je veux parler de mon expérience d’élu rural.
Prenons garde, mes chers collègues, à ce qui se passe dans deux pays proches, la Belgique et l’Italie, où les plus riches traînent les plus pauvres dans la boue. Je ne voudrais pas que notre belle République, qui a été construite au fil des ans par nos ancêtres, se retrouve divisée, à l’instar de ce qui se passe en Belgique entre les Flamands et les Wallons ou en Italie entre le Nord et le Sud, entre ceux qui ont en permanence la parole et tous les moyens financiers, et ceux qui, dans les territoires ruraux connaissent des difficultés grandissantes. Il faut soutenir la ruralité française, qui représente 80 % de notre territoire.
S’agissant de la DSU et de la DSR, force est de reconnaître que le pouvoir péréquateur de ces deux dotations est très inégal : s’il est puissant pour ce qui concerne la dotation de solidarité urbaine, cette dernière étant versée à un nombre finalement restreint de villes, il est très faible s’agissant de la dotation de solidarité rurale dans la mesure où cette dernière dotation sera versée à plusieurs dizaines de milliers de communes rurales.
Si l’on veut véritablement que la dotation de solidarité rurale soit efficace, il faut à la fois majorer massivement les crédits qui lui sont affectés et peut-être revoir les conditions de son attribution. Si l’on veut majorer les crédits de la DSR sans conséquence pour le budget de l’État et si l’on veut, en règle plus générale, augmenter les ressources des communes rurales pauvres, il faut revoir tout l’édifice de la DGF.
En effet, la DGF est la lointaine héritière des taxes sur les salaires et du versement représentatif de la taxe sur les salaires, le VRTS.
Au moment de sa création, faisant droit aux revendications des grandes villes, notamment, le législateur a cru devoir créer une dotation ville-centre afin de tenir compte des charges de centralité ; nous en avons longuement parlé aujourd'hui. Il a également fait en sorte que, pour la dotation de base de la DGF, un habitant compte pour deux dans ces mêmes grandes villes. Enfin, il a mis en place un système de progression minimale.
En d’autres termes, ce sont les villes les plus riches, comme Paris, Boulogne, Neuilly ou Puteaux, qui ont bénéficié de la loi instaurant la DGF. Les réformes qui sont intervenues au fil des décennies n’ont malheureusement pas remis en cause cet édifice qui est finalement très défavorable aux communes rurales, alors qu’elles sont celles qui ont le plus besoin d’être aidées.
Il est grand temps de remettre l’ouvrage sur le métier. Une nouvelle réforme de la DGF s’impose d’autant plus que, en cette période de disette budgétaire, ce serait la seule manière de mettre en place une péréquation efficace en faveur des communes qui en ont le plus besoin.
Les charges de centralité, qui sont bien réelles, ont été reprises, en milieu urbain, par les communautés d’agglomération et les communautés urbaines, qui perçoivent d’ailleurs à cet effet une DGF largement majorée, bien supérieure à celle versée aux communautés de communes.
Dans ces conditions, je ne vois pas pour quelles raisons on continuerait à privilégier, pour le calcul de la DGF, les villes-centre, alors que la plupart d’entre elles ont transféré leurs compétences à l’intercommunalité.
Monsieur le ministre, il y a là un gisement de plusieurs centaines de millions d’euros qui pourraient fort opportunément financer la péréquation sans que cela coûte le moindre centime au budget de l’État. Voilà ce que je tenais à dire au sujet de la péréquation verticale.
S’agissant de la péréquation horizontale, le projet de loi de finances crée le Fonds national de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales, qui devrait être doté de 250 millions d’euros en 2012.
Je ne peux que me féliciter de cette création, mais je m’interroge néanmoins sur son efficacité réelle. On nous indique que les blocs territoriaux de moins de 10 000 habitants seraient favorisés par cette réforme. Mais ils percevraient 53, 5 millions d’euros pour un prélèvement de 35, 9 millions d’euros, soit une recette supplémentaire nette de 17, 6 millions d’euros seulement, ce qui me paraît bien faible rapporté au nombre de communes et de communautés de communes concernées.
Monsieur le ministre, nous savons pertinemment, et notre discussion d’aujourd'hui l’a confirmé, que la mise en œuvre d’une péréquation efficace n’est pas facile car elle heurte la susceptibilité des élus des communes et surtout des villes, qui ont l’habitude de vivre avec un certain niveau de vie. Mais se sont-ils seulement interrogés une seule seconde sur les difficultés dans lesquelles se débattent, au quotidien, leurs collègues maires des communes rurales qui ne disposent souvent pas de véritable secrétariat de mairie, qui doivent reporter des investissements faute de moyens et qui paient de leur personne pour tenter de satisfaire leurs concitoyens ?
Voilà toutes les raisons pour lesquelles il faut mettre en œuvre une nouvelle réforme de la DGF, seule à même de nous permettre d’améliorer de façon conséquente la nécessaire péréquation en faveur des communes et communautés de communes rurales.
Je fais confiance au Gouvernement et compte beaucoup sur vous, monsieur le ministre, pour améliorer considérablement la péréquation verticale et horizontale des recettes de nos communes et intercommunalités.