichit le travail des inspecteurs d’approches complémentaires, singulièrement pour les produits, en raison du règlement REACH et de la directive sur les biocides.
Cependant, alors que le nombre d’inspecteurs avait légèrement augmenté au cours des dernières années, il commence à diminuer. Je regrette qu’il n’y ait pas un seul indicateur de performance pertinent à ce sujet. Pour autant, les faits sont là : il y a 1 200 équivalents temps plein pour 500 000 installations classées. Ces inspecteurs sont pourtant le premier moyen, et sans doute aussi le plus efficace, pour amener les industriels à améliorer leurs installations et à mener une politique de prévention des risques. Or, comme pour la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, on observe une baisse du nombre des contrôles, notamment des contrôles inopinés des rejets, associée à une hausse significative des sanctions administratives aux dépens des sanctions pénales qui, je le rappelle, sont, elles, rendues publiques et présentent donc l’intérêt de l’exemplarité. Là aussi, l’État semble abandonner progressivement ses missions de contrôle.
Par ailleurs, j’ai bien noté l’augmentation des moyens humains et financiers accordés à l’Autorité de sûreté nucléaire afin qu’elle puisse mieux remplir la mission qui lui a été confiée par le Premier ministre après l’accident de Fukushima, et, nous l’espérons, en toute indépendance.
Bien qu’il soit difficile d’être exhaustif en sept minutes, je tiens également à souligner que le Fonds chaleur de l’ADEME, s’il a fait ses preuves, reste sous-doté avec 250 millions d’euros pour 2012 quand il en faudrait près du double !